Annonce d'un futur heureux événement et nuit agitée

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Tard dans la soirée, je rentrai chez moi. Sophie, ma petite femme bien aimée, m'attendait avec impatience. Je l'embrassai tendrement et me dirigeai aussitôt vers la chambre pour me déshabiller. Elle m'emboita aussitôt le pas.

La connaissant, je savais qu'une scène de ménage, aussi inévitable qu'un orage d'été, se préparait à l'horizon dès que je lui raconterai ce qui m'était arrivé.

— Tu en a mis du temps pour rentrer ! Tu aurais pu me prévenir que tu reviendrais tard. Tu es allé au magasin aujourd'hui t'acheter des vêtements ? Ils sont super ! Et puis, tu sens bon ! On dirait que tu viens de prendre une douche ! Humm !

— Merci ma chérie, répondis-je en me penchant en avant pour lui rendre son baiser, mais je ne les ai pas achetés, on me les a prêtés.

— Mais j'aimerais bien savoir pourquoi. Qu'as-tu donc fait de ton beau costume ?

— Euh... en fait... hum… je suis tombé dans une vasière pendant que je cherchais des indices.

Elle eut un sursaut. Et ce fut un déferlement de reproches, ce à quoi je m'attendais. Je baissai la tête, prêt à affronter l’averse.

— Comment ? Mais qu'est-ce que tu racontes ? Tu devrais faire plus attention. Tu prends beaucoup trop de risques. Glisser dans une vasière ! Mais quelle idée ! Et presque à la tombée de la nuit ! Et puis le costume et les chaussures que je t'avais offerts pour ton anniversaire, que sont-ils devenus ?

Sous cette avalanche de remontrances, et surtout aussi parce que j'étais exténué, je pris la mouche et m'emportai à mon tour :

— Le costume, il est dans le garage en attendant d’être lavé ! Et les chaussures, elles sont désormais englouties dans la vase où je me suis enfoncé. Et puis, tu n'as pas épousé un comptable, ni un inspecteur des impôts, ni un notaire, assis derrière un bureau, mais un policier. Tu étais prévenue, ce métier présente parfois des aléas, voire quelques risques !

— Des aléas ! Des risques ! Les risques, tu les cherches quand même un peu ! Et moi, je tremble pour toi tous les jours quand tu ne rentres pas de bonne heure ! Et j’ai besoin de toi pour élever notre enfant.

Elle éclata soudain en sanglots tandis que je recevais comme un gros coup de massue sur la tête.

— Hein ? Quoi ? Un enfant ? Quel enfant ? Tu attends un bébé ?

— Oui, je suis enceinte de trois mois ! Le docteur me l'a confirmé ce matin, et je n'ai pas eu le temps de t'en parler, à cause de notre dispute idiote !

Un vertige me saisit. Les jambes me manquèrent et je m'assis sur le bord du lit. J'étais sans voix. C’était une merveilleuse nouvelle. Alors, ça y était, j'allais être père pour la première fois. Bien entendu, nous avions fait tout ce qu’il fallait, mais je ne croyais pas que cela allait fonctionner si rapidement.

Jusqu'à présent, cela me paraissait encore abstrait. Et là, ça avait marché ! J'allais devenir papa à mon tour, être responsable d'un petit être qui venait de nous deux. J’avais l’impression de vieillir tout à coup.

— Mais, pourquoi ne m’en as-tu pas parlé plus tôt ?

— Je le savais, mais je ne voulais pas te décevoir … au cas où… je voulais être sûre… hoqueta-t-elle.

Elle se tut. J’avais compris. Petite, elle avait vu sa mère faire plusieurs fausses couches et elle craignait de faire de même. Pauvre petite Sophie qui gardait son secret pendant des semaines, redoutant de me faire une fausse joie, comme si ce malheur pouvait la frapper elle aussi. Tout ça pour m’épargner. Elle m’avait certainement caché ses nausées matinales.

Mes yeux se mouillèrent à mon tour. J'étais bouleversé. Elle s’assit au bord du lit et je la pris dans mes bras. Je couvris son front et ses joues de baisers. J’embrassai ses larmes pour les faire disparaître. Je ne voulais plus qu'elle pleure à cause de moi. Je me sentais tellement honteux, tellement coupable de m'être fâché alors qu'elle s'inquiétait tant à mon sujet.

Nous restâmes assis au bord du lit un long moment, l'un contre l'autre. Je me rappellerai toujours de ce doux moment, moi entourant ses épaules de mon bras, respirant l'odeur de ses cheveux blonds et la tenant serrée tout contre moi. Elle avait retrouvé le sourire.

Ma chère Sophie, l'amour de ma vie, ma ravissante épouse aux cheveux couleur de miel, mon rayon de soleil. Sa petite stature ne lui enlève en rien son caractère affirmé et son franc-parler. Ancrée dans la réalité, elle est celle sur qui je peux toujours compter. Elle possède ce talent de remettre mes idées en ordre, parfois avec une certaine fermeté.

Et là, elle m'offrait le plus beau cadeau qui soit. Je ne devais pas la décevoir et je me promis de faire amende honorable et de m'assagir. Ne plus prendre autant de risques, autant que possible.

---

La nuit qui suivit cette journée mouvementée ne fut pas de tout repos. Je dormais profondément lorsque je fis un rêve étrange.

Je flottais dans les eaux sombres du bras mort où j'avais retrouvé le corps. Une force inconnue me tirait vers le bas. J'avais beau me débattre, ma lente descente continuait, l'eau envahissait mes poumons, le froid mordant de l'eau me saisissait. Soudain, le cadavre que j'avais trouvé apparut, surgissant des eaux troubles, flottant dans son costume, parmi les plantes aquatiques qui ondoyaient autour de lui. Il me parlait, des bulles se mêlant à ses paroles, sans que je n'en comprenne le sens...

Terrorisé, je me mis à crier, mon cœur battant la chamade. Je me redressai sur les oreillers et m’assis dans le lit. Mon épouse, réveillée en sursaut, se retourna vers moi et me demanda ce qu'il se passait.

Je lui racontai mon cauchemar.

— C'est horrible, en effet ! C'est sûrement la découverte de ce corps qui t'a traumatisé de manière inconsciente.

— Pourtant, lorsque je l'ai trouvé, je n'avais pas vraiment eu peur de lui.

— Mais alors, comment faisait-il pour te parler puisqu’il était sous l’eau ?

— J’en sais rien ! Tu sais, les rêves… Ce n’est pas toujours logique ! En tout cas, j’ai bien entendu sa voix. Une voix douce et grave à la fois… Mais, comme il murmurait, je n’ai pas compris ce qu’il me disait.

— T’aurais pu lui demander de répéter ou de parler un peu plus fort !

— Ah ! Très drôle ! Moque-toi donc de moi !

— Une voix ! Voilà autre chose, maintenant ! Mon mari entend des voix dans ses rêves !

Elle soupira et se retourna de l’autre côté.

— En tout cas, bravo ! grogna-t-elle. Merci d’avoir gâché ma nuit ! Maintenant, je vais mettre un temps fou à me rendormir !

— Désolé, ma chérie !

Je restai assis, dans le noir, adossé à mon oreiller que j’avais redressé. Je craignais de retomber dans ce cauchemar et je me sentais oppressé. Je tâtai mon front. Il était en sueur. J’avais sûrement dû attraper froid.

Sophie s’était quand même rendormie. Je percevais sa respiration régulière. Et moi, j’étais maintenu en éveil par une sourde et inexplicable inquiétude. Soudain, je me mis à grelotter.

Mon esprit était en ébullition et les pensées tourbillonnaient, alternant l'enquête et ma future paternité. Un grand changement dans ma vie s'annonçait et cela me travaillait.

Finalement, je me levai et enfilai ma robe de chambre pour aller dans la cuisine me faire un bon grog. J'irai sûrement mieux.

Je réfléchissais en sirotant ma réconfortante boisson qui me réchauffait et me tournait un peu la tête. Tout ceci me paraissait bien étrange et mystérieux. Le corps du disparu, retrouvé dans un marais, attaché par une corde, le château, la propriété, la branche coupée dans le massif de fleurs…

Tout me revenait à l'esprit mais en vrac. C’était comme un puzzle insolite, aux pièces éparpillées. J'étais incapable de réfléchir.

Et cet enfant à venir, ce rôle de père qui m'angoissait un peu et qu'inconsciemment, je n'étais pas prêt à endosser.

Et puis ce rêve, que voulait-il dire ? Un homme qui parle sous l’eau. Ça n'a aucun sens !

La fatigue m’envahissait peu à peu et mon esprit se brouillait.

---

Je me réveillai au petit matin, la tête sur la table de la cuisine où je m’étais assoupi à côté de mes plans et de mon bol de grog. Les spirales de mon carnet s’étaient imprimés sur ma joue, y créant de curieux dessins. Je massai mon cou ankylosé, puis me levai pour préparer mon petit déjeuner. Je me sentais fatigué, la gorge brûlante et le nez bouché. J’avais attrapé un sacré rhume !

Un peu plus tard, Sophie déboula dans la cuisine, alors que je finissais mon bol de café. Elle avait sa tête des mauvais jours. Un peu en rogne et des valises sous les yeux. Pas étonnant, dans son état ! Et si en plus je perturbe son sommeil… Et ma mine ne devait pas être meilleure que la sienne.

— Alors, ça va mieux ? me lança-t-elle.

— Si on veut !

— En tout cas, tu as attrapé un sacré rhume ! Tu parles comme un canard.

Puis, je me mis à tousser. Une toux caverneuse.

— Est-ce bien raisonnable de retourner travailler dans ton état ? Tu devrais rester au lit. Je m’occuperai bien de toi, mon chéri ! se radoucit-elle en me caressant le dos.

Me voyant ainsi mal en point, elle était redevenue gentille.

— Je vais appeler ton commissaire et lui dire que tu es malade, continua-t-elle. Au besoin, je te ferais un mot d’excuse et je te soignerais… Et si ça empirait, j’appellerais le docteur.

C'était un programme bien tentant...

— Non, ça va aller ! Je vais aller au commissariat. Ce n’est pas un simple rhume qui va m’empêcher d’aller bosser.

— Comme tu voudras ! En tout cas, tu auras perdu l’occasion de fainéanter un peu au lit !

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