76. L'infirmière
Une aube d'étain et de rose se répandait sur le mur face à Sebastian quand l'infirmière entra dans la chambre ce matin-là.
Elle était jeune, jolie, mince. Ses cheveux étaient du même blond que les blés à la fin de l'été et ses yeux du bleu des lacs de montagne, mais ils brillaient d'un reflet dur qui rappelait à l'homme alité le bleu du cœur des glaciers et l'intimida.
Elle l'aida à sa toilette avec des gestes précis, mais mécaniques. Puis elle pratiqua en silence les exercices recommandés par le Doktor Morgenstern. Elle s'apprêtait à partir quand Sebastian s'enhardit :
" Excusez-moi, mais j'ai entendu de la musique. Est-ce que quelqu'un joue ?
- Ach nein, es ist unmöglich, mein Herr. Personne n'a joué ici depuis des années. Peut-être avez-vous rêvé.
- Je suis certain que non, mademoiselle.
- Alors vous avez entendu la radio.
- Le son était trop clair pour ça. C'était du piano.
- Il y a bien un piano à l'étage, mais je peux vous assurer que personne n'y a touché depuis des années. "
De froids, les yeux de l'infirmière devinrent aussi durs que l'acier. Le genre de regard qui n'appelait pas à la discussion. Sebastian sentait qu'on lui cachait quelque chose et qu'il lui faudrait se faufiler hors de sa chambre pour faire la lumière sur ce mystère. Peut-être que pouvoir poursuivre sa route en passait par là.
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