– Papa, je suis prête ? On peut partir, demanda Céléna à son père.

– OK je préviens Sam.

– Pourquoi ?

– J’ai vu avec lui, il t’emmène, c’est même lui qui s’est proposé. Je me suis dit que vous apprécieriez de passer encore un moment ensemble avant qu’il regagne la France.

– Oh merci, c’est vraiment super.

Sur ces derniers mots, Céléna saisit sa valise posée dans le couloir, embrassa Emily, Ethan et Andrew qui s’étaient levés aux aurores. Puis ils la regardèrent disparaître dans l’embrasure de la porte. Sam l’attendait à côté de la Mini Cooper, impatient de cette escapade matinale.

– Comme ça c’est toi mon chevalier servant ? J’en ai de la chance.

– Je n’allais pas manquer cette virée et puis va savoir dans combien de temps nous aurons l’occasion de nous revoir.

Céléna déposa un bisou sur la joue de son ami, il avait raison, les mois à venir allaient être bien chargés et un séjour en France n’était pas au programme. Après elle pourrait envisager de s'y rendre un week-end. Bordeaux, en avion n'était pas si loin. Pour l’heure, elle voulait profiter de sa compagnie le temps du trajet.

– Bon c’est moi qui conduis à l’aller, tu feras le retour, proposa Céléna.

– C’est parfait, en plus ton père m’a demandé de faire le chauffeur pour votre invité.

– Dommage, je vais le rater, dit-elle avec un soupçon de regret dans la voix qui trahissait ses émotions.

– Peut-être le croiseras-tu à l’aéroport ?

Céléna sortit de la propriété, il faisait encore nuit. La route était déserte, seuls quelques lièvres s’aventuraient dans les prés. La lune se reflétait sur la rivière qui avait retrouvé son lit après l’avoir abandonné la semaine dernière. Les traces de son tourment resteraient encore quelques semaines bien présentes, rappelant à tous qu’elle était la maîtresse de son cours. Sam fixait l’horizon, perdu dans ses pensées et Céléna lança la conversation.

– Alors ça y est tu es prêt pour le grand départ ?

– Plus que jamais, je pense que c’est la première fois que je n'ai aucun doute et que je ne regrette rien.

– Comme je t’envie de cette belle assurance et surtout de votre histoire.

– Tu penses que nous allons trop vite ? demanda Sam avec inquiétude.

– Pas du tout, je vous connais bien tous les deux, et vous êtes faits l’un pour l’autre. Christophe ne me parle que de toi et toi de lui.

– Céléna, je peux te poser une question ?

– Bien sûr.

Sam hésita puis finalement se lança :

– Est-ce que tu aimais Martin ?

Céléna prit un temps avant de répondre

– Non en y repensant, pas comme tu aimes Christophe ou que mes parents s’aiment. Il était là, il m’a flatté pour mieux me séduire. J’ai été bien naïve cela ne se reproduira pas. Je n’attends pas cela d’un homme.

– Et hier soir ? poursuivit-il.

Céléna ne comprenait pas où Sam voulait en venir.

– Hugh t’a dévoré du regard toute la soirée, est-ce que lui ?

Sam la connaissait trop bien. Comment pouvait-il savoir qu’en rentrant il l’avait embrassé et qu'elle l'avait avec douceur repoussé ?

– Eh bien disons, que nous avons échangé un baiser, avoua Céléna du bout des lèvres.

– Et …

– Rien de plus.

– Non …

– Tu ne voulais pas ? insista Sam.

– Je ne sais pas …

– Tu sais ils ne sont pas tous comme Martin. Hugh a l’air gentil.

– Oui…

– Mais tu n’es pas prête ?

– C’est difficile à dire quand on est vraiment prêt.

– Et Hugh il l’a pris comment ?

– Comme un garçon bien, il a accepté et n’a pas insisté.

– Et aujourd’hui, tu …

– Je ne sais toujours pas.

Sam n’insista pas. En bon ami, il ne voulait pas mettre Céléna dans l’embarras. Ils firent une pause dans un petit café. Ils avaient encore un peu de temps et plutôt que de choisir l’inconfort de l’aéroport, ils optèrent pour un petit coin sympa dans Edimbourg. La Barantine Victoria avait le charme typique des boulangeries françaises qu'elle avait apprécié pendant ses deux années à Bordeaux. La petite boutique était une parenthése juste idéale pour passer un bon moment avec un ami autour de gourmandises. Ils commandérent un thé et quelques douceurs pour agrémenter ce petit déjeuner improvisé. Cette fois c'est Céléna qui engagea la conversation.

– Sam, est-ce que je peux te demander quelque chose moi aussi ?

– Oui, toujours.

– Le gars qui m’a aidé, tu l’as rencontré et …

– Tu veux savoir quoi ?

– Non rien laisse tomber.

– Il est parfait si tu me demandes mon avis.

Céléna n’ajouta rien, elle ne voulait pas en savoir plus finalement. Elle se leva pour récupérer la commande et revint les bras chargés un sourire aux lèvres.

– Allez je meurs de faim, régalons-nous.

Sam essaya à nouveau de reprendre la conversation qu’ils venaitent d'entamer mais Céléna lui demanda gentiment d’en rester là. Cela n’avait pas d’importance. Ils poursuivirent en parlant à nouveau du futur voyage de Sam à Bordeaux ou de celui de Céléna aux Etats-Unis. Puis vint l’heure de reprendre la route, pas question de rater son vol. Elle était attendue à Stornoway.

Avant de descendre de la voiture, elle se retourna vers Sam, l’embrassa et lui dit à l’oreille

– Ce sera une évidence et chacun de nous deviendra son essentiel. Voilà ce qu’est pour moi l’amour.

Sam la serra fort dans ses bras et après cette tendre étreinte regarda Céléna se fondre dans la foule.

Elle se présenta à l’accueil pour valider son départ. Elle prit les escaliers qui la menaient au hall d’embarquement. Et à nouveau une odeur chatouilla ses narines, ce doux parfum de chèvrefeuille, elle se retourna pour voir si … et personne le couloir était vide.