Chapitre 36

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Ace n'était pas serein. Pas du tout serein. Quelle idée il avait eue d'accepter ! Tyler avait le don de lui faire faire n'importe quoi. Il n'y avait rien d'autre de plus satisfaisant intellectuellement que de faire la queue, un samedi soir, devant l'entrée d'une boîte de nuit ?

Comble de l'ironie, son ami était déjà à l'intérieur. Le gars avait eu l'audace de rentrer bien avant lui. Heureusement, la file avançait plutôt vite : le videur ne contrôlait que la limite d'âge.

Soudain, on le bouscula. Un type se retourna, s'excusa pathétiquement devant le regard mauvais du brun.

Il scruta le groupe derrière lui. Quatre hommes paillaient, sans doute déjà bien imbibés d'alcool. S'ils se trouvaient devant la Jouvay, James les renverrait illico presto. Ils portaient des tenues toutes plus osées les unes que les autres, Ace retint difficilement une moue de dégoût. Pourquoi les gens voulaient à tout prix se désinhibaient ?

Il croisa le regard du type qui lui était rentré dedans. Il le reluquait sans vergogne. Il détourna aussitôt la tête, mal à l'aise. Décidément, il aurait mieux fait de rester au lit.

Son tour arriva, il s'empressa de franchir le seuil. Il laissa le temps à sa vue de s’accoutumer à la pénombre et partit à la recherche de son ami. Tyler lui avait dit qu'il l'attendait près du bar.

Quand un rai de projecteur bleu illumina une tête aux cheveux clairs, Ace le reconnut aussitôt. Il soupira de soulagement tandis que son cœur s'affola dans sa poitrine. C'était souvent le cas en ce moment, à chaque fois qu'il posait les yeux sur son ami.

— Hey, s'écria-t-il quand il fut assez proche.

— Salut.

Tyler avait les yeux brillants. Il ne l'avait pas attendu pour commencer à boire. Son ami recula, le toisa, avant de soupirer.

— Je t'avais dit de t'habiller sexy.

— Ben, quoi ?

L'Espagnol se regarda. Il avait enfilé une chemise noire et un pantalon de la même couleur. Simple, classique, efficace.

— Tu sais bien qu'on n'a pas les mêmes goûts. Et je n'avais que ça d'à peu près potable.

— Ce n'est pas grave, tu es toujours à croquer de toute façon.

Il comprit immédiatement l'humeur de son compagnon. Il en fut certain quand il passa une main sur sa nuque et l'attira à lui pour l'embrasser.

Quand ils se séparèrent, Ace l'observa du regard et nota alors sa tenue. Il ne sut comment réagir devant l'extravagance celle-ci.

Tyler portait une fine chemise noire, entièrement transparente, qui laissait entrevoir sa peau claire. Elle était décorée de multitudes de petites strasses qui brillaient sous les projecteurs. Il avait enfilé un pantalon blanc ample d'une matière étrange, imitant le latex. Il était maquillé, bien plus qu'à la soirée du nouvel an, et une chaîne qu'il n'avait jamais vu ornait son cou.

— Alors, comment tu me trouves ?

Il tourna sur lui-même. Ace se mordit la lèvre.

— On n'a pas les mêmes goûts, répéta-t-il d'une voix douce.

Aussitôt, son visage se ferma les yeux et il baissa la tête.

— Je vois...

L'Espagnol se rendit compte de sa bourde. Il avait parlé trop vite, sans peser ses mots. Il n'avait pas voulu le blesser – bien sûr qu'il le trouvait beau, il l'était toujours à ses yeux et peu importe ce qu'il portait – mais jamais il n'aurait osé porter ces vêtements.

Il repensa au type qui l'avait bousculé plus tôt, et à sa troupe d'amis. Eux aussi, s'étaient habillés ainsi. Un étau comprima son cœur quand il les imagina admirer Tyler.

Ace posa les mains sur les hanches de son ami, juste assez haut pour faufiler ses pouces sous la chemise et caresser sa peau.

— Hé, ce n'est pas parce que ce que tu portes n'est pas mon style que je ne te trouve pas magnifique. Tu te rappelles ce que je t'ai dit la fois où nous sommes allés faire les magasins ? Un vêtement ne peut pas enlaidir une personne. Tu es beau, n'en doute jamais, souffla-t-il.

Il croisa le regard du blond.

— Et encore plus quand tu n'as pas d'habits, ajouta-t-il dans un souffle.

Le sourire réapparut sur ses lèvres.

— Merci.

Ace l'attira un peu plus contre lui et l'embrassa.

— Viens, on va commander.

Il le prit par la main et l’emmena au bar.

— C'est quoi ? demanda-t-il.

— Ça n'a pas grande importance. Le principal, c'est que ce soit de l'alcool.

Ils trinquèrent. Il l'imita et but d'une traite le liquide dans le petit verre. Il déglutit, grimaça quand l'alcool lui brûla la gorge et toussa.

— Toujours pas l'habitude, remarqua Tyler.

Il lui lança un regard noir ; le blond ne broncha pas.

Ils reprirent la même chose, et continuèrent avec des cocktails.

— Attends ! Il faut que je te montre quelque chose.

Tyler posa son verre sur la table et s'empressa de rejoindre une nouvelle fois le bar. Livré à lui-même, Ace observa autour de lui. Il n'était entouré que de la gent masculine. Il surprit un couple à s'embrasser à pleine bouche, un autre se frottait plus qu'il ne dansait. Il commença à se sentir mal à l'aise lorsqu'il croisa le regard d'un type qui se trémoussait.

Il fut soulagé quand son ami le rejoignit.

— C'est quoi ça, encore ? questionna-t-il en regardant son ami déposer tout son attirail sur la table.

— Tais-toi et écoute moi, pour une fois.

Il leva les yeux au ciel. Tyler fourra un verre rempli d'un liquide blanc dans sa main. Vodka, supposa-t-il. Puis, il posa les mains sur son torse et entreprit de déboutonner sa chemise.

— Tu fais quoi ? l'arrêta-t-il.

— Relax, je te demande pas de faire un strip-tease. Hors de question de faire profiter les autres, il n'y a que moi qui ai le droit à ce spectacle.

Il l'embrassa tandis qu'il continuait. Sous son regard suspicieux, il écarta les pans et dégagea son col. Alors il se pencha et lécha son cou. Ace sentit ses joues rougir et regarda autour de lui, mais personne ne semblait faire attention à eux. Ils n'étaient qu'un couple un peu trop proche parmi tant d'autres.

Tyler s'empara de la salière qu'il avait emmenée et versa du sel sur la trace humide qu'il avait créée. Quelques grains cascadèrent sur les tatouages de ses clavicules.

— C'est une technique très connue. Tout d'abord, il faut un peu de sel.

Il croisa le regard azur de son amant. Les jeux de lumière projetaient des ombres qui se mouvaient dans ses iris, les rendant presque vivants. Le brun frissonna.

— Ensuite, nous avons besoin d'un quartier de citron vert.

Il le prit entre ses doigts.

— Pour la variante, il faut que tu le tiennes entre tes dents.

Ace ouvrit la bouche comme un automate. Il ne le lâchait pas du regard, complètement hypnotisé par les gestes lents de son ami. Il expira quand il sentit un doigt frôler ses lèvres. Ce n'était pas le quartier de citron que sa langue voulait goûter.

— Enfin, nous avons besoin d'un shot de vodka pur.

Ace ferma les yeux quand il sentit la langue de Tyler remonter jusqu'en haut de sa mâchoire. Elle laissa une traînée mouillée et chaude sur sa peau. Puis, le blondinet prit le verre de ses mains, renversa la tête et l'avala avant de mordre dans le citron, frôlant du bout du nez celui d'Ace.

— J'aime beaucoup cette façon de faire, souffla-t-il.

Tyler gloussa. Il glissa ses mains sous sa chemise. N'y tenant plus, l'Espagnol l'embrassa fougueusement. Son haleine avec le goût de la vodka, ses lèvres, l'amertume du citron. Il sentit les doigts de son ami s'enfoncer dans sa peau avant de glisser jusqu'en bas de son dos.

— Je sais ce que tu cherches à faire, chuchota-t-il contre ses lèvres.

— Hmhm ?

Il soupira quand il lui mordit le lobe.

— Tu veux m'attirer dans tes péchés.

— Je n'oserai jamais corrompre un homme aussi droit que toi.

Ace lui fit les gros yeux quand il effleura son entrejambe de son genou.

— Allons danser.

Il l'entraîna à sa suite. Au moment où ils déboulèrent sur la piste, la musique changea. Tyler se colla à lui et commença à bouger son bassin. Subjugué par son aisance, Ace se laissa entraîner, posa ses mains sur les hanches du blond et se contenta de le regarder, tandis qu'il ne dansait pas vraiment. Il sentait le corps de son partenaire le frôler, il dut plus d'une fois contrôler les émotions qui menaçaient de le submerger. La tête lui tournait, les yeux du blondinet étaient hypnotisants. Il se laissa embrasser, quémandait ses lèvres, se gavait de ses caresses sur sa nuque, de ses paumes brûlantes sur son torse dénudé. Tyler allumait un brasier en lui, l'attisait, le nourrissait. Il mourrait d'envie qu'il l'éteigne, qu'il continue de jouer avec lui. Parce que son amant s'amusait avec lui, il en avait conscience, tout comme lui savait qu'il le tenait aux creux de ses mains. Ace s'en moquait totalement, qu'il fasse ce qu'il veut avec lui ce soir, il lui donnerait tout.

— J'ai très envie de toi, chuchota-t-il au creux de son oreille.

Tyler l'embrassa pour le faire taire.

— La corruption fût plus rapide que ce que j'avais prévu ! Je crois que j'ai une mauvaise influence sur toi.

— Je m'en fous, tu peux déteindre autant que tu veux sur moi du moment que je peux te sucer encore et encore.

Cette fois-ci, il plaqua carrément sa main sur la bouche de l'Espagnol, un air choqué au visage.

— T'es pas bien, toi !

Il la retira brusquement en riant quand Ace la lécha. Soudain, le brun l'attira à lui et l'emprisonna dans ses bras.

— Tu sens ? murmura-t-il.

Tyler hocha la tête, le regard accroché au sien.

— On rentre ?

Il lui sourit.

— Évidemment.

Il s'échappèrent rapidement de l’atmosphère étouffante de la boîte de nuit et Tyler appela un taxi.

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