L'aube Écarlate
Le ciel noir semblait étouffer la terre, engloutissant jusqu’au moindre bruit dans un silence morbide.
Le vieux manoir Ravenhurst, énorme masse dévorée par le lierre, suintait l’humidité et la mort.
Une seule lumière vibrait dans la grande salle.
Un dernier battement de vie dans un lieu que le temps avait oublié.
Et puis vint le hurlement.
Un cri brut, écœurant, si déchirant que les murs tremblèrent.
Ils la trouvèrent là, Eva, pendue par ses propres intestins.
Ses tripes, arrachées à mains nues, étaient nouées autour d'une poutre grinçante.
Le sang pissait encore de son ventre ouvert, éclaboussant le parquet en longues traînées visqueuses.
Ses côtes, fracturées, jaillissaient comme des doigts brisés hors de son torse déchiré.
Ses yeux, hors de leurs orbites, pendaient sur ses joues dans un glissement humide, reliés par des nerfs tendus.
La pièce empestait le fer, la bile, et quelque chose de plus ancien, de plus sale.
Samuel était agenouillé sous elle, hurlant dans un spasme de terreur animale.
Ses doigts s'enfonçaient dans la chair molle du cadavre, essayant désespérément de la retenir, de lui rendre une forme humaine.
Son visage était maculé de sang, sa bouche dégoulinante d'humeurs et de chair déchiquetée.
Derrière lui, Lena vomissait bruyamment, des jets d’acide et de bile frappant le sol déjà souillé.
Ses bras tremblaient si fort qu’elle en perdit l’équilibre, tombant dans sa propre gerbe.
Tom reculait, les yeux exorbités, incapable de détacher son regard de l’horreur suspendue devant lui.
Nora se recroquevillait contre un mur, gémissant d'une voix brisée, incapable d'articuler un mot.
Alex, pâle comme un cadavre lui-même, pointa un doigt tremblant vers l’obscurité du couloir.
Une forme y glissait.
Une masse noire, informe, suintante.
Un râle grave résonnait, une respiration... trop humide, trop charnelle pour être humaine.
Puis, sans prévenir, une main énorme, déformée, griffue, jaillit du noir.
Elle s'abattit sur Samuel.
Le son que produisit son crâne en explosant fut dégueulasse : un craquement mouillé, suivi d'un "ploc" visqueux.
Des éclats d'os et de cervelle éclaboussèrent Lena et Tom.
Samuel s'effondra dans un bruit mou, agitant ses jambes par réflexe, tandis que sa mâchoire arrachée pendait à un lambeau de peau.
Le manoir semblait vibrer de plaisir.
Quelque chose chuchota, tout autour d'eux, une voix sifflante comme du verre brisé :
"Encore... encore du sang..."
Dans un accès de panique, Lena hurla et se précipita vers la porte...
Mais le sol sous elle se fendit comme une gueule.
Des dents de pierre surgirent, claquant autour d’elle, broyant ses jambes en une gerbe de sang et d'os éclatés.
Elle hurla, hurla encore, avant qu’une vrille de chair noire ne s’enroule autour de son cou et lui arrache la tête d'un coup sec, projetant un geyser de sang contre les murs.
Tom, glapissant comme un animal pris au piège, glissa dans la mare de viscères et se redressa couvert de fluides.
Nora, en état de choc, se mit à rire.
Un rire vide, aigu, presque enfantin.
Le plafond suintait du sang maintenant.
Chaque fissure des murs vomissait une liqueur noire et épaisse qui coulait sur le sol, imbibant leurs vêtements, collant à leurs peaux.
Dans la lumière mourante de la salle, le monstre avança.
Il n'était pas entier.
C'était une masse d'organes amalgamés, des bras griffus sortant au hasard d'une carcasse boursouflée, des bouches hurlantes ouvertes partout sur son corps.
Des morceaux d'anciens visiteurs semblaient encore palpiter dans son corps immonde.
Il s’approchait... lentement... inévitablement.
Et personne n’était prêt pour la suite.
Annotations
Versions