Chapitre 7 — Toujours là, mais fatiguée
Une minute de lecture
(Point de vue de Mila)
Parfois j’aimerais qu’elle me crie dessus.
Qu’elle me dise : "Laisse-moi tranquille." Ou "Tu ne peux pas comprendre."
Mais elle ne dit rien. Elle baisse les yeux. Elle se referme.
Et moi, je reste là, comme une conne, à deviner ce qu’elle ressent. À porter un truc que je ne vois même pas vraiment.
Je l’aime, Sarah. Plus que n’importe qui. Depuis qu’on a dix ans. Depuis qu’on a fait semblant d’être des sirènes dans une piscine municipale toute pourrie.
Mais bordel…
J’ai le droit d’en avoir marre, non ?
J’ai le droit d’être triste, moi aussi. D’avoir mal pour elle. D’avoir peur pour moi.
Parce que je la vois s’éteindre par moments. Et j’ai peur qu’un jour, elle ne revienne pas.
Et pourtant, je reste. Je reste toujours.
Parce que je me rappelle ce matin-là. Où elle ne parlait plus. Où elle tremblait sans comprendre pourquoi.
Elle me l’a dit. Une fois.
Elle m’a dit ce qu’il lui avait fait. Et depuis, je ne le regarde plus. Je ne regarde plus aucun garçon pareil.
Et depuis, je fais attention.
À ce qu’elle boit. À comment elle respire.
À si elle met du mascara ou pas.
Je la connais comme un livre abîmé que j’ai relu mille fois.
Mais j’aimerais qu’elle m’ouvre une page, parfois. Qu’elle me dise ce qu’elle ressent sans que je doive lire entre les silences.
Et là, maintenant, elle me parle d’un garçon.
Noah.
Il a l’air bien. Gentil. Mais je me méfie pour elle. Parce que c’est elle. Parce que je ne veux plus jamais qu’elle retombe.
Alors je souris.
Je l’écoute parler.
Je la regarde s’allumer un peu.
Et même si j’en ai marre, parfois…
Je suis là.
Parce que c’est ce que fait l’amour.
Même l’amitié, quand elle est vraie.
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