Chapitre 22 : Mélanie

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Une journée entière était passée depuis que Maxime avait été touché par l’énergie du Serpentaire. Une journée entière qu’Adrien et lui étaient enfermés dans leur chambre sur la mezzanine. Une journée entière que Mélanie guettait tout signe d’apparition d’une partie démoniaque chez leur malade

Elle essayait de ne pas trop faire espionner les pensées de Maxime, mais étant le seul humain dans les parages, il lui était compliqué de ne pas l’entendre. Étrangement, il était simple pour la Gémeaux d’avoir ses pensées dans sa tête. Il était très calme et serein. Pour un simple humain, son esprit était parfaitement rangé et ordonné. Aucun sentiment ne venait au-dessus de l’autre, aucune émotion ne le tiraillait d’un côté ou de l’autre. Tout était calme, parfaitement zen. Maxime était un vrai havre de paix, même en cette période difficile. Elle comprenait ce qu’Adrien pouvait tant lui trouver, en plus de son physique charmeur, il fallait l’avouer.

À cette pensée, elle tourna les yeux de l’autre côté du salon. En cuisine, en train d’essayer de préparer le repas du midi, Dorian lui tournait le dos. Malgré la chaleur, grâce au soleil qui tapait contre les grandes fenêtres, il portait toujours son col roulé. L’époque où il était libre de lui-même lui manquait. La chaleur de sa peau et la douceur de ses lèvres étaient deux sensations qu’elle aimerait revivre et connaître à nouveau. Il lui manquait.

Elle se leva, prête à réduire la distance qui la séparait de lui, lorsque deux coups furent frappés à la porte. Dorian se retourna aussitôt. Ils se regardèrent tous les deux, surpris, personne ne savait qu’ils étaient ici et Martin était dans sa chambre. Un étranger avait réussi à remonter jusqu’à eux.

Mélanie fit signe à Dorian d’attendre. À part les faibles pensées de Maxime, son esprit était complètement calme. La personne qui venait de frapper n’était pas humaine, il ne pouvait s’agir que d’un Zodiaque. Or, jusqu’à présent, lorsqu’ils s’étaient retrouvés face à un des leurs, il était toujours accompagné de démons. Pourtant, sa tête n’était pas remplie du bourdonnement incessant de ces créatures.

Elle s’approcha doucement de la porte, et abaissa la poignée. Elle l’ouvrit d’un coup surprenant la personne qui se trouvait derrière.

Elle eut elle-même un hoquet de surprise en découvrant le Serpentaire, là devant sa porte. Il se tenait à quelques pas d’elle, avec ses yeux marron cernés, ses cheveux bruns délaissés par le temps qui s'ébouriffaient sur le haut de sa tête.

— Ne l’approche pas ! s’interposa Dorian entre eux faisant s’élever son poison de ses mains.

— Je ne suis pas là pour créer des ennuis, se défendit-il en levant les mains en l’air en signe de reddition. Je veux aider.

Sa voix était d’une chaleur à caresser la peau. Ses mots s’enchaînaient comme les paroles d’une chanson. C’était la première fois pour Mélanie qu’elle souhaitait entendre la voix de quelqu’un dans sa tête.

— Nous aider ? Après tout le mal que tu as causé ?

— Justement ! Je n’ai jamais voulu de tout ça ! Vous ne comprenez pas. Vous ne me connaissez pas.

— On sait toutes les horreurs qui ont eu lieu à cause de toi !

— Ce n’est pas de ma faute ! Vous ne savez pas comment ça fonctionne, vous ne connaissez pas le revers de la médaille.

— Et on… commença le Scorpion.

— Laisse le entrer Dorian, le coupa Mélanie.

— Quoi ? Mais…

— Je crois qu’on devrait écouter ce qu’il a à dire. Il est venu seul et de lui-même. Si c’était un piège, il n’aurait pas fait ça. Si des démons arrivent, je les entendrai.

— Et s’il s’agit d’autres Zodiaques ?

— Si c’était le cas, ils seraient déjà là. Laisse le entrer.

Mélanie regarda Dorian abaisser ses mains et faire disparaître sa fumée. Il s’écarta sans pour autant détourner son regard du nouveau venu.

La Gémeau comprenait sa réticence, elle était aussi sur ses gardes, mais quelque chose chez le Serpentaire lui inspirait confiance. Maintenant, qu’elle le voyait de près et au calme, elle avait une autre vision de lui.

Ils le laissèrent entrer dans l’appartement et refermèrent la porte derrière lui, sans manquer de vérifier qu’il n’y avait personne dans la cage d’escalier. Leur sérénité venait d’être compromise.

— Toi ! s’écria Adrien.

Sans crier gare, le Vierge se jeta sur le Serpentaire. Il le fit basculer en arrière et l’empêcha de se relever en se positionnant au-dessus de lui. Il l’enchaîna. Adrien le frappa encore et encore. Il y mettait toute sa rage. Sous lui, il n’y avait aucune défense. Le Serpentaire ne cherchait même pas à se protéger, ni même à le repousser. Il subissait sans se défendre.

Mélanie se tourna vers Dorian. Il devait agir, si Adrien continuait ainsi, il risquait de le tuer. Dorian dû capter son message puisqu’il s’approcha à grands pas dans le dos du Vierge, passa ses bras sous les aisselles de son ami et le tira en arrière.

— Ça suffit ! lui ordonna-t-il.

— Il a transformé Maxime ! se débattit-il encore rouge de colère.

La Gémeau s’accroupit à côté du Serpentaire et l’aida à se relever. Il était bien amoché, son œil commençait déjà à changer de couleur, son nez saignait et une boule se formait au niveau de sa mâchoire.

— Il est venu de lui-même et il a dit qu’il voulait nous aider, répondit Mélanie.

— Et comment ? Il n’existe pas de remède !

— Peut-être que si, bégaya-t-il en portant sa main à sa mâchoire.

— Il devrait prendre ma glace, il en a plus besoin que moi à présent.

Maxime venait d'apparaître en haut des escaliers. Mélanie ne put s’empêcher de porter ses mains devant sa bouche. À présent, toute la partie gauche de son visage était recouverte de cette substance noire. Ses traits étaient toujours humains, mais vu la propagation de l’essence démoniaque, il devenait urgent de faire quelque chose.

— Quelle serait la solution ? demanda-t-il en descendant les escaliers et se tenant fermement à la rambarde.

— Il faudrait améliorer votre Vierge, avec le même mélange qui a permis de soigner Martin quand il était enfant.

— Tu t’en souviens ? demanda le concerné.

— Bien sûr. Tu étais très malade, ton père n’avait plus aucune solution alors il est venu voir le mien. C’est ensemble qu’ils ont mis au point ce procédé. Je peux le refaire, je peux vous aider à le sauver. J’en suis persuadé.

— Comment être sûr qu’il ne nous ment pas ! Je n’ai aucune confiance en lui. C’est de sa faute si on en est là ! Il est à l’origine de tout ça ! C’est lui qui crée les démons et qui mène des expériences sur les nôtres ! hésitait Adrien.

— Ce n’est pas aussi simple ! contra-t-il.

— Alors explique-nous !

— C’est bien trop compliqué et bien trop long ! On n’a pas le temps.

— Dans ce cas, tu ne feras rien !

— Arrêtez tous les deux ! intervint Mélanie.

Elle en avait marre de les entendre. Ils ne faisaient que se renvoyer la balle, mais cela ne faisait rien avancer. Ils perdaient du temps pour rien.

— Je vais rentrer dans sa tête ! déclara-t-elle. J’irai avec lui dans ses souvenirs. Je pourrais ainsi trancher sur la véracité ou non de ses paroles.

— Tu es sûre que c’est une bonne idée ? lui demanda Dorian qui s’était rapproché d’elle.

— Aucun espace mental ne m’a fait peur jusqu’à présent. Et comme ça, on sera fixé une fois pour toutes. Tu es d’accord…

— Enzo, répondit-il à sa question silencieuse. Je n’ai jamais tenté l’expérience, mais je suis d’accord pour que tu viennes voir mes souvenirs.

— Très bien ! Alors c’est réglé !

Ils s’installèrent tous les deux sur le canapé du salon. Maxime s’était assis sur le fauteuil d’à côté. Son état empirait à vue d'œil, il avait du mal à cacher sa douleur à présent. Mélanie savait qu’elle devait faire vite, que son passage dans la tête d’Enzo était obligatoire, mais qu’elle ne devait pas perdre de temps à l’intérieur.

— Je veux que tu fermes les yeux, lui intima-t-elle, et que tu ouvres ton esprit. C’est comme si tu ouvrais une fenêtre à l’intérieur, laisse l’air s’engouffrer à l’intérieur et je ferai de même.

Elle posa une main sur son épaule et le sentit se détendre à son contact. Elle ferma les yeux à son tour et trouva rapidement la porte pour pénétrer son esprit. À peine eut-elle passé le seuil, que le vide autour d’elle prit forme. Le bunker où ils l’avaient vu la première fois se matérialisa autour d’elle.

— Alors voilà à quoi ressemble ma tête. J’y ai passé toute mon enfance, ce n’est pas étonnant que mon mental ait choisi cette représentation.

Cette fois-ci, on était bien loin du souterrain vide et froid que Mélanie et les autres avaient pu voir. Il était entièrement aménagé, comme une petite maison. Un coin salon avec canapé et télévision était installé dans un coin, tandis qu’une mignonne kitchenette entièrement équipée faisait l’angle de l’autre côté.

— Ce n’est plus comme ça aujourd’hui… notifia à voix haute Mélanie.

— Non, ils m’ont tout fait sortir lorsqu’ils m’ont découvert.

— Qui ça ?

— Les Zodiaques, ceux pour qui je travaille.

— Si tu commençais par me montrer comment tout a commencé ?

Ils changèrent de pièce. Enzo la mena dans celle qu’ils n’avaient pas ouverte lors de leur découverte. Il s’agissait d’un petit laboratoire de chimie. Il était entouré de grandes étagères toutes plus encombrées les unes que les autres. Des bocaux et récipients de toutes formes et toutes tailles s’empilaient les uns sur les autres.

— Concentre-toi sur le moment que tu veux me montrer, indiqua Mélanie. Tu sauras alors où le trouver au milieu de tout ça.

Elle le regarda fermer les yeux et un dixième de seconde plus tard, l’un des pots s’alluma d’une lueur orangée. Enzo s’en empara et revint vers Mélanie.

— Prête ?

— C’est plutôt toi, est-ce que tu es prêt ? Il est toujours étrange de revivre ses propres souvenirs.

D’un haussement d’épaules, il dévissa le couvercle. Aussitôt, Mélanie se sentit aspirée à l’intérieur. Lorsque la lumière se dissipa, elle se trouvait toujours dans le bunker. Elle n’avait pas bougé d’un pouce. Enzo se tenait toujours à côté d’elle. Elle suivit son regard et découvrit un lui de plusieurs années plus jeune recroquevillé en boule sur le sol.

Il était pris de spasmes. Son corps tremblait de toute part. D’un coup, une nouvelle convulsion le prit et une onde d’énergie noire explosa autour de lui. Mélanie se protégea par réflexe, mais rien ne se passa. Elle n’était pas vraiment là et lui non plus.

Vu sa mine renfrognée, Mélanie n’essaya pas de parler au Enzo de son époque. Ils restèrent là, à regarder son jeune lui pendant une dizaine de minutes. Dizaine de minutes où il envoya six vagues d’essence de démon avait compris Mélanie.

Et puis d’un coup la porte s’ouvrit. Trois Zodiaques débarquèrent dans la pièce. Parmi eux, Mélanie reconnut tout de suite l’ancien des Balances. Il était là accompagné de l’oncle de Martin, et d’un Capricorne qu’elle reconnut à son symbole.

— Alors tu es bel et bien vrai, commença le Balance de sa voix éraillée.

Il s’avança vers Enzo, se pencha comme il put malgré son âge et posa une main sur sa tête. Aussitôt, les tremblements du Serpentaire cessèrent.

— Tu as besoin de nous, continua-t-il. Sans nous, tu ne peux pas vivre. À partir de maintenant, tu feras ce qu’on te demande si tu ne veux pas devenir une bombe.

L’image se brouilla devant les yeux de Mélanie. Le jeune Enzo et les trois autres Zodiaques disparurent, tandis que le Serpentaire refermait le bocal et le souvenir par la même occasion.

— Qu’est-ce que cela signifie ? demanda-t-elle.

— Tous nos dons sont aussi des malédictions. Il y a chaque fois un revers de la médaille. Les Serpentaires, nous absorbons une énergie que nous sommes les seules à percevoir et nous l’emmagasinons en nous. Le problème est que nous n’avons aucun contrôle dessus et lorsqu’on en absorbe trop alors on a besoin de se décharger. Soit nous explosons et libérons cette énergie qui transforme les humains en démons, soit nous la transmettons aux Zodiaques qui y sont immunisés.

— Sauf que depuis votre bannissement, vous êtes seuls… comprit Mélanie.

— Tu l’as vu toi-même, à cette époque, sans personne, je libérais cette énergie en continu. Je ne pouvais plus sortir du bunker. J’étais un danger pour tous les humains. S’ils ne m’avaient pas trouvé, j’aurais sombré dans la folie et j’aurai sûrement mis fin à mes jours.

— Tu les aides pour pouvoir continuer à vivre, conclut-elle.

— C’est égoïste, je sais. Mais maintenant que vous êtes là, j’ai une chance de m’en sortir. Une chance de rattraper mes erreurs.

— Je comprends… Mais si tu veux convaincre les autres, et surtout Adrien, il va falloir sauver Maxime.

— Je sais et je suis sûre de ce que j’avance. On peut le sauver en améliorant le pouvoir d’Adrien. Sa barrière fait disparaître l’essence démoniaque lorsqu’elle est accrochée à un corps, en la modifiant, il pourrait l’aspirer sans qu’elle n'ait d’hôte.

— Il pourrait alors la récupérer quand Martin la fait fondre !

— Exactement, il n’y a qu’à concocter la formule et ils pourront le sauver.

— Mais ce n’est pas ce que tu essaies de créer depuis tout ce temps ? De recréer la formule qui a permis de faire évoluer le pouvoir de Martin.

— Si, mais je l’ai fait tourner en rond depuis tout ce temps. Mon père m’a transmis le procédé.

Elle le vit fermer les yeux une nouvelle et cette fois-ci, ce fut un petit cahier qui prit des couleurs sur la table centrale. Il l’ouvrit et Mélanie put y lire tous les ingrédients dont ils avaient besoin. Ce n’était pas si compliqué. Ils pouvaient le faire. Ils pouvaient sauver Maxime.

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