Les échos d'un passé troublant

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À ces mots, Kiran et Zena échangèrent un regard. Enfin. Enfin une véritable découverte. Le poids de la frustration accumulée au fil des jours s'évaporait, remplacé par une lueur d'espoir.

Eamon, quant à lui, sentit un frisson d'excitation parcourir son échine. Il fronça les sourcils, concentré.

—Ce symbole, peux-tu me le décrire ? demanda-t-il, sa voix vibrante d'optimisme.

Adam marqua une courte pause, cherchant ses mots.

—De ce que j'en ai vu... il est Esthérian, j'en suis persuadé. C'est compliqué à décrire, mais il s'agissait d'un cercle, avec une sorte de rosace en son centre.

Zena, perplexe, fronça les sourcils et intervint :

—Comment ça, compliqué à décrire ? Si tu l'as vu, tu peux nous en donner les détails.

La réponse d'Adam se fit plus hésitante, comme s'il se débattait avec ses propres pensées.

—Eh bien... le symbole a disparu... quand la porte s'est ouverte à mon contact.

Un silence pesant suivit cette révélation, rapidement brisé par la voix d'Eamon, qui s'éleva, pleine de surprise :

—Quoi ?! Ouverte, dis-tu ? s'écria-t-il, avant de reprendre d'un ton plus ferme et pressant. Souviens-toi des consignes, Adam ! Ne touche à rien, n'interfère pas ! Reste sur place et attends-nous. Compris ?

—Oui, Doc. Je vous attends devant la porte. À tout de suite, conclut Adam avant de couper la communication.

Il glissa l'intercom dans son sac, attrapa sa gourde et avala une gorgée d'eau fraîche, appréciant brièvement le soulagement qu'elle procurait dans cette chaleur accablante. Puis, prenant une grande inspiration, il s'assit sur un rocher, juste en face de l'immense ouverture qu'il avait révélée. Ses yeux ne quittaient pas l'antre sombre, son esprit oscillant entre émerveillement et une pointe d'angoisse. L'obscurité semblait presque vivante, et l'idée que quelque chose puisse en surgir faisait naître un frisson dans son dos.

Pendant ce temps, au sud, Kiran laissa éclater sa joie.

—Enfin ! Ouiii ! cria-t-il en sautant presque de bonheur. Sa voix, empreinte d'un enthousiasme retrouvé, résonna dans la zone rocailleuse. Allez, ne perdons pas une seconde ! Rejoignons Adam !

Eamon, partageant son excitation, hocha vigoureusement la tête.

—Prenez vos affaires. Nous devrions pouvoir le rejoindre en une heure environ. En route ! ordonna-t-il, rassemblant son matériel.

Le trio s'engagea sur le chemin du retour, leurs pas précipités soulevant de petits nuages de poussière rougeâtre. Alors qu'ils progressaient sous le soleil brûlant, Zena, dont la curiosité était piquée, s'approcha du docteur.

—Docteur, je peux vous poser une question ? demanda-t-elle.

Eamon tourna légèrement la tête, invitant d'un geste à poursuivre.

—Pourquoi avez-vous laissé Adam seul ? Son ton n'était pas accusateur, mais sincèrement intrigué.

Eamon esquissa un léger sourire.

—Le laisser seul n'était ni une punition, ni une tentative de l'écarter, comme toi ou lui avez pu le penser. Bien au contraire.

Zena fronça légèrement les sourcils, attentive.

—Adam a un talent naturel pour l'archéologie, reprit Eamon avec un sérieux empreint de fierté. Mais je voulais qu'il en prenne conscience par lui-même. Être seul, livré à ses propres instincts, permet parfois d'établir une connexion plus intime avec le site. Cela peut mener à des découvertes qu'on ne ferait jamais autrement.

Zena hocha lentement la tête, comprenant mieux la démarche du docteur.

—Je vois. Dans ce cas, c'était un test, en quelque sorte.

Eamon acquiesça.

—Oui, en quelque sorte. De plus... Adam est le seul à avoir trouvé un artefact Esthérian jusqu'ici. Cela ne peut pas être une coïncidence. Je voulais lui donner l'opportunité d'exploiter pleinement ses capacités. Et, entre nous, j'avais une entière confiance en lui.

Le regard de Zena s'adoucit. Elle jeta un coup d'œil à Kiran, qui marchait quelques pas en avant, encore emporté par son enthousiasme. Puis, reportant son attention sur le docteur, elle répondit avec un sourire complice :

—Vous aviez raison. Cette découverte prouve que vous aviez vu juste.

Eamon répondit par un simple hochement de tête, mais son expression en disait long. Malgré les défis, il sentait que l'expédition venait enfin de trouver sa raison d'être.

En arrivant sur les lieux de la découverte, le trio s'immobilisa instinctivement. Devant eux, Adam était assis sur son rocher habituel, scrutant attentivement l'entrée colossale qui se dressait face à lui. Mais ce n'était pas la vue d'Adam qui captiva d'abord leur attention : c'était l'imposante entrée, à moitié enfouie dans la falaise, qui dominait l'espace d'une aura énigmatique.

Un bref silence s'installa alors que leurs regards se croisaient, comme pour s'assurer qu'ils voyaient tous la même chose, qu'il ne s'agissait pas d'un mirage né de la chaleur écrasante.

Kiran, incapable de contenir son excitation, prit les devants et se précipita vers Adam, levant le bras pour attirer son attention.

—Adam ! On est là ! s'exclama-t-il.

Adam tourna la tête, un sourire soulagé se dessinant sur son visage.

—Ah, Kiran ! Vous voilà enfin ! Je commençais à croire que vous aviez décidé de me laisser ici pour toujours, haha ! plaisanta-t-il.

Eamon, suivant Kiran de près, posa une main ferme mais brève sur l'épaule d'Adam. Aucun mot ne fut échangé, mais ce simple geste portait en lui toute la fierté et la reconnaissance qu'il éprouvait envers son jeune protégé. Puis, sans attendre, le vieux docteur avança vers la porte, attiré par elle comme un papillon par la lumière.

—Eh bien, même pas un mot, Docteur ? lança Zena, un sourcil arqué, surprise par cette économie de paroles.

Adam, amusé, haussa les épaules.

— Laisse tomber, Zena. Ça fait des années qu'il attend ce moment. Il tourna la tête vers Eamon, dont l'enthousiasme débordant était presque palpable.

Kiran, qui ne perdait jamais une occasion d'assouvir sa curiosité, s'agenouilla à côté d'Adam.

—Alors, raconte ! Comment tu l'as trouvée, cette porte ? Demanda-t-il avec insistance.

Adam étira un sourire gêné.

—Franchement ? Un pur coup de chance. J'étais frustré, alors j'ai ramassé une pierre et je l'ai balancée sur un rocher. Quand j'ai entendu un bruit métallique, j'ai compris qu'il y avait quelque chose. Ensuite, j'ai suivi les indices. Tout était là, sous notre nez, depuis le début.

Kiran éclata de rire.

—T'imagines ? Si tu n'avais pas balancé cette pierre, on serait peut-être encore à gratter des cailloux au sud. Bon, ça veut dire qu'on peut entrer maintenant, non ?

Sans attendre de réponse, il se releva et se dirigea avec enthousiasme vers l'immense ouverture.

Le reste du groupe rejoignit rapidement Eamon, qui explorait la paroi rocheuse avec une concentration presque obsessionnelle. Il passait délicatement ses doigts le long du contour de l'antre béante, les yeux brillants d'émerveillement.

Zena, les bras croisés, l'observa avec un mélange d'amusement et d'impatience.

—Docteur, vous comptez caresser cette porte toute la journée, ou on peut entrer ? Parce que je parie que la véritable découverte se trouve à l'intérieur.

Eamon sursauta légèrement, pris au dépourvu. Il se redressa et passa une main nerveuse sur sa tête, ajustant son monocle.

—Hum, oui, pardon... Tu as raison. Excusez-moi, je crois que je me suis laissé emporter. Entrons.

—Let's go ! Lança Kiran, déjà prêt à s'élancer à l'intérieur.

—Non. La voix ferme d'Eamon arrêta Kiran dans son élan.

Le Neurorien se retourna, déconcerté.

—Comment ça, non ? protesta-t-il, visiblement déçu.

—Non, car ce n'est pas à nous d'y entrer en premier, répondit calmement Eamon, mais son ton laissait entendre qu'il ne tolérerait aucune objection.

Kiran plissa les yeux, méfiant.

—Et à qui, alors ? À Koros ? On s'en fiche, non ?

Eamon se tourna vers Adam, un sourire énigmatique sur les lèvres. D'un geste solennel, il tendit son bras gauche en direction du jeune Terrien, l'invitant à prendre les devants. —C'est à Adam d'y aller en premier.

—Moi ? Réagit Adam, surpris.

—Oui, toi, confirma Eamon avec un sérieux inébranlable. C'est ta découverte. L'honneur te revient.

Kiran haussa les épaules, un sourire amusé se formant sur son visage.

—Eh bien, si c'est une question d'honneur, je suppose que c'est toi le héros du jour. Vas-y, Adam.

Adam inspira profondément, son regard oscillant entre la porte béante et ses camarades. Il sentait sur lui le poids des attentes, mais aussi une étrange exaltation.

—Très bien. Si l'honneur est pour moi, alors allons-y ! Déclara-t-il avec détermination.

Sous les regards de ses compagnons, il s'avança lentement vers l'entrée. Il s'arrêta un instant au seuil de la porte, sortit une lampe torche de son sac, et l'alluma. Le faisceau lumineux perça les ténèbres, révélant une cavité métallique dont les parois scintillaient faiblement sous la lumière.

Adam soupira, son souffle résonnant dans l'immensité silencieuse. Il jeta un dernier regard en arrière, croisant les regards de ses compagnons qui l'encourageaient silencieusement.

Puis, levant son pied droit, il franchit enfin l'entrée, disparaissant peu à peu dans l'ombre mystérieuse de l'ancien édifice.

Adam avançait prudemment, la lampe torche tremblante dans sa main. Le faisceau lumineux balaya le couloir sombre qui se dévoilait pas à pas devant lui, glissant lentement de droite à gauche, comme s'il redoutait d'y croiser quelque chose. Ses premiers pas étaient hésitants, ses muscles tendus sous l'effet d'une nervosité palpable. Le silence oppressant de l'endroit semblait absorber chaque bruit, y compris le léger crissement de ses bottes sur le sol métallique.

L'air, auparavant traversé par un courant glacial à l'entrée, s'était figé. Une fraîcheur stagnante enveloppait les explorateurs, s'infiltrant sous leurs vêtements et provoquant des frissons involontaires. L'atmosphère était lourde, saturée d'une odeur de moisissure mêlée à un relent métallique, rappelant une cave abandonnée depuis des siècles. Tout ici semblait ancien, mais étrangement intact. Les murs, lisses et uniformes, ne portaient ni inscriptions, ni décorations, comme si ce lieu avait été conçu pour être oublié, ou pour dissimuler un secret.

—Étrange... vraiment étrange, murmura Eamon, brisant le silence de sa voix absorbée par l'écho lointain. Le vieil archéologue glissait ses doigts sur la paroi métallique, son regard perçant cherchant des indices invisibles. Il fronça les sourcils, son esprit déjà en quête d'une logique derrière cette architecture atypique. Activant son carnet holographique, il y consigna quelques notes rapides.

—Cette structure n'a rien de commun avec ce que nous avons découvert sur les Esthérian's jusqu'ici. Rien.

Adam, qui marchait en tête, hocha légèrement la tête sans répondre, concentré sur son avancée. Chaque pas semblait l'emmener plus profondément dans un passé oublié, comme s'il foulait le seuil d'un autre temps. Le silence continuait de peser, oppressant, brisé uniquement par le faible grésillement de la lampe et le bruit régulier de leur respiration.

Après plusieurs minutes de progression dans ce couloir interminable, la lumière de leur lampe révéla une ouverture plus large. Ils pénétrèrent dans une vaste salle ovale qui s'étendait devant eux, sa taille imposante accentuée par l'écho de leurs pas. Adam s'immobilisa, le souffle court, tandis que son regard parcourait ce nouvel espace.

L'atmosphère changea radicalement. Ici, les murs lisses du couloir faisaient place à une fresque monumentale qui encerclait la salle. Mais, à leur grande frustration, une grande partie de l'œuvre semblait effacée par le temps ou par un autre phénomène inexpliqué. Les motifs qui subsistaient étaient à peine visibles, des fragments épars de figures ou de lignes géométriques esquissées sur le métal.

Eamon s'approcha lentement, presque avec révérence, son regard rivé sur les vestiges de la fresque. Il effleura l'une des sections intactes de ses doigts tremblants, comme s'il espérait y trouver des réponses enfouies.

—Une fresque... mais pourquoi est-elle si endommagée ? murmura-t-il, sa voix à peine audible, empreinte d'une fascination presque religieuse.

Kiran, visiblement déçu par la fresque à moitié effacée, passa une main sur sa tête en soupirant.

—C'est... effacé... On arrive trop tard, Doc ? demanda-t-il, le ton empreint d'amertume.

Eamon se tourna vers lui avec un sourire énigmatique, son regard pétillant d'un optimisme qui semblait inébranlable.

—Trop tard ? Évidemment, mon cher Kiran. Nous avons environ 320 000 ans de retard. Mais cela ne signifie pas que ces vestiges soient dénués de valeur.

Il posa une main rassurante sur l'épaule de son élève avant de désigner la fresque d'un geste ample.

—Ces gravures, même dans leur état actuel, ont encore beaucoup à nous apprendre. Il suffit de savoir où regarder et comment interpréter.

Zena, déjà absorbée par les vestiges devant elle, s'approcha pour examiner de plus près les détails épars. Son ton serein coupa court à la déception ambiante.

—Étudions-les. Peut-être qu'en les analysant, nous trouverons des réponses, ou au moins une piste. C'est notre rôle, n'est-ce pas, Kiran ?

Le Neurorien haussa les épaules avant de hocher la tête, visiblement convaincu par les propos de sa camarade.

—Ouais, t'as raison. Ça vaut le coup d'essayer.

De son côté, Adam, conscient de la déception qui flottait encore dans l'air mais aussi encouragé par l'engagement de ses amis, s'approcha à son tour de la fresque. Chaque pas semblait alourdi par une certaine prudence, mais sa curiosité l'emporta.

À mesure qu'il s'avançait, une étrange tension se fit sentir dans la salle. L'atmosphère changea subtilement, comme si l'air devenait légèrement chargé d'énergie. Et alors qu'il tendait une main hésitante vers la fresque, quelque chose d'inattendu se produisit.

Sous son approche, la fresque s’illumina soudainement, de manière presque organique, comme si elle réagissait à sa présence. Adam cligna des yeux : à quelques centimètres des parois, la surface n’épousait pas vraiment la pierre. Elle flottait, suspendue dans l’air, comme une toile immatérielle projetée en silence.

Les motifs effacés, jusqu’alors invisibles, commencèrent à s’éclairer doucement, révélant des contours et des couleurs qu’aucun d’eux n’aurait pu imaginer.
Adam recula instinctivement d’un pas, abasourdi.
— Qu’est-ce que… ? murmura-t-il, les yeux écarquillés.

Mais sa curiosité prit rapidement le dessus. Il avança de nouveau, tendit un doigt tremblant et toucha délicatement l’espace lumineux. Sa pulpe rencontra non pas la rugosité d’une paroi, mais une résistance froide, lisse, sans matière — comme une fine membrane vibrante.

À cet instant précis, la lumière s’intensifia, se propageant comme une onde sur toute la surface suspendue. Elle parcourut la fresque entière, révélant des détails jusque-là enfouis sous une couche invisible de temps et de mystère. Les contours flous devinrent peu à peu nets, et des scènes complexes et vibrantes prirent forme sous leurs yeux ébahis.

— Tout le monde, regardez ça ! s’écria Adam, stupéfait, sa voix résonnant dans l’espace immense. La fresque… elle… elle s’allume !

Le groupe se retourna d’un seul mouvement, leurs regards fixés sur l’étrange spectacle. Une onde lumineuse, presque vivante, continuait de se propager, illuminant la fresque suspendue avec une précision fascinante.
Eamon, bouche bée, fit quelques pas en direction d’Adam, incapable de détacher ses yeux de cette vision. Kiran et Zena, eux aussi subjugués, observaient en silence tandis que les couleurs éclatantes se répandaient sur les murs.

Les scènes holographiques qui se dévoilaient semblaient contenir une histoire : des figures indistinctes prenaient peu à peu forme, des paysages d’une autre époque se dessinaient, des structures monumentales et des scènes de vie émergeaient, chaque détail vibrant comme s’il avait été préservé hors du temps.

—C'est... incroyable, souffla Zena, son regard parcourant les fresques qui semblaient prendre vie.

Eamon, quant à lui, s'approcha davantage, les mains tremblantes.

—Une technologie holographique... C'est comme si cette fresque était... une archive vivante. Quel génie, quelle sophistication... Ces Esthérian's... Sa voix se brisa sous l'émotion, incapable de trouver les mots pour décrire ce qu'il ressentait.

Kiran, d'habitude si volubile, était muet d'admiration. Ses yeux, grands ouverts, passaient frénétiquement d'un détail à l'autre, comme s'il craignait de manquer un seul fragment de ce trésor visuel.

—Ça... ça change tout. La fresque n'est plus du tout la même... souffla Kiran, le regard rivé sur les murs désormais illuminés. Son admiration transperçait dans sa voix, ses pupilles brillant presque autant que les images devant lui.

Zena, elle aussi fascinée par le spectacle, ne put s'empêcher de sourire.

—Je ne sais pas ce que tu as fait, Adam, mais bravo. Grâce à toi, on vient de gagner un temps fou.

Adam haussa légèrement les épaules, visiblement troublé mais aussi un peu gêné par l'attention soudaine.

—Je n'ai rien fait de spécial. J'ai juste... fait comme vous. J'ai passé ma main sur la fresque, et elle a réagi. C'est tout.

Eamon, silencieux jusqu'à présent, s'avança lentement vers Adam, l'observant comme s'il voyait en lui quelque chose qu'il n'avait pas encore compris. Le vieux scientifique murmura, presque pour lui-même :

— Depuis le début, il y a quelque chose... Une connexion entre toi et ce lieu, Adam.

Son ton était empreint d'un mélange de curiosité et de réflexion, mais il finit par lever la tête, retrouvant son regard analytique.

—Ce qui est encore plus fascinant, c'est que cet endroit fonctionne toujours. Après plus de 300 000 ans... cette structure est encore alimentée en énergie.

Eamon passa une main sur son menton, sa posture trahissant une intense réflexion.

—Leurs technologies devaient être absolument hors de notre portée. Des années-lumière d'avance sur tout ce que nous pouvons concevoir aujourd'hui. C'est la seule explication logique.

Kiran, qui avait jusque-là gardé ses yeux fixés sur la fresque, intervint avec excitation :

—C'est dingue... mais, Doc, qu'est-ce qu'on fait maintenant ? On continue plus loin ?

Eamon leva une main pour calmer l'impatience du Neurorien.

—Pas si vite, Kiran. Une telle découverte mérite qu'on prenne le temps de l'étudier correctement. Avant d'aller plus loin, nous devons comprendre ce que cette fresque raconte. Elle contient peut-être des informations cruciales.

Zena hocha la tête, approuvant cette approche prudente.

—Il a raison, Kiran. Si cette fresque est une archive ou un récit, elle pourrait contenir des indices sur l'histoire des Esthérian's ou même sur la fonction de cet édifice.

Le vieux scientifique s'approcha à nouveau des murs, caressant presque du bout des doigts les contours lumineux de la fresque. Son regard oscillait entre admiration et intense concentration.

—Étudions ces images. Elles pourraient nous révéler ce qui se cache au-delà de ce couloir, et peut-être bien plus encore.

Adam, qui observait la scène en silence, sentit une fois de plus cette étrange sensation qui le liait à ce lieu. Il ne comprenait pas ce qui se passait, mais il savait qu'il avait un rôle à jouer dans cette aventure. Tandis que le groupe commençait à analyser les détails de la fresque, il jeta un dernier regard vers l'obscurité qui s'étendait plus loin dans l'édifice. Une partie de lui brûlait de curiosité, mais il savait que, pour l'instant, il devait suivre le rythme imposé par Eamon.

Les fresques holographiques illuminaient la salle d'une lueur bleutée, enveloppant l'espace d'une atmosphère presque irréelle. Un léger sifflement énergétique flottait dans l'air, comme un écho fantomatique d'un passé lointain. Ces peintures holographiques, vestiges d'un autre temps, déployaient devant les spectateurs ébahis des scènes captivantes, des fragments d'histoire qui, à eux seuls, promettaient de bouleverser toutes les connaissances sur le peuple Esthérian disparu.

Les images s'animaient doucement, révélant l'hégémonie de cette civilisation à travers des scènes de vie d'une richesse inouïe. La fresque débutait par la représentation d'un monde paisible, où un peuple uni vivait en harmonie. Mais leur curiosité insatiable et leur soif de découverte les poussèrent rapidement à lever les yeux vers les étoiles.

De majestueux vaisseaux spatiaux prenaient alors vie sous leurs yeux. Leurs formes élégantes et élancées, d'un doré brillant mêlé de teintes bronze, évoquaient des prédateurs célestes. Ces vaisseaux, symboles de leur suprématie technologique, paraissaient presque vivants. La proue, fine et incurvée vers le bas, se terminait en une pointe acérée, tandis que leur section centrale, plus large, semblait abriter des quartiers d'équipage et des zones de vie. À l'arrière, deux extensions effilées, semblables aux ailes d'un rapace, ajoutaient à leur allure aérienne et menaçante. Ces navires traversaient les vastes étendues du cosmos avec une aisance presque divine, dominant un fond étoilé qui semblait s'étendre à l'infini.

La fresque évoluait ensuite, montrant les mondes qu'ils avaient conquis. Sur ces planètes colonisées, de gigantesques tours s'élevaient, des édifices d'une architecture complexe et d'une élégance presque surnaturelle. Chaque détail trahissait un raffinement hors du commun. Ces structures, ornées de symboles mystérieux gravés avec une précision infinie, se dressaient comme des monuments à la gloire des Esthérian's. Leurs teintes argentées, mêlées d'un bleu poli et scintillant, leur conféraient une majesté intemporelle, tandis que les villes qu'elles dominaient semblaient s'étendre à perte de vue.

Des scènes de vie quotidiennes apparaissaient dans un flot continu. On y voyait ce peuple énigmatique vaquer à ses occupations : bâtir des structures colossales, cultiver des champs fertiles, étudier des artefacts inconnus, explorer des mondes encore vierges. Ces images montraient également une société vivante, vibrante : des individus dansant lors de festivités, célébrant des rites inconnus, ou simplement riant et échangeant dans des moments de partage. La vie et l'énergie qui émanaient de ces scènes donnaient à ces êtres une dimension presque tangible, effaçant la frontière entre passé et présent.

Le fond étoilé se peuplait peu à peu d'une multitude de vaisseaux. Leur disposition soignée et harmonieuse, traversant des nébuleuses lumineuses et des galaxies lointaines, symbolisait l'expansion galactique des Esthérian's, leur domination totale et leur curiosité insatiable. Chaque image évoquait leur maîtrise technologique, leur quête infinie de savoir et leur volonté de repousser les limites de l'univers connu.

Ce mélange parfait de puissance, de sophistication et de curiosité conférait à cette fresque une aura presque divine. C'était bien plus qu'une œuvre d'art ou un témoignage du passé : c'était une fenêtre sur l'apogée d'une civilisation dont l'héritage restait enfoui dans les profondeurs du temps, et qui, pourtant, semblait murmurer encore à travers ces hologrammes.

Soudain, une rupture brutale déchira cette vision idyllique. L'atmosphère lumineuse, emplie d'espoir et de prospérité, se mua en une scène sombre et oppressante. La fresque holographique changea radicalement de ton, projetant des images de chaos et de destruction qui semblaient presque résonner dans la salle.

La prospérité des Esthérian's laissa place à une vision d'apocalypse. Des explosions retentissaient, secouant les tours majestueuses, désormais en flammes. Leurs structures, autrefois symboles de puissance et de raffinement, s'effondraient dans un fracas terrifiant sous l'impact d'attaques brutales. Des silhouettes indistinctes — sans doute des Esthérian's et d'autres créatures — couraient dans la panique, leurs visages figés par une peur viscérale. Leurs corps se bousculaient, se heurtaient, dans une tentative désespérée de fuir un danger invisible mais inéluctable.

Les cieux, autrefois traversés par les élégants vaisseaux dorés, étaient devenus un théâtre de destruction. Ces mêmes vaisseaux, jadis symboles d'une domination galactique, n'étaient plus que des carcasses fumantes. Ils s'écrasaient lourdement au sol, brisant les derniers vestiges d'ordre et d'harmonie. La fresque élargit ensuite son champ, révélant que la destruction ne se limitait pas à une simple ville ou un monde isolé. C'était une catastrophe à l'échelle interplanétaire.

Des planètes entières brûlaient sous des flammes colossales, leurs écosystèmes annihilés en un instant. Les océans s'évaporaient dans un souffle incandescent, les terres se craquelaient et se fracturaient comme sous l'effet d'une colère divine. Les explosions d'étoiles lointaines illuminaient un cosmos plongé dans le chaos, transformant ce qui était un symbole de grandeur en une scène de désolation absolue.

Était-ce une guerre intergalactique ? Une invasion d'un ennemi inconnu ? Un fléau qui défiait l'entendement ? La fresque, dans son étrangeté quasi prophétique, ne donnait aucune réponse claire. Elle ne faisait que projeter des visions de destruction et de perte, laissant libre cours à l'imagination et aux spéculations.

Mais c'étaient les dernières images qui restaient les plus troublantes, celles qui plongeaient le spectateur dans une angoisse sourde. D'étranges silhouettes émergèrent de l'ombre. Leur apparence était vague et brumeuse, mais leur aura était indéniablement malveillante. Ces formes vaguement humanoïdes semblaient déformées, comme si elles appartenaient à un monde où les lois de la nature avaient été perverties.

Leurs yeux, brillants d'une lueur surnaturelle, transperçaient la fresque avec une intensité glaçante, comme s'ils fixaient directement les spectateurs. Ces regards, empreints d'une malveillance insondable, semblaient porter un avertissement. Ces créatures, cauchemardesques dans leur allure, dominaient les scènes de destruction. Elles n'étaient pas seulement des témoins passifs de ce chaos : elles en étaient les instigatrices, les architectes, les bourreaux.

La fresque s'arrêta brusquement, laissant la salle plongée dans une semi-obscurité. Le sifflement énergétique s'estompa lentement, comme pour renforcer la solennité du moment. L'air lui-même semblait plus lourd, chargé d'une tension presque palpable.

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