Manuel et Izan

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— Maman ?

Izan me tends ses bras et je l’accueil avec plaisir contre moi dans leur salle de jeux. Ma nouvelle prothèse n’est pas pratique. Trois mois où j’ai pas encore l’habitude, j’ai par ailleurs l’ergothérapeute dans deux heures, juste après leur siestes pour peut-être tester d’autres modèles.

Je me sens une nouvelle personne, presque irréelle. Mon cœur, ma main, mon souffle et mes nouvelles nuits à nouveau calme entre les jumeaux et les médocs. J’avais peur qu’ils me repoussent en voyant que leur mère à un doigt en moins et pourtant, je suis émue quand Izan mordille sa voiture peluche tout en caressant le faux pouce.

Manuel jaloux, le repousse un peu, ils se chamaillent avant de repartir s’amuser. Ils sont loin de savoir qu’ils n’auront plus de parents. Tout tient à un fil tendu et c’est quand ils s’endorment sur leurs coussins, après les avoir recouvert d’un drap, que je retire ma robe grise.

C’est debout devant le miroir de la cheminée que je pleure en silence en touchant toutes mes cicatrices. Du fer, des coups, des menottes, de l’opération, de mes automutilations et celles invisibles.

En sous-vêtements, je me rends compte que j’ai maigri. Même cela fait trois mois que j’ai ramener les petits et que Luna reprend le sourire avec sa volonté de s’inscrire à des cours de boxe, j’ai le sentiment que ce que lui avait annoncé après son premier entretien avec Andréa, va être une réalité.

Même si mes enfants sont tout pour moi, Roberto est ma drogue. Il a été là à chaque tentative de mourir. Là pour savoir m’aimer, là pour me soutenir dans mes crises de panique, là encore pour brûler de passion entre nous.

Quand il en cure, c’est Alvaro dont j’ai besoin. Une autre douceur comme un bonbon à la menthe du passé. Il n’impose rien, il reste à l’écoute. Et Eva ? On s’était pas revu depuis mon année de vacances, je lui ai enfin répondu, quelques jours après le Gardien.

J’avais hésité à la revoir, sentant qu’elle me mentait sur sa vrai histoire. Ce sentiment de recoller des petits morceaux m’est venu quand j’ai accepté de récupérer les cartons qui me correspondaient.

Parmi ce tri, j’ai trouvé une étrange photo avec moi, Eva et d’après les mentions au dos, Emilia et son chien. C’était proche de la cascade où Eva avait disparu. Pourquoi j’ai inventé une amie dans un autre destin ? Mes parents m’ont jamais contredis, sans doute pour me préserver.

Ce que je me demande, c’est si Eva avait chutait de son propre choix ? Où alors elle avait obéit ? Le Présentier tirait les ficelles avec mon oncle. Si déjà Nicolas avait prévu d’éloigner ma sœur de notre famille, s’il m’avait une dernière fois piqué après avoir abusé de moi, si…

Et si, dans ce flash plus limpide, lors de la sortie scolaire proche de la cascade, elle, mon amie m’avait bien poussé à fuguer, on était surveiller ? J’ai le souvenir d’avoir vu cette photo pendant l’audition, elle venait de mon propre appareil et prise par un patient.

Oui, Emilia nous avait remercié d’avoir retrouvé son chien avant que ce dernier se jette de la falaise, la contraignant à se retrouver, brisée contre le rocher d’en bas. Eva et moi nous sommes disputés, je voulais chercher des secours, elle, voulait essayer de ramener son corps.

Elle avait glissé et l’eau l’a emporté. Je pense que j’ai pas voulu la vérité. Que j’ai collé l’identité de ma meilleure amie sur cette inconnue pleine de coups. J’avais tout laissé aux psys et suivit à la lettre les règles rigides mais plein d’amour de mes parents.

Les vérités, les secrets ne cesse de découvrir. Si les autres photos sont aux mains des enquêteurs pour les relier à d’autres victimes possiblement encore en vie, de mon côté, personne ne sait rien.

Tout s’enfume dans mon esprit. Mon regard retrouve de l’éclat quand je vois Izan et Manuel. Hélas, à peine rhabiller que Luna rentre sans frapper. Je cherche à déterminer sa question :

— Surveille tes frères jusqu'au retour de ton père. Tu voulais quelque chose ?

— Eu, je cherchais dans le grenier, le vieux haut Upa Dance, tu sais, l’une de vos reliques jamais vendu, c’est pour Léo pour son anniversaire. Et j’avais oublié que tu consulté les dernières photos et bé…

— La curiosité est un mauvais défaut mais bon, j’imagine que tu as trouvé une intéressante ?

Elle me sourit gêné pour me tendre celle auquel je pensais.

— Je vais pas te gronder, je suis fatiguée de manière générale. Alors oui, j’y pensais à l’instant à ma vie entière et le Gardien, le Présentier, mon oncle et Eva surtout avec cette autre gamine, tout ça n’a rien du hasard. Tu comprends ?

— Oui, tu cherches des réponses, parle en aussi à ton amie. Je suis contente quand même que tu lui reparles, ça lui a fait du mal ce silence même si elle a compris. Ce que j’ai tenté aussi remarque. Au fait, tu te dis épuisée sauf qu’à chaque rendez-vous psy, tu rayonnes ! Tu sors plus souvent avec nous et j’ai repensé aussi à ce que m’a dit après mon entretien. Je sais pas quand papa va être au Paradis mais comme pour Léo, je comprends ce sentiment. Mais par pitié, fait en sorte que rien ne soit préméditée ! Tu vois, un truc naturel !

— Tu as un humour glauque ma fille ! Je compte bien évidemment….

— Tu te mens, tu comptais te suicidée ?

Elle se rapproche presque avec reproche mais en parlant plus bas. Je me retourne vers les jumeaux avouant :

— Vous êtes tous des drogues pour moi mais ne les prenait pas comme une trahison, ton père, se meurt, je ressens la fin. Il avait beau avoir du répit, de l’espoir plusieurs fois, plus rien ne fonctionne. Je ne vais pas vraiment m’en aller, juste, je serais plus absente pour éviter la douleur. Ça aurait dû être moi, moi à mes vingt-quatre ans. J’ai mon troisième cœur et je t’avoue aussi que ce n’est pas un mensonge que j’ai expliqué à la presse. Ce greffon sans médocs à des promesses mais ce qui tue, ce sont les deuils, les traumas qui reviennent nous enterrer. J’ai beau avoir un super suivi, cette machine devra être testé sur des sujets moins vulnérables. C’est pour ça, que oui, tu me revois revenir, partager, c’est pour que chacun de nous puissent garder de beaux souvenirs. Alvaro nous laisse en famille et il reviendra le jour, enfin tu comprends.

— Pardon maman, je le redis, je le comprends mais je ne peux le concevoir. Heureusement que papy et mamie ne savent rien. Et Adela, tu lui a dit aussi ton état ?

— Elle le sait. Au fait, promet moi une chose ma chérie.

— Je t’écoute maman.

— Enfin deux plus tôt. Pour les garçons, ils faudra leurs donner une lettre à chacun quand ils ont quinze ans. Je te le redirais dans mon testament. Je préfère qu’ils savent mon passé uniquement ce moment-là. Et deuxième chose, j’ai bien peur que mon enquête ne soit résolu d’ici là donc, je te laisserais fouiner avec Eva et Alvaro même Adela, si elle veut.

— D’accord maman. Avant que tu partes là-haut puis à ton rendez-vous, s’ils ont faim et tout, je pense appeler Adela ou Alvaro non ? Papa n’est pas là et ils ont une si grande énergie, que je vais pas m’en sortir !

— Tu as raison, oui ton père est en centre ! Je pensais tu vois, qu’il allait revenir comme ça…Je devrais me reposer finalement. Je t’aime ma puce, je vais écrire à Adela et surtout reprendre la photo. Et oui, je devais surtout parler à Eva de ce jour-là.

…..

Elle m’embrasse sur la joue puis s’en va en fixant la photo sans se retourner. Je m’assoie à côté de mes frères qui sont paisibles à sucer leurs pouces.

« Et deuxième chose, j’ai bien peur que mon enquête ne soit résolu d’ici là donc, je te laisserais fouiner avec Eva et Alvaro même Adela, si elle veut. »

La photo glacée me donne déjà des frissons. Ces gamines qui ne pouvaient imaginer le drame. Ma mère a raison, tout était sans doute planifié. Comme le Gardien travaillait pour un trafic d’enfants, était-ce possible qu’Eva et Emilia ont été manipulés pour….

Je me lève d’un coup, ça réveille les petits, je les rassure et file vite retrouver ma mère pour exposer ma théorie.

— Maman, Eva, tu avais bien connu ses parents ?

Non mais je rêve ! Elle fume en cachette ?! C’est donc ça aussi l’odeur étrange de la cigarette ? Moi qui pensait que c’était à la limite ma tante ! On habite maintenant dans la maison des mes grands-parents refait à neuf pour plus de place pour notre famille.

— C’est compatible ça ?! Putain maman ! Je pensais à tata ou le reste de pipe de papy ! Je sais que tu déconnes mais c’est grave ça !

— Je t’ai dit de les surveiller ! Putain ! Ils se font mal !

Elle me repousse en après avoir écrasé la cigarette. C’est elle qui se fout de ma gueule là ! En bas, elle fait le bilan de potentiel bobos. Ils ont juste des égratignures mais elle reste paniqué comme s’ils s’étaient cassé un bras.

— Bobo maman.

— Maman va vous soigner de suite Izan. Luna, prend Manu, on file dans la salle de bain !

Manuel pleure plus qui ne parle contrairement à Izan. Le pédiatre n’est pas à l’ordre du jour, pas de premier bilan avec un nouveau et ce n’est pas le moment d’affoler ma mère. Une fois les deux soignés, Adela arrive pour les occuper, voyant une tension.

Mais ma mère préfère prendre de l’avance pour son rendez-vous, nous embrasse rapidement et claque la porte. Les jumeaux pleurent du départ et c’est reparti pour un autre tour de consolation.

— Ta mère sent la fumée, j’imagine que tu l’as surprise et que celui a pas plus ?

— Maman…papa…

— Oui ils vont revenir mon petit. D’ailleurs, je m’étonne que personne n’a remarqué qu’il y a qu’Izan qui s’exprime non ? Tu veux dessiner ? Tiens, tata vous donne de quoi faire de jolies dessins pour papa et maman.

— Je vais préparer le thé, tu en veux ?

— Un café alors.

Lors de mon retour, je dépose la photo et lui raconte tout. Son silence m’angoisse et je redoute la réponse :

— Ta mère même avant que je quitte le navire avant ses treize ans, à toujours été en quête de quelque chose. Si elle veut en finir après le deuil, c’est pas mon genre de le dire mais, c’est son choix. On veillera sur les jumeaux, on continuera à tenir nos promesses de tout dénicher. Je ressens moi aussi que c’est ce Gardien qui a garder d’autres archives autre que des photos glauques des crimes. Je peux faire confiance aux autorités sauf que j’ai plus confiance en ma sœur. Pour le moment, on s’occupe de ses bouts choux et à son retour, je vais lui parler. On doit tous l’aider à résoudre les mystères pour elle, pour Eva, Emilia et les anonymes.

Je ne sais quoi rajouter et c’est Manuel qui me fait penser à autre chose en donnant un feutre. Alors je dessine avec eux, retrouvant ma petite enfance à moi aussi, mettre du soleil à des maisons escaliers crocodiles et autres traits bizarres.

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