Chapitre 8 : bouge !

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Trempé jusqu’aux os, Théoxane descendait les marches du grand escalier, quittant avec regret le toit de la septième tour où il n’avait retrouvé que le vent. En poussant la porte de son petit appartement, idéalement situé dans une station qui n’était pas la sienne, il découvrit Andréas qui l’attendait. Celui-ci avait finalement choisi de quitter tout ce luxe qui donnait à son allure sauvage un caractère primitif. La déception du jeune homme fit place à une colère jusqu’ici endormie, mais cette dernière fut chassée par un sursaut de maturité inattendu qui le poussa à s’asseoir.

Les deux colocataires, posés l’un à côté de l’autre, se regardèrent longuement avant d’oser échanger un mot. Puis ils se permirent soudain à parler de Rubie, tandis que le salon brillait pourtant par son absence, s’imaginant savoir mieux qu’elle ce qu’elle pouvait penser. Ils se faisaient les avocats de ses ressentiments sans en avoir goûté la subtilité, jouant avec des cartes qui n’étaient pas les leurs. Est-ce stigmatiser que de dire qu’ils arboraient là une attitude débordante de masculinité ?

- Mets-toi à sa place, déclara Théoxane, elle n’a plus que toi au monde, elle ne peut pas se permettre de te perdre. Puis tu ne peux pas nier que tu es le premier à t’être mis en danger.

- Peut-être, mais est-ce que ça lui donne le droit de me reprocher des erreurs qu’elle s’empresse de reproduire ? questionna Andréas, le regard indigné. Qu’est-ce qu’elle croit, que je ne tiens pas à elle ? Tout ce que j’ai toujours fait n’avait pour unique but que de la protéger ! Je l’ai promis, je l’ai même juré à notre mère alors qu’on était en train de l’enterrer et aujourd’hui Rubie m’en veut de tenir cette promesse ! Si je voulais gagner ce combat, ce n’était pas pour la gloire ou je ne sais quoi d’autre, c’était pour garantir sa sécurité.

- Parce que tu crois que ta mort aurait garanti sa sécurité ?

- Je t’en prie, s’agaça le jeune homme, je suis pas mort, arrête avec ça !

Il ne se rendait décidément compte de rien.

- Tu lui dois la vie espèce d’imbécile ! s’exclama Théoxane en se relevant. Sans les pouvoirs de ta sœur, ce serait Emeulus qui serait sorti victorieux de cette putain d’arène ! C’est facile d’utiliser les Condors pour justifier toutes tes conneries, sauf que ça fait dix-sept ans qu’ils font leurs rondes sans jamais tomber sur elle, et ce n’est pas un simple tour de passe-passe qui la démasquera. Tu devrais faire confiance à Rubie et lui parler plutôt que de la garder en cage, elle pourrait te surprendre.

- Merci de me rappeler que tu la connais mieux que moi, dit-il en s’allongeant sur le canapé désormais vidé d’une présence encombrante.

- Si tu savais ranger ton orgueil ne serait-ce que cinq minutes, peut-être que ce ne serait pas le cas.

A ces mots, Théoxane se dirigea dans la cuisine. Il sentait la colère bouillir à l’intérieur de son corps, comme une boule de feu coincée dans son thorax qui l’empêchait de respirer. A bout de souffle, il ouvrit la fenêtre afin de reprendre de l’air. Tout était calme, trop calme pour un retour d’arène. D’épais nuages brouillaient le ciel tandis que le monde semblait s’être rendormi. Il se laissa quelques minutes pour profiter de la sérénité ambiante, lorsqu’il aperçut une lueur brillant dans le lointain.

- Mec… lâcha-t-il d’une voix chancelante. Mec !

Sans prendre le temps d’essayer de comprendre, Andréas courut le rejoindre.

- Qu’est-ce qu’il y a ? demanda-t-il à peine eut-il franchit l’embrasure de la porte.

- Je retire tout ce que je viens de dire, tu avais raison, ils sont là !

Dans la seconde qui suivit, Andréas envoya valser quelques casseroles et se jeta sur la fenêtre. Devant lui se dressaient désormais d’énormes oiseaux dorés encuirassés, battant des ailes à la vitesse d’un ouragan. On les appelait les Condors, et il savait pertinemment d’où ils venaient.

- Où est Rubie ?

- J’en sais rien.

- Comment ça t’en sais rien ?

- Elle n’était pas sur le toit…

- Alors débrouille-toi pour la trouver et barrez-vous d’ici !

Mais le jeune homme ne réagit pas, paralysé par la peur. Andréas attrapa un verre d’eau et lui balança à la figure.

- Bouge !

Trempé, il s’élança à travers le couloir, laissant son ami seul et toujours blessé face à ces colosses aériens. Entrainé depuis l’enfance à ce genre de situation, Andréas savait exactement ce qu’il devait faire. Il retira la chevalière qu’il portait à son majeur, un faucon argenté aux yeux rubis, et la dirigea vers la fenêtre entre-ouverte. Instinctivement, il ferma les yeux tandis qu’un éclair rouge vint déchirer le ciel. Quand il les rouvrit, les Condors avaient disparu.

L’adrénaline retomba, et le jeune homme reprit peu à peu conscience du monde. A mesure qu’il retrouvait ses sensations, il se mit à suffoquer, son cœur se déchainant à l’intérieur de sa poitrine. Pour la première fois de toute sa vie, il avait réellement eu peur. Doucement, il se laissa glisser contre le mur, s’octroyant quelques minutes de répit afin de reprendre son souffle. Malheureusement pour lui, le calme ne fut que de courte durée. Rubie était quelque part, dehors, et il devait absolument la retrouver… la retrouver avant eux.

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