Chapitre 4 – La pièce se referme

2 minutes de lecture

Le ciel s’assombrissait lentement sur les toits de la ville. Le vent poussait les nuages comme s’il voulait effacer la journée. Sélène marchait d’un pas assuré dans l’allée pavée qui menait à la résidence privée d’Elias Kane. Un lieu discret, niché derrière de hauts murs et des arbres centenaires. Il n’y avait pas de photographe, pas de projecteurs. Elias n’aimait pas l’excès. Il préférait le contrôle.

Elle avait choisi une robe noire, sobre mais fendue, avec un col légèrement asymétrique. Pas trop voyante, mais impossible à ignorer. Son rouge à lèvres était mat, profond, presque austère. Le genre de beauté qui dérange autant qu’elle fascine.

Un majordome lui ouvrit la porte sans poser de questions. Son nom figurait sur la liste.

Elle avait réussi à se faire inviter.
Officiellement, comme "contact du cabinet Marceau", un cabinet juridique secondaire qu’elle avait croisé lors d’un stage six mois plus tôt. Officieusement, parce qu’Elias avait donné son feu vert en silence.

La salle était baignée d’une lumière chaude. Des convives en costume, des femmes aux robes fluides, des conversations feutrées, des coupes de champagne levées à mi-hauteur. Une soirée de pouvoir.

Et au fond de la pièce, Elias. Entouré. Mais seul.

Il tourna la tête au moment exact où elle franchit la dernière marche. Comme s’il l’avait sentie.

Leurs regards se croisèrent. Aucune surprise dans le sien. Juste ce même trouble silencieux, à peine dissimulé. Il esquissa un mouvement vers elle, mais une femme élégante lui adressa la parole. Il hocha la tête, poliment, sans quitter Sélène des yeux.

Puis, une silhouette apparut à sa gauche. Blonde, fine, douce. Annette.

Elle portait une robe pastel, simple, attachée à la taille par un ruban satiné. Elle était belle, dans sa discrétion. Elle portait un plateau. Serveuse. Infiltrée dans le décor. Invisible.

Quand elle vit Sélène, elle s’arrêta net.

— Tu es venue ? dit-elle, presque à voix basse, comme si la soirée pouvait l’entendre.

— On m’a invitée, répondit Sélène avec calme.

Annette tenta de sourire, mais ses yeux vacillaient.

— Je ne savais pas que tu connaissais quelqu’un ici…

— J’ai appris à connaître les bonnes personnes, murmura Sélène. C’est une compétence.

Elias s’était approché, laissant derrière lui les conversations. Il s’arrêta à leur hauteur.

— Mademoiselle Vexley, dit-il doucement. Je suis heureux que vous soyez venue.

Annette baissa les yeux.
Sélène se contenta d’un hochement de tête.

— Ce genre d’endroit n’est pas dans mes habitudes, mais il faut bien apprendre à vivre avec le luxe.

Il sourit. Un vrai sourire, rare et fragile.
— Le luxe est un piège, mais vous saurez en sortir.

Sélène ne répondit pas. Elle savait jouer avec les silences.

— Annette, dit Elias sans méchanceté, pourriez-vous nous apporter deux verres, s’il vous plaît ?

Elle acquiesça, les mains tremblantes légèrement. Et s’éloigna.

Sélène attendit qu’elle disparaisse pour reprendre :

— Vous me voulez dans votre monde, Elias ?

— Je vous veux dans ma vie.

La phrase tomba, simple. Mais le sol se déroba sous elle une seconde.

Il n’y avait pas de stratégie dans sa voix. Juste un aveu. Brut. Prématuré. Dangereux.

Sélène sentit un vertige.
Elle n’avait pas prévu que ce serait si facile.

Mais à quelques mètres, Annette observait, un plateau dans les mains, un sourire vide sur les lèvres.
Elle venait de comprendre.

Le poison s’était infiltré. Doucement. Mais définitivement.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Azeratlas ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0