Interlude [4]

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[NB : cet interlude contient des infos qui contredisent l’interlude précédent. C’est une erreur de scénario, l’interlude d’avant est caduque. Tout cela sera aplani à la correction (en m’excusant pour la gêne occasionnée)]

***

La contrebasse, c’est pas l’instrument le plus compliqué du monde : suffit d’avoir un bon doigté, le sens du rythme et l’oreille pour les octaves bien basses. C’est comme piloter un coucou volé, ça ne s’oublie jamais.

Par chance, on avait repris les bonnes habitudes, avec Tank, de jouer quelques ritournelles pour les clients du bar. C’est sûr qu’en sortant de détention, il nous a fallu un peu de temps pour nous retrouver, avec la Grande Dame mais, au moment de me présenter au Brigadier, on était déjà rabibochés depuis un bail. J’étais en mesure de lui faire fredonner un air correct.

L’autre obstacle à mon embauche, c’était la neige – et Hibenquicks. Entre l’une qui n’en finissait pas de tomber et l’autre qui n’en finissait pas de jouer au plus con, les cheminots avaient fini, eux, par se mettre en grève. Un fait assez exceptionnel au sein de la Société, m’avait-on dit. Depuis que l’ensemble du réseau ferroviaire avait été confié à la Compagnie Interdimensionnelle, les rébellions avaient été enterrées en même temps que les querelles entre compagnies concurrentes. Et pour bien s’assurer qu’il y aurait toujours de la main d’œuvre sur le pont, le président de la CFIS n’avait pas lésiné sur les privilèges. Ses employés étaient réputés pour être les ouvriers les plus gras et les plus fortunés du multivers. Alors forcément, quand quelqu’un décidait de les prendre pour de la merde… Bref, avec ça, c’est tout Vambreuil qui s’est retrouvé à l’arrêt. Certes, le Brigadier n’était pas à cela près, vu qu’il ne tournait déjà plus par manque d’affluence et, depuis peu, par manque de personnel. Pourquoi recruter quand on est considéré comme un service « peu vital » pour l’activité locale, en ces temps de disette ?

C’est à la faveur du concert au Vivarium que j’ai pu être engagé. L’affaire s’est montée du jour au lendemain et Lenoir avait chargé sa régisseuse de recruter fissa des musiciens prêts à l’emploi. Comment t’expliquer que la situation n’a pas joué en sa faveur ? À cause ou grâce à toute cette merde, Volodie n’a pas pu compter sur son vieux réseau armorandais qui, de toute façon, en avait soupé de ses manières de duchesse. Obligée de se rabattre sur des gens du coin, quitte à réengager sans le savoir des truands notoires – et je ne parle pas de moi quand je dis ça ! Le bouche à oreille à partir de personnes à peu près fiables lui a cependant évité de refaire la même erreur.

Commençant par sa propre fille, qui trépignait depuis perpète avec son violon et ses quenottes à rayer le parquet, dame Alma a cru bon de réunir la fratrie Pinketts dont les sœurs, Holly et Polly, faisaient déjà du bon boulot, respectivement comme serveuse et danseuse. Je n’ai pas besoin de te dire ce que je pense de ce choix de recrutement, je pense que tu le sais très bien. À part ce tocard de Sullyvan, elle a pu compter sur les Tobias, anciens membres d’une fanfare avec laquelle ils avaient fait sécession pour une raison que j’ignore toujours, et qui avaient atterris à Vambreuil après avoir échoué à trouver d’autres oreilles à casser. Ajoute à cette joyeuse clique la vieille Carméla-la-narco et ton serviteur, et le compte était bon. Au passage, c’est en auditionnant devant une salle pleine de Volodie seule que j’ai touché du doigt ce que devaient ressentir les frangines qui venaient nous raconter leurs péripéties avec des vieux bourges de quatre décennies leurs aînées. Pas de doute que ça ait pu jouer en ma faveur, même si je préfère croire que mes talents de musicien lui ont suffi.

Le lendemain de mon embauche, on était tous réunis au Brigadier pour la première répétition. Volodie s’est indignée quand elle a su que je ne savais pas lire une partition, puis s’est franchement mise en pétard en constatant qu’à part sa chère fille et les trois fanfarons – encore que malaisément – personne ne savait. Faut dire que cette greluche ne m'avait pas posé la question à l’entretien, même si j’aurais sûrement menti, comme avait dû le faire Sully et Carméla. L’affaire joua en la faveur de Valentina qui fut nommée cheffe d’orchestre pour l’occasion, avec pour mission de nous apprendre les différents airs prévus pour le concert. Au bout d’une dizaine de séances menées tambour battant, on était plus ou moins en mesure de faire répéter les danseuses. La Marquise a, en revanche, été la grande absente de ces petites communions jusqu’à la veille du grand soir. Ça t’énerve si je te dis que j’ai l’ai tout de suite trouvée très belle ? Console-toi : je n’ai jamais eu la prétention de lui faire la cour, ce qui ne m’a pas empêché d’espérer un peu d’attention de sa part. Ça aussi, je sais que ça t’énerve, mais que veux-tu ? L’orphelin que je suis a consacré sa vie entière à se chercher une mère, sans jamais rien trouver que de la déception. Et dans le cas d’Aliane, de lourds remords.

Volodie n’a pas eu le nez si creux que ça en me recrutant. C’est ma condition et ma place au Brigadier qui ont attiré sur moi l’attention du Magicien.

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