Chapitre 29

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« — Prenez-le… C’est mon dernier cadeau…

Je ne comprends pas. Vous aviez dit...

— J’avais dit … peut-être.

— « Picon-Bière avait raison. Il parlait d’un pacte avec le diable.

— Nous ne nous reverrons plus.

— Je reviendrai.

— Evitons les promesses »

Le lendemain, alors que les premiers rayons de soleil caressaient la cime des pins, elle quitta la maison endormie et laissa un mot de remerciement sur la table de la cuisine. Lorsqu'elle arriva devant chez sa mère, on avait coupé le figuier. Elle regarda sans y croire la souche blême qui s’agrippait au sol entre deux pots ébréchés.

Sa mère l’attendait sur le seuil, les mains croisées. Personne n’aurait su dire si elle était sur le point de rire ou de pleurer. La gorge serrée, elles s’embrassèrent et s’assirent dans la cuisine. Sur la table, un gros bouquet de mimosas débordait du vase. Debbie regarda par la fenêtre qui lui parut plus grande.

— Tu vois que ce n’était pas si difficile de le faire couper.

— Faut avoir une raison pour faire les choses.

— C’était quoi ta raison ?

— Ce que tu m’as raconté à propos du vieil américain et de son arbre mort. J’ai pas voulu qu’on dise la même chose de moi. On reste des années avec quelque chose et tout d’un coup on s’en débarrasse… Ça s’est bien passé avec ton musicien ?

— Je lui ai raconté l’histoire de Rebecca.

—Tu as eu raison, le plus dur, c’est la première fois, tu te souviens quand tu allais à la mer ? Tu n’osais pas entrer dans l’eau et puis…

— MAM … Excuse-moi. Qu’est-ce que tu fais ?

La vieille femme ouvrit un placard et sortit un album de photos sur lequel deux chatons se disputaient une pelote.

— J’attendais que tu reviennes pour l’ouvrir. Ce sera la première fois depuis bien longtemps.

Coincée dans le TGV entre une marmaille excitée et un couple de petits vieux somnolents, Debbie se laissait aller. Il y avait bien longtemps qu’elle ne s’était sentie aussi légère.

« Alors, c’est dit ? Tu viens me voir à Noël ? On fera une petite fête, j’inviterai Jessica.

— Promis…

—Tu as quelque chose de changé. Tu ne serais pas amoureuse ?

— N… non … Quelle idée ? Qu’est-ce qui te fait croire ?

— On ne peut pas cacher grand-chose à une mère. Je ne serais pas étonnée si… Non rien ! Tu as le droit d’avoir tes secrets. »


Josie l’attendait à la gare. Un foulard aux tons de pêche mettait en valeur son bronzage rural. — Dis donc ça te réussit la Côte d’Azur, tu as une mine superbe ! Tu as bien fait de rentrer par le train, plutôt que de te taper la traversée de la France avec l’autre conne. Mariana est passée au magasin. Elle a pris des oratorios de Bach ! Tu l’imagines en train d’écouter ça ? Depuis le temps, rien qu’avec ce qu’elle m’achète, elle doit avoir une pleine étagère. J’ai aussi

revu Stef, sa fille est repartie au Canada et il l’air d’avoir le moral dans les chaussettes.

Elle reprit son souffle tandis qu’elles montaient dans un taxi. D’un commun accord, elles décidèrent de manger chez Debbie. Elles s’installèrent autour de la table basse après avoir razzié un marchand de cuisine chinoise. La plante verte tendait ses feuilles. Debbie l’arrosa et lui parla longuement à voix basse.

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