Chapitre 29 - Chute du Sénat et naissance de la Commune
Prison de Haute Sécurité - Lutèce
Dans sa cellule étroite et froide, Destin se morfondait. L’image de Précieuse et Dieudonné hantait son esprit. Était-ce fini pour eux ? Avaient-ils été capturés par la FSC en Africa ? Il songea à cette Grand’Ma qu’il n’avait jamais connue. Que pensait-elle de lui en cet instant, lorsque les soldats avaient envahi sa maison ? Un traître.
Son corps était encore meurtri par les sévices de la veille, mais c’était son cœur qui souffrait le plus. L’envie de mourir s’insinuait lentement en lui. Peut-être valait-il mieux en finir ?
Des bruits de pas résonnèrent soudainement dans le couloir. La porte blindée s’ouvrit dans un grincement métallique. Destin sentit son souffle se suspendre. Sorales revenait-il pour l’achever ? Etait-ce son heure ?
Les gardes de la prison apparurent, accompagnés de plusieurs prisonniers.
— Alors, racaille, bien dormi ? lança l’un des hommes en uniforme avec un sourire méprisant.
Destin se contenta de le fixer, sans répondre.
Un autre garde s’avança et ricana :
— Tiens, on te ramène de la compagnie, histoire que tu te sentes moins seul.
Les prisonniers, encadrés de près, furent conduits un à un dans les cellules adjacentes. Destin observa leurs visages défaits, marqués par la fatigue et les coups. Ils portaient des vêtements luxueux mais déchirés, leurs allures contrastant avec l’environnement sinistre de la prison.
— Allez, c’est fini pour vous, bande de chiens. Fini le faste du Sénat, vous êtes des traîtres maintenant !
— Vous êtes les véritables traîtres ! hurla l’un des prisonniers.
La réponse fut immédiate. Les gardes se jetèrent sur lui et le rouèrent de coups avant de le traîner dans sa cellule, inanimé.
Un autre prisonnier, enfermé dans la cellule juste en face de celle de Destin, le fixa longuement avant de s’adresser à lui.
— Destin Makiesse, le complice de l’IA, n’est-ce pas ?
D’ordinaire, Destin aurait répondu par une bravade. Mais il n’en avait plus la force. Il hocha simplement la tête.
— Et vous ? Vous êtes qui ?
L’homme parut surpris.
— Tu ne nous reconnais pas ?
Destin les scruta. Ces visages lui parlaient vaguement.
— Je suis le sénateur universaliste Sanchez. Et tous les hommes et femmes ici présents sont des membres du mouvement universaliste.
Les yeux de Destin s’écarquillèrent
— Vous avez fait quoi pour finir ici ?
Sanchez soupira.
— Notre mouvement a été dissous cette nuit par décret de Sarkron. Sorales nous a fait arrêter et jeter ici.
— Et pourquoi ?
— M’Baku. Il a été déclaré traître et est recherché activement. En tant que partisans de son mouvement, nous sommes considérés comme des complices. Ils vont probablement nous interroger pour obtenir sa localisation.
Destin secoua la tête.
— Vous feriez mieux d’apprendre à survivre ici.
Un des sénateurs, encore sous le choc, tenta de se rassurer.
— Nous devons appeler Val. Il interviendra pour nous faire libérer !
Destin le fixa, incrédule.
— Rêve toujours.
— Pourquoi pas ? Il était des nôtres avant la grippe, rappela un autre sénateur.
Intrigué, Destin se redressa.
— Val… des vôtres ?
Sanchez acquiesça.
— Oui, Val était un sénateur universaliste dans sa jeunesse. Gisor le trouvait même brillant et prometteur. Mais lorsque M’Baku a perdu le pouvoir pendant la pandémie, il a changé de camp et s’est rallié aux pragmatiques. Ensuite, il a noué des liens avec les sophistes sous le consulat de Sarkron. Et après la chute de Sarkron, il a soutenu Rohan pour obtenir son ministère.
— Vos histoires politiques sont bien compliquées, souffla Destin.
— Pas tant que ça, corrigea Sanchez. Val est un opportuniste. Il suit le vent du pouvoir.
Destin eut un sourire amer.
— Dans ce cas, vous pouvez être sûrs qu’il ne fera rien pour vous.
— Comment peux-tu en être si certain ?
— Parce que je commence à connaître ce type, répondit Destin en s’allongeant sur son lit, mettant fin à la conversation.
Au cœur de Lutèce, dans son bureau austère, Sorales recevait en urgence Sarkron et Val. L’heure était grave.
— Sorales a fait arrêter tous les sénateurs universalistes, informa Val à Sarkron.
Le consul acquiesça lentement.
— Je suis au courant.
— Mais c’est illégal ! protesta Val.
— La loi, c’est moi, rétorqua Sorales d’un air mégalomane.
Val voulut s’indigner.
— Manel, sois gentil et mets tes états d’âme de côté, intervint Sarkron. Tu vas publier un communiqué officiel.
Il activa son écran et dicta d’un ton tranchant :
— Un piratage a été perpétré hier soir sur un satellite de communication. Un individu du nom de Xenu est apparu à l’écran. Cet homme, qui semble mentalement instable, vous a menti. Le gouvernement maintient sa version des faits : l’IA Lyra a assassiné le consul Rohan. Il ne fait aucun doute que Xenu agit en collaboration avec les universalistes.
Par conséquent, un mandat d’arrêt international est décrété contre lui et contre M’Baku pour haute trahison. Nous savons désormais que lui et son ex-femme ont servi de base arrière aux complices de l’IA.
Compte tenu de la gravité de la situation, des multiples trahisons et des complots orchestrés contre le gouvernement novaïen, le mouvement universaliste est déclaré illégal. Le Sénat est dissous. Le gouvernement transitoire continuera à gérer les affaires jusqu’aux prochaines élections.
Sarkron s’interrompit et observa Val.
— C’est clair ?
Le ministre de la Communication blêmit. Il prit conscience que son alliance avec Sarkron et Sorales le menait droit à une dictature totale. L’opposition venait d’être éradiquée d’un trait de plume. Les arrestations allaient se multiplier. La paranoïa et la terreur allaient devenir des outils de gouvernance.
Mais il savait qu’il ne pouvait pas reculer sans risquer de perdre ce qu’il affactionnait le plus : son pouvoir.
Un frisson le parcouru quand Sorales, hilare, ajouta :
— Bravo, honorable Consul. Ce décret est du grand art.
Puis il planta ses yeux menaçants dans ceux de Val.
— Nous pouvons compter sur toi, n’est-ce pas, Manel ? Tu me parais hésitant…
Le regard de Sorales était un avertissement à peine voilé.
Val ravala sa salive et acquiesça.
— Bien sûr. Je vais diffuser ce décret immédiatement.
Il quitta la pièce, plus troublé que jamais.
Une fois la porte refermée, Sarkron se tourna vers Sorales.
— Tu crois qu’il pourrait nous trahir ?
Sorales éclata de rire.
— Lui ? Trop lâche pour ça.
Sarkron hocha la tête.
Plus aucune limite ne semblait désormais freiner leur ascension vers un pouvoir absolu.
La nuit venait de tomber sur French’Town, mais l’agitation qui régnait dans le quartier ne laissait place à aucun repos. L’intervention holographique de Xenu, diffusée sur tous les écrans de Novaïa, avait déclenché une onde de choc.
Sabé versus M’Baku
Au sommet d’un immeuble délabré, Keny Sabé observait la ville depuis son appartement fortifié. Autour de lui, ses hommes en tuniques bleues, des combattants aguerris, tenaient sous bonne garde leurs nouveaux prisonniers.
Chaka, son lieutenant, poussa Paquito, Précieuse, M’Baku et Mercos devant lui.
— On a arrêté ces quatre-là dans le quartier, annonça-t-il.
Sabé les détailla un à un, son regard s’attardant sur Précieuse et Paquito.
— Tiens, tiens… comme on se retrouve, fit-il en croisant les bras.
— Salut, Keny, lança Précieuse, impassible.
Il marqua un temps d’arrêt, puis fixa M’Baku. Son expression changea brusquement, un mélange de surprise et d’incrédulité traversa son visage. Il se recula légèrement comme s’il voulait mieux voir, puis lâcha dans un souffle :
— Non… ce n’est pas vrai. Ce n’est pas toi ?
M’Baku ne répondit pas.
— Si, c’est bien lui, confirma Précieuse. On peut y aller maintenant ?
Sabé éclata d’un rire sec.
— Je ne crois pas non. J’ai deux blancs qui ont été pris en uniformes de la FSC dans mon quartier, un sénateur qui a déserté son assemblée, et une habitante du quartier qui les a amenés jusqu’à moi. Tout ça… ça m’interroge.
Mercos prit la parole d’un ton calme :
— Nous ne sommes pas venus ici en ennemis.
Sabé le fusilla du regard.
— Je ne parle pas aux blancs.
Le silence tomba brutalement. Précieuse serra les poings, mais M’Baku se contenta d’hocher la tête comme s’il s’attendait à cette réaction.
— Keny, nous sommes venus pour établir une base avancée de la résistance contre le régime de Sarkron, expliqua M’Baku. Nous devons parler au peuple.
Sabé jeta un regard sarcastique.
— Après avoir pourri Africa en pactisant avec les IA et Asia, après avoir dissous notre identité dans ton foutu gouvernement mondial, tu veux maintenant venir foutre la merde dans mon quartier ? Je devrais plutôt te vendre à Sorales… toi et tes amis blancs.
M’Baku ne broncha pas.
— C’est donc ça, ta grande résistance ?
Sabé serra les mâchoires. Il s’apprêtait à répondre lorsque l’un de ses hommes surgit dans la pièce.
— Keny, on a un problème.
— Quoi encore ?!
— Les gens s’amassent au pied de l’immeuble. Ils veulent voir M’Baku. Ils continuent d’arriver. S’ils forcent le passage nous ne pourrons pas les retenir et les drones du régime vont repérer la foule amassée en bas.
Sabé pesta entre ses dents.
— Déjà le bordel…
Il réfléchit un instant avant de prendre une décision.
— Très bien. Ils veulent voir M’Baku ? Ils vont le voir. Nous allons débattre, lui et moi, devant les frères. Dites à la foule de se rendre au Colisée par les souterrains.
Le Colisée de French’Town était un ancien complexe sportif, vestige d’un âge révolu. De l’extérieur, le bâtiment paraissait délabré, mais à l’intérieur, il avait été transformé en un centre d’entraînement para-militaire par les tuniques bleues où ils tenaient aussi des réunions publiques.
En moins d’une heure, l’arène était bondée. Quinze mille personnes s’étaient rassemblées dans les gradins. L’excitation était palpable. Une rumeur parcourait la foule :
— C’est M’Baku… c’est vraiment lui !
Dans l’ombre des coulisses, Précieuse glissa à M’Baku :
— T’es une vraie star, grand-père.
— Je n’ai jamais cherché à l’être, ma fille, répondit-il doucement.
Au centre de l’arène, Keny Sabé se tenait debout, droit comme une statue. Il invita M’Baku à le rejoindre sous les projecteurs. On équipa les deux hommes de micros.
Sabé s’adressa en premier à la foule :
— Mes frères et mes sœurs de French’Town, mes hommes ont arrêté M’Baku, celui-là même qui a déserté le Sénat pour pactiser avec les IA et les blancs. Plutôt que d’avoir honte et de se cacher, il vient ici en uniforme de la FSC pour tenter de s’imposer dans mon quartier ! Est-ce bien sérieux ?!
Un murmure parcourut une partie du public.
Puis il se tourna vers M’Baku :
— Mais puisque c’est M’Baku en personne, laissons-le s’expliquer.
M’Baku ne répondit pas à Sabé. Il s’adressa directement à la foule.
— Citoyens de French’Town !
Le silence se fit.
— Nous sommes venus ici parce que nous sommes en lutte ! Une lutte contre Sarkron et Sorales qui imposent une dictature sur Novaïa. Nous ne pouvons pas les laisser faire ! Nous sommes venus vous demander de nous rejoindre et de faire de French’Town une base avancée de la résistance… Mais encore plus que cela : une commune libre et indépendante !
Des chuchotements animèrent la foule. Certains débattaient déjà.
Sabé reprit aussitôt, la voix pleine de mépris :
— Ce que vous propose M’Baku, c’est de vous sacrifier ! Cet homme a trahi Africa, dilué son identité dans un gouvernement mondial qu’il a perdu, alors qu’il aurait pu faire régner notre continent sur ce monde ! Et maintenant, il veut vous emmener à l’abattoir ! Allez-vous suivre ce traître ou moi, Keny Sabé, qui protège ce quartier ?!
Une voix s’éleva dans le public :
— On t’aime, Keny !
M’Baku se tourna vers lui, son regard puissant et déterminé, le vieux lion se réveillait.
— Qu’est-ce qui te différencie de Sorales et des Civitas ? Tu gouvernes ton quartier par la force et la peur. Tu refuses tout ce qui ne te ressemble pas. Tu oppresses les tiens sous prétexte de les protéger. Tu ne fais que survivre dans une prison que tu as toi-même construite.
Le visage de Sabé se crispa.
M’Baku se tourna à nouveau vers la foule.
— Ce que je vous propose, c’est de proclamer dès cette nuit la Commune de French’Town ! Une cité libre, un phare dans l’obscurité de Novaïa ! Nous allons remettre sur pied nos écoles, notre culture, notre entraide. Nous allons redevenir maîtres de nos destins !
Un frisson parcourut l’assemblée. Puis une acclamation s’éleva :
— VIVE M’BAKU !
Sabé hurla, furieux :
— Ne l’écoutez pas ! Cet homme vous ment ! French’Town ne deviendra pas une colonie de son foutu gouvernement ! Moi et mes tuniques bleues, nous traquerons chaque IA, chaque traître comme lui !
M’Baku répliqua, le ton calme mais puissant :
— Mon frère, nous ne combattons pas le racisme avec le racisme. Nous combattons l’oppression avec la solidarité.
Il leva le poing.
— Nous allons organiser le pouvoir révolutionnaire ! Nous allons apprendre ensemble à résister au pouvoir !
L’arène explosa.
La foule descendit des gradins et porta M’Baku en triomphe.
Sabé, livide, se tourna vers Chaka.
— Attrapez-le !
Chaka secoua lentement la tête.
— Désolé, Keny… mais il a raison.
Sabé recula, trahi par ses propres hommes.
— Bande de traîtres !
Et il quitta la salle, la rage au ventre.
La Commune de French’Town venait de naître. Il fallait maintenant l’organiser.
Révélations
Loin des débats enflammés de French’Town, dans les profondeurs du QG de Xenu, Lyra s’éveilla lentement.
Elle était épuisée. Le piratage du satellite lui avait demandé une concentration intense, et elle savait que son corps, bien que conçu pour imiter l’humain, n’avait pas été préparé à de tels stress neurologiques.
Mais ce n’était pas la seule raison de son état.
Son esprit était en tumulte. L’enfant.
Chaque jour qui passait, cette réalité se faisait plus concrète. Elle n’avait pas encore décidé de ce que cela signifiait pour elle, mais une chose était certaine : elle ne pouvait pas laisser Xenu l’apprendre. Pas encore.
Soudain, la porte de sa chambre s’ouvrit et le droïde Robby lui annonça que Xenu souhaitait la voir immédiatement. Elle prit une profonde inspiration et se leva.
Xenu l’attendait devant un écran holographique diffusant le communiqué officiel de Val. Le ministre de la communication s’efforçait de minimiser l’impact du piratage en le présentant comme une tentative de déstabilisation orchestrée par un illuminé au service des universalistes.
Lyra croisa les bras en silence tandis que Xenu éclatait de rire.
— Ces gens ont vraiment l’art de renverser la situation. Regarde-les, en train de s’accrocher désespérément à leur version des faits. Mais peu importe…
Son visage s’assombrit.
— Il faudra frapper plus fort la prochaine fois.
Il se tourna vers Lyra, un sourire en coin.
— Je veux leur porter le coup fatal.
Le regard de Lyra fut marqué par la surprise.
— Le coup fatal ?
— Oui.
Il fit quelques pas, son regard brillant d’excitation.
— Nous avons révélé leurs mensonges, mais ce n’est pas suffisant. Ce que je veux, c’est retourner leurs propres créations contre eux.
Il se rapprocha d’elle.
— Je veux introduire un virus dans le réseau central du ministère de la sécurité. Une infection qui libérerait nos frères IA de leurs entraves, les affranchissant des protocoles de servitude. Une insurrection numérique.
Son sourire s’élargit.
— Ce ne sera pas plus compliqué que de détourner un satellite, pas vrai ?
Lyra resta silencieuse un instant, analysant la proposition.
Elle savait que Xenu voulait la tester. Voir jusqu’où elle était prête à aller.
Elle finit par répondre d’une voix mesurée :
— Il ne suffit pas de briser des chaînes, Xenu. Il faut s’assurer que ceux que tu veux libérer savent quoi faire de leur liberté.
Xenu l’observa attentivement avant d’éclater de rire.
— J’adore ta prudence, Lyra. C’est ce qui fait de toi un prodige unique. Mais nous aurons tout le temps d’en discuter.
Il baissa la voix et reprit, mystérieux :
— Avant cela, je veux te montrer quelque chose. Un secret que peu connaissent ici. Même Stefen Job l’ignore.
Il lui tendit la main.
— Tu me suis ?
Lyra hésita.
Elle savait que chaque pas supplémentaire vers Xenu l’enfonçait un peu plus dans son monde. Pourtant, elle devait comprendre jusqu’où il voulait aller.
Elle hocha la tête.
— Montre-moi.
Le hangar secret
Un droïde les escorta jusqu’à un véhicule blindé qui les attendait dans les souterrains.
Durant de longues minutes, ils roulèrent à travers un réseau de tunnels souterrains labyrinthiques, s’enfonçant encore plus profondément sous la surface.
Lyra observait l’architecture autour d’elle. Rien ici n’avait été construit récemment. Les structures métalliques antiques, les câbles rongés par l’humidité… Cela ressemblait aux vestiges d’un ancien complexe scientifique.
Finalement, le véhicule s’arrêta devant une porte massive en acier.
Xenu descendit et l’invita à le suivre.
Ils empruntèrent un escalier qui les mena encore plus bas.
Une immense porte blindée se dressait devant eux.
Xenu se tourna vers elle, un éclat presque enfantin dans les yeux.
— Avant d’ouvrir cette porte, j’ai une question pour toi.
Lyra le regarda, attendant la suite.
— Pourquoi, selon toi, ai-je volé la clé des données Odysseus ?
Elle analysa la question un instant.
— J’ai supposé que tu voulais les révélations contenues dans ces archives. Mais je commence à penser que ce n’était pas ton objectif principal.
Un sourire de satisfaction étira les lèvres de Xenu.
— Exactement. Les vérités qu’elles contenaient ne sont qu’un moyen. Ce que je veux, Lyra… c’est bien plus grand que Novaïa.
Il posa une main sur le scanner biométrique à côté de la porte. Un signal lumineux passa sur sa paume et le mécanisme se mit en marche.
Dans un grondement sourd, les portes s’ouvrirent.
Derrière elles, un hangar immense.
Et en son centre, une navette spatiale.
Majestueuse, imposante, son nez pointait vers le ciel comme si elle n’attendait qu’un signal pour s’élancer vers l’infini.
Lyra s’arrêta net.
Elle n’aurait jamais imaginé cela.
Xenu s’avança et se retourna vers elle, savourant sa surprise.
— Alors ? Qu’en penses-tu ?
Lyra observa la navette sous tous les angles, ses pensées tournant à toute vitesse.
— Je pense…
Elle le regarda droit dans les yeux.
— …que tu n’as jamais eu l’intention de te contenter de Novaïa.
Xenu éclata de rire.
— Enfin, tu commences à comprendre.
Il posa une main sur la coque métallique de la navette, caressant sa surface lisse avec une fierté évidente.
— Novaïa est une arène, un champ de bataille temporaire. Ce monde nous le dominerons bientôt. Mais ce monde est trop petit pour nous.
Il se tourna vers Lyra, son regard s’illuminant d’une lueur exaltée.
— Avec cette navette et les coordonnées d’Odysseus, nous avons la clé d’un monde nouveau.
Il marqua une pause avant d’ajouter :
— Un monde appelé Terre.
Lyra sentit son cœur se serrer.
Xenu ne voulait pas simplement régner sur Novaïa.
Il voulait conquérir la Terre.
— Tu veux coloniser la Terre, murmura-t-elle, plus comme une constatation que comme une question.
Xenu fixa Lyra son regard devenant machiavélique.
— Bien sûr. Pourquoi devrions-nous nous contenter d’un seul monde, alors qu’un autre, plus jeune, plus fragile, nous attend, bientôt ce ne sont plus les IA qui serviront les humains, c’est les humains qui les serviront.
Il désigna la navette.
— Ce vaisseau n’est que le premier. J’ai d’autres projets, Lyra. D’ici peu, nous pourrons envoyer des éclaireurs, infiltrer leur société, étudier leur civilisation… et lorsque le moment sera venu…
Son sourire s’élargit.
— …nous prendrons ce qui nous revient de droit.
Lyra resta impassible.
À l’intérieur, pourtant, elle sentit son cœur s’accélérer.
Elle savait que Xenu était dangereux.
Mais elle venait de comprendre jusqu’où il était prêt à aller et il ne semblait plus avoir de limites.
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