Auguste

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La fête battait son plein au Royaume. Depuis une semaine, les bals se succédaient. Jean espérait que son fils Auguste daignerait enfin s'intéresser aux jeunes femmes qui le courtisaient. Il aurait bientôt vingt ans et n'avait toujours aucune promise. Le vieux Roi se faisait un sang d'encre. Il voyait défiler les demoiselles au rythme des jours qui le poussaient inexorablement vers la cérémonie d'anniversaire, celle qu'il se réjouissait de vivre depuis des années.

Auguste parvint enfin à s'extirper de la salle de bal. Il étouffait. Il en avait assez de ces filles qui se pavanaient devant lui, l'embaumaient de leurs parfums mielleux et qui jacassaient si fort qu'il en avait mal à la tête. Son père multipliait ces fêtes dans l'espoir qu'il se fiance avant ses vingt ans. Mais Auguste se fichait complètement d'être marié. Ce qu'il voulait c'est être libre. Libre de chasser, libre de sillonner le pourtour des falaises maudites dans l'espoir de percer les histoires ancestrales qui pesaient sur sa famille depuis des années. Et pourquoi pas dénicher ce fameux trésor dont tout le monde parlait.

Le prince descendit dans les jardins qui le conduisaient à la forêt domaniale. Il avait besoin de s'éloigner de cette atmosphère pesante et de cette musique entêtante pour respirer l'air boisé de la futaie. Alors qu'il s'aventurait au milieu des bois, un craquement attira son attention. Auguste s'avança lentement mais la créature qui se dissimulait dans la pénombre s'enfuit à toute allure. Le jeune prince tenta de lui courir après mais retardé par son sursaut de surprise et par l'obscurité qui avalait la forêt, Auguste perdit sa trace.

Les soirs suivants, le futur roi s'éclipsa de la salle de bal et s'aventura dans la forêt pour guetter la créature qu'il avait croisée quelques jours plus tôt. Mais elle ne revint pas...
Alors qu'il commençait à se demander s'il n'avait pas rêver de cette apparition, un craquement retentit non loin de lui. Auguste se redressa lentement et d'un pas feutré s'avança vers l'arbre derrière lequel se cachait la silhouette qui l'observait. Celle-ci tenta de s'échapper à nouveau mais le jeune homme la retint par le bras.

  • Attends ! Ne pars pas !

La jeune fille se débattit en vain.

  • N'aie pas peur, je ne te veux aucun mal ! Je te lâche d'accord ? Mais ne t'enfuis pas.

Le prince relâcha sa prise.

  • Je m'appelle Auguste et toi ?

L'étrangère hésita un instant avant de répondre timidement :

  • Niniel.

Sa voix était douce et chantante, différente de toutes celles qui résonnaient dans ses oreilles depuis des jours.

  • Que fais-tu au beau milieu des bois en pleine nuit ?

Prise en faute, la jeune fée ne sut quoi répondre. Au loin, des voix crièrent le prénom du prince.

  • Viens ! Sauvons-nous ! cria t-il en attrapant la main de Niniel pour l'entrainer plus loin dans la forêt.
  • Auguste !
  • Vite, vite ! chuchota le prince à l'adresse de la fée qui se mit à rire derrière lui.

Au bout de quelques minutes, les deux jeunes gens arrivèrent au ruisseau qui s'étalait devant les falaises maudites. Auguste se laissa choir, essoufflé par leur intrépide fuite et Niniel s'assit doucement près de lui. Profitant de la lueur de la lune, le prince se mit à détailler la jeune fille à ses côtés. Elle ne ressemblait à aucune des femmes qu'il côtoyait depuis plusieurs jours. Son teint opalescent était auréolé de longues mèches retenues en un chignon couronné de tresses argentées. Des diamants parcouraient ses nattes et miroitaient sous l'éclat de la lune. Elle tourna la tête vers lui dévoilant des lèvres rosées et un regard azuré rehaussé de cils poudrés de neige. Auguste en resta interdit. Jamais il n'avait vu pareille beauté. Lui qui fuyait l'Amour et les femmes en général, dut bien admettre que cette fille ne le laissait pas indifférent. Ils restèrent ainsi l'un à côté de l'autre jusqu'à ce que l'Aurore perce le jour. Auguste qui s'était assoupi, se réveilla seul. L'inconnue avait disparu. Mais chaque soir, les deux jeunes gens continuèrent de se retrouver dans la forêt avant d'aller profiter ensemble du clair de lune au bord du ruisseau.

Auguste faisait beaucoup rire Niniel qui l'écoutait avec intérêt et passion. Il lui racontait les bals, imitait les donzelles qui paradaient devant lui, lui confessait la peur de son père de ne jamais le voir se marier et l'amitié qui le liait à Ferdinand. Il lui parlait de ce qu'il aimait, de ces légendes ancestrales qui hantaient le royaume et suscitaient sa curiosité.

  • Un jour je découvrirai ce qui se cache derrière ces falaises et mon ancêtre sera vengé !

Niniel ressentit une décharge électrifier tout son corps au moment où elle l'entendit prononcer ces paroles. Auguste était tel qu'elle se l'était figuré le jour où elle l'avait vu pour la toute première fois. C'était un homme ambitieux, acharné et persévérant. Elle savait qu'un jour ou l'autre il obtiendrait ce qu'il désirait. Elle attendit qu'il se soit assoupi et regagna l'antre de Ryu, une pointe d'amertume au fond de la gorge. Continuer de le fréquenter n'était bon ni pour elle ni pour son peuple. Mais le cœur a ses raisons que la raison ignore : Niniel était amoureuse.

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