Se lier d’amitié 

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« Cher journal,

Mon séjour se passe à merveille.

Devine qui est en train de dormir en ce moment même sur mon canapé ?

Il s'appelle Flavien, alias Théo James !

Il est très sympathique mais ne va pas croire que je suis sous son charme ! Pas du tout !

Je t'expliquerais plus tard !

Il n'est pas du tout mon genre et je ne pense pas qu'il soit intéressé par une femme comme moi. Mes jambes ne sont pas assez longues pour lui et je n'ai rien à voir avec ses critères de beauté ! Princesse a beau être complètement folle, elle n'en reste pas moins une belle femme. Tu m'as regardé ?

Avec Oscar nous avons décidé de laisser nos querelles de côté. Il est, bien évidemment, d'une immaturité totale mais je pense qu'un terrain d'entente est envisageable. Il reste le père de mon enfant. À mon plus grand regret ! ».

Installée à ma table habituelle, je touille mon verre d'eau à l'aide d'une petite cuillère.

J'ai conscience que cela n'a aucun sens. Mais cela compense le fait que je n'ai rien d'autre à mélanger. J'arrache le bout d'un stick anti-acide avec les dents et j'avale son contenu. La raclette m'a donné de sacrées brûlures digestives toute la nuit. Je ne fais pas la maligne en ce moment même.

Nikita passe près de moi et je l'interpelle.

- Excusez-moi, l'homme à qui vous parliez hier soir m'a transmis un message, il aimerait que vous lui apportiez le petit-déjeuner en chambre.

Il est huit heures du matin, je suis convaincue qu'il dort encore.

Le visage de Nikita se fend d'un large sourire et je rigole sous cape.

Elle se précipite avec une assiette de viennoiseries et un broc de café. Elle se faufile entre les vacanciers telle une anguille. J'aimerais être une petite souris et les espionner. La scène doit être hilarante.

Peut-être finiront-ils comme les couples dans l'émission : « Mariés au premier regard ». Je me vanterais d'être une très grande entremetteuse et il me remerciera d'avoir mis sur son chemin, la femme de sa vie.

Je l'imagine lui ouvrir la porte, avec son vieux t-shirt du groupe Nirvana et son caleçon difforme. Il n'a rien d´élegant et il n'est pas aussi raffiné qu'il prétend l'être.

Flavien s'installe près de moi, son éternel ordinateur sous le bras. Il me gratifie de son superbe sourire et allume son appareil. Il tape désespérément sur un bouton et souffle d'exaspération. La main sur le front, il fronce les sourcils et peste.

- Un problème ? Demandé-je.

- J'ai oublié de le charger hier soir. Je suis tombé de fatigue après notre repas. Je ne me rappelle pas avoir aussi bien mangé.

Nous avons passé la soirée à parler de nos vies respectives. Il travaille dans un prestigieux centre d'affaire dans la région. Il a monté sa propre boîte et il gère une société avec une trentaine d'employés.

Il m'a expliqué qu'il était ici à la demande de la famille de Mallaury mais qu'ils avaient en effet suspendu leur requête. Apparement, l'établissement ne fonctionne pas si bien que cela. Ils ne comptent pas le dédommager pour le travail qu'il a fourni. Il pense repartir dans les prochains jours. Mais il aimerait s'entretenir avec le patron du lieu.

Lorsque je lui ai raconté ma vie au magasin, il s'est montré assez intéréssé. Il m'a posé beaucoup de questions. Cela fait plaisir d'avoir un interlocuteur receptif et captivé. Il m'a complimenté et je me suis soudainement trouvé intéressante à ses yeux.

- Donnez- moi votre chargeur, lui dis-je en tendant ma main.

Il s'exécute et je me penche sur le côté pour placer ce dernier dans la prise mais le fil est trop court. Je tire accidentellement sur l'ordinateur, celui ci vient cogner contre les verres vides.

Flavien se lève et se place en face de moi. Il dépose son ordinateur sur la table et l'allume. Je m'excuse et je lui demande s'il préfère que je me décale à une autre place.

- Ce n'est pas à vous de partir, c'est moi qui vous dérange.

- Non pas du tout ! Votre compagnie est très plaisante !

J'ecarquille les yeux et je me rattrape :

-Votre présence ne me dérange pas.

Il se concentre sur son ordinateur et j'en profite pour envoyer un message à mon père. Je ne lui ai pas répondu depuis deux jours.

Je me prends en photo et je lui envoies.

Il me répond rapidement, j'ai l'impression qu'il attendait mon message avec impatience.

« Tu as l'air en forme ma chérie! Nous t'embrassons ta mère et moi ».

Je traduis par « je t'embrasse mais ta mère doit le penser aussi ».

Je ne prends pas la peine de discuter avec ma mère de mon séjour. Je sais éperdument que cela ne l'intéresse pas. Ses cours de yoga et de bodyscuplt lui prennent déjà énormément de temps.

J'aperçois Oscar à l'entrée du restaurant. Il est accompagné de Nikita qui s'exprime avec de grands gestes. L'air inquiet, elle lève ses bras en l'air et crie « Izvinite ». Elle me pointe du doigt, l'air plus qu'affolé. Je me ratatine sur mon fauteuil.

Je n'ai pas d'échappatoire. Je glisse le long de celui-ci comme une glace en plein soleil. Mes fesses touchent le sol. Cachée sous la table, j'observe la scène.

Flavien passe la tête sous la nappe.

- Que faites-vous ? Me demande-t-il l'air incrédule.

- Redressez-vous et faites comme si de rien n'était.

Les vieilles chaussures marrons d'Oscar arrivent jusqu'à notre table. Je respire silencieusement, ne bougeant plus.

J'ai envie de rire. Je mords l'intérieur de mes joues. Je l'imagine ouvrir la porte de sa chambre, Nikita lui offrant le dejeuner. Il déteste être dérangé au lever du lit. Il a toujours été bougon et désagréable.

- Bonjour, pouvez vous me dire où se trouve Salomé s'il vous plaît ?

Sa voix est pressante et agacée. Heureusement qu'il ne me voit pas, je passerais un mauvais quart d'heure.

- Je ne sais pas désolé.

En revanche, celle de Flavien est étonnement calme.

- Ses affaires se trouvent à côté de vous pourtant.

- Elle est partie subitement , elle doit sûrement se cacher aux toilettes, vous la connaissez elle se planque souvent là bas.

Quel culot ! Il ne va pas s'en sortir comme ça ! Je pince ses mollets si fort qu'il sursaute et pousse un cri.

- Vous allez bien mon vieux ?

- Très bien ! Répond Flavien en passant son poing sous la table.

- Bonne journée alors.

Oscar s'éloigne et je m'extrais de ma cachette. Je me hisse sur les fesses et je me relève en m'appuyant sur le fauteuil. Je devrais arrêter de me planquer sous la table. S'y mettre est une chose, s'y défaire en est une autre.

- Vous m'avez pincé ! S'offusque Flavien.

- Vous m'avez traité de pisseuse ! Avouez que c'était cherché !

- Je vous ai sauvé la mise ! Vous me devez une revanche !

- Nous verrons ça plus tard !

Il boit son café et nous sommes rejoint par Mallaury. Celle ci me pointe du doigt avec un regard assassin. Ses yeux noirs me transpercent.

- Que faisiez-vous sous la table en compagnie de mon fiancé ?

Elle s'approche de moi et je recule hésitante.

Flavien se lève et s'interpose entre nous deux.

- Ce n'est pas ce que tu crois Mallaury !

Elle le fusille du regard et le pousse.

Elle m'attrape par mon pull et me colle contre la baie vitrée. Elle claque ma tête sur la fenêtre. Son visage est si prêt que je sens son haleine mentholée.

- Calmez-vous s'il vous plaît, vous me faites mal.

J'ai soudainement peur et je n'ai plus le cœur à rigoler. Elle est complètement hystérique. Je place mes mains sur mon ventre. Mon instinct maternel me dicte de protéger mon enfant. Dieu sait ce qu'elle pourrait me faire.

- Ne vous approchez plus de lui , vous avez compris ?

Elle me gifle si fort que mon visage se tourne et vient se claquer sur la baie vitrée.

Je n'en reviens pas. Je suis tellement choquée que je ne tente pas de me défendre.

Les vacanciers ont les yeux braqués sur nous.

Flavien lui empoigne le bras et l'emporte hors du restaurant.

J'en profite pour ramasser mes affaires en vitesse. La tête baissée, je sens les larmes me monter aux yeux. Vexée, je ravale ma fierté. Je ne me suis jamais autant sentie humiliée.

Même lorsque ma mère m'avait coupé les cheveux si court que je ressemblais à Jim carrey dans le film "Dumb et Dimber". À l'époque, je portais un bonnet pour cacher l'horreur capillaire dont ma mère m'avait affublée. Elle ne s'est improvisée coiffeuse qu'une seule fois er je dois dire que c'était celle de trop.

Je bouscule Oscar dans ma précipitation. Il me stoppe et me demande ce qui se passe.

- Laisse moi Oscar s'il te plaît, je dois aller à mon animation, je n'ai pas le temps de discuter.

Il ne me rattrape pas. Dès que cela ne concerne pas sa petite personne, il peut se montrer égoïste !

Il n'a jamais aimé les ennuis, il a une capacité à les ignorer assez effarante je dois dire.

Je le contourne et m'éclipse dans la salle des activités pré-natales qui juxtapose l'hôtel.

J'emprunte le couloir vitré et je suis bientôt rejoins par Rosie et Tiana. Celles ci sont accompagnées de leurs conjoints.

Encore une séance en duo ! J'espère que, cette fois ci, je ne vais pas rendre mon déjeuner sur les pieds de mes camarades de grossesse.

- J'ai hâte d'assister à cette séance ! S'exclame Rosie.

Silencieusement, je m'installe dans la salle. Elle se situe juste à côté de notre salle habituelle.

Elle n'est pas très grande, il fait bon et chaud. Elle est éclairée d'une lumière tamisée bleutée. Une musique douce sort des enceintes accrochées au mur.

L'ambiance est agréable et chaleureuse.

De gros coussins de couleurs mauves sont installés au sol ainsi que des couvertures épaisses.

Plusieurs instruments de musiques comme des bâtons de pluie, des xylophones ou des triangles sont déposés près des gros coussins. Des bougies parfumées embaument l'endroit.

Je me place sur un gros coussin. Les genoux pliés contre ma poitrine, j'écoute les explications d'Alva.

- Vous allez vous reconnecter avec votre corps. Cette séance a pour but de vous apaiser et de laisser votre esprit vagabonder dans les mers paisibles de votre sérénité.

Mon esprit a plutôt envie de vagabonder sur les eaux troublées de mon existence. La mer risque d'être déchaînée par une fioriture d'émotions ingérables. Je ne suis pas concentrée depuis mon altercation avec Mallaury.

- Je vous laisse choisir les instruments les plus inspirants avec votre partenaire.

Partenaire mes fesses. Le mien est complètement inexistant. Elle ferait mieux de le stipuler aux séances précédentes. Cela m'éviterait de me retrouver seule comme une godiche.

Tout le monde se met en place et je les observe le menton posé sur la cime de mes genoux.

Alva s'accroupît devant moi et pose sa main sur mon avant bras.

- Comment allez-vous Salomé ? Vous n'êtes pas dans votre assiette ?

Je hoche la tête, je n'ai pas envie de parler et je n'ai pas envie d'exposer la scène de tout à l'heure.

La porte s'ouvre délicatement et Flavien passe sa tête par l'embrasure.

Quand on parle du loup.

Il n'y peut rien mais je ne peux m'empêcher de le fusiller du regard.

- Ah monsieur Bourgeois entrez ! Salomé je vous ai trouvé un partenaire.

Elle me sourit tout en pointant du doigt Flavien.

Je manque de m'étouffer avec ma salive. Ce dernier m'observe l'air penaud.

- Si cela vous convient nous pouvons commencer la séance ... insiste Alva.

Les autres continuent leurs activités et n'ont pas l'air de se soucier de moi.

Je peux, tout de même, remarquer que Rosie penche son cou d'une façon étrange. Elle donne plusieurs coups d'œil furtifs vers moi. Elle essaye de nous écouter mais elle n'est pas très discrète.

Alva me laisse avec Flavien. Il se place près de moi.

- Excusez-moi Salomé . Mallaury a dépassé les limites, je lui ai dis le fond de ma pensée. J'ai eu le droit au même châtiment ... mais je m'en moque, elle ne viendra plus vous importuner.

Je le regarde avec des yeux ronds. Il n'a quand même pas osé lui faire du mal.

Il m'offre un joli sourire et secoue la tête.

- Je l'ai envoyé balader Salomé, ne vous inquiétez pas elle est bien vivante ! Elle n'a pas arrêté de gueuler, sa voix stridente m'a percé les tympans.

- J'espère que cela ne vous donnera pas trop d'ennui.

- Peu importe, l'essentiel est que vous alliez bien, enfin j'espère ?

- Oui ! Oui ! Juste vexée et humiliée mais cela passera avec le temps.

C'est déjà quasiment oublié.

Il n'est pas obligé de savoir que cela m'a affecté au point d'avoir envie de me cloitrer dans ma chambre.

- Je voudrais me racheter auprès de vous. J'ai proposé mon aide à votre animatrice. Bien sûr si cela ne vous dérange pas ....

J'ai le cœur qui bat la chamade. Il est là, posté devant moi. Jamais je n'aurais imaginé qu'il serait, un jour, installé près de moi, à se soucier de mon état psychique. Il paraissait tellement pédant dans le hall de gare.

Je soupire et j'accepte.

Je n'ai pas eu besoin d'être convaincue longtemps. Je sais, je suis faible. Mais j'ai envie de profiter de la situation. Il n'y a pas de mal.

- Les papas vont se positionner, comme la dernière fois, derrière les mamans. Nous allons faire des exercices de relaxation.

Je ne suis pas rassurée à l'idée que Flavien se place derrière moi. Je suis crispée comme une statue. J'ai peur de l'écraser. Il est plus grand que moi, certes, mais mon ventre est aussi large que son corps.

- Voilà très bien, placez les coussins dans vos dos Messieurs. Mesdames , détendez-vous et positionnez-vous contre vos moitiés. Fermez les yeux, je vais tamiser un peu plus les lumières.

Je croise le regard de Rosie. Celle ci me dévisage le sourire aux lèvres. Elle lève les sourcils en direction de Flavien. Je hoche la tête et je tape dans l'air.

Elle rigole et donne un coup de coude à Tiana. Celle ci me regarde et jubile aussi.

Je lève les yeux aux ciel et j'écoute les explications d'Alva.

La lumière douce emplie la pièce. Je reste assise pendant que les autres sont avachies sur leurs conjoints.

Flavien se racle la gorge et je m'appuie sur lui docilement.

- Messieurs, vous allez passer vos mains sur le ventre de vos femmes, afin d'être en totale osmose avec elles.

Pour ma part, je suis en totale osmose avec la gênance absolue.

Que cherche-t-elle à faire ? Quelle est sa démarche ? Il y a une caméra cachée. Je vais découvrir Mallaury derrière ce guet apens et tout le monde rira de ma détresse.

- Je peux ? Me chuchote Flavien dans le creux de l'oreille.

La chaleur de son haleine me provoque une sensation agréable au creux du ventre. J'ai des frissons partout. Je maudis mes émotions. Cela est complètement absurde, je ne dois pas ressentir ce genre de chose. C'est inconcevable !

Une femme enceinte peut-elle avoir des sentiments pour un autre homme que celui qui l'a engrossé ?

Je me pose trop de questions.

Je chasse ces questions idiotes et me concentre sur l'animation.

Je hoche la tête et il dépose ses mains sur mon ventre. La tête posée sur le creux de sa clavicule, je sens les cognements de son cœur. Il bat rapidement, il doit être aussi gêné que moi.

Mais c'est lui qui a tenu à participer. Peut-être pour se rattraper du comportement de sa cinglée de petite amie ? Mais dans ce cas là, de simples excuses étaient suffisantes.

Où peut être que j'attise de la pitié ?

Une célibataire enceinte peut émouvoir les plus insensibles. Moi qui pensais avoir un charme fou. Je n'ai rien de tout cela. Je suis une simple femme, affublée de dix kilos en trop et d'un ventre concourrencant celui du père Noël.

Bébé s'agite drôlement. Elle fait un roulé boulet dans mon utérus et pousse sur le devant de mon ventre. Flavien s'exclame doucement. Elle tape plusieurs fois là où sa main est posée. Elle fait onduler mon ventre.

La musique douce détend l'atmosphère.

Les autres couples sont en parfaite symbiose. Moi je suis tendue. La proximité avec Flavien y est pour quelque chose. Il le ressent et il m'en fait part.

- Détendez-vous Salomé, votre bébé est très en forme !

Je tourne la tête et mon nez vient ricocher sur sa gorge. La pénombre m'empêche de le voir correctement mais je peux sentir sa mâchoire se contracter. Son parfum enivrant m'émoustille. J'ai envie de déposer mes lèvres sur sa gorge mais je me retiens. Je ne dois pas passer pour une fille désespérée. Je n'en suis pas une de toute façon.

Bébé fait des pirouettes, elle a décidément pris d'assaut mon utérus. Elle virevolte comme sur un trampoline.

Je souris, il y en a une qui a le même sentiment que moi. Qui peut mieux comprendre ce que je ressens qu'elle en ce moment ?

- Vous allez entourer vos conjointes avec vos bras, vos respirations doivent être synchronisées. Inspirez, expirez, inspirez, expirez.

Flavien se redresse et il me faut quelques secondes de plus pour mettre mon fessier et mon imposant ventre correctement. Il m'entoure de ses bras et le menton posé sur mon épaule , il inspire. Je le suis et sa respiration douce et calme m'apaise immédiatement. Ses mains m'enveloppent comme un gros câlin. Je suis en train de fondre. Je pose mes mains sur ses avants bras. Je me laisse guider par ses gestes.

- C'est bien Salomé ! Chuchote-t-il dans mon oreille.

J'ai la gorge nouée, je suis émue.

Quelle idiote ! Je dois me ressaisir.

J'inspire.

J'expire.

J'inspire.

J'expire.

- Vous allez vous allonger l'un sur l'autre. Placez vos mains sur le ventre et fermer les yeux.

Je m'exécute et je croise le regard de Flavien . Je n'ai pas envie de fermer les yeux . J'ai peur de l'écraser. Je ne pense à rien d'autre. Il passe sa main sur mon visage et ferme mes paupières. J'attrape machinalement son poignet et il ne bouge pas, je veux garder la douceur de son geste sur moi. Il écarte une mèche de mon visage. Et vient la placer derrière mon oreille.

Une musique douce me parvient, j'ai envie de bailler. Les sons sont mélodieux, apaisants et relaxants. Ils mélangent plusieurs styles de musiques de méditation.

Flavien se remue un peu. J'ouvre les yeux , son visage est près du mien. Je dois être lourde pour lui.

Pendant que les autres sont perdus dans les sons d'apaisement et de relaxation, je contemple ce qui me semble relaxant : la douceur de son visage.

Il dépose sa main sur mon ventre et bébé se remet à faire des cabrioles.

Il essuie le coin de ses yeux , il a l'air ému. Cela attise ma curiosité. Je prends sa main et la chaleur de sa paume vient s'associer à la mienne. Nous fermons les yeux et nous nous laissons bercer par les prémices d'une nouvelle relation : d'amitié ? J'en suis certaine, d'amour ? Il ne faut pas charrier.

- Salomé ! Salomé ! Réveillez vous .

Je m'étire de tout mon long et ma main percute un visage. J'ouvre les yeux, Flavien se masse la joue.

- Excusez-moi ! Dis-je dans un long bâillement.

La séance est terminée et nous sommes seuls dans la pièce. Je me suis endormie telle une marmotte en pleine hibernation.

- Alva m'a laissé les clés, vous étiez tellement bien.

Je regarde autour de moi. J'essuie ma bouche. J'ai bavé comme un lama , je suis un anti-amour à moi toute seule. Je frotte mon visage et je me sens vaseuse.

J'ai un homme d'une beauté incroyable et d'une gentillesse exemplaire près de moi et tout ce dont j'ai envie c'est de partir d'ici.

Salomé tu n'es qu'une mauviette. Tu n'es qu'une couarde.

Il m'aide à me relever , les mains sur les hanches, je baille à m'en décrocher la mâchoire.

- Cette séance vous à sonner.

- oui !

- Voulez-vous manger quelque chose ?

- oui !

- voulez-vous vous joindre à moi ?

- oui ...

- Allez-vous répondre oui à toutes mes questions ?

- oui euh non !

Je cligne des yeux. La bouche en cul de poule, je l'observe .

- On y va ?

Je hoche la tête et je le suis.

Il dépose les clés à la réception et nous nous dirigeons vers le restaurant. Rosie et Tiana nous font signe de la main . Flavien s'éloigne vers le buffet et je m'avance vers elles. Elles ont fini de déjeuner et m'assaillent de questions.

- Alors on a son petit cœur qui bat la chamade ? Me taquine Rosie.

- Ne dis pas n'importe quoi !

- Vous êtes mignons tous les deux. Il t'a demandé de sortir avec lui ?

- Non et vu la réaction de sa copine je ne pense pas que ça soit une bonne idée !

- Ils ne sont plus ensemble ! Tu vas passer la soirée avec lui ?

- Non ce n'est pas à l'ordre du jour.

- Avoue qu'il te plaît !

- Nous avons sympathisé rien de plus !

- Il avait l'air beaucoup plus que ça tout à l'heure ...

- Il voulait se faire pardonner ...

- Quoi ? Disent-elles en chœur.

Je n'ai pas envie de revivre mon humiliation.

De toute façon, Flavien arrive trop vite et les deux commères en profitent pour s'éloigner .

- Je vous ai pris des noix, vous avez l'air de les apprécier . En fait je vous ai vu une fois en manger, j'ai pensé que cela vous ferait plaisir.

Je m'installe face à lui et il dépose nos assiettes sur la table. En parfait gentleman, il m'aide à m'installer. Je ne comprends toujours pas ce que princesse lui reproche. Il coche toutes les cases pour l'instant.

Je triture un morceau de pain, si bien qu'il ne reste que des miettes. J'examine les gens autour de moi . Ils mangent et boivent , parlent et rigolent. Ils ont l'air heureux. Je ne suis pas convaincue que je le sois. Je suis bien entourée, j'adore mon travail, je suis en pleine forme, mais il me manque quelque chose.

Aurais-je encore l opportunité, quand mon bébé sera là, de faire la fête et de m'amuser ? Et si Mallaury avait raison , si je suis un incapable de garder un homme près de moi ?

- Vous allez bien ? Me demande Flavien.

- On ne peut mieux !

Je mange la salade de pomme de terre qu'il m'a servi .

- Excusez-moi encore pour tout à l'heure , je repense au geste de Mallaury , je m'en veux tellement.

- Ce n'est rien , n'y pensons plus !

- Vous parraissez affectée. J'ai préféré l'éloigner de vous, j'aurai dû rester ici avec vous.

- Oui .... Dites-moi Flavien , vous aviez l'air bouleversé tout à l'heure. Je vous ai vu essuyé vos yeux.

Il dépose sa fourchette et baisse les yeux. Je mets toujours les pieds dans le plat.

Il a l'air triste tout d'un coup.

- Je n'aurais jamais l'opportunité de connaître cette situation.

Voilà qu'il recommence. Il sait qu'il est beau, il sait qu'il peut plaire à n'importe quelle femme. Pourquoi se dénigre-t-il à ce point ?

- Ne dites pas de bêtises ! Vous êtes charmant. Vous possédez beaucoup de qualités qui peuvent plaire aux femmes. Vous trouverez votre perle rare , il faut être patient !

Je me répète mais il n'a pas l'air de comprendre.

- Non Salomé ! Ce n'est pas la question, je ne pourrais jamais ... je suis ...

Mon téléphone sonne, c'est Oscar. Je coupe en vitesse la sonnerie. Ce n'est pas le moment, il interrompt une conversation ultra intéressante.

- C'est Oscar, il n'a toujours pas compris qu'il m'importunait, vous disiez ?

Je reçois plusieurs messages. Mon téléphone ne fait que vibrer.

« Pourquoi tu me raccroches au nez ? ».

« Tu as trouvé meilleure compagnie que moi ? ».

« Salomé, répond moi »

« Je voudrais passer la soirée avec toi »

Je prends ma tête entre mes mains et souffle nerveusement.

- Je lui réponds rapidement, je pense qu'il ne va pas me lâcher.

Je pianote sur mon téléphone.

« Arrête de me harceler, je suis en tête à tête avec quelqu'un »

« Tu as un nouveau petit ami? »

Quel toupet ! Il ose me demander cela alors qu'il s'envoyait en l'air avec Morticia.

« Ciao »

« Répond moi »

Je lui envoies un doigt d'honneur et il a l'air d'avoir compris.

- Je suis à vous, que me disiez-vous ?

- Laissez tomber Salomé ! Ce n'est pas important, j'ai un service à vous demander !

- oui ?

Il a l'air déçu. Je maudis Oscar. Il faut toujours qu'il gâche tout.

- Accepteriez-vous de m'accompagner à une soirée ce soir ? J'ai reçu une invitation de la part du domaine, il y aura un tas de gens avec des conversations ennuyeuses.

- Pourquoi ne pas décliner ?

- Ils ont besoin de mes services ... Son visage se crispe, les yeux brillants, il attend ma réponse.

- Mallaury ne dira rien ?

Ma question est loin d'être anodine. Mais je n'ai pas envie d'attirer les foudres de cette cinglée.

- Nous ne sommes plus ensemble ! Elle n'a rien à dire.

- Je ne sais pas, vous risquez d'être ennuyé avec moi , je ne suis pas sortable ...

-Ils ont un buffet à volonté , me coupe-t-il, j'ai pensé que vous seriez intéressée ?

- Si vous me prenez par les sentiments.

J'avale d'un trait mon verre d'eau. Je plonge mon regard dans le sien.

Il faut qu'il arrête de m'envouter de la sorte. Il est craquant et je suis complètement sous son charme.

- Juste une chose ! Est- il possible que vous portiez la combinaison ?

Je le regarde perplexe. Pourquoi cette requête ? Il m'a vu une fois avec cette tenue. Elle me met en valeur certes , mais je suis très gênée dans ce vêtement.

- Oui, je pense.

Un jour, je jure de m'écouter. Maintenant, je n'ai plus qu'à demander de l'aide à Rosie et Tiana. Mes deux déesses de la mode. Je vais devoir répondre à leurs questions.

Je ne sais pas ce qui est le pire : me trouver seule à une soirée avec Flavien ou bien répondre aux questions très indiscrètes de Rosie.

Lorsque je descends le grand escalier du hall d'entrée, je remarque l'effervescence qui s'y déroule.

Les vacanciers vont et viennent, les bras chargés de paquets. Le réveillon est demain. Ne paniquons pas !

J'ai pu voir Rosie entre deux. Elle m'a prêté une autre combinaison. Celle que je porte est noire avec de la dentelle dans le dos. Les manches courtes cache le haut de mes épaules. Mais la dentelle et le décolleté ne permettent pas une fois de plus de porter de soutient gorge. On s'y fait à la longue.

Flavien se trouve devant le grand sapin. Il réinstalle une guirlande. Serait-il maniaque ? Je pense qu'il doit être carré et sérieux dans ce qu'il entreprend. En même temps, diriger une entreprise doit demander beaucoup d'investiment personnel. Il lève la tête et vient à ma rencontre.

Mon cœur palpite, j'ai soudainement chaud.

Je prends garde à ne pas glisser avec mes talons.

- Nous pouvons y aller si vous êtes prête ?

Sa voix douce et suave me fait fondre comme une guimauve. Je soupire béatement.

Il est très beau ce soir. Il a mis une jolie chemise fleurie et un pantalon cintré bleu marine. Son noeud papillon est assorti.

La réceptionniste me dévisage incrédule. Je lui fais un sourire crispé.

Il est vrai que je suis accompagnée par l'homme qui était sensé remettre l'établissement en ordre. Cela porte à confusion.

Je prends le bras qu'il me tend et nous sortons.

Il a emprunté une voiture électrique golfette.

- C'est de l'autre côté du lac, le chemin sera plus agréable pour vous.

Je m'installe à côté de lui et sa proximité me chamboule. Il fait particulièrement froid dehors mais je suis en ébullition.

Nous longeons le lac. Il me paraît immense , il est entouré de lanternes et les arbres lui donnent un côté mystérieux.

La voiturette fuse et un silence s'installe.

Il finit par se garer devant un bâtiment ancien qui ne ressemble pas au reste du domaine.

Il semble venu tout droit du dix-huitième siècle et il faut monter quelques marches pour y accéder.

Flavien me tend la main en parfait gentleman. La chaleur de sa paume est agréable.

Nous déposons nos manteaux dans la salle appropriée et nous entrons dans une autre salle. Un homme nous ouvre la porte. Cela est très solennel. Chaque personne est vêtue de manière sobre. Ma combinaison est parfaite pour l'occasion.

Flavien dépose une main au creux de mon dos et je sens mon corps entier se liquéfier.

- Vous êtes magnifiques ce soir , chuchote-t-il dans mon oreille.

Ma colonne vertébrale est parsemée de piqûre. Je sens son haleine chaude sur ma peau. Je lui souris bêtement en le remerciant et lui retourne le compliment.

L'endroit est vraiment très peu éclairé.

Une scène surplombe la pièce et des sièges pourpres lui font face. J'ai l'impression d'être au théâtre. Flavien nous indique deux sièges devant et nous prenons place.

Je ne suis pas très à l'aise. Je n'arrête pas de tortiller mes doigts ainsi que d'agiter nerveusement ma jambe.

Il pose sa main sur les miennes , son regard concentré sur la scène.

Une estrade et un micro y sont installés.

Un silence s'installe et tout le monde a les yeux rivés sur un homme corpulent en costard et cravate. Il prend la parole et son double menton tremble sous ses exclamations. Je porte machinalement ma main à ma gorge. Je caresse celle-ci en déglutissant.

J'imagine un goéland. J'ouvre et ferme la bouche. Flavien me donne un coup de coude, il semble amusé. J'essaye d'écouter ce que cet homme nous dis.

Je réprime plusieurs fois des bâillements. Bébé s'agite et je meure de faim. Elle donne un violent coup de pied dans ma vessie et je croise rapidement les jambes.

- Bienvenue à vous tous ici ce soir. Je suis heureux de vous accueillir pour l'inauguration de la salle de conférence, que le domaine des Balsamines a eu la gentillesse de nous céder. C'est un honneur de représenter cet endroit cher à mon cœur...

Flavien pianote discrètement sur son téléphone.

Je suis étonnée qu'ils aient investis dans cet endroit sachant leur position délicate.

L'homme goéland s'écarte et un couple de soixante-dix ans s'avance. La dame est vêtue somptueusement. Elle porte de magnifiques bijoux à plusieurs carats, une robe moulante et un chignon bien dressé. L'homme porte un joli costume, une grosse montrée Rolex à son poignet.

- Nous pouvons applaudir Monsieur et Madame Argaud.

La dame s'avance vers le micro et balaye des yeux la salle.

Argaud ! Ce sont les grands parents de Mallaury ! Celle-ci doit être présente également.

Elle va sûrement monter sur scène, j'ai peur qu'elle nous remarque et fasse un scandale devant tout le monde. Je ne supporterais pas une deuxième altercation avec elle. Surtout que la salle est noire de monde. Je me lève discrètement et me dirige en trottinant vers la sortie. Flavien est en grande conversation avec quelqu'un sur sa droite et il ne me remarque pas.

Je prends un long couloir et cherche désespérément les toilettes. Plusieurs femmes sortent d'un couloir adjacents et je vois l'écriteau des toilettes sur le mur.

L'endroit est très luxueux. Les lavabos sont revêtus de marbres et les robinets sont dorés . De grands miroirs dorés sont accrochés au mur. Le sol est tapissé de moquette pourpre qui rappelle les siège de la salle de conférence.

Un parfum d'ambiance sort d'appliques discrètes. Je rentre dans le premier toilette . J'aimerais y rester toute la soirée pour ne pas avoir à subir les frasques de princesse. Elle doit se sentir pousser des ailes.

Un gloussement se fait entendre dans le toilette d'à côté. Quelqu'un cogne dans le mur puis j'entends rigoler plus fort.

Qu'est ce que c'est ça ? Ils sont deux là dedans ! Je tends l'oreille et je reconnais la voix stridente de Mallaury.

Elle n'assiste pas au discours de ses grands parents. J'aurais dû rester là bas au lieu de venir ici.

Je me rhabille et je colle mon oreille sur la cloison. J'entends un autre petit rire. Un petit rire de hyène.

Ne me dites pas que ... ?

Je lave mes mains et prends mes pieds dans quelque chose posée au sol.

Une vieille paire de chaussures marrons. Quelle ironie du sort.

Je prends du bout des doigts ses immondes souliers et je les balance dans la cuvette des toilettes. Je tire la chasse d'eau et je m'enfuis en courant.

Je prends le couloir et je me dirige vers une grande porte , ce n'est pas la salle de réception. C'est un grand bureau. Une immense bibliothèque longe le mur du fond, un luxueux tapis est déposé au sol et deux canapés sont installés devant un âtre de cheminée.

Des dossiers sont disposés sur le bureau. Je m'avance sur la pointe des pieds et je les ouvre.

Je suis consciente que mon acte est vraiment très déplacé. Je suis curieuse, ce n'est pas de ma faute.

Des papiers de cessation d'activité ainsi que des contrats de location sont éparpillés.

Le nom de Mallaury est figuré en première ligne, elle sera sans doute la gestionnaire principale lorsque ses grands- parents prendront leur retraite.

Un dossier avec le nom de Oscar Leterreux attire ma curiosité. Apparement, il s'occupe de cette affaire. Quelle coïncidence !

Je ne suis pas complètement dupe. Cela est normal de demander conseil à un avocat.

Le hasard fait bien les choses, c'est justement ici qu'il avait réservé nos vacances.

Vous pensez vraiment que je vais avaler cette histoire ?

Apparement les papiers sont signés de février deux-mille vingt-deux !

Il était en déplacement et nous n'avions pas pu fêter notre saint-Valentin. Il était débordé ! Évidemment ! Ils n'ont pas attendu très longtemps pour fêter leur victoire.

Quelqu'un touche à la poignée de la porte. Je rassemble tous les dossiers correctement et je me glisse sous le bureau.

Pourvu que ça ne soit pas Mallaury et Oscar !

Une voix grave et âgée me parvient.

Mallaury entre et ses longues jambes arrivent jusqu'à moi.

J'ose à peine respirer. Pliée en huit sous le bureau, ma position est très inconfortable.

L'homme referme la porte et s'avance vers un guéridon pour lui servir un verre d'alcool.

- Merci grand père.

Je suis soulagée, il n'y aura pas de batifolage dans cette pièce.

- Comment te sens-tu Mallaury ? Je suis très impressionné par ton ami , il nous a bien conseillé pour cet endroit ! Mieux que l'autre. À part nous dire que nous étions en déficit.

- Oui, nous ne sommes plus ensemble ! Il a trouvé mieux ! Et moi je suis libérée !

Elle s'allonge sur le canapé , son corps svelte épousant parfaitement sa tenue argentée.

- Il était temps de te débarrasser de lui , il n'avait aucune compétence en gestion. Trop indécis ! Il nous faut des gens dynamiques et intelligents ! Il n'avait aucun talent, aucune éloquence.

- Tout à fait, il s'est entiché de l'autre potiche. Il veut une descendance rien de plus. Il ne pourra jamais me l'offrir. Et cet avocat , mon dieu quel pot de colle ! Il nous a sorti d'un sacré pétrin. Il pense maintenant qu'il peut avoir plus de contrats avec tous ces actionnaires présents. Il compte sur moi. Je voulais juste faire le moins de frais possible. Il n'était pas obligé de prendre ses vacances ici.

- Ils sont tout comme ça. Tu as du pouvoir et des responsabilités, fais attention à qui tu donnes ta confiance. Ils n'arriveront jamais à ta cheville.

- Tu as raison Grand-Père , je suis tellement plus distinguée que toutes ces mégères.

J'en ai assez attendu . Je mets discrètement mon téléphone en silencieux. J'aimerais qu'ils sortent pour que je puisse m'en aller à mon tour.

Son grand père referme les bouteilles d'alcool. Mallaury se redresse. Mon vœu est peut être en train de se réaliser.

Quelqu'un tape à la porte. Oscar l'air accablé, ses chaussures dégoulinantes à la main peste. Mallaury et son grand père se regardent et le suivent.

Je compte jusque cinq et je sors de ma cachette. Je m'approche à pas de velours de la sortie et je me précipite dans le couloir.

Je prends la direction opposée et je traverse le hall. Je trouve le chemin de la salle, la musique hurle dans les enceintes. Tout le monde danse, rie. Il est très difficile de se frayer un chemin. Des coupes de champagne sur des grands plateaux sont servies. Le serveur de l'hôtel blanc m'accoste et me propose un verre de champagne.

- Sérieusement? Il n'y a rien qui vous perturbe ?

Mon ton est exaspéré. Il toise ma tenue, un sourire au lèvres.

Il fixe mon décolleté et je lui demande d'arrêter.

Je secoue mon doigt devant lui. Flavien se poste entre nous, bousculant légèrement le serveur.

- Où étiez-vous ? Je vous ai cherché partout.

Son ton est inquiet. Il contracte à nouveau sa mâchoire.

- Je me suis perdue dans le couloir , m'exclamé-je à voix haute.

- Mallaury est là et votre ex-compagnon aussi.

Bien sûr qu'elle est ici, elle est la prochaine directrice de l'établissement. Elle ne ratera pas une occasion de nous le balancer en pleine figure.

- Avez-vous pris quelque chose à boire et à manger ? Il est collé à mon oreille tant la musique hurle.

- Non !

Il m'attrape la main et m'entraîne vers le buffet à volonté. Il prend deux assiettes et les garnies généreusement.

- Tenez ! Mangez !

Il est directif mais tellement attentionné. Je n'ai pas l'habitude d'être choyée comme ceci. Il est maturite et toutes les femmes revent d'être accompagnée par un homme comme lui. Il m'observe et croque dans ses mignardises.

La musique se radoucit et une chorale monte sur scène. Elle entame des chants de noël. Les femmes sont habillées avec d'épaisses robes anciennes et des capes vertes. Elles ressemblent aux femmes de l'époque victorienne. Les hommes sont élégants dans leurs costumes. Leurs chants sont magnifiques.

- Pourquoi avez-vous tenu à ma présence ? Lui demandé-je la bouche pleine.

- J'aime votre compagnie puis vous me deviez bien cela !

- C'est vous qui vous êtes proposé pour mes animations, pourquoi avoir tenu à ce que je porte ceci ?

Je lui montre ma combinaison les bras levés autour de moi.

- Parce que je vous trouve magnifique dedans.

Il chuchote à mon oreille et je déglutis ma salive difficilement.

Il sert la main de plusieurs hommes d'affaires. Il me présente à chaque convive qu'il croise. Il a l'air de connaître pas mal de monde. Il rit à plusieurs personne et parle d'affaires.

Deux fois, il passe sa main autour de ma taille, avant de se raviser.

Oscar est tout prêt, il scrute Mallaury. Celle-ci est devant la scène. Elle adresse de chaleureux sourires aux convives. Elle paraît complètement hypocrite.

Oscar croise mon regard.

Merde.

Alerte rouge.

Il va savoir pour ses chaussures.

Je recule discrètement et je me faufile entre les groupes de personnes.

Flavien me regarde les sourcils froncés. Il tourne la tête vers Oscar puis vers moi.

Je pince les lèvres. Un groupe l'accoste, il semble embarrassé.

Il tente de me suivre mais je suis happée par la foule qui bouge autour de moi.

La chorale commence « Carols of the bell ».

Je trouve une issue de secours qui amène à une terrasse.

Parfait.

Je n'ai plus qu'à descendre le perron et faire le tour du bâtiment. Je pourrais passer de nouveau par le hall.

Sauf qu'il n'y a aucun perron.

Je n'ai pas de manteau , je n'ai pas d'écharpe.

Je congèle sur place. La porte ne s'ouvre pas de l'extérieur.

Bien sûr ma combinaison ultra fine ne me permet pas de me réchauffer.

Je vais me transformer en yéti , j'ai déjà le physique pour !

Ma respiration fait de la fumée, il fait moins cinquante degrés. Je sautille sur place, mes bras autour de moi. J'ai beau toquer dans la porte, il n'y a personne qui m'entend. La musique hurle trop de l'autre côté. Il ne manquerait plus qu il neige et je serais la nouvelle égérie de haagen daas.

Au bout de plusieurs minutes, qui me semblent très longues, le porte s'ouvre et le regard inquiet de Flavien se pose sur moi.

Il s'approche après avoir levé le loquet pour bloquer la porte . Il me tend mon manteau et lorsqu'il dépose ses yeux sur moi il rougit. Je baisse les yeux. Forcément ! J'ai froid et je ne porte pas de soutient gorge. Je glisse dans mon manteau puis il noue mon écharpe autour de mon cou.

La musique de la salle me parvient. Nos yeux sont plongés l'un dans l'autre.

- Je vous ai vu sortir mais ils sont légèrement collants...

Il passe sa main sur mes joues.

- Vous êtes frigorifiée !

Je suis légèrement embarrassée. Son contact me met mal à l'aise. Pourtant, je ressens une déception lorsqu'il me lâche.

Il me pousse vers l'intérieur et nous nous faufilons au fond de la salle pour rejoindre le hall d'entrée.

Il part chercher son manteau et l'enfile en vitesse.

- Je vais vous ramener à l'hôtel, je ne voudrais pas que Paloma ait froid.

- Vous êtes convaincu qu'elle se nommera Paloma ? Dis-je en rigolant.

- Je trouve ce prénom magnifique. Vous ne trouvez pas?

Je fais mine de réfléchir et provoque un rire enjoué de sa part.

Je monte dans la voiturette et il démarre calmement. Le froid vient me caresser le visage, mais pour rien au monde je voudrais être ailleurs.

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