Le printemps arrive.

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Les leçons dispensées par Doris m'ont permis à savoir gérer l'abondante richesse de mon oncle ainsi qu'à passer le temps malgré le conséquent travail que l'hiver nous impose. Je comprends désormais plusieurs choses : les raisons pour lesquelles il s'est cantonné à un rôle d'ambassadeur et de conseiller de mon père ainsi que la raison qui a fait qu'il a choisi ma tante et aucune autre.

Tout d'abord, Atlas a voyagé un peu partout dans le monde et par conséquent a amassé de nombreuses richesses tant culturelles que monétaires. C'est un commerçant talentueux qui lui a valu d'être convié à bien des cours, il est donc naturel que père ait fait de lui l'ambassadeur de l'Atlantide et un conseiller de choix. Il a été longtemps envisagé pour le trône mais l'exercice du pouvoir ne sied pas à son tempérament aventurier et à son amour des chiffres, je me souviens que quand je lui avais une fois posé la question il m'avait répondu qu'une vie confinée dans un palais ne lui convenait pas malgré son affection évidente pour la famille. Il est celui en qui mon père a le plus confiance ainsi que son frère préféré parmi les trois qu'il avait.

Ensuite, Doris est une sirène qui a été éduquée à Sparte ce qui avait accentué son caractère peu conventionnel. Atlas avait besoin d'une femme suffisamment instruite et indépendante pour gérer sa trésorerie et c'est justement à Sparte au cours d'une réception qu'il l'a rencontré, tombant vite sous son charme. Leur union a été béni par huit enfants qui ont soit pris la voie de leur père soit celle du mariage comme toute bonne fille qui se respecte.

- « Etant donné que tu iras à la cour au début du printemps, tu devras prendre une domestique personnelle pour alléger ton séjour. » M'interrompt Doris tandis que j'étais dans mes pensées.

- « Oui... Serait-ce possible d'avoir une liste des familles nobles de l'Atlantide pour que je puisse décider ? »

- « Bien sûr, tu auras tout l'hiver pour faire ton choix. Comment trouves-tu ces leçons d'économie, au juste ?

- « Fort instructif. Si je venais à être seule ici, sans vous, je pense que je pourrais à peu près m'en sortir quant à la gestion du budget. »

- « Faut dire que ton oncle est un excellent précepteur dans ce domaine. C'est lui qui m'a tout enseigné et d'une façon qui ne peut intéresser que l'élève. »

- « Vous est-il déjà.... Arrivé de vous demander si votre vie actuelle vous convenait ? » Demandai-je.

- « Non, je ne me suis jamais posé cette question tant la réponse est évidente. J'aime Atlas, mes enfants, la vie que j'ai avec lui, même si mon unique souhait serait qu'il soit ici plus souvent... Que veux-tu, c'est un aventurier dans l'âme et cela fait partie de son charme. Pouvoir se marier par amour est un luxe pour les femmes comme nous et rares sont celles qui ont réussis. »

- « Songez-vous à la reine Tia ? »

- « Bien évidemment. Ahmosis, encore jeune noble à marier, a été frappé en plein coeur par une flèche d'Amour quand il a vu Tia à la cour impériale. Bien qu'elle ait été elle-même touché par Amour, elle tenait à ce qu'il lui prouve sa sincérité de manière constante jusqu'au tournoi où il a clamé haut et fort qu'il voudrait épouser Tia s'il venait à remporter la victoire et il a réussi. Il a gagné la main de sa belle, l'a désignée comme Fleur de Schinéar et s'est marié avec elle peu après. » Raconte Doris avec exaltation. « Qui sait, tu pourrais bien être la Fleur de Schinéar cette année vu que tu seras à la cour à partir du printemps.»

Fleur de Schinéar est un titre pour désigner celle qui est considérée comme la plus belle femme de l'empire par le vainqueur du tournoi du printemps. Il s'agit d'un privilège qu'on ne peut avoir qu'une fois dans sa vie et nombreuses sont les nobles femmes qui rêveraient de l'avoir, Atlas m'a raconté qu'il avait désigné Laura avec une rose jaune bien avant qu'elle n'épouse mon père, preuve que le vainqueur du tournoi ne désigne pas toujours la femme qu'il souhaite épouser vu qu'à ce moment-là, il était déjà marié et père. Tante Doris n'en a pas fait grand cas puisque selon elle, elle n'avait pas besoin d'une rose de verre ou d'un titre pour être la plus belle à ses yeux. Dans mon ancienne vie, c'était Blanche qui avait eu ce titre après avoir reçu une rose de verre coloré en rose de la part du prince hériter d'Egypte, Séthi.

- « C'est vrai que ce récit donne envie de connaître l'amour... S'il sait se montrer généreux avec ceux qui le méritent. » Dis-je, sur un ton grave.

- « Si tu peux avoir une bonne relation avec ton époux, c'est une bonne chose mais dans le cas contraire... Je ne crois pas que tu aies eu un coup de coeur pour qui que ce soit, non ? »

- « Et bien... Non, je n'ai jamais éprouvé une telle affection pour quelqu'un et je ne pense pas avoir intéressé quiconque jusqu'à présent. » Dis-je, en me remémorant ma vie passée.

- « Je vois... A ton âge, il ne serait pas inhabituel si tu ressentais une quelconque forme d'attraction envers un jeune homme et de vouloir découvrir par toi-même malgré les interdits parce non seulement ton corps mais aussi ton esprit subiront tôt ou tard des changements. »

A son ton, je devine aisément que ma réponse ne l'a pas totalement convaincu. Je reconnais bien là la figure maternelle qui arrive à discerner le mensonge de la vérité quand cela sort de ma bouche même si elle ne me questionne pas davantage. Amour... Je sais à peine ce que ce mot signifie dans le langage courant mais pour moi, il est synonyme de douleur et de mort. J'ai essayé autrefois d'aimer Thurian mais le peu d'once d'amour que j'aurais pu ressentir s'est détruit quand il a bafoué le voeu de fidélité pour la première fois, ma fierté en a pris un coup si dur que j'en ai brisé un miroir. Au vu de tout ce que cela m'a apporté de croire en un sentiment autant célébré dans les chants et poèmes des troubadours et contes, je suis certaine que le mieux pour moi est de faire une croix dessus. Pourtant, je dois sauvegarder les apparences en faisant mine de vouloir faire un bon mariage... Pour le moment, il va me falloir gagner du temps pour que cela arrive le plus tard possible et me concentrer sur l'essentiel à savoir gagner en réputation et je vais rester sur l'ouverture des hospices ainsi que la distribution de provisions durant les temps durs. Une fois à la cour et débarrassée d'Aryon, je devrais me tenir informée de tout ce qu'il se passe chez les nobles mais aussi au sein du palais impérial tout en gardant un masque de personne inoffensive.

Plusieurs semaines sont passés et autant dire que nous avons été bien occupés à fournir des couvertures chaudes, des vêtements décents, de la nourriture et quelques écus pour maintenir le domaine d'oncle Atlas. J'ai étudié l'économie et les différents produits sur le marché durant ce laps de temps pour pouvoir préparer le banquet de Noël avec tante Doris. Les premiers flocons de neiges n'ont guère tardé à tomber du ciel et les voir me rappelle aussitôt mes derniers instants, ma dispute avec Thurian, ma chute, lui qui m'a littéralement laisser tomber,... J'en ai également profité pour changer ma garde-robe en termes de couleurs.

- « Souhaites-tu jeter toutes ces robes qui te sied, cousine ? »

- « Non, bien sûr que non... Je compte en donner quelques-unes à ma future domestique personnelle, Hermione. »

- « En voilà une idée fort charitable. Mais es-tu sûre qu'elles lui iront ? » Demande Hermione, en mettant une ceinture d'or sous ma poitrine .

- « J'en suis persuadée... Sans compter que les couleurs vont lui plaire. »

- « Le bleu est une couleur qui te va, elle fait ressortir tes yeux et rappelle ton appartenance à la fois à l'Atlantide mais aussi au peuple de la mer. » Ajoute Ariadne, la cadette des filles de Doris, qui dorlote le petit Hélios, son neveu.

- « C'est d'accord pour le bleu... En revanche, je ne veux aucune trace de rouge et encore moins du jaune dans mon armoire. Dites, qu'est-ce que cela fait d'être mère et de porter ce petit être dans ton ventre ? » Demandai-je en regardant le bébé.

- « Il y a des hauts et des bas, je l'avoue... Mais c'est merveilleux de voir un bébé comme la réussite de ton mariage, surtout si la relation avec ton mari est bonne. » Explique Hermione « Ariadne saura bientôt ce que c'est et Cassandra le vit déjà. »

- « Donc, j'en conclus que cela vous convient d'être des poules pondeuses d'enfants. » Dis-je sur un ton sarcastique.

- « El', voyons ! C'est notre rôle de donner des enfants, aussi douloureux soit ce devoir. » S'exclame Cassandra.

Je ne veux pas vivre de tels moments, surtout après avoir vu quelqu'un mourir en donnant la vie. Quelle ironie ! Avant la mort de Madame, j'avais déjà beaucoup d'appréhension sur la maternité et son décès n'a fait que de changer cette appréhension en peur bleue. Pourtant, si je mène mon plan jusqu'au bout pour évincer Aryon, tomber enceinte sera une obligation pour prolonger l'héritage de ma famille et je sais d'avance que je subirais énormément de pression si je ne m'atèle pas rapidement à la tâche mais comment faire sachant que je ne supporte plus le contact masculin ainsi que tout rapport à l'intimité. Rien que d'y repenser me donne des maux de ventre comme pour me rappeler la douleur perpétuelle de ces moments de torture.

- « Cassandra, Elda a encore le temps pour cela. Elle n'est pas encore une femme et il n'est pas question de mariage pour le moment. » Apaise Ariadne. « Peut-être qu'elle changera d'opinion plus tard. »

- « Fort bien. Que dis-tu du rose ? »

- « Ce sera pour Sa... Celle qui me servira. » Dis-je, décidée à ne pas porter cette couleur. - « Dis-moi, tu n'aurais pas parler de mes yeux par hasard ? »

- « Oui, et je pense avoir celles qu'il te faut. » Dit ma cousine avec un grand sourire en tressant mes cheveux. « Je pense qu'il est grand temps que tu leur montres qui tu es à Schinéar. »

Dans la salle d'apparat, tous les nobles de la région ont été conviés pour festoyer. Doris a chaleureusement accueilli chacun d'entre eux et a engagé davantage de monde pour assurer le service durant cette période, promettant un salaire plus conséquent. Même j'ai fini d'être préparée depuis un moment, j'hésite à entrer par la grande porte malgré mes cousines qui tiennent à ce que je vienne mais un domestique annonce leurs entrées ainsi que la mienne. Allez, respire un grand coup et montre-leur ce que tu as dans le ventre.

Je me joins à elles et c'est toutes les quatre que nous entrons dans la salle en attirant bien des regards. Cassandra a revêtu une splendide houppelane bleu marine avec de la fourrure d'hermine sur le bout des manches et le décolleté plongeant qui dégage son buste qui allège ses formes pulpeuses de mère de famille et porte une couronne tressée ornée de perles pour sublimer la noirceur de ses cheveux. Hermione porte quant à elle une robe jaune aux manches bouffantes jusqu'aux biceps avec des manchettes pour fermer les manches, un motif végétal vert orne ses côtes jusqu'au bas de sa tenue et a mis ses cheveux vert en demi-queue. Ariadne a deux longues tresses descendant jusqu'à ses cuisses et porte une cotehardie dont la couleur mêle à la fois le bleu et le vert avec une fine ceinture d'or en accord avec les broderies de son col. Pour ma part, j'ai porté mon choix sur une robe verte avec un tissu transparent sombre comme pardessus fermé par une ceinture d'or à ma taille avec des broderies d'or sur le décolleté et les coudes, mes cheveux bruns sont coiffés lâchés avec deux tresses sur le haut et deux tresses en bas pour former une coiffure typique de la noblesse grecque chez les femmes avec des mèches encadrant mon visage. Bien des murmures se sont entendre sur la beauté des filles de Doris mais également sur la mienne que beaucoup qualifient de "grandissante". Une fois devant la grande table de la maîtresse des lieux, cette dernière nous invite à prendre place à ses côtés avec une satisfaction à peine déguisée.

- « Madame, j'ai ouïe dire que vous avez pris en charge l'éducation de votre nièce dernièrement. Comment se porte-t-elle ? » Demande un baron venu nous saluer.

- « Fort bien, je suis très motivée pour apprendre ce qu'il faut pour être la digne fille de mon père. Ma chère tante est une très bonne préceptrice et sans elle, je ne suis pas sûre d'avoir pu réussir à gérer le domaine de mon oncle. » Ai-je répondu avant que Doris ne le fasse.

- « Tu es bien trop humble, Elda. Elle m'a été d'un grand secours pour la préparation du banquet de Noël. » Ajoute Doris, contente de son travail.

- « C'est un aboutissement naturel venant d'une Rose impériale de l'Impératrice, l'une de ses préférées de surcroît. »

- « Elle n'est pas une parente de Madame contrairement à la jeune Blanche. Elle est comme une seconde mère pour Elda. Je ne doute point de la popularité que ma charmante nièce aura à la cour une fois là-bas.»

- « Nous n'en doutons point, madame. Espérons que le Comte Atlas reviendra bientôt pour satisfaire notre soif de récits de la cour et de ses voyages. Je vois également que vos filles se portent à merveille. »

- « Mes trois filles vont bien tout comme leurs mariages. Hermione a eu Hélios il y a quelques mois, Ariadne accouchera bientôt de son premier enfant et Cassandra est enceinte de son quatrième enfant. »

- « Que de bonnes nouvelles ! »

- « Profitez bien de ce grand festin, les restes seront distribués au peuple. » Annonce à voix haute Doris avant de se rassoir. « Je vois que tu as fait ton choix quant à ta couleur, Elda. »

- « J'avais envie de changement et je trouve que le vert est une couleur fort agréable pour mes yeux ; de plus je n'en ai jamais porté jusqu'à maintenant et j'entends mettre le bleu que pour les évènements officiels pour représenter ma patrie. »

Cela me fait tout drôle d'être un objet d'attention parce que jusqu'à maintenant, on ne me remarquait qu'à peine durant l'enfance et tout le long de ma précédente vie. Ce pourrait bien être un atout profitable en temps et en heure. Malgré la qualité du repas préparé pour la fête, mon estomac n'a eu de cesse de se tordre ce qui a pour effet que je n'ai pas mangé grand-chose. Le premier service comprenait du vin et des tostes, pâté de veau, du boudin et des saucisses tandis que le second a enchainé sur une tourte à la citrouille et aux lentilles, suivi par une bonne quantité de cormary, du porc au vin rouge avec des épices, pour finir sur des crêpes et des poires parfumées. Heureusement que j'ai mes cousines et cousins pour me distraire ainsi que de petits spectacles entre les services sinon le temps m'aurait paru duré une éternité.

- « Est-ce que tout va bien, cousine ? Vous me paraissez bien pâle. » Demande Lysandre, l'aîné des fils d'Atlas.

- « Tu n'es point malade, j'espère. » Questionne Léandre, le benjamin.

- « Ces derniers jours, je n'arrive plus trop à manger grand-chose et pourtant, je ne suis point malade. Si madame me le permet, j'aimerais me retirer pour aller me coucher. »

- « Fort bien, je ferais venir une miresse pour t'ausculter en espérant que ce n'est guère une grippe. » Autorise Doris

Sur ce, je m'incline et me retire dans ma chambre où deux servantes m'aident à enlever ma robe et à défaire mes cheveux pour me vêtir au coucher. Je suis certaine que ce n'est pas la grippe qui me frappe mais un mal qui pourrait contrecarrer mes plans si je ne suis pas soigné rapidement. Durant mon sommeil, je revois des évènements du passé tels que la mort de Madame, celle de ma seule amie, le tournoi censé se dérouler au printemps, mon mariage avec mon bourreau, les funérailles de Madame et mon exil le jour du remariage de l'empereur Alaric. A chaque fois, je me suis réveillée en sueurs et paniquée. Ne pouvant plus me rendormir, je mets un châle sur mes épaules et m'assois près de la fenêtre pour regarder la lune briller dans le ciel étoilé en tenant un coffre sur mes genoux. Déverrouillant la prison de mon secret, je prends la lettre vieille de deux ans pour cette vie, dix-sept ans dans mon ancienne, et la presse contre ma poitrine.

Quand tante Doris m'a demandé si j'avais déjà eu un coup de coeur, j'ai à la fois menti et dit la vérité. La partie vraie est que personne ne s'est jamais intéressé d'une quelconque façon à moi parce que je n'avais rien qui puisse attirer qui que ce soit, que cela soit dans l'apparence ou dans ce que j'aime et déteste.

La partie fausse est qu'il y a bien eu quelqu'un qui a fait battre mon coeur au point qu'il prenne feu mais il n'en a jamais rien su et cela ne changera rien dans cette vie puisqu'il s'agit de quelqu'un qui m'est inaccessible. On ne s'est parlé que deux fois au total, la première quand j'étais jeune et la seconde était lors de la nuit des funérailles de l'Impératrice mais impossible de me souvenir de ce qu'on s'est dit. Le seul détail que je sais est que Thurian m'a réprimandé pour être rentré aussi tard de ma ballade dans les jardins, sans chaperon, au crépuscule et avec un homme. Qu'est-ce qu'il a pu se passer pendant cette ballade qui a duré trois heures ? J'ai déjà passé du temps là-bas, étant l'un de mes préférés, et jamais un tour complet n'a duré plusieurs heures même en prenant mon temps.D Des derniers échos que j'ai eu le concernant avant ma mort, il a mené de nombreuses batailles pour sa patrie et ne s'est jamais marié.

- « ...lda... Elda... Elda ! Voyons, tu t'es encore endormie à la fenêtre. » Dit Hermione en me secouant.

- « Navré, je n'ai presque pas fermé l'oeil de la nuit et regarder la Lune a le don de m'apaiser ces derniers temps. »D Dis-je en remettant mon châle, dissimulant la lettre.

- « La miresse est déjà arrivée, mère lui fait ausculter tout le château en attendant ton réveil. »

- « Elle pourra passer à ma chambre, je suis déjà vêtue pour être en condition. » Dis-je en retournant au lit. « Hermione... Puis-je te poser une question ? »

- « Bien sûr. »

- « Quelle est la nature exacte de ta relation avec ton époux ? »

- « Notre mariage était arrangé certes mais on s'est vite entendus du fait de nos âges rapprochés et on partageait beaucoup de points communs même si rien n'aurait pu le présager. J'ai découvert une facette de lui que je n'aurais jamais soupçonné et cela m'a séduit. »

- « On peut dire qu'Amour ne vise que ceux qu'il estiment digne de ses flèches. »Murmurai-je, aigrie.

- « Tu dis cela parce que tu es encore jeune et pucelle, cela changera en temps et en heure. Je vais aller chercher la miresse. »

Une fois Hermione hors de ma chambre, je réfléchis à un plan pour la cour impériale et c'est alors que me revient quelque chose d'important : Safiye ! Je dois la faire venir ici avant qu'elle ne soit déshonorée et exilée, mais comment ? ... Mais oui ! Tante Doris a parlé d'avoir une domestique personnelle et m'a confié une liste de jeunes filles issues de la noblesse atlante... dont Safiye est fait partie ! La voilà la solution pour la sauver du déshonneur ! J'en informerais Doris plus tard, en attendant, j'ai une santé dont je dois me préoccuper.

La miresse arrive et m'ausculte en prenant mon pouls, touchant plusieurs parties de mon corps et m'interrogeant sur mes troubles. Quand elle palpe mon bas-ventre, une vive douleur me fait gémir. Elle me regarde perplexe.

- « Jeune fille, avez-vous eu vos règles ? »

- « Pas encore. »

- « Avez-vous déjà... ? »

- « Bien sûr que non ! » Exclamai-je, ayant compris son sous-entendu.

- « Votre tempérament est tout à fait normal, froid et humide... Pourtant, vous avez été chauffée comme si une bête s'était acharné sur vous sans répit. Si vos douleurs datent depuis deux ou trois mois... Puis-je... ?» Demande-t-elle en sortant une pierre.

Elle m'explique que la pierre réagira ou non une fois posée sur le bas-ventre, la couleur permettant de discerner la nature du problème. Chez les femmes aquatiques comme moi, les problèmes de fertilité sont monnaie courante du fait que nous sommes froides, plus que la moyenne du fait de notre mode de vie aquatique, contrairement à l'homme qui a un tempérament sec et chaud si on en croit les encyclopédies de médecine. Une fois l'explication terminée, elle pose la pierre à la place à jauger et murmure une incantation dans une langue qui m'est inconnue et après cet instant magique, la vieille femme me regarde avec étonnement.

- « Et bien, ça alors... Je dois avouer qu'en quarante ans de pratique, je n'ai jamais vu un cas pareil. »

- « Comment cela ? »

- « Vous êtes bien vierge mais... Pour une raison que je ne m'explique pas, votre corps a... Comment dire... Des blessures que vous ne devriez pas avoir. »

- « Des blessures ? Je ne vous comprends pas. » Dis-je, incrédule.

- « Vous n'avez pas eu d'accident, ni rapport intime ni rien qui pourrait provoquer de tels dégâts. La pierre est resté de marbre et mes mains ont senti une chaleur si ardente que j'ai cru mes mains dans un brasier.»

- « Qu'est-ce que c'est censé vouloir dire ? »

- « C'est comme si le péché de la chair vous avait tant martelé au point de provoquer des dégâts irréversibles à votre intimité alors que vous êtes encore pure... » Explique-t-elle, aussi incrédule que moi.

- « Madame, il y a quelque chose que vous ne me dites pas. Je le vois à votre regard. »

- « Vos yeux sont clairvoyants, jeune fille. Il y a effectivement quelque chose que je n'ose vous dévoiler sous peine de détruire votre vie. »

- « Qu'est-ce donc ? Parle. Est-ce en lien avec les blessures internes à mes organes ? »

- « Et bien... Je suis au regret de vous annoncer... Que jamais vous ne pourrez porter d'enfant. » Annonce-t-elle sur un ton chagriné après qu'un ange passe.

Je n'en reviens pas, mon corps a gardé les séquelles du passé et cela a eu pour conséquence que même dans cette vie, je serais incapable de procréer alors que j'ai été élevée pour cela. Moi qui me demandait comment gérer ce problème une fois héritière, voilà que la question s'est résolu d'elle-même, au moins aucun enfant ne souffrira de la cruauté gratuite d'un parent. Il me faut cependant simuler un profond chagrin pour ne pas éveiller les soupçons.

- « Comment vais-je faire alors ? N'y-a-t-il point de moyen pour que je retrouve la fertilité ? Sans cela, je suis condamnée au couvent. » Dis-je, larmoyante alors que je jubile intérieurement.

- « Malheureusement, je crains que même la magie ne puisse remédier à ce problème. »

- « Pas un mot à qui que ce soit, que cela soit dans ce château ou à l'extérieur... Pas même Dame Doris. Je pense que vous savez à quoi vous attendre si je viens à apprendre que la nouvelle s'est ébruitée. »

- « Oui, gente dame. »

- « Bien. Vous pouvez vous retirer.» Dis-je en lui donnant un bourse pour son service, espérant que cela achètera également son silence.

Une fois seule dans la chambre, je médite sur la question. Thurian, quel chien tu as été !! Maintenant, je comprends mieux pourquoi je n'ai jamais pu être enceinte avant entre le stress, les ébats d'une rare violence, l'irrégularité de mes menstruations et mes humeurs instables cumulés. Pour le moment, cette stérilité arrange mes projets jusqu'à ce que j'hérite du trône ; c'est là que le problème va surgir et me mettre dans une situation des plus délicates. Allant vers mon bureau, je prends un carnet vierge, une plume et de l'encre pour noter tout ce qu'il me sera nécessaire pour l'avenir.

- Aller à la cour impériale au printemps.

- Faire venir Safiye avant qu'il ne soit trop tard.

- M'arranger pour qu'Aryon soit définitivement écarté du trône sans qu'on me soupçonne d'y être impliquée.

- Retarder le plus tard possible la découverte de mes règles ainsi que le mariage.

- Veiller à ce que l'empereur n'ait d'yeux que pour Madame ainsi qu'à la santé de cette dernière.

Pour Safiye, je sais exactement quoi faire et j'entends bien m'en occuper dès aujourd'hui. Concernant Aryon, je sais déjà ce qui pourrait le rendre inéligible à la succession mais faut-il trouver un moyen pour que le scandale éclate sans qu'on ne puisse me relier à l'affaire. Avec un peu de chance, Safiye pourra m'aider à dissimuler les menstruations... Quant à Madame, je pense que l'aider à jouer de ses talents et l'embellir davantage pourrait bien empêcher sa Majesté d'avoir ne serait-ce que l'idée de prendre une concubine.

Doris vient me voir en fin de matinée pour prendre de mes nouvelles et est ravie de savoir qu'il ne s'agit que de fatigue.

- « J'ai jeté un oeil à la liste des jeunes filles issues de la noblesse atlante... Il y en a bien une qui a retenu mon attention et j'aimerais avoir votre avis dessus.»

- « Je t'écoute.»

- « Sofia de la famille Aléthéia... Que pouvez-vous me dire sur sa famille ? »

- « Il s'agit de leur seconde fille parmi les cinq, elle a ton âge et a une noble réputation. Je pense qu'elle pourrait être de bonne compagnie pour toi. »

- « J'en suis convaincue... Dans ce cas, je vais aller rédiger une missive à sa famille. Ce sera elle qui sera à mon service et je tiens à ce qu'elle soit à Schinéar dans les plus brefs délais. »

- « Je joindrais à ton courrier une note pour mon époux afin qu'il s'assure que le voyage se passe sans encombre. »

Ravie de la nouvelle, je remercie ma tante avant de finir de me préparer pour la leçon de danse, je m'habille d'une simple cotardie verte aux manches flottantes qui dévoile mes épaules et me coiffe d'une simple demi-queue. Une fois dans la salle, je vois Lysandre qui nous attend.

- « Il me tarde de découvrir les talents de danseuse de ma cousine préférée. J'ai moultes fois ouïe dire que tu avais la grâce d'un cygne. »

- « Pourquoi ne pas vérifier ces commérages de suite ? Avec une basse danse, je vous prie. » Dis-je, amusée.

Une fois les premières notes entendues, nous nous inclinons avant de tenir sur la pointe de nos pieds pour entamer une première démarche en posant nos pieds droit légèrement en arrière du gauche. Ensuite, c'est celui de gauche qui se place en se tournant à notre droite de sorte qu'on soient face à face avant de faire revenir le pied droit à sa position initiale.

Vient ensuite le branle où on alterne la gauche et la droite par de petits pas latéraux quand un fort applaudissement se fait entendre dans la salle, nous nous tournons tous vers sa provenance pour voir à la grande porte un grand homme bien bâti et richement vêtu. Etant donné ses yeux bleu cristallin et sa chevelure courte bouclée soyeuse, je peux affirmer que c'est le Comte Atlas... Mon oncle.

- « Mon ami, je n'attendais pas ton retour si tôt.» S'exclame Doris avec joie en allant l'enlacer.

- « Il me tardait trop de revoir ton tendre visage, ma mie. » Dit-il en lui baisant les lèvres. « Ainsi que le reste de ma famille.»

- « Père, c'est une joie de vous revoir.» Dit Lysandre en s'inclinant. « Hermione, Cassandre et Ariadne seront enchantées de te revoir, tout comme Léandre, Phoebus, Ezio et Ulysse.»

- « J'étais surtout pressé de voir mon nouveau petit-fils.»

- « Où est son Altesse le prince Aryon ?» Demande Doris, étonnée de le voir seule.

- « Il est à la capitale, sa Majesté tenait à le garder à ses côtés plus que jamais. Et puis, cela me donne l'occasion de pouvoir pleinement profiter de ma nièce préférée. A chaque fois que je reviens, tu es différente de celle que tu étais à mon départ.» Me dit-il.

- « Son Excellence est bien trop bonne, vos paroles me touchent beaucoup.» Dis-je en faisant la révérence. « J'espère que votre route s'est bien déroulé.»

- « Je constate que Doris a bien achevé ton éducation, c'est plaisant à voir. Madame l'Impératrice a très hâte de te revoir et me presse de te faire venir à la cour dès que possible. J'aimerais entendre et voir tout ce que tu as fait. »

- « Pour répondre à son Excellence, tante Doris m'a enseigné la gestion de vos richesses afin que je puisse savoir gérer les futurs caisses de mon époux une fois mariée. »

- « Ma chère épouse m'a beaucoup écrit de lettres, me faisant part de ta volonté d'apprendre et d'ouvrir un hospice à la capitale ce qui est des plus louables.»

Mon oncle me tend le bras, que je prends aussitôt et il m'entraîne à l'extérieur parmi les flocons qui tombent après m'être couverte d'un épais mantel bleu. Il me demande alors de lui en dire plus sur ce que sa femme m'a appris en son absence et je lui ouvre mon esprit quant aux questions de l'amour qui me font réfléchir. Il comprend vite qu'elle n'a rien caché sur ce qu'il arrive durant la nuit de noces entre les mariés et surtout le comment, prenant soin de m'expliquer les dangers de la galanterie des hommes et comment les contourner avec finesse. Pour reprendre ses termes, elle a cultivé ma vertu en me contant mille et une histoire où Amour joue un rôle déterminant dans la destinée des personnages, en bien comme en mal. En m'en faisant d'abord un portrait positif, elle m'a aidé à mettre en lumière les tourments qu'il provoque au point de corrompre les esprits au point de commettre l'impensable chez certains. Si je peux accepter qu'il s'agisse d'un sentiment complexe capable du meilleur comme du pire, en aucun cas je ne dois le laisser se mettre au-dessus de ma dignité car beaucoup ont préférés s'asseoir dessus par amour, plutôt par faiblesse de mon point de vue, ou plutôt par peur de se retrouver seul puisqu'il n'est pas permis d'être célibataire, encore moins pour une femme, où la cohésion sociale est primordiale.

- « Mon oncle, je n'ose vous poser la question malgré mon irrésistible envie de savoir.»

- « Sur quoi porte donc ton questionnement ? »

- « Sa majesté, mon père... Comment va-t-il ? »

Quand j'ai mentionné mon père, il s'est stoppé net dans sa marche comme surpris et hésitant à répondre. Je devine de l'inquiétude sur les traits de son visage, ce qui n'augure rien de bon. Est-ce que père est souffrant ? Mourant ? En difficulté ? Les trois à la fois ?

- « Je ne devrais pas t'en parler parce qu'en théorie, tu es une fille et donc non concernée... Mais la loi est formelle, tu es SA fille et il est normal qu'un enfant s'inquiète pour son parent dont elle a très peu de nouvelles et dont elle a dû oublier le visage ainsi que la voix... Le conseil atlante a commencé à questionner mon frère sur la succession et puisque ce sont les descendants directs du monarque qui sont premiers dans la ligne, deux camps se sont rapidement formés : celui qui favorise ton frère Aryon de fait qu'il soit l'ainé et celui qui favorise Laura parce qu'elle a accédé au titre de reine en te mettant au monde. Malgré ses tentatives pour calmer les tensions, la pression se fait de plus en plus forte et je le connais suffisamment pour savoir qu'il n'osera jamais choisir entre ses enfants car peu importe le choix... Le conflit serait inévitable.»

- « Parce que dans mon cas, ce serait une grande première qu'une princesse soit désignée pour hériter du trône, mon oncle. Arya l'a récupéré après les multiples échecs des autres héritiers mâles et s'est avéré être une bénédiction pour l'Atlantide, c'est sous son règne que nous avons pu de nouveau montrer au monde que nous sommes le fier peuple des mers et de la richesse et qu'il nous est possible de tenir n'importe quelle puissance dans le creux de sa main parce qu'on est une thalassocratie commerciale... Un seul mot contre nous peut nous transformer en un danger aussi démesuré que l'ébranleur du sol dont le sang coule dans les veines royales. »

- « Je constate que tu as de la lucidité à revendre... Au moins tu as conscience de ce qu'il se passe et de ce qui est attendu de toi, qualité qui n'est pas donnée à tous, je le crains.»

- « Dois-je comprendre que même si les chances sont très faibles, je pourrais être considérée pour la succession ? »

- « Si on s'en tient aux lois atlantes, tu as ta chance en tant que fille du roi même si tu n'es pas le premier candidat envisagé. »

- « Pardonnez mon audace mais qu'en pensez-vous ? Je veux dire, du choix de l'héritier, mon oncle. Avez-vous une préférence ou un autre candidat à proposer ? »

- « Le conseil voulait que je sois considéré encore une fois pour la question. Ton père sait parfaitement ce que j'en pense, le trône ne m'a jamais intéressé et les jeux politiques ne sont en rien passionnants contrairement aux voyages et rencontres qui me sont davantage plaisants. Peu importe qui sera désigné, tant qu'il a les qualités requises pour assurer la prospérité de l'Atlantide, je le soutiendrais.»

- « Voyons alors ce que la fortune peut nous réserver à l'avenir. Ma tante et moi comptions vous écrire pour une demoiselle qui me servirait à la cour impériale.»

- « Je vois et as-tu une idée de l'heureuse élue ? »

- « Oui, j'y ai mûrement réfléchi et mon choix s'est porté sur la famille Aléthéia, en particulier leur fille Sofia. Elle m'a l'air d'être un bon choix d'autant plus que je n'ai presque pas d'amies de mon âge, même à la cour.»

- « Ma chère épouse m'a pourtant vanté combien tu te souciais du personnel et que tu as même amené les jeunes enfants à t'écouter narrer l'histoire de notre ancêtre des mers quand tu es allée au petit hospice. Elle m'a même dit que c'est comme si tu les avais captivés.»

- « Madame votre épouse est bien trop aimable, il a suffi qu'un seul me pose des questions pour que cela se change en histoire à raconter. »

- « Tu pourrais bien utiliser ce talent pour organiser des salons pour tisser des liens, que cela soit de nature purement politique ou amical. En tout cas, je reconnais bien là les goûts de ton père... Il a de la finesse et de la délicatesse dans ses goûts en particulier pour les Arts. Tu pourrais être une grande mécène si tu le souhaites ainsi on pourrait faire découvrir davantage la culture atlante à Schinéar.»

- « Servir mon peuple est mon devoir, mon oncle. Tant que je peux me rendre utile à sa Majesté, cela me convient très bien. »

- « Je t'ai rapporté quelque chose de sa part, justement. » Me dit-il en sortant d'une petite bourse un collier de perles blanches rosées avec un grand coeur d'or puis trois demi-coeurs de plus en plus petits pour laisser pendre . « Sais-tu de quoi il s'agit ? »

- « Des perles, symbole même de l'élégance féminine. Elles sont d'excellentes qualités à en juger par leur lustre. » Murmurai-je en touchant les perles.

- « Un humble présent de ton prèsent pour le quizième anniversaire de sa fille unique. »

Il me met le collier et se recule pour voir comment il me sied avant de me dire en grec que je suis bénie par Aphrodite en portant ses larmes au cou, compliment qui me flatte. Après cette ballade, je suis encore plus déterminée à m'approprier le trône. Maintenant que je sais que la question de l'héritier se fait vraiment pressante, il va me falloir prouver ce que je suis davantage un diamant qu'un caillou, l'augmenter pour être prise au sérieux et réduire à néant celle d'Aryon.

Un grand banquet d'une semaine est organisé pour fêter le retour tant attendu d'Atlas sur son domaine et il faut avouer que cette chaleur familiale est fort plaisante, ils s'aiment tous et se soutiennent les uns les autres... J'envie les enfants d'avoir connu un tel amour partagé entre eux puisque je n'ai que de vagues souvenirs de mon père et presque aucun de ma génitrice. Aryon et moi avons quittés clandestinement l'Altantide avec Atlas pour Schinéar du fait qu'à l'époque, beaucoup de complots visaient la famille royale et s'il semblait facile de hâter la mort du roi, faire disparaitre deux jeunes enfants était tout aussi simple alors Père a secrètement missionné son frère aîné de nous amenerà la cour impériale où nous serions plus en sécurité en tant que protégés du couple impérial. Tout s'était fait dans la hâte et je me souviens n'avoir pris que deux choses du haut de mes huits ans : la bague d'Arya et un curieux livre où était consignés diverses plantes capable de charmer, d'ensorceler, de guérir... ou de tuer. Cet ouvrage m'a été utile une fois par le passé puisqu'il m'a permis de sauver quelqu'un d'un empoisonnement sans que personne n'ait pu me découvrir tant j'étais invisible à l'époque et il se pourrait bien qu'il me soit de nouveau utile plus tard si les évènements me le permettent.

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