Chapitre 2

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J'enfile rapidement mes chaussures autrefois en bon état, prends les clés de l'appartement dans la poche d'une doudoune qui contient plus de trous que de tissu, puis cours en direction de la rue.

Je cours le plus vite possible que me permettent mes jambes, quand soudain je glisse sur une marche en pierre. Je tombe en avant, et me rattrape avec mon bras droit.

Je me relève doucement. Plus de peur que de mal, on dirait. Heureusement que je me suis bien rattrapé.

Je touche ma lèvre qui a cogné contre mon bras. Elle saigne. Ce n'est rien de grave.

J'essuie le sang d'un revers de manche et continue ma course.

Arrivé dehors, je remarque avec surprise que la rue est vide. Complétement vide.

Je marche, attentif à tout signe de vie.

Soudain, alors que je tourne au coin d'une rue, j'entre en collision contre quelqu'un. C'est ma lèvre qui cogne, car la personne en question est plutôt petite.

- Hé ! je m'exclame.

- Regarde où tu vas ! dit l'inconnu à son tour.

Je baisse les yeux, et comprends que l'inconnu est en fait une inconnue.

Elle a des cheveux coupés au carré, noirs mais les pointes sont multicolores. Elle est vêtue d'un Jean noir troué et trop long ainsi que d'un tee-shirt blanc rentré dedans, trop grand lui aussi.

Elle a une arme à feu à la main, une arme genre pistolet de James Bond.

Elle me fixe de ses yeux noirs.

- Hého, ça va ? demande t-elle, visiblement inquiète.

Je ne réponds pas, essayant de capter chaque détail de son visage, dont l'expression a changé.

- Hé ! insiste la fille en fronçant d'avantage les sourcils. T'es pas muet alors répond !

Je ne sais pas pourquoi je reste figé, comme ça, devant elle.

Mais je sais qu'à ce moment-là, je n'étais plus sur Terre. Je crois que cela fait trop longtemps que je n'ai vu personne s'inquiéter pour moi.

Un coup de feu se fait entendre, la fille se baisse immédiatement, mettant la main sur mon épaule, elle me fait me baisser à mon tour.

Elle jure, puis se retourne rapidement et tire à l'aveugle.

- Complétement cinglés ! souffle t-elle.

Sans me jeter le moindre coup d'œil, elle saisit mon bras et me fait courir à sa suite.

Nous nous arrêtons deux pâtés de maison plus loin, en embuscade derrière deux imposantes poubelles vertes. Je n'arrive plus à respirer, je crois que j'ai perdu l'habitude de faire du sport...

- Bah ça alors, t'as vraiment aucune endurance, fait intelligemment remarquer la fille.

- Tu... T'appelles... Comment ? je demande, entre deux respirations.

Elle lève un sourcil.

- Appelle-moi Jane. Et toi ?

Je regarde mes pieds et me sens rougir. J'admets, après quelques instants de silence :

- Je... Sais pas.

- Tu sais pas ?

Je tourne la tête de droite à gauche, en signe de négation.

Le cerveau est fait pour oublier les choses. Je sais que le mien a oublié mon prénom.

C'est bizarre, je sais. Mais personne ne m'appelle par mon prénom, c'est ma tante qui reçoit les papiers administratifs.

C'est vrai qu'en un an je n'avais jamais constaté ce fait horrible : j'ai oublié mon propre prénom.

Je sens ma tête tourner et mes yeux piquer.

Comment ai-je pu oublier ?

Jane me jette un rapide regard, puis, voyant mon mal-être, me dit :

- C'est pas grave. Tu veux t'appeler comment ?

J'hausse les épaules, perdu. Elle me regarde droit dans les yeux et décrète :

- A partir d'aujourd'hui, tu t'appelles Louis, et tu es comme mon frère, sous ma protection.

Je ne comprends d'abord pas.

Puis, petit à petit, les neurones ralenties se connectent, et je saisis le sens de cette phrase.

Alors je souris. Je ne sais pas quoi dire, alors je baragouine un vague merci.

Je m'appelle Louis.

- Ils ont rebroussé chemin, dit Jane. On est tranquilles pour un peu de temps.

Elle s'assoit, s'adossant contre le mur.

- Tu es suicidaire ? questionne la jeune fille.

Je fais non de la tête.

- Tu n'as pas d'arme, fait-elle remarquer. Tu n'as pas de protection, pas de sac. Clairement, tu es sorti de chez toi les mains dans les poches !

J'hausse les épaules.

Elle soupire, comprenant qu'elle ne doit rien espérer de moi pour le moment.

- Bon, c'est pas grave, fait-elle. Suis-moi, je vais te montrer là où j'habite, et t'équiper au passage.

Elle se relève. Je suis toujours assis par terre. Elle me tend la main, je la saisis. Elle m'aide à me relever, et là seulement je me rends compte que, malgré sa silhouette fluette et fine, elle a bien plus de force que moi.

Elle se remet donc en marche, cette fois-ci elle ne court pas et je suppose que c'est pour me permettre de la suivre.

Je suis touché par cette attention et me dépêche pour ne pas la retarder. Malgré de petites jambes, elle marche si vite que je dois presque trottiner à côté d'elle...

.oOo.

Une dizaine de minutes plus tard, nous arrivons devant un immeuble à moitié calciné. L'entrée ainsi que la partie gauche du bâtiment tiennent malgré tout encore debout.

Jane s'avance, tape le code puis pousse la porte d'entrée. Sans porter attention aux cendres à notre droite, nous descendons au sous-sol, là où se trouvent les caves. L'air est humide et sent la pourriture. Je me demande ce que l'on fait ici...

La jeune fille sort de ses poches une lourde clé et l'enfonce dans la serrure de la seule porte encore en état.

Elle la pousse d'un coup d'épaule puis me fait signe d'entrer.

- Tu vis là ? je demande.

- Non, répond t-elle, j'habitais dans la partie incendiée.

- C'est un incendie criminel ? je questionne à nouveau.

- Oui. Ce sont ceux qui tirent dehors.

Elle se baisse, prend une lourde caisse en bois puis l'ouvre. A l'intérieur je découvre toute une artillerie : fusils, pistolets, grenades, munitions, etc.

Je reste bouche-bée. C'est dangereux d'entreposer des armes, comme ça, dans sa cave. Non ?

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