L'horreur sur le bout des doigts

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— Tu as des questions ?

Des questions moi ? Bien sûr ! Pleins ! Et pourtant, je n’ose pas trop creuser au vu de ce qu’elle m’a exposé avec des termes simples, pas trop crus et ignoble !

— Eva, si j’ai bien compris, c’était une amie à toi ?

— Tu parles de celle que j’ai retrouvé en Sicile ? Eva ? Enfin, Anna ?

— Oui. Vous étiez ensemble dans la même classe c’est bien ça ? Puis, une chute d’un rocher pour se baigner, j’ai bien compris que ce Présent machin était le patron d’un vaste réseau dont le culte était une branche. Et, elle s’appelait Emilia, d’après tes dires.

— Ma chérie, Emilia était une de mes meilleures amies à l’école, elle c’était suicidé à treize ans. Battu à mort part ses parents ou les grands des classes supérieurs. Personne n’en sait rien.

Elle se perd elle-même, ça se voit quand elle doute, fronçant les sourcils puis elle se lève pour tourner en rond dans ma chambre. Je sers toujours mon coussin contre moi, en tailleur comme si la future explosion rarissime de sa part pouvait me protéger.

— Eva, elle…non ! C’est une fausse ma chérie. Je t’ai dit quoi exactement ma puce ?! Eva, Anna ou Emilia ?!

— Eva treize ans, chute pour se baigner, une amie à toi. Et Emilia treize ans, suicide. Tu sais, tu as une mémoire en morceau par ce que tu as subis, ce n’est pas grave de confondre. Si ça se trouve, c’est deux amies. Enfin, il y aurait donc une troisième.

Elle me fixe ébahie. Elle s’illumine et ça fait plaisir à voir.

— Tout colle avec Eva, son corps retrouvé et bon je n’ai aucun souvenir d’une amie nommé Emilia en classe, ni une Anna. Alors ok, j’avais d’autres amis, une vrai sociale pendant des années. Mais là, quand Eva avait disparu, ont m’a reproché de ne pas l’avoir assez pleuré ! Ils se sont détournées de moi, qu’ils vivent le choc de plein fouet , je leur disais dans ma tête ! J’avais dû inventé effectivement sans le vouloir. Excuses moi pour ça. Tu as d’autres questions aussi ? Je pense que tu as suffisamment de quoi comprendre ta mère.

Je viens la voir en posant ma main sur son cœur avant de la câliner en larmes.

— Maman, il y a des autres cœurs artificiels sur le marché, pourquoi tenté quelque chose de peu fiable ?

— Depuis ta naissance, je leur ai demandé de me raconter en détails, le fonctionnement de deux modèles, l’un brouillon en preuve et l’autre, utilisé en moi et de m’informer le moment voulu, quand la deuxième version sans poches suspectes, sans compartiments à puce, soit mise en service. J’ai plusieurs fois écrits que si je le pouvais, je serais prête pour avancer la science.

— Il était vraiment en métal ? Tu étais une sorte de Terminator ?

— Tu peux rigoler mais j’ai y penser. Et oui, la coque était dans un métal adapté pour le corps et les vaisseaux, les valves faite de…de plusieurs morceaux cousus de pauvres victimes. Je prenais les mêmes traitements que pour tout type de greffes classiques, rapidement, je m’étais senti différente, étrange puis, quand j’ai rencontré ce Sergio, plus calme. Un moment donné, j’ai saisi que mon cœur était unique, supportant de la drogue, de l’alcool et un stress important.

— Mais, comment ça se fait qu’à l’hôpital, personne n’a remarqué que ce cœur n’était pas normal ?

….

— Le chirurgien avait greffé en vingt ans, une dizaine de patients dont moi. Un maigre nombre par rapport au nombre de malades. Et faut que tu comprennes que l’équipe était sous surveillance, sous menace. Ils ont démissionnés d’ailleurs peu de temps après que j’avais intenté le procès pour mise en danger. Ils ont témoignés anonymement en indiquant qu’ils ne savaient rien de ce réseau. Le chirurgien disait que certains patients participaient à une nouvelle greffe mais seul lui, faisait le relais avec les dossiers, le suivis des analyses. Tout était falsifiés.

— Et normalement tu devais avoir un suivi toi, personne ne s’était inquiété ?

— J’ai su toujours pendant le procès, que le médecin avait indiqué que j’étais sous surveillance par un autre.

J’embrasse son front sentant la pomme. Je pensais ne pas tant parler, pourtant sa présence si douce, si curieuse et si pleine d’amour, me procure du bien. Elle m’a également réveillé une vieille énigme Eva, Emilia, Anna…Tout est limpide, c’est clair, ça brise.

— Merci ma Luna de ta confiance. Tu devrais à ton âge vivre une vie apaisée, pas comme à mon âge, faire la course contre la mort qui rôde autour de soi. Avec papa, on ne va jamais cesser d’être à tes côtés le plus longtemps possible. Sinon, j’ai une dernière chose à te dire, ça ne va pas faire du sens après notre dernière promesse mais, je pars pendant un an, seule. Je n’ai jamais pris de vrais vacances depuis quatorze ans.

Mon cœur saigne, je l’enlace le plus fortement…Au fond, je pourrais supplier qu’elle reste et j’ai l’infime espoir, que du repos va lui être bénéfique. En ce moment, elle tient la maison toute seule malgré l’aide de papa, Adela et Alvaro. Elle fatigue, parle seule sans s’en rendre compte et j’ai menti à Manu. Le retour de son amie n’est qu’une façade.

— Tu me promet de m’écrire ? De m’appeler ? De revenir plus forte ?

— Oui et désolé de vouloir ça maintenant. On m’a autorisé pour que je prenne du recul avant l’opération.

— C’est un cœur en métal aussi ?

— Très complexe à t’expliquer même moi, je n’ai pas tout compris. Mais aucun métal, assez novateur, inspiré de la nature.

— Mon cœur, le taxi Alvaro est là !

— C’est maintenant ?

— Ne pleure pas ma puce, je rentre bientôt.

— Et tu seras opérée quand ?

— À mon retour.

— J’aimerais que tu restes !

….

— Moi aussi ma puce mais maman en a besoin de ces longues vacances. Moi, j’ai réduit mes heures, mon chef à bien entendu accepté donc je serais là pour manger des glaces, t’emmener à la patinoire avec Alvaro ou danser avec Adela.

Je lui caresse aussi ses cheveux avant de les enlacer toutes les deux. Marta a décidé de s’en aller au pire moment. Je pourrais moi aussi, lui en vouloir sauf que ça serait injuste. Comme notre fille, j’ai remarqué que Marta n’a jamais cessé de s’investir dans l’appartement.

Elle ne regrette pas la maison avec la piscine, s’estimant que c’était trop grand pour ranger, passer le balais, surveiller Luna au bord de l’eau…Trop de danger. Elle reste magnifique dans sa combativité et ne m’a jamais voulu de m’avoir moi aussi, éloigner un peu le bateau.

Elle avait hésité à la dernière minute, à défaire la valise. Je l’ai assuré que je prendrais le relais, Luna n’est pas seule. Et puis, j’ai quelques années devant moi avec l’espoir d’un traitement qui retarde l’échéance.

— Mes princesses, maman à son vol dans deux heures, il lui faut de l’avance.

Luna se décolle pour changer de parent. Je donne toute ma tendresse tandis que sa mère l’embrasse une dernière fois pleines de promesse et d’humour :

— Tu es la femme de la maison, à ce titre honorifique, laisse les hommes s’occuper de la charge mentale. J’adore ce sourire et il va bien sûr me manquer mon miracle. Je t’aime.

— Tu vas où ?

— Une étape en Sicile, rejoindre Anna, Eva, Emilia.

— Dans la piscine ?

— Et même la mer ! J’ai beau avoir plusieurs cicatrices heureusement ridées, mal en points, je reste belle. Ton père me l’a si souvent rappeler. Alors, oui, telle une dauphine, je nagerais et croquerais la vie ! Ensuite, j’irais seule en bateau, à pied, en mule, là où je prendrais un nouveau souffle. Ainsi, j’aurais l’esprit plus clair pour voyager avec vous, mes amours. Et puis, tu pourras profiter plus de ton père, vous vous êtes manqués ces derniers mois.

Une fois partit, Luna se cache à nouveau dans sa chambre jusqu’au dîner. Je toque à sa porte jusqu’à qu’elle m’autorise. Ici, c’est un culte à nous… Enfin, elle a enlevé les posters de Disney, ceux de Maitre Gims, Pink ou U2 avec les poneys.

— C’était donc ça, le bruit que j’ai entendu depuis le salon ? L’imprimante à bien souffert pour nous retrouver ici.

— Moins que maman et toi.

Touchés, couler. Le même humour de famille, surtout de sa mère. Elle est assise à son bureau et attendant que la machine s’éteigne. De mon côté, je détaille avec nostalgie, Upa Dance dans ses deux versions, moi pour des promotions de mes albums solo ou des pubs. Puis, un autre pan de mur concerne des articles relatant les faits depuis que sa mère était portés disparu, jusqu’au Présentier. Elle a imprimer également toutes les photos possibles de nous trois.

— Qu’est-ce qui te fascine chez nous ma puce ?

— Votre capacité à vivre après les horreurs. Tu restes toi aussi fort papa alors que tu vas mourir. Je vous ai vu avec Alvaro et maman. J’ai compris le message tu sais. J’ai pas envie que vous partiez mais si tu peux continuer à me promettre de vivre des moments magiques….

— Chaque jour ma princesse. Pour commencer, j’ai préparer des burgers et frites maisons. MacDo devant le film que tu choisis, ça te va ?

— Maman va pleurer si je prends des kilos !

— On fera attention.

Je lui tends la main et on s’installe dans le salon devant Narnia, elle aimait quand elle avait sept ans. Je trouve ce film parfait pour retomber en enfance et j’ai plaisir à redécouvrir l’histoire.

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