II. Tempête en haute mer, la bataille pour la survie

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En ce début de soirée, Élise était confortablement installée dans son bureau à la brigade marine, absorbée par le volumineux dossier intitulé "Mer Obscure". Comme ses collègues aimaient si bien l'appeler. Lorsqu'un coup furtif résonna à la porte, elle s’ouvrit lentement, laissant échapper un léger grincement. Son collègue Jean se tenait là, arborant un sourire éclatant, visiblement porteur d’une bonne nouvelle.

- Laisse-moi deviner, Jean….Tu as enfin réussi à faire fonctionner le scanner du premier coup ?

- Presque, Elise. Ce n’est pas pour ça que je suis là, j’ai une nouvelle qui pourrait vraiment t’aider !

- Laisse-moi rêver… Tu sais comment transférer les photos des pièces à conviction ?

- Haha, pas tout à fait non plus… je suis toujours en train d'étudier ça !

- Allez.. accouche Jean. J’ai un boulot monstre avec cette affaire "Mer Obscure".

- Justement, j'ai du nouveau. Je viens de recevoir un appel de la Tunisie.

- Oh ? Et alors, qu'est-ce qu'ils veulent ? C’est encore une nouvelle piste qui va finir par capoter ?

- Pour cette fois, je ne pense pas. Notre suspect numéro un Rachid EL-Khaled, a été retrouvé mort abattu d’une balle sur la plage de Ghedhabna. Il n’y avait pas d’argent sur lui, juste un papier avec l'inscription *20h-01h*. Ah oui, il y a aussi une tente est présente sur la plage, avec des inscriptions liées à la pêche.

- Très intéressant tout ça. Cela ressemble à des horaires, sans doute liés à une opération d'immigration clandestine. Où exactement a-t-on retrouvé le corps ?

- Sur la plage de Ghedhabna, coordonnées exactes 35.30224777018683, 11.061450102435838. Elise ouvra une l’application de la carte satellite pour afficher l’emplacement exact sur son ordinateur.

- Alors, où te caches-tu… Ah, ce système est toujours aussi lent !

- Ne m'en parle pas je galère aussi…

- Ah, voilà ! Le corps a été retrouvé ici… et si j’en crois les données l'île la plus proche serait…. Après une longue minute de charge du logiciel. Roulement de tambour… Tadam, Lampedusa !

- Jean, appelle immédiatement Sofia du poste Poste 317/LAMP-IMM pour les prévenir d’une arrivée imminente de bateau de migrants !

~

Le capitaine Antonio scrutait l’horizon avec une attention particulière. Fort de ses années d’expérience en navigation en Méditerranée, il arbore un air préoccupé. Au loin, le ciel semblait se charger de nuages sombres, prêt à déverser un torrent de pluie et des vents puissants, comme si les divinités marines étaient en colère.

- Vincenzo, j’espère que tu n’as pas le mal de mer ?

- Pourquoi me poses-tu cette question ?

- Une tempête se prépare au loin, et elle semble bien costaud !

- Et merde… on ne va quand même pas couler avec ton vieux rafiot ?

- Sacrebleu ! Mon bateau, un vieux rafiot ? Il a affronté les tempêtes les plus terribles de la Méditerranée ! Ce rafiot comme tu dis, nous amènera à bon port. J’en suis certain.

- Si tu le dis, c’est toi le capitaine !

- On devrait peut-être prévenir les passagers que ça va secouer un peu d’ici une heure !

- Non, pas besoin, ils sont grands !

- Vincenzo, fort de mes expériences passées, je pense qu'il est sage de les prévenir. Lors d’une tempête, tout peut arriver, surtout pour ceux qui ne sont pas préparés à affronter une telle violence.

- On s’en fiche d’eux, c’est moi le boss maintenant que Rachid n’est plus là ! Continue à nous conduire à bon port, c’est tout ce qui compte, mon capitaine. De toute façon, on doit tous mourir un jour ou l’autre. Maintenant, plus un mot, sinon je les fais taire pour toujours dès qu'on pose pied sur la terre ferme."

- Très bien, boss…

~

Mariam, incapable de dormir, avait entendu la conversation entre le capitaine et l’assassin du passeur. Très inquiète de ce qu’elle venait d’entendre, elle décida de prévenir discrètement Ndeye et l’homme en face d’elle.

- Ndeye ? Réveille-toi ! Ndeye !

- Humm... répondit Ndeye d'une voix à peine audible, à moitié endormie.

- Ndeye, écoute-moi, j’ai quelque chose à te dire !

- Laisse-moi me reposer, Mariam, on en parlera plus tard... murmura-t-elle, la tête enfouie dans l'oreiller de fortune créé avec des vêtements.

- Non, on ne peut pas attendre ! J’ai entendu les deux hommes dans la cabine de pilotage. Une tempête s’approche, l’assassin du passeur ne veut pas nous prévenir, mais nous devons nous préparer au pire, d’après le capitaine. Lui, il a l’air de vouloir nous protéger !

Ndeye se redressa soudainement, le regard empli d’inquiétude. Elle scrutait les alentours, cherchant un moyen de se stabiliser, alors que le bateau commençait à tanguer légèrement. Le vent soufflait de plus en plus fort. Les premiers signes de la tempête se faisaient sentir. Elle attrapa une vieille corde de pêche qui se trouvait juste à côté de ses pieds.

- Mariam, tu es sûre de ce que tu dis ? demanda Ndeye, la voix tremblante mais déterminée. On doit avertir les autres avant que ce soit trop tard.

- Je suis certaine de ce que j’ai entendu. Mariam s’approcha d’elle, une lueur d’urgence dans les yeux. Le capitaine veut que nous soyons prêts à tout. Mais nous devons agir vite, avant que les autres ne s’en rendent compte trop tard.

Ndeye acquiesça d’un signe de tête, tout en ajustant ses vêtements pour se préparer à la tempête. Les nuages sombres au-dessus d’eux se rassemblent rapidement, obscurcissant le ciel étoilé qui marquait leur départ. La mer commençait à se déchaîner. Ndeye se tourna alors vers l’homme en face d’elle, décidée à lui annoncer la nouvelle.

- Monsieur, Monsieur, j’ai besoin de vous parler.

L’homme se retourna lentement, son regard dur et intense. En se tournant, son visage, marqué par une large cicatrice, se dévoila. Ndeye, surprise, marque un instant d’arrêt, les yeux fixés sur la déformation de sa peau.

- N’aie pas peur, dit-il calmement en lisant son étonnement. Je vais bien. Ce n’est qu’une vieille blessure que j’ai eue pendant la guerre civile en Libye. Je m'appelle Khalid

- Mon pauvre... Tu as dû tellement souffrir… et je m'appelle Ndeye murmura t elle, touchée par la dureté de son vécu.

- L'homme esquissa un léger sourire, bien que ses yeux trahissent une tristesse profonde.

- J’ai l’espoir de rejoindre une vie meilleure dans un pays libre, dit-il d’une voix grave, et peut-être pouvoir me faire opérer pour retrouver mon apparence d’autrefois.

- Je te le souhaite de tout cœur. Ndeye prit une profonde inspiration avant de se redresser. J’ai besoin de te dire une information importante.

- L’homme la regarda attentivement, un peu plus sur ses gardes.

- Oui, dis-moi, répondit-il.

- Une tempête se prépare, commença Ndeye, le ton grave. Mariam, la dame juste en face de nous, a entendu les deux hommes dans la cabine. L’homme avec lequel tu es monté ne veut pas qu’on soit au courant, mais le capitaine lui souhaite nous prévenir du danger. L’homme fronça les sourcils, une lueur d’agacement traversa ses yeux.

- Cela ne m’étonne pas de lui. C’est un sacré fripon, celui-là. L’homme le plus dangereux de la Méditerranée. J’espère qu’il se fera arrêter un jour ou l’autre... Il se tut un instant, puis fixa Ndeye plus sérieux. Que comptes-tu faire ? Ndeye prit un moment avant de répondre, pesant ses mots.

- Il faudrait essayer de trouver des gilets de sauvetage pour une éventuelle chute ou des cordes pour nous attacher au bateau, afin de ne pas tomber à la mer pendant la tempête. L’homme haussait un sourcil l’air pensif.

- Bonne idée, dit-il enfin. Mais je ne suis pas sûr qu’il y ait des gilets de sauvetage ici, et encore moins des cordes. Ndeye sourit légèrement, fière de sa trouvaille.

- Si, j’ai trouvé une corde. Essayons d’en trouver deux autres ! Il la fixa un moment, impressionné par sa détermination.

- D’accord, répondit-il, je vais t’aider à chercher. Mais il va falloir se dépêcher. Cette tempête ne va pas nous attendre.

- Mariam, va prévenir les deux hommes vers la cabine, je m’occupe des cordes avec Khalid !

Tous se précipitèrent à leurs tâches, cherchant à se préparer à l'inévitable. Le vent se renforçait, promettant une tempête d'une violence inouïe. Les vagues commençaient à déferler, secouant le bateau dans des secousses inquiétantes. L'horizon, déjà assombri par des nuages noirs engloutissant tout sur son passage. Ndeye et Khalid fouillent frénétiquement la poupe du bateau, à la recherche de cordes ou de tout autre matériel qui pourrait les aider, quand soudain, un cri déchira le tumulte de la tempête.

- À l’aide ! hurla une voix paniquée.

Ndeye tourna la tête à temps pour voir le jeune Nabil, glissant du ferry prêt à être englouti par une vague furieuse. Il tentait de se maintenir à une barre, mais la tempête était trop forte. Le bateau tanguait violemment sous la puissance des vagues. Nabil se battait contre la mer déchaînée, mais il semblait complètement impuissant face à la violence des éléments.

- Non ! s’écria Mariam, terrorisée, ses yeux écarquillés. Il va tomber !

Un cri de panique monta des passagers tandis que Nabil pris dans la houle, perdit prise et disparut dans l’obscurité des vagues.

Le bateau se pencha brusquement, projetant tout le monde dans un chaos total. Le vent hurlait et les vagues s’écrasaient avec une force aveugle envoyant de l’eau salée sur le pont. Le cri désespéré de Nabil englouti se perdit dans la tempête.

- C’est trop tard ! cria Khalid. Il a été emporté par le courant ! Espérons que les divinités marines aient pitié de lui !

Antonio le capitaine, Vincenzo et les passagers, hagards tentaient de se maintenir. Certains s’agrippant désespérément aux rambardes, d’autres rampant au sol pour éviter d’être projetés par les secousses. Le bateau tanguait à un angle inquiétant, menaçant de chavirer à tout instant. Le capitaine luttant pour garder le contrôle du navire, hurlait des ordres que le rugissement de la tempête rendait inaudibles.

- Vite, les cordes ! ordonna Ndeye à Mariam, qui se cramponna à une barre, luttant contre le vent. Il faut qu’on se lie les uns aux autres pour ne pas être séparés !

Les deux femmes se frayèrent un chemin à travers le chaos en s'enroulant les cordes autour de leurs tailles et les attachant solidement aux parties du bateau. Mais à chaque secousse, l’embarcation penchait un peu plus, menaçant de les engloutir dans la mer déchaînée.

Au loin, des éclats de lumière blanche frappèrent l’horizon, suivis de bruits assourdissants. Des éclairs frappaient la mer avec une violence frénétique, tel un déchaînement de foudre mythologique, comme si les dieux eux-mêmes déversaient leur courroux sur les eaux déchaînées. Ajoutant à la terreur ambiante, la pluie battait leurs visages avec une violence extrême. Soudain, un autre cri de douleur déchira l’air.

- Regardez ! Là-bas ! cria un Mariam, pointant du doigt une silhouette qui dérivait dans les vagues.

C’était Nabil qui avait été emporté. À moitié submergé, il flottait dans les eaux tumultueuses, incapable de se maintenir à la surface. Ballotté par les vagues comme une poupée de chiffon, la mer le tirait de plus en plus loin.

- Il est perdu ! s’écria Ndeye, les yeux remplis de désespoir. Nous ne pouvons rien faire pour lui maintenant.

Le capitaine, les traits tirés par l’effort et la fatigue, observa la scène d’un regard froid et déterminé. Il savait que la mer n’avait aucune pitié. Mais il n’eut pas le temps d’agir davantage. Un vent violent s’abattit sur le bateau, le faisant pencher dangereusement sur le côté. Un cri de terreur monta du pont, noyé dans le vacarme de la tempête. La mer faisait rage, et le destin des passagers était désormais aussi incertain que le fracas des vagues qui les engloutissent. Khalid s'agrippa à Ndeye et Mariam.

- Restez avec moi ! On va s’en sortir, cria-t-il par-dessus le vent !

Mais la mer était une bête furieuse, et personne ne pouvait dire de quel côté allait pencher la chance. Une énorme vague s’écrasa contre le bateau. Le faisant tanguer violemment. Dans la confusion Jorge, situé à la proue fût projeté par-dessus bord. Disparaissant dans l’obscurité des eaux déchaînées. Les passagers hurlèrent, certains tentant désespérément de se maintenir à ce qui pouvait les sauver. Ndeye et Mariam précipitèrent leur regard vers le bord du bateau, fouillant les vagues à la recherche de Jorge. Mais la mer semblait l’avoir déjà engloutie.

Le capitaine, accablé par la violence de la tempête, se battait pour garder le navire à flot. Le bateau se penchait dangereusement sous la force des vagues successives. Menaçant de se briser à tout instant.

- Il faut nous préparer au pire ! hurla-t-il par-dessus le vent. Accrochez-vous à ce que vous pouvez ! À travers la porte de la cabine qui venait de s’ouvrir, sous le regard sombre de Vincenzo.

Les passagers désemparés et terrorisés, cherchaient à s’accrocher aux cordages. Un d'eux se réfugia dans la cabine, mais personne n'est à l’abri de la fureur de la mer.Le bruit assourdissant du navire, tremblant sous le choc des vagues et de la pluie diluvienne, résonnait comme un cri déchirant au cœur de la tempête. Les passagers se cramponnent à tout ce qu’ils pouvaient. La mer semblait prête à engloutir le monde tout entier.

Le bateau, pris dans l’étreinte impitoyable de la tempête, luttait désespérément pour rester à la surface. Mais les vagues géantes le secouaient sans relâche, le traitant comme un simple jouet d’enfant à la merci de leur furie.

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