Chapitre 5

Une minute de lecture

Quand je suis descendu ouvrir le café ce matin, la rue était anormalement calme.

Pas un bruit de moteur. Pas un passant. Pas même un chien errant.

Je me suis frotté les yeux, pensant que j’étais en avance, mais non : l’horloge du clocher marquait bien huit heures.

À l’intérieur, tout semblait normal, presque trop normal.

Les tables étaient alignées comme je les avais laissées. Le percolateur ronronnait. L’odeur du café embaumait l’air.

Mais il n’y avait personne. Pas un client habituel. Pas un "bonjour Thomas" chanté depuis le trottoir.

À neuf heures, toujours personne. À dix heures, la même chose.
Je suis sorti sur la place et j’ai fait quelques pas.

La boulangerie était fermée. La pharmacie aussi. La supérette, portes closes, volets tirés.

Seule la lumière grise du matin filtrait entre les murs, donnant au village une impression de maquette oubliée. Où étaient-ils tous passés ?

Un frisson a couru le long de ma colonne vertébrale et je suis retourné dans mon café. Machinalement, j’ai attrapé un chiffon et ai commencé à essuyer le comptoir ; une manière comme une autre de donner un sens au silence.

C’est alors que j’ai vu, posé près de la caisse, un carnet.

Pas le mien. Un autre. Petit, usé, aux bords écornés.
Je l’ai ouvert. Il était rempli de noms. Des centaines de noms.

Certains me disaient vaguement quelque chose — d’autres, pas du tout.

En haut de la première page, griffonné d’une écriture nerveuse :

"Ne pas les oublier."

J'ai senti une lourdeur dans ma poitrine. Quelque chose m’échappait. Quelque chose que je n’étais pas censé comprendre.
Qui d'autre utilisait un carnet pour se souvenir des gens qui disparaissent, et pourquoi n'était-il plus là ?

Je suis resté là, le carnet dans les mains, à regarder mon propre reflet dans la vitrine du café.
La rue , derrière, était vide.

Et pour la première fois depuis longtemps, je me suis demandé si je n'étais pas le dernier.

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