54. La fausse ingénue

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Shakira, La Tortura : https://youtu.be/Dsp_8Lm1eSk

Alken

— Alken, j'ai eu une bonne idée ! Je pense que ce qui me bloque, c'est le morceau sur lequel on danse… Ça fait trop vieux jeu. Tu serais d'accord pour garder la choré et l'adapter à un autre morceau ?

Je lève la tête et manque de pousser un juron quand je vois comment Charline s'est habillée pour notre répétition. Ça ou nue, c'est du pareil au même ! La jeune rousse a en effet revêtu une mini-jupe noire et une simple brassière laissant apparaître plus de son corps que je n'en aie jamais vu. Et la façon dont elle se déplace me laisse penser qu'elle n'est pas venue pour rigoler. Je déglutis, légèrement mal à l'aise.

— Bonsoir Charline. Tu as chaud ? demandé-je en essayant de ne la regarder que dans les yeux. Et c'est quoi cette histoire de changer de morceau. Tu penses à quoi ?

Elle s'approche de moi, féline et assurée et se penche sur mon bureau en mettant sa poitrine juste devant mes yeux.

— Ben quoi ? Elle est sympa ma tenue, non ? minaude-t-elle. Je pensais à La Tortura, de Shakira. Tu connais ? C’est pas tout jeune, mais ça bouge, et… J’aime bien, ça me parle.

— Tu appelles ça une tenue ? C'est à peine si ça cache ce que la morale conseille de dissimuler ! Un peu de tenue, ça fait du bien parfois !

Je sais que ce n'est pas mon rôle de juger la tenue de mes élèves et je ne le fais pas en temps habituel mais là, clairement, elle abuse. Je ne suis même pas sûr qu’elle porte une culotte !

— On est au vingt-et-unième siècle, Alken, je m’habille comme je veux. Et ne fais pas ton coincé, je suis sûre que tu apprécies ce que tu vois, dit-elle en me faisant un clin d'œil. Alors, la chanson, tu en penses quoi ?

— Si la chanson peut t'aider à te libérer un peu, on peut essayer. Tu l'as ramenée ou je la prends sur Internet ?

Je préfère ne rien ajouter sur la tenue. C'est sûr que ça la met bien en valeur mais je suis surpris de voir que ça ne me fait aucun effet. Si Joy avait mis une petite jupe comme ça, je crois que je serais déjà en train de la faire gémir. Je dois vraiment être mordu si les autres femmes me laissent insensible.

— Je l’ai sur ma clé, dit-elle en glissant sa main dans sa brassière pour en sortir une clé USB qu’elle me tend.

Je fais comme si c'était normal et connecte la clé à l'ordinateur de la salle avant de lancer la chanson. Dès les premiers mots, elle me prend la main et m'attire au milieu de la pièce. Elle positionne ensuite son dos contre mon torse et fait passer mes bras autour de sa taille pour que je l'enlace dans une version beaucoup moins sage que la chorégraphie d'origine. Vu la musique, ce n'est pas déconnant, mais ça me surprend néanmoins et je mets quelques secondes à réagir quand elle saisit mes doigts pour les presser contre sa poitrine dont je sens toute la fermeté. Ses tétons pointent rapidement et je la repousse un peu brusquement alors que la musique continue.

— Charline ! grondé-je. On n'est pas là pour ça. Si tu ne calmes pas tes ardeurs, je demande à ce que l'on me trouve une autre partenaire !

— Oh Alken, arrête, rit-elle en venant onduler contre moi au rythme de la chanson. C’est pour la danse voyons ! Qu’est-ce que tu vas t’imaginer ?

— Qu'est-ce que tu as ce soir ? Il faut te contrôler ! Ce n’est pas raisonnable de danser comme ça avec ton prof !

Je m'éloigne et vais arrêter la musique. Je me retourne alors qu'elle est en train d'ôter sa brassière en se mordillant la lèvre telle une actrice porno. J'hallucine qu'elle n'ait pas encore compris que je ne suis pas intéressé ! Mais c’est bien face à elle, seins nus que je me retrouve et elle se plante à quelques centimètres de moi, mains sur les hanches dans une attitude provocante qu’elle doit croire irrésistible. Même si elle a de beaux arguments, son comportement m’insupporte.

— N’importe quoi ! persiflé-je. On dirait une adolescente en manque. Si tu penses que c’est comme ça qu’on séduit un homme qui a de l’expérience, tu te plantes totalement. Des seins, tu sais, j’en ai vus beaucoup dans ma vie. Et les tiens n’ont rien d’exceptionnel, tu peux me croire sur parole. Rhabille-toi et on arrête pour ce soir. Je vais devoir reporter ton attitude à Elise, c’est inadmissible ce que tu es en train de faire.

— Ne le prends pas comme ça, marmonne-t-elle en remettant sa brassière. Si c’est comme ça que tu réagis quand une femme te drague… Très bien, pas la peine d’en parler à Elise, j’ai compris.

— Tu es mon élève, Charline. Il ne peut rien y avoir entre nous, ce n’est pas l’endroit pour draguer. Et en plus, tu ne m’intéresses pas du tout. J’aime la femme qui partage ma vie, alors calme tes hormones, compris ?

— Je t’ai dit que j’avais compris. Pas besoin d’être condescendant non plus. A demain, Alken, soupire Charline en récupérant ses affaires pour quitter la pièce.

Je l’observe sortir rapidement et me demande ce que je dois faire suite à cet épisode. La procédure voudrait que je la dénonce à la Direction et, au mieux, elle se prend une suspension avec disqualification pour le concours, au pire, elle est virée. Mais ce serait quand même malheureux qu’avec son talent, elle se retrouve à faire serveuse dans un fast-food quand même.

C’est dans cet état d’esprit que je rentre chez moi et surprends Joy qui sort de sa douche, étonnée de me voir de retour si tôt. Dès qu’elle me voit, elle fait tomber la serviette qui lui recouvrait le corps et se précipite dans mes bras. Le contraste avec ce qui s’est passé dans la salle de danse est saisissant. Je l’ai à peine aperçue que déjà mon excitation prend le pas sur ma raison. J’ai à peine senti sa peau contre la mienne que mon désir m’enflamme et me fait oublier toute raison.

— Kenzo n’est pas là, en haut ? lui demandé-je alors qu’elle défait les boutons de mon pantalon pour me l’enlever.

— Qui ça ? rit-elle. Nous sommes seuls, beau danseur. Tu attends quoi ? Pas intéressé ?

— Oh que si, je suis intéressé, répliqué-je en la saisissant par les fesses et en la plaquant contre le mur de la cuisine.

Comme à chaque fois que nos corps s’épousent, les sensations sont fortes et nos baisers sont intenses et passionnés. Joy se montre toujours aussi enthousiaste, mais j’avoue que j’y mets moins de cœur que d’habitude, l’image de Charline s’imposant régulièrement dans mon esprit. Lorsque ma partenaire pousse son cri de jouissance, je souris et la repose à terre sans avoir connu l’extase de mon côté. Je l’embrasse alors qu’elle me lance un regard interrogateur, laissant mes mains caresser son corps. Elle se love contre moi et j’adore sentir la chaleur de sa peau contre la mienne.

— Je t’aime, Joy. C’est fou comme ça fait du bien de te retrouver chaque soir, murmuré-je en déposant de petits bisous dans son cou.

— Vraiment ? Ça n’a pas tant l’air que ça, ce soir… Tout va bien, Alken ?

Je marque une pause et hésite un instant avant de me confier à elle. Qui sait comment elle va réagir ? Mais je ne veux pas avoir de secret pour elle. Je la regarde alors qu’elle enfile une petite robe de nuit et me rhabille aussi de mon côté avant de m’installer à table. Elle vient se mettre sur mes genoux et m’enlace avant de m’embrasser à nouveau tendrement.

— Tu as raison, Joy. Tout ne va pas bien et je ne sais pas quoi faire.

— Qu’est-ce qu’il se passe, Chéri ? Est-ce que je peux t’aider d’une façon ou d’une autre ? Quel est le problème ?

— J’ai eu un souci ce soir avec Charline. Je devrais en parler avec Elise, mais ça risque de nuire à sa carrière… Je ne sais pas quoi faire, Joy… Je suis perdu.

— Un souci ? Qu’est-ce qu’elle a fait ? C’est si grave que ça ? Je… Je ne comprends pas, Alken, qu’est-ce qui pourrait nuire à sa carrière, au juste ? Je doute qu’Elise la renvoie ou je ne sais quoi, c’est la meilleure de sa promo.

— Joy, elle s’est dénudée devant moi et m’a fait des avances ! Elle voulait que je la baise dans la salle de cours ! Tu te rends compte de ce que ça veut dire ?

Joy ouvre grand les yeux et reste silencieuse, semblant assimiler ce que je viens de lui dire. Je peux voir l’instant où tout se met bout à bout et où elle réalise ce qu’il s’est passé. Elle fronce les sourcils et ses traits se crispent.

— Non mais, elle est sérieuse ? Quelle petite dinde ! Elle est folle ou quoi ? Mais… Oh bordel, elle est vraiment prête à tout, cette sal… Mieux vaut que je me taise, sinon je vais devenir vulgaire, grimace-t-elle finalement, clairement énervée.

— Ouais, je sais, je suis comme toi, dis-je plus calmement. Mais je fais quoi maintenant ? Tu crois que je dois la dénoncer ? Je ne sais pas quoi faire…

— Tu l’as repoussée ? Enfin, je veux dire… Comment ça s’est passé ? Elle a été insistante ou elle s’est rhabillée toute penaude ?

— Bien sûr que je l’ai repoussée. Je lui ai dit de se rhabiller et je l’ai traitée de gamine en manque. Elle m’a dit qu’elle ne s’attendait pas à une telle réaction face à une femme qui me drague. Je lui ai répondu que j’en aimais une autre et qu’il fallait qu’elle calme ses hormones. Je crois qu’elle a compris la leçon, mais ça me dérange quand même, son attitude.

— Alken, je… Vraiment, je crois que tu devrais en parler à Elise. Ou au moins, ne plus te retrouver seul avec elle. Qui sait jusqu’où tout ça pourrait aller ? Elle est dingue !

— Oui, elle est folle. Mais tu penses qu’Elise me croira ?

Je suis vraiment inquiet par rapport à la situation. Si elle dit que c’est moi qui l’ai forcée, qui va-t-on croire ? Peut-être que si je ne dis rien, cela va en rester là et qu’elle ne va plus recommencer ? Et ne plus me retrouver seul avec elle, ça ne va pas être facile, il faut qu’on répète pour le concours… Je vois que Joy réfléchit aussi de son côté, très inquiète.

— Pourquoi est-ce qu’Elise ne te croirait pas ? Elle a le feu au cul, cette fille. Enfin, tu fais comme tu le sens, Amour, mais à ta place, j’en parlerais. J’ai envie d’aller lui secouer les puces, je te jure.

— Je pense qu’elle a compris que je ne rigolais pas. Et je me dis qu’il vaut mieux éviter de faire des vagues. Je vais y réfléchir, en tous cas. Merci de me soutenir, ma Chérie, ajouté-je, soulagé de voir qu’elle ne me fait pas de reproches et qu’elle a confiance dans ce que je lui ai raconté.

— C’est normal, voyons ! C’est ça, un couple, non ? Je crois que j’ai cerné le personnage, et ça me fait flipper, Alken, vraiment… Tu devrais être prudent.

— Promis, je vais faire attention.

Je l’embrasse à nouveau alors qu’elle me câline la nuque, pensive. Je suis d’accord avec elle, et moi aussi, j’ai cerné le personnage. Il va falloir que je me méfie, sinon c’est ma carrière à moi qui risque de souffrir.

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