Chapitre 97 : Cheminement

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Tandis que ma fille grandissait physiquement, grâce à ma thérapeute, je grandissais émotionnellement. J’étais arrivée à l’état de débris dans le cabinet de Marianne Joie de vivre et, durant les deux ans qui suivirent, elle s’évertua à me rendre la mienne, en m’aidant à recoller les morceaux.

Je souffrais encore de la perte de Guillaume, mais, dans un minuscule espace intérieur, une petite partie de mes nombreuses plaies commençait à être pansée, une à une. À notre première rencontre, ses paroles réconfortantes m’avaient apporté les premiers soins d’urgence. Désormais, le traitement se déroulait au long court. Mais, à l’inverse d’un médicament à libération prolongée qui n’aurait été efficace que quelques heures, la thérapie ne se contentait pas de masquer les symptômes. Elle soignait mon âme en profondeur. D’ailleurs, je ne prenais plus du tout de cachetons. Après l’arrêt réussi des somnifères lors de ma seconde grossesse, je cessai définitivement de prendre des anxiolytiques.

Je pus en finir avec cette camisole chimique parce qu’après chaque rencontre, je revenais à Nantes le cœur un peu plus apaisé et, entre chaque séance, les effets positifs perduraient pendant des jours. Notre travail portait ses fruits, j’allais globalement mieux. Même si je demeurais boulimique, mois après mois, je réduisis les crises en les espaçant au maximum. Galvanisée par ces résultats encourageants, je retournais toujours voir Marianne, l’impatience et l’envie d’avancer chevillées au corps, plus motivée que jamais à me débarrasser de mes démons intérieurs. Je ne manquais jamais aucun rendez-vous.

Deux axes essentiels participèrent activement à mon évolution durant ces deux années : la thérapie d’un côté, le développement personnel de l’autre. Dans le premier cas, un interlocuteur extérieur devait intervenir, mais dans le second, j’étais seul maître à bord. Qu’importe la situation, la guérison vient toujours du patient, de son investissement et de sa volonté. Et la mienne était féroce. J’étais déterminée à m’en sortir.

Ma fille rentra en maternelle et je profitai de son absence pour travailler. Je recevais sur ces heures de classe, entre 9h et 16h30. Je travaillais à gagner de l’argent, comme d’habitude, mais désormais, je travaillais aussi sur moi, une nouveauté. Entre chaque massage érotique, je plongeais dans un livre. À peine en avais-je fini un qu’un livreur Amazon m’en déposait un nouveau. Il y avait tellement de références que c’était difficile de choisir, mais au fur et à mesure, certains écrivains se détachèrent du lot. Parmi mes auteurs de prédilection, il y avait toujours Neal Donald Walsh, dont je lus tous les bouquins, auquel s’ajoutèrent Wayne Dyer, Joe Dispenza, Florence Scovel-shinn, Tony Robbins, Esther et Jerry Hicks, Ronda Byrne, ou encore Byron Katie, pour ne citer qu’eux.

Je lisais tout le temps. En journée, entre deux clients ; après vingt heures, dès que ma fille était couchée ; le week-end, quand elle était chez son père. Je n’avais presque plus de vie sociale mais je m’en fichais. Cela ne m’intéressait pas. Je préférais profiter de chaque minute disponible pour m’améliorer et travailler à devenir une autre.

À cette époque, rien ne me passionnait plus que la physique quantique et les lois scientifiques et spirituelles qui régissaient l’être humain. Le domaine était vaste, mais ça ne me faisait pas peur. J’avais une soif d’apprendre incommensurable. Malgré mon côté perché, j’étais une intellectuelle, rationnelle et pragmatique, qui avait besoin d’explications pour cheminer. Pour guérir, je ne me voyais pas faire des incantations vaudous ou aller fumer de l’ayahuasca dans la Cordillère des Andes en parlant à mes ancêtres lointains. Ma progression spirituelle nécessitait de comprendre les principes de base de notre fonctionnement, dans toutes nos dimensions, afin de les mettre en application. Tant que je ne les maîtrisais pas parfaitement, je continuais à dévorer des lignes.

Je tirais de réels bénéfices de cette période de recherches. Plus j’emmagasinais d’informations, plus j’avais le sentiment de développer mon pouvoir. Le savoir me rendait puissante. Chaque découverte me réjouissait et ajoutait une nouvelle corde à mon arc. Il faut voir ma bibliothèque actuelle, reliquat de cette époque. Tous les livres ont été stabilotés à foison, crayonnés en tous sens, et chaque page blanche de début ou de fin d’ouvrage a reçu mes commentaires et mes pense-bêtes. J’ai passé un temps considérable à décortiquer chaque concept, pour en extraire la substantifique moelle.

Parmi les lois qui régissent l’Univers, ma préférée était celle appelée « loi de l’attraction ». Je l’étudiais en long, en large et en travers. J’aimais sa logique implacable :

Tu attires à toi ce que tu es.

Qui étais-je ? Puisque nos pensées créaient notre réalité, il était facile, en regardant ma situation actuelle, de deviner ce que j’avais pensé de moi toute ma vie. Une fois le constat établi, plutôt que de grimacer, il fallait corriger le tir. J’aurais pu me désespérer de la tâche à accomplir, car le tableau était loin d’être glorieux :

34 ans

Célibataire

Boulimique

Prostituée

Mais ce fut tout le contraire. J’aimais le challenge que représentait cette introspection. Le postulat de départ de cette loi était d’identifier ce que l’on souhaitait vraiment de la vie pour l’attirer à soi. Je devais donc clarifier mes intentions. On dit souvent que pour savoir où l’on va, il faut se rappeler d’où l’on vient. Mais il est tout aussi important de savoir ce qu’on l’on attend réellement pour savoir où aller. C’est comme une feuille de route. Sans objectifs à atteindre, pas de direction à prendre.

J’avais le sentiment d’ouvrir la première page d’un nouveau livre et de pouvoir y écrire tout ce que je désirais être ou avoir. C’était comme rédiger une lettre au Père Noël. Lorsque je plongeais dans ces exercices de visualisation écrite, je ressemblais à ma fille à l’approche du 25 décembre. Le stylo bic enfoncé dans la bouche, les yeux levés au ciel, j’étais impatiente et enthousiaste à l’idée de recevoir tout ce que j’allais lister. Lorsque je m’y attelai, on ne m’arrêtait plus. Je décrivais chacun de mes désirs sur des pages et des pages, les détaillant avec exactitude, qu’ils soient terre-à-terre ou plus farfelus.

Les mois passant, je commençais enfin à oser mettre sur papier un de mes anciens rêves qui, soudain, semblait pouvoir devenir réalité : 

J’aimerais écrire.

Après tout, pourquoi pas ? D’autres l’avaient fait avant moi. D’autres étaient partis de rien et avaient fini au sommet, inversant complètement la tendance de leur existence à un moment donné. N.D.W, par exemple, s’était retrouvé SDF avant d’écrire sa trilogie et de devenir multimillionnaire. Et que dire de Byron Katie, une américaine incroyable, dont j’avais découvert les extraordinaires ouvrages ? Cette ancienne obèse, boulimique hyperphagique, avait connu l’éveil et, du jour au lendemain, avait radicalement changé de vie. Depuis, devenue prophète en son pays, elle « prêchait la bonne parole », et diffusait son message à qui voulait l’entendre, sans jamais forcer ou contraindre quiconque à adhérer à ses positions.

D’années en années, de lectures en lectures, je découvrais que des tas d’individus lambdas revenaient de loin et profitaient de cette seconde chance qui leur était offerte de se réaliser, pour communiquer aux autres l’espoir d’une vie meilleure. J’étais très bonne cliente de tous ces discours optimistes, pour autant, je n’étais pas d’une candeur absolue non plus. Même si j’appréciais suivre le parcours de ces personnalités passionnantes, je conservais mon libre arbitre. Chacun avait son chemin et je n’escomptais pas calquer le mien sur celui d’un autre. J’avais assez de recul pour m’inspirer de ces gens sans tomber dans le fanatisme spirituel qui nous conduit à commencer toutes les phrases par : « Byron Katie a dit que... »

Byron Katie était Byron Katie et j’étais moi. Et je savais que, si nos trajectoires pouvaient être similaires, les réponses aux problèmes qu’elle avait rencontrés n’allaient pas forcément être les miennes. Je prenais ce que j’avais à prendre dans chaque bouquin, chez chaque personnage public, dans chaque documentaire ou biopic, ou à l’occasion de chaque stage que j’entreprenais. Et puis je faisais ma cuisine.

Exactement comme lorsque je m’installais derrière les fourneaux, je ne suivais jamais la recette à la lettre. Je piochais à droite et à gauche ce qui résonnait en moi et laissais de côté les ingrédients dont je ne percevais pas l’utilité. Personne ne devait me dire ce que j’avais à faire ou à penser. Cela ne dépendait que de moi et de ma sensibilité. Je me voulais malléable, ouverte aux nouvelles idées et aux concepts novateurs, mais pas éponge imbibée qui ramassait tout et n’importe quoi. Je possédais un cerveau en parfait état de marche et comptais bien l’utiliser à bon escient. J’avançais ainsi, influençable mais pas dupe.







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