La salle où Naïa venait d’entrer était un contraste saisissant avec la forêt luminescente d’Yllion-9. Le dôme noir extérieur laissait place à un intérieur fait de verre liquide, d’écrans flottants et de lumière bleue diffuse. Les murs eux-mêmes semblaient vibrer doucement, comme une membrane entre deux mondes.

Teks s’arrêta un instant.

— Ce lieu n’est pas seulement une archive. C’est une prison… et une épreuve.

Naïa plissa les yeux.

— Une épreuve de quoi ?

Le robot haussa les épaules mécaniques.

— Pour entrer dans la connaissance des Aelari, il faut d’abord traverser leur mémoire. Leur esprit. C’est une sorte de labyrinthe mental. Certains s’y perdent à jamais.

Une voix résonna dans la pièce. La silhouette bleutée, l’hologramme féminin, apparut de nouveau.

— Héritière, si tu souhaites comprendre, tu dois accepter l’épreuve. Le labyrinthe est ton passé, ton futur et ce qui n’a jamais été. Prête ?

Naïa n’eut pas le temps de répondre que le sol sous ses pieds se déroba.

Elle tomba dans une obscurité douce, enveloppante, comme dans un rêve profond.

Quand elle rouvrit les yeux, elle était dans un couloir sans fin, dont les murs étaient recouverts d’écrans. Mais ces écrans ne montraient pas des images. Ils montraient des souvenirs.

Les siens. Ceux qu’elle croyait connaître.

Elle vit son enfance sur Vega 17, la maison de son père, le sourire de sa mère. Puis, brusquement, les scènes se déformèrent. Des images d’un autre temps apparurent : des vaisseaux flottants, des villes de cristal, des figures encapuchonnées parlant une langue inconnue.

Elle avança dans ce corridor, fascinée, terrifiée.

Chaque souvenir était une porte. Elle ouvrit une.

Un visage lui apparut : un homme qu’elle n’avait jamais vu, mais qui portait une ressemblance troublante avec elle.

— Qui es-tu ? demanda Naïa.

— Je suis le gardien de ta mémoire, répondit une voix calme.

— Pourquoi est-ce que je ne me souviens pas de toi ?

— Parce que ta mémoire a été scellée. Il y a des choses que l’esprit humain ne peut pas supporter. Mais le cristal que tu portes est la clé.

Naïa serra le cristal dans sa main. Une chaleur douce se répandit dans tout son corps.

— Montre-moi, dit-elle.

Le couloir se transforma en une vaste place, où des silhouettes dansaient autour d’un feu azur.

— Ce que tu vois là est l’histoire des Aelari, murmura la voix. Ils ont choisi de s’effacer pour protéger le savoir. Et ils t’ont choisie pour le réveiller.

Naïa sentit son cœur battre plus vite.

— Pourquoi moi ?

— Parce que tu es l’héritière, la descendante d’une lignée oubliée. Mais attention : le labyrinthe ne se contente pas de te montrer des souvenirs. Il teste aussi ta volonté, ta vérité.

Soudain, le sol trembla. Le feu s’éteignit.

Des ombres s’élevèrent, mouvantes, indistinctes.

— Ce sont tes peurs, dit la voix. Pour les affronter, tu dois savoir qui tu es vraiment.

Naïa recula, mais le couloir se rétrécit.

Des voix chuchotaient à ses oreilles, des accusations, des doutes.

Tu n’es qu’une voleuse.
Tu ne mérites pas ce pouvoir.
Tu vas tout détruire.

Elle sentit les larmes venir.

— Ce n’est pas vrai, murmura-t-elle.

Teks apparut à ses côtés, calme.

— Ne les écoute pas. C’est le labyrinthe qui essaie de te briser.

Naïa prit une profonde inspiration.

— Montre-moi la vérité.

Le sol s’ouvrit à nouveau. Cette fois, elle tomba dans une pièce blanche, immaculée.

Au centre, une stèle où était gravé un message :

« Seule la lumière de la vérité peut dissiper l’ombre du doute. »

Elle comprit.

Elle devait s’accepter. Accepter son passé, ses erreurs, ses forces.

Et surtout, accepter la responsabilité qu’elle portait.

Une silhouette émergea du blanc : une version plus jeune d’elle-même, avec des yeux remplis d’espoir.

— Je suis prête, murmura Naïa.

Le labyrinthe changea encore. Cette fois, elle se retrouva face à une porte massive.

Un dernier test.

Teks la regarda.

— Derrière cette porte se trouve ce que tu cherches. Mais une fois que tu entreras, il n’y aura plus de retour en arrière.

Naïa posa la main sur la poignée.

Elle l’ouvrit.

Et fut aveuglée par une lumière éclatante.

Lorsqu’elle rouvrit les yeux, elle était de nouveau dans la salle du dôme.

L’hologramme lui souriait.

— Tu as réussi. Tu as traversé le labyrinthe.

Naïa sentit que quelque chose en elle avait changé. Une force nouvelle, un savoir ancien.

— Que dois-je faire maintenant ? demanda-t-elle.

— Trouver le Conseil des Aelari. Ils détiennent la clé pour sauver ton monde.

Mais à ce moment précis, une alerte retentit.

Une voix mécanique résonna dans la station :

— Intrusion détectée. Système de défense activé.

Teks tourna la tête vers la sortie.

— Ils sont là.

Naïa serra le cristal.

— Je ne peux pas échouer.