Chapitre 11 : Citrons givrés

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Marc partait dans une semaine. Il avait mis ses papiers à jour, Rosa était prête et allait faire son premier service comme cheffe ce jour-là. Il savait qu'elle était stressée, il avait essayé de la calmer et de la rassurer. En même temps, cela aurait été surprenant qu'elle ne soit pas stressée. Il l'était toujours un peu, à chaque service. La réussite tenait certes du chef mais aussi de la brigade, si celle-ci n'était pas en accord, alors rien de bon ne pourrait sortir de la cuisine.

- Tout va bien, Rosa ? lui demanda-t-il alors qu'il la croisait en sortant de son bureau.

- Bien chef. Vous avez des nouvelles du frigoriste pour la porte de la chambre froide ?

- Il n'a pas répondu à mon message, mais il est rare qu'il le fasse. Il devrait passer dans les soixante-douze heures.

- Bien, je rappellerai à l'équipe de faire attention.

Il la laissa prendre ses marques dans la cuisine pour préparer le service et alla en salle faire le point avec son équipe.

Rosa salua les commis qui étaient déjà en train de préparer la cuisine et d'éplucher les nombreux légumes. Elle leur demanda un rapide topo et leur rappela les différentes découpes qu'elle souhaitait. Elle avait commencé, avec l'aide du chef Marc, à modifier des petites choses ici et là. Elle donnait sa touche personnelle à la cuisine.

Les autres cuisiniers et Mia la pâtissière arrivèrent. Rosa les réunit pour le briefing :

- Bon ce midi, c'est mon premier service comme chef auprès de vous. Je compte sur vous pour faire de votre mieux. Nous avons une douzaine de réservations. Ce devrait être assez tranquille. Les commis ont préparé la matière première. Chacun sait ce qu'il a à faire. C'est parti !

- Oui cheffe !

Ça y est elle les ressentait de nouveau ces frissons d'excitation, ces papillons qui lui rappelaient à quel point elle se sentait à sa place. Tout se passa plutôt bien jusqu'à ce que vers treize heures trente, Barbara arrive affolée en cuisine :

- Cheffe ! On a un groupe de vingt-cinq personnes qui vient d'arriver. Peut-on les servir ?

Rosa ne réfléchit pas longtemps, elle avait fait l'inventaire, elle savait ce qu'elle pouvait servir :

- OK, mais tu limites la carte au plat du jour, au saumon et au pavé de bœuf.

L'hôtesse hocha la tête et repartit.
Rosa s'adressa alors à sa brigade :

- On va redistribuer les rôles afin d'être efficaces. Robert je te mets aux cuissons des accompagnements avec les commis, Fred, au poisson. Mia tu me donnes un coup de main pour les entrées. Sofiane, c'est bon pour les sauces ?

- J'en ai à refaire un peu, mais c'est jouable.

Rosa acquiesça et attendit que les commandes arrivent. Elle remarqua que Robert tiqua en voyant les réserves de légumes. Il relança une casserole de riz et invectivait les commis pour qu'ils s'activent. Rosa commença à placer les assiettes pour les entrées afin qu'elles partent en même temps. Mia envoya les derniers desserts des clients déjà attablés.

La serveuse revint et annonça les entrées et les plats : finalement ils avaient uniquement choisis deux entrées. Elle rappela à chacun le nombre d'assiettes qu'ils avaient à sortir. Elle se chargerait de la cuisson des pavés de bœuf, il n'en fallait que cinq, elle s'en occuperait après les entrées. Elle se plaça de manière à avoir un œil sur chacun tout en se concentrant sur ses assiettes. Elle appréciait la préparation avec Mia, elles trouvèrent rapidement leur rythme. Dans un ballet coordonné, les assiettes se remplirent et partirent les unes après les autres en quelques minutes.

Avant que les assiettes ne soient toutes parties, elle vit du coin de l'œil, Robert s'énerver sur Mathéo. Le pauvre commis s'était trompé dans la découpe des carottes. Les morceaux bien trop gros ne pourraient être cuits à temps. Il renvoya Mathéo chercher des légumes et il entreprit de retailler les carottes tandis que Carla, le second commis commençait les cuissons.

Quand Rosa eut terminé, elle prépara la viande.

- Robert besoin d'aide ?

- C'est bon cheffe, j'attends Mathéo.

La jeune cheffe hocha la tête et reprit sa tâche. Cinq minutes plus tard, un grognement se fit entendre :

- Bon sang ! Mais qu'est-ce qu'il fout !

- Que se passe-t-il Robert ?

- Mathéo n'est toujours pas revenu.

Rosa ayant une intuition quitta son poste :

- Le frigo !

Quand elle approcha de la réserve, elle entendit les appels désespérés du jeune commis. Sans attendre elle lui ouvrit. En larmes, Mathéo grelottait. Elle le prit dans ses bras pour le réchauffer. Le pauvre était frigorifié. Marc certainement prévenu par Martha la serveuse, arriva et lui dit qu'il prenait le jeune commis en charge. Rosa repartit à ses fourneaux et constata que ses pavés étaient fichus. Sans se formaliser, elle les jeta et en reprit d'autres et reprit la cuisson de la viande. Elle avait juste terminé quand il fallut servir.

La fin du service fut plus calme et Rosa félicita son équipe :

- Vous avez vraiment bien géré. Robert bravo pour ta concentration et ton professionnalisme.

- Merci cheffe. J'aurais tout de même dû m'inquiéter de Mathéo plus tôt. Il est dû genre efficace ce n'était pas normal qu'au bout de cinq minutes il ne soit pas de retour.

- Ce n'est pas de ta faute, c'est celle de la porte qui est cassée. Je vais harceler le frigoriste pour que ce soit réparé d'ici demain.

Il hocha la tête satisfait et rassuré que la cheffe ne lui tienne rigueur de rien. Martha arriva sur cet entrefait et déclara que Rosa était attendue par le groupe. Rosa ôta son tablier, se rafraîchit rapidement et vit tout d'abord Mathéo près du zinc avec Marc.

- Comment vas-tu Mathéo?

Il se remit aussitôt à sangloter.

- hey là ! Ne te mets pas dans cet état. Tout va bien.

- J'ai... Je... Je le savais bien que la porte était cassée, tu l'avais rappelé au début du service, mais j'étais tellement stressé...

- Ce n'est pas de ta faute Mathéo, le réconforta Marc, puis s'adressant à Rosa, le frigoriste sera là dans deux heures, je l'ai harcelé.

Rosa sourit, ils étaient bien pareils tous les deux.

- Mathéo tu as fait du bon boulot, on aurait dû s'inquiéter de toi plus tôt, tu es quelqu'un de rapide et efficace cela n'était pas normal que tu ne sois pas revenu aussitôt.

Le jeune calma ses sanglots et un léger sourire fleurit sur ses lèvres.

- Je dois aller voir nos clients. Je reviens.

Les deux hommes aquiescèrent et Rosa rejoignit la salle. Barbara discutait avec un homme qui se trouvait dos à Rosa. Elle entendit alors l'hôtesse dire quand celle-ci l'aperçut :

- Ah ! Voilà notre cheffe !

L'homme se retourna lentement. Rosa le reconnut aussitôt. Il n'avait pas changé, il était toujours aussi écœurant. Son sourire pervers et ses petits yeux libidineux glissèrent sur toute la silhouette de la jeune femme. Rosa retint un frisson de dégoût et pinça les lèvres pour retenir la bile qui lui montait aux lèvres. Barbara s'éloigna rapidement ravie d'être débarrassée de ce client un peu trop tactile et aux manières un peu déplacées.

- Rosa ! Comme je suis heureux de te revoir ! Allez viens embrasser tonton Luigi !

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