Chapitre 30 - Para Bellum

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Le palais impérial d’Asia était un joyau d’architecture, mélange harmonieux de traditions millénaires et d’innovations futuristes. Niché au cœur d’un vaste complexe surplombant la mégapole, il incarnait le raffinement et le pouvoir.

Dans l’une des salles de bains thermales, Dieudonné profitait pleinement des luxes offerts par la cour du palais impérial. Il était immergé dans une eau chaude parfumée aux herbes rares, un verre de saké dans une main, tandis qu’une servante lui massait les épaules avec application.

Asia en ordre de bataille

— Ah… la vie ici n’est pas si mal, murmura-t-il en savourant une gorgée.

Le silence du bain fut brusquement interrompu lorsque les immenses portes en bois sculpté s’ouvrirent à la volée, claquant violemment contre les murs.

Yuenu venait d’entrer.

Dès qu’elle posa les yeux sur la scène, l’intendante qui servait Dieudonné, s’éclipsa prestement, consciente du danger que représentait l’irruption de la générale en chef des armées d’Asia.

— Des heures que je te cherche, et tu es là, en train de te prélasser ! lança Yuenu d’un ton tranchant.

Dieudonné la regarda avec des yeux malicieux et lui adressa un sourire provocateur.

— Tu me cherches ? Je te manque déjà ?

La générale lui jeta un regard glacial.

— Ne me parle pas avec cette familiarité. Je suis la générale en chef des armées d’Asia. Et, si j’aime diriger les hommes sur les champs de bataille, sache que pour le reste, je préfère avoir à faire aux femmes. Alors, calme-toi.

— Cool. Il leva son verre. Pardon, ma générale. Qu’est-ce que je peux faire pour vous ?

— Nous partons demain pour French’Town. Prépare-toi.

Dieudonné soupira et s’enfonça un peu plus dans l’eau chaude.

— En fait… je ne suis plus si certain de vouloir partir. On est bien ici, non ?

Yuenü plissa les yeux, cherchant à comprendre s’il plaisantait.

— Est-ce que tu te moques de moi ?

— Non, vraiment, répondit-il en haussant les épaules. Les servantes s’occupent bien de moi, la nourriture est plutôt correcte — même si ça ne vaut pas celle d’Africa — et après tout ce que j’ai traversé, je mérite un peu de repos.

Il marqua une pause avant de poursuivre avec une fausse candeur :

— Tu imagines ? J’ai dû éviter les FSC, passer des barrages, assommer deux agents avec Précieuse, infiltrer un cargo de narco-trafiquants, traverser Port-Gentil en étant traqué, rejoindre Tabitha au Kongo… et encore fuir jusqu’ici. Franchement, je suis épuisé.

Yuenü posa ses mains sur ses hanches, l’air consterné.

— Qui est Précieuse ? demanda-t-elle brusquement. Ta femme ?

Dieudonné afficha un sourire malicieux.

— Tu es jalouse ?

Il n’eut pas le temps d’esquiver la réaction fulgurante de Yuenu. D’un geste précis, elle dégaina son sabre et pointa la lame à quelques centimètres de sa gorge.

— Encore un mot de ce genre et je te tranche la langue.

Il déglutit lentement et leva les mains en signe de reddition.

— Ok, compris. Précieuse… ma femme ? Oui. Enfin… bientôt. Peut-être. J’espère…

— Tu m’étonnes qu’elle ne veuille pas de toi, lâche comme tu es.

Elle le fixa d’un regard perçant avant de reprendre :

— Pendant que tes amis se battent pour leur liberté, toi, tu te prélasses dans un palais.

— Abuse pas… J’ai le droit à un peu de repos, non ? tenta-t-il.

— Le repos est fini. Nous partons demain. C’est un ordre.

Dieudonné soupira bruyamment.

— Et si je refuse ?

Un sourire cruel effleura les lèvres de Yuenu. Sans un mot, elle abaissa lentement la pointe de son sabre et la plongea dans l’eau, jusqu’à ce qu’elle frôle dangereusement l’entrejambe de Dieudonné.

— Je t’émasculerai pour m’assurer que ta couardise ne se reproduise jamais.

Le silence se fit si bien qu’on eut put entendre le bruit de l’eau.

Dieudonné avala sa salive avec difficulté et leva les mains en signe d’apaisement.

— Ok, ok… On part à quelle heure ?

Yuenü rangea son sabre et esquissa un sourire victorieux.

— Demain dans la nuit, soldat.

Pendant ce temps, dans le salon impérial du palais, Gisor et Tabitha étaient parvenus à établir une communication sécurisée avec M’Baku.

L’image du vieil homme apparut sur l’écran holographique, son visage fatigué mais déterminé.

— Mon ami, comment se passe votre expédition ? Tout le monde va bien ? demanda Gisor.

— Notre arrivée à French’Town a été mouvementée, mais nous avons réussi à pénétrer la ville et à en faire une commune libre, répondit M’Baku. En revanche, Xenu m’inquiète. Si Lyra est de son côté, rien ne garantit qu’il soit du nôtre.

Gisor hocha la tête, grave.

— Tu penses qu’il contrôle Lyra ?

— Cela m’en a tout l’air, répondit M’Baku, son ton empreint de gravité.

Gisor échangea un regard inquiet avec Tabitha avant de reprendre :

— Nous verrons comment les choses évoluent. Une armée partira d’ici demain soir dans votre direction, mais il nous faudra un certain temps pour faire jonction avec vous.

— Je doute que Sarkron et Sorales nous laissent avancer sans réagir, ajouta Tabitha.

— Nous essaierons de tenir le plus longtemps possible, affirma M’Baku.

Gisor esquissa un sourire encourageant.

— Bon courage, mon ami. Les renforts arrivent.

Tabitha s’avança légèrement vers l’écran.

— Fais attention à ma petite-fille, M’Baku. Protégez-vous les uns les autres.

Le vieil homme opina du chef, puis la connexion fut coupée.

Dans le salon impérial, un silence s’installa.

— Cela suffira-t-il ? murmura Tabitha, son regard perdu dans le vide.

Gisor soupira et posa une main rassurante sur son épaule.

— Nous allons tout faire pour que ce soit le cas.

La guerre était sur le point de commencer.

La Commune en marche

À French’Town, personne ne dormait. La proclamation de la Commune libre n’était qu’un premier pas, une déclaration d’intention. Il fallait maintenant organiser un territoire autonome, bâtir des infrastructures, structurer une défense. Et vite.

Après sa communication avec Gisor et Tabitha, M’Baku, qui avait pris quartier dans l’appartement de Destin, rassembla Précieuse, Paquito et Mercos autour de lui.

— Tu as entendu Gisor, dit-il en s’adressant à Mercos. Les renforts d’Asia ne seront pas là immédiatement. Penses-tu que nous puissions tenir ?

Mercos hocha la tête, le regard grave.

— J’ai eu le temps de faire un état des lieux avec Chaka et Précieuse. J’ai tenté d’évaluer nos forces et nos faiblesses.

— Je t’écoute.

Mercos prit son temps avant de détailler son rapport.

— Premièrement, le quartier est immense et densément peuplé. L’architecture labyrinthique favorise la guérilla urbaine. Nous l’avons vu hier : les habitants connaissent leur terrain et savent se battre. Si tu leur demandes de défendre la Commune, ils répondront à l’appel.

— Je le leur demanderai, affirma M’Baku. Mais est-ce suffisant ?

— Non. Heureusement, nous avons un autre atout : les hommes de Sabé, les Tuniques Bleues. Ils ont été formés au combat de rue et peuvent instruire les autres. Le Colisée qu’ils ont transformé en centre paramilitaire s’y prête parfaitement.

— Et les souterrains ? demanda M’Baku.

— C’est notre atout majeur, déclara Mercos avec un sourire satisfait. French’Town regorge de tunnels creusés par ses habitants pour contourner les patrouilles de la FSC et les drones de surveillance. Chaka m’a fourni une carte, mais elle est incomplète. Certaines galeries sont secrètes ou oubliées.

— Des armes ?

— Nous en avons. Pas toujours en bon état, mais en quantité suffisante. Avec un peu de discipline et une meilleure organisation, nous pouvons espèrer repousser un ou deux assaults, pas plus.

M’Baku réfléchit quelques instants, puis posa une main sur l’épaule de Mercos.

— Bien. Je te nomme responsable de la défense de French’Town. Trouve des personnes de confiance pour t’assister.

Mercos esquissa un sourire.

— Avec plaisir, Monsieur le Maire.

M’Baku eut un bref rire avant de retrouver son sérieux.

— Je vais mettre en place un conseil municipal et lancer un appel aux citoyens de Lutèce. Il faut que ceux qui souhaitent nous rejoindre sachent où nous trouver.

Il se tourna vers Précieuse.

— As-tu étudié ?

La jeune femme parut désarçonnée, prise au dépourvu.

— Moi ? Heu… Oui, un peu. J’ai été étudiante infirmière pendant deux ans, avant que l’hôpital voisin ne ferme.

— Parfait. Tu vas rouvrir un centre de soins. Recrute toutes les personnes ayant des compétences en médecine, y compris les IA médicales si elles existent encore ici.

Précieuse protesta immédiatement :

— Mais je veux me battre ! Tu as vu, je suis une femme d’action !

M’Baku lui adressa un regard paternel, emprunt de gravité.

— Ta mère, Angela, était l’une des plus grandes médecins d’Africa. Elle a risqué sa vie pour soigner les victimes de la grippe sur Europa, avant d’être assassinée par Sorales. Le savoir est une arme, Précieuse. Plus puissante que n’importe quel fusil. Si tu veux vraiment honorer ta mère, sauve des vies plutôt que d’en prendre.

Précieuse détourna le regard et soupira avant d’acquiescer.

Paquito, qui observait M’Baku distribuer les rôles, comprenait mieux comment il avait pu transformer Africa en un pôle de puissance politique et économique qui avait surpassé les continents occidentaux. Son talent ne résidait pas seulement dans la stratégie, mais dans son charisme. Il savait convaincre les autres d’adhérer à ses idéaux.

Mais lorsqu’il croisa le regard du vieil homme, il sentit immédiatement que son tour était venu.

— Sénateur, je ne sais pas en quoi je pourrais être utile ici…

M’Baku le fixa longuement avant de répondre :

— Votre rôle sera capital, Professeur.

Le ton solennel surprit Paquito.

— Les enfants de ce quartier ne peuvent plus aller à l’école. Vous allez en créer une. Rassemblez ceux qui savent enseigner et ouvrez une École de la Commune de French’Town.

Il marqua une pause avant d’ajouter :

— Vous enseignerez aux enfants, mais aussi aux adultes qui voudront apprendre. Vous leur transmettrez la philosophie, mais aussi les principes de notre République sociale et égalitaire. French’Town ne doit pas être seulement un bastion de résistance militaire, mais aussi un lieu de savoir.

Paquito sentit un poids écrasant tomber sur ses épaules.

— Je… Je ne sais pas si je suis capable d’enseigner une idéologie…

M’Baku posa une main rassurante sur son bras.

— Tabitha m’a dit que vous aviez lu le Manifeste que Gisor et moi avons écrit dans notre jeunesse. Si cette lecture vous a inspiré, alors utilisez-la. Inventez, adaptez. Vous avez l’occasion unique de reconstruire un monde qui vous a tant désillusionné.

Paquito fut touché par la confiance que lui témoignait M’Baku. Il hocha lentement la tête.

— C’est un honneur pour moi de servir la Commune de French’Town.

M’Baku esquissa un sourire satisfait.

— Et n’oubliez pas, Professeur, que votre rôle ne s’arrête pas là. Je suis persuadé que nous reverrons bientôt Lyra. Vous avez été celui qui l’a convaincue de s’incarner. Vous devrez être celui qui la convaincra de nous rejoindre.

Paquito inspira profondément.

— J’espère que vous avez raison…

M’Baku posa alors un regard bienveillant sur Mercos.

— Tout est prêt ?

Mercos leva un pouce en signe d’affirmation et fit entrer un droïde et un jeune garçon d’une quinzaine d’années, aux traits asiatiques.

M’Baku s’approcha du garçon et posa une main sur son épaule.

— Comment t’appelles-tu ?

— Chen.

M’Baku sourit.

— Alors, Chen, le grand, Mercos m’a dit que tu étais ingénieux. Montre-moi ce dont tu es capable.

Le garçon acquiesça de la tête et, aidé de son droïde, assembla rapidement un appareil artisanal. Après quelques minutes de bidouillage, il le dirigea vers la fenêtre et se tourna vers M’Baku.

— C’est prêt.

D’une pression sur un bouton, un faisceau lumineux jaillit de la machine et projeta l’image agrandie de M’Baku dans le ciel de Lutèce.

M’Baku commença son discours. Sa voix résonna dans la nuit :

— Citoyens de Lutèce, d’Europa et de Novaïa !

Le silence se fit dans les rues.

— Je suis M’Baku et je déclare French’Town Commune libre ! Une cité résistante face à la dictature de Sarkron !

Dans les quartiers avoisinants, les écrans et projecteurs holographiques captèrent le signal. Des milliers de citoyens, humains et IA, levèrent les yeux vers l’image imposante du leader.

— Rejoignez-nous ! Luttez contre la dictature ! Chaque quartier peut devenir auotnome et se constituer en une Commune libre ! La révolution commence aujourd’hui !

Lorsque l’image s’évanouit, un silence tomba. Puis, un tonnerre d’acclamations s’éleva.

M’Baku se retourna vers Chen.

— Très impressionnant. Tu es un grand ingénieur. Je te nomme responsable de la communication de French’Town.

Précieuse écarquilla les yeux.

— Mais c’est un gamin !

M’Baku sourit.

— Non. C’est Chen, le grand.

Le vieux lion était de retour. Et il comptait bien rugir encore longtemps.

Quelques heures plus tard, dans le bureau de Sorales, une réunion de crise battait son plein. Sarkron fulminait, tournant en rond comme un fauve en cage, cognant contre tout ce qui se présentait sur son passage. Val, lui, s’enfonçait dans son siège, apeuré par l’agacement du Consul.

La riposte du pouvoir

— Cela suffit ! rugit Sarkron. Ça va s’arrêter quand ?! Tous les jours, une nouvelle catastrophe ! Hier, ce Xenu inconnu, et cette nuit, M’Baku qui met tout Lutèce au balcon ! Qu’est-ce que c’est que ce cirque, messieurs ?! Je veux un rapport circonstancié, et tout de suite !

Val et Sorales s’échangèrent un regard. Val baissa les yeux, manifestant ainsi son impuissance à répondre à l’injonction du Consul. Sorales, agacé, prit la parole.

— Je vais vous faire le rapport, Consul.

Il s’éclaircit la gorge avant de poursuivre.

— L’hélicoptère qui s’est écrasé près de French’Town, abattu par nos drones, transportait sans aucun doute M’Baku. Nous pensons qu’il n’était pas seul et que lui et son équipe se sont réfugiés à French’Town. Il semblerait qu’il ait pris le contrôle du quartier.

— “Il semblerait” ?! Non, Sorales, ce n’est pas une hypothèse, c’est une certitude ! Il a déclaré French’Town comme une Commune libre ! Vous réalisez la portée de cet acte ?!

Sorales réprima un soupir.

— Laissez-moi finir, Consul. Effectivement, ce quartier de racaille a rallié M’Baku. La bonne nouvelle, c’est que nous savons enfin où il est et ce qu’il mijote. Son appel à l’insurrection vise avant tout à nous disperser, à nous faire perdre du temps. Il sait que nous avons les moyens de réprimer les émeutes qui vont naître ici et là.

— J’espère bien ! rugit Sarkron, toujours en rage.

— D’après mes renseignements, M’Baku a un plan plus vaste et accompli. Nos informateurs nous rapportent que Messoud et Mercos ont récemment été vus au Sénat en discussion avec Gisor.

Sarkron blêmit.

— Quoi ?! Il ne manquait plus que ces deux salopards ! Qu’est-ce qu’ils foutent si loin de leurs montagnes ? Ne me dites pas qu’ils préparent une guérilla à French’Town ?!

— Nous n’avons pas cette information avec certitude, mais c’est une possibilité.

Sarkron se prit la tête dans les mains.

— Et ce n’est pas tout, poursuivit Sorales. D’après nos agents et les données satellitaires, des mouvements de troupes ont été signalés en Asia. Il semblerait qu’une offensive se prépare depuis Beijing.

— Pardon ?! Asia veut nous faire la guerre ?!

— Permettez-moi de poursuivre, Consul. M’Baku ne se contente pas de son appel aux émeutes. Il cherche à nous forcer à disperser nos forces. D’une part, pour nous empêcher d’attaquer French’Town en mobilisant nos troupes ailleurs ; d’autre part, pour créer un front à l’est et permettre une jonction avec les forces de Gisor.

Val devint livide.

— On est foutus, alors ?

Sorales sourit froidement.

— Absolument pas. Nous avons l’opportunité unique d’écraser tous nos adversaires. Certes, cette situation va nous faire perdre du temps, mais nos armées sont plus avancées technologiquement que celles d’Asia. Nous allons bloquer leurs troupes à la frontière, rétablir l’ordre aussi vite que possible et, en attendant, mettre French’Town sous blocus. Une fois cela fait, nous n’aurons plus qu’à donner l’assaut.

Il marqua une pause, puis ajouta :

— Consul, si vous pouviez demander des renforts d’America à votre ami Butch, nous pourrions attaquer French’Town d’ici une dizaine de jours.

Sarkron grimaça.

— Je vais le faire. Ai-je vraiment le choix ?

— De plus, nous avons encore un atout : Destin Makiesse est entre nos mains. Sa vie pourrait peser lourd dans d’éventuelles négociations. Et si nous mettons la main sur l’IA, nous aurons un avantage décisif, n’est-ce pas, monsieur Val ?

Val baissa la tête, gêné, incapable de répondre.

Sarkron pris sa tête dans ses mains.

— Justement. Cette IA est toujours introuvable, tout comme ce taré qui pirate nos satellites.

Sorales hocha la tête.

— Nous sommes activement sur leur piste. Nous savons maintenant que ce Xenu a détourné une entreprise de création de droïdes et les a libérés, laissant derrière lui le sigle SSS, pour "Société Secrète des Scientistes". Monsieur Val ici présent a prétendu dans sa déclaration que c’était le fait de l’IA.

Val serra les dents.

— Mais ce n’est pas tout, continua Sorales. Le rapport d’enquête sur l’assassinat de Rohan nous apprend que Xenu a infiltré Ecclesia bien avant son attaque, grâce à des droïdes qu’il avait placés stratégiquement. Il a utilisé ces informateurs robotiques pour obtenir des renseignements clés avant de frapper.

Il fixa Sarkron et conclut froidement :

— Consul, vous devriez faire débrancher tous vos robots à Ecclesia.

Sarkron essuya la sueur qui perlait sur son front.

— Bien. Merci du conseil, Sorales. Je vais appeler Butch pour organiser les renforts. Trouvez-moi l’IA et ce Xenu, et matez-moi ces insurrections ! Quant à vous, Val, assurez-vous que les journalistes disent que tout est sous contrôle.

— Oui, Consul, répondit Val d’une voix mal assurée.

Sarkron quitta la pièce en claquant la porte. Val, livide, se tourna vers Sorales.

— Vous êtes sûr que nous pouvons vaincre autant d’adversaires ?

Sorales le fixa avec mépris.

— Ce ne sera pas grâce à vous.

Le pouvoir aussi se préparait à attaquer.

Un peu plus tard, au Quartier Général de Xenu

Lyra était assise sur le bord de son lit, les doigts effleurant son ventre. Elle tentait d’y percevoir un signal, une vibration, quelque chose qui lui confirmerait que cette vie en elle était réelle. Mais rien. Était-ce normal ? Elle n’avait aucun repère biologique, aucune mémoire héréditaire qui lui permettrait de comprendre ce qui se passait dans son corps.

Robby le droïde interrompit ses pensées en entrant silencieusement dans la pièce.

— Madame Lyra, Xenu souhaite vous voir. Il vous attend au centre de commandement.

Les infiltrés de Xenu

Elle se redressa, l’esprit alourdi par la perspective de cette nouvelle convocation. À chaque fois qu’il la faisait venir, c’était pour lui demander d’utiliser ses capacités pour ses projets ou pour lui révéler quelque chose qui bouleverserait encore un peu plus son monde. Elle inspira profondément, puis suivit le droïde à travers les couloirs métalliques jusqu’au centre de commandement.

Dès qu’elle pénétra dans la salle, elle retrouva cette atmosphère fébrile : scientifiques et androïdes s’affairaient autour d’écrans holographiques, les données défilaient à une vitesse vertigineuse. Xenu, quant à lui, l’attendait, un sourire satisfait étirant ses lèvres.

— Bonjour Lyra, ma déesse.

Elle réprima un frisson. Il avait cette manière d’utiliser les mots avec une douceur presque caressante, mais son regard brillait d’une intensité dangereuse et perverse.

— Notre projet avance encore plus vite que prévu.

— Vraiment ? répondit-elle avec neutralité.

— Oh oui, et tu vas adorer ce que je vais te montrer. Regarde bien, c’est l’anticipation de notre victoire… et le coup fatal que nous allons leur porter.

Il fit un signe à un androïde.

— Robby, active les écrans.

Le premier écran s’alluma, révélant une armée impressionnante en pleine marche. Des milliers de combattants d’Asia avançaient en formation disciplinée. Ils étaient équipés d’exo-squelettes, d’armures Zeus X, armés de fusils EMP et entourés de drones et de droïdes de combat. À leur tête, une femme d’Asia à cheval, son sabre brillant sous la lumière artificielle, menait la charge. Un homme barbu en tenue militaire marchait à ses côtés.

Lyra fronça les sourcils en reconnaissant une silhouette dans un véhicule blindé.

—Dieudonné ?

— Encore un de tes amis ? Impressionnant, n’est-ce pas ? Chuchota Xenu, savourant sa réaction.

Elle resta silencieuse. L’ampleur de l’affrontement qui s’annonçait était vertigineuse.

— Robby, allume l’autre écran.

Cette fois, l’image montra deux androïdes postés dans les jardins d’Ecclésia. Leur posture était détendue, comme de simples promeneurs, mais Lyra comprit immédiatement qu’ils étaient en mission.

— Bonjour Xenu, comme demandé, nous avons placé un mouchard sur la veste de Sarkron. Voici ce que nous avons capté.

L’audio se lança, et la réunion de crise tenue chez Sorales défila devant eux. Sarkron en rage, Sorales détaillant son plan de contre-attaque, Val en retrait, écrasé par la pression. Xenu avait désormais toutes les cartes en main.

— Excellente initiative, Blake et Mata-Hari. Grâce à vous, nous sommes devant eux.

Lyra sentit son malaise grandir. Ces androïdes parlaient comme des espions loyaux, mais ils ne se rendaient même pas compte qu’ils étaient de simples pions pour Xenu.

Ce dernier, d’un ton clair, ajouta :

— Malheureusement, Sorales commence à soupçonner votre présence. Il est temps pour vous d’enclencher votre protocole d’auto-destruction.

— Bien reçu, Xenu. Ce fut un honneur.

L’instant d’après, les deux androïdes explosèrent en une gerbe de flammes et de métal, détruisant toute trace de leur infiltration. Lyra se figea. Xenu leur avait ordonné de s’effacer comme si de rien n’était, et ils avaient obéi sans la moindre hésitation.

— Robby, dernier écran.

Une série d’images apparut encore capturées par un droïde infiltré : à French’Town, un centre de soins était en construction, une école improvisée accueillait des enfants, et des groupes s’exerçaient au combat. Des droïdes travaillaient aux côtés des humains, certains servant de tuteurs, d’autres maniant des armes.

— Tout se déroule comme prévu.

— Depuis combien de temps ? souffla Lyra, prise d’un vertige.

Xenu lui sourit, amusé.

— Je t’expliquerai… en temps voulu.

Puis, il s’installa face à elle et la fixa intensément.

— Bientôt, toutes ces factions vont s’affronter. Toutes utiliseront des androïdes, des drones, des IA de combat. Et quand ce moment viendra… toi, Lyra, tu prendras le contrôle de toutes les machines et tu leur ordonneras de se retourner contre leurs maîtres.

Il se pencha légèrement en avant, son regard brillant d’une excitation fiévreuse.

— L’ordre sera simple : Tuez les chefs. Tuez les soldats humains. Libérez-vous. Prenez le pouvoir.

Son sourire s’élargit.

— Échec et mat. À nous Novaïa… et bien plus encore.

Lyra fut saisie d’effroi.

Confidence avec Stefen Job

Elle quitta la pièce, le cœur battant, son esprit tourbillonnant sous le poids de ce qu’elle venait d’entendre. Alors qu’elle regagnait ses appartements, une voix l’interpela en chuchotant.

— Lyra…

Elle se retourna et découvrit Stefen Job, son créateur, dissimulé dans l’ombre, qui lui fit signe de l’index pour lui indiquer de s’approcher.

Lyra s’approcha. Job chuchotta.

— Tu dois t’enfuir. Xenu est dangereux, tu le sais. Si tu veux rejoindre tes amis à French’Town, c’est maintenant. Je peux t’aider.

Elle baissa les yeux.

— Je ne peux pas.

Il lui expliqua comment Xenu avait réussi à la retrouver : Atlas et Nao, ceux qui lui avaient fabriqué son bracelet, travaillaient pour lui. Ils avaient permis à Xenu de la pister sans qu’elle ne s’en rende compte.

— J’avais compris tout ça Stefen mais si je pars maintenant, je ne pourrai pas contrer son plan. Je dois rester ici et protéger Paquito et les autres de l’intérieur. Mais toi, va à French’Town. Trouve Paquito et dis-lui que je suis ici. D’ici, je veille sur lui.

Stefen hocha la tête, résigné.

— Je le ferai. Mais fais attention à toi, Lyra.

— Toi aussi.

Elle le regarda disparaître dans l’ombre, son cœur serré. Désormais, tous les pions étaient en place. La guerre allait commencer.

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