— Sarah… faut qu’on parle.
Elle était entrée dans ma chambre, doucement. Pas comme d’habitude.
Moi j’étais assise, un carnet sur les genoux, à moitié vide.
Elle s’est assise près de moi.
— Ce que tu m’as dit l’autre soir… ça m’a brisé.
Je l’ai regardée, fatiguée.
— J’ai pas envie d’en reparler.
— C’est pas toi qui vas en parler. C’est moi.
Silence.
— Tu m’as demandé pourquoi ton père n’a jamais été là.
Je me suis tendue.
— C’est parce qu’il n’a jamais voulu l’être.
Sa voix tremblait.
— Il m’a violée, Sarah.
Le monde a cessé de bouger.
— C’était un gars que je connaissais. Un ami d’ami. Il m’a dit que j’étais jolie. Il m’a proposé de me raccompagner.
Elle avale difficilement.
— J’avais 17 ans. Je suis tombée enceinte de toi.
Je ne bougeais plus.
— Je ne t’ai jamais dit tout ça parce que j’avais peur que tu penses que t’étais un accident.
Elle pose sa main sur la mienne.
— Tu n’es pas un accident. Tu es la seule lumière que j’ai eue après l’ombre.
Et c’est là que j’ai pleuré. Pour elle. Pour moi. Pour tout ce qu’on avait caché, toutes les deux.
Et cette fois, je l’ai laissée me prendre dans ses bras.