Je suis réveillé en sursaut par un bruit fracassant de verre brisé. Je me redresse en vitesse et regarde autour de moi, désorienté. Les cris de plusieurs personnes me parviennent de l'extérieur. Je quitte mon lit en précipitation, manquant de me prendre les pieds dans ma couverture, afin de tirer les rideaux. Les passants courent dans tous les sens, se bousculant violemment. Certains tombent au sol et, s'ils ne finissent pas piétinés par la foule, sont attaqués par d'autres individus qui se jettent sur eux pour les mordre brutalement, leur arrachant même des morceaux entiers de peau et de chair ! Mes yeux s'écarquillent face à ce spectacle cauchemardesque. Les cris de douleur des victimes m'arrachent des frissons d'horreur. Je me sens trembler de façon incontrôlable. Qu'est-ce qui se passe ?

Les personnes attaquées tombent au sol, gisant dans leur propre sang pendant quelques secondes, puis commencent à se tordre de façon consulsive et se redressent ainsi, ou rampent, pour poursuivre d'autres êtres humains, reproduisant un cycle qui semble ne pas vouloir prendre fin.

Je sens mon coeur battre à tout rompre et ma respiration s'accélérer. Ce scénario, je l'ai déjà vu un nombre incalculable de fois, dans des films, des séries et des jeux vidéos. C'est le début d'un enfer interminable pour ceux qui le vivent. Le début d'une apocalypse zombie. . .

Je secoue la tête et m'inflige même une claque, espérant me réveiller, mais la douleur est bien présente et je ne rouvre pas les yeux pour me découvrir à nouveau dans mon lit et en sécurité. C'est donc bien la réalité ? Je jette un nouveau coup d'oeil dehors. Le chaos règne toujours. À cette vitesse, le quartier, puis la ville, seront entièrement transformés en quelques heures à peine et. . .

- Les gars !

Je me précipite sur mon téléphone, posé sur ma table de chevet, pour envoyer un message sur notre groupe d'amis :

"Vous êtes où ? ! Vous avez vu ce qui se passe, dehors ? !"

Aucune vue. Aucune réponse non plus, d'ailleurs. Bon sang ! Il leur est peut-être arrivé quelque chose ! Il faut que j'en ai le coeur net, mais d'abord. . .

Je décide d'appeler papa. Au bout de quelques sonneries, le téléphone décroche enfin :

- Allo, fiston ? Tout va bien ?

- Euh. . . Oui, pour l'instant. . . Écoute, j'ai du mal à croire à ce qui m'arrive et. . . tu ne vas sans doute jamais me croire, mais. . . Laisse tomber. Je vous demande juste d'être prudents, maman et toi, parce que notre quotidien est probablement en train de basculer à tout jamais.

- Quoi ? ! Qu'est-ce que tu racontes ?

- Je n'ai malheureusement pas le temps de t'expliquer. Il faut que j'aille vérifier que les autres vont bien. Faîtes attention, maman et toi. Faîtes attention au comportement des gens qui vous entourent. Je vous rejoins aussi vite que possible.

- Attends, qu'est-ce que. . . ?

Je raccroche, ne lui laissant pas le temps de terminer. J'ai pensé à lui lâcher un "Je vous aime.", mais ç'aurait été comme insinuer qu'on ne se reverrait plus et c'est hors de question. Mes parents habitent dans une autre ville. Si tout vient de commencer ici comme je le pense, ils sont encore hors de danger pour le moment. J'ai encore le temps de les rejoindre avant qu'il ne soit trop tard. . .

- On va survivre ! dis-je pour m'auto-convaincre.

Je fouille sous le matelas pour sortir le revolver offert par papa. Je m'empare ensuite d'un sac à dos dans lequel je balance au hasard nourriture et eau, puis file me changer, enfile mes chaussures, attrape mon manteau et ouvre lentement la porte de mon appartement. Je regarde à droite, puis à gauche. Personne. Je me glisse lentement à l'extérieur, en veillant bien à refermer la porte. Au moins un endroit dont je pourrai être sûr de la sûreté. Je descends ensuite les escaliers aussi rapidement que me l'autorise la prudence. Au bout de quelques marches, je remarque des tâches de sang. Je déglutis avec peine, mais ne m'arrête pas. J'arrive finalement au rez-de-chaussée sans encombres, mais suis aussitôt agressé par une forte odeur cuivrée. Je me couvre le nez et me retiens de vomir face au sang recouvrant le sol et les murs. Même le plafond n'a pas été épargné. . . Voilà pourtant bien longtemps que le sang ne m'impressionne plus. Je suis habitué aux films, séries et jeux emplis de violence, mais là. . . Ce n'est pas pareil, sans doute parce que c'est du vrai sang, cette fois. . .

Je suis sur le point de reprendre mon chemin lorsqu'un râle digne d'une bête sauvage se fait entendre. Je me retourne juste à temps pour voir un homme au visage à moitié arraché se jeter sur moi en hurlant. Un zombie ! Je tire sur lui sans réfléchir. Il s'effondre un moment, mais se remet aussitôt debout, comme si je venais simplement de lui mettre un coup avec ma main ou mon pied. Horrifié, je suis sur le point de tirer à nouveau lorsqu'un manche à balai traverse le crâne de mon agresseur. La jeune femme qui en tient l'autre bout câle ensuite son arme entre les deux murs formant le couloir conduisant aux caves, coinçant ainsi le monstre. Je me laisse tomber à terre, sous le choc. Je n'ai jamais autant tremblé de toute ma vie !

Ma sauveuse se tourne rapidement vers moi pour me demander :

- Est-ce que ça va ? Tu n'as pas été mordu ?

- Euh. . . Je. . . Non. . . Merci. . .

Elle sort de la poche de son pantalon un couteau de cuisine avec lequel elle me menace, pendant qu'elle se penche prudemment sur moi pour s'assurer que je ne suis pas blessé.

- Bien. . . conclue-t-elle finalement. Tu es le premier être encore humain que j'ai croisé. Suis-moi. Il faut qu'on aille se mettre en sécurité avant qu'il ne soit trop tard.

- Attends ! Il faut d'abord que je passe chez mes amis, pour m'assurer qu'ils vont bien. Ensuite, on quittera la ville pour rejoindre mes parents. En tout cas, c'était mon but en sortant de chez moi.

- Voilà qui tombe bien. Quitter la ville est aussi mon but, car elle est clairement fichue. Les autorités doivent déjà être au courant de la situation, mais le temps qu'ils réagissent, à imaginer qu'ils aient les bons réflexes dès le début, cette cité est déjà condamnée. Ils vont certainement la boucler pour empêcher la contamination d'autres lieux. C'est en tout cas la solution la plus logique. En revanche, passer chez tes amis nous ferait perdre un temps précieux. Cela pourrait nous coûter la vie. . .

- J'en ai bien conscience, mais je ne peux pas les abandonner. Si tu ne veux pas m'accompagner, tant pis. Nos chemins se séparent ici. Merci pour ton aide, lui dis-je en me relevant. J'espère pouvoit te rendre la pareille un jour.

- Je peux savoir où tu vas ?

- Eh bien. . . Rejoindre mes amis.

Elle pousse un long soupir, puis lâche en se dirigeant vers la sortie :

- Tu ne pourras jamais m'être redevable si tu ne survis pas et tu ne survivras clairement pas seul. Viens. Allons vite sauver tes amis. Enfin. . . Dans l'optique où ils peuvent encore être sauvés.

Je la suis en souriant, agréablement surpris de son soutien. Il vaut en effet toujours mieux être deux dans une situation pareille et le fait de ne plus être seul me rassure.

- Attention. Tu n'as plus le droit à l'erreur à partir de maintenant, sinon, nous le regretterons tous les deux, me dit-elle avant de s'engager à l'extérieur.

J'acquiesce et me précipite à sa suite, mais à peine ai-je le temps de mettre le pied dehors qu'une main me saisit fermement par l'épaule. Je me retourne en sursaut, subitement déconcentré. Un zombie en profite pour se jeter sur moi.

"Game Over"

- Maman ! râlé-je. Je vais devoir tout recommencer, maintenant

- Oh, désolée, mon chéri, mais j'avais beau t'appeler, tu ne réagissais pas. Lisa t'attend dans le salon.

Je retire en vitesse mon casque et éteins l'appareil pour rejoindre la jolie blonde, qui m'accueille, comme à son habitude, avec un large sourire et les bras grands ouverts. Je souris à mon tour et la serre contre moi, sous l'oeil vert attendri de maman. Mon coeur bat la chamade, mais le sentiment qui en est la cause n'a rien à voir avec la peur du héros de Zombie Invasion Simulator. . .