Chapitre 2: I Know Your Lie

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"- Qu’est-ce que tu ferais si tu pouvais changer le monde ?
– Je ferais table rase de l’Histoire délabrée."

Pawn. 4/16

J’avais le sourire aux lèvres et je ne pouvais m’empêcher de ricaner.
Ma main soupesait la bourse pleine d’or que le village m’avait versée.
Tout, je venais de tout leur prendre, ils allaient souffrir et je m’en réjouissais.
La pluie creusait des flaques dans la route boueuse et molle, le cours d’eau juste à côté grandissait à une vitesse ahurissante, ma joie partie en écume pour se transformer en long soupir.
Ma figure mutilée se reflétait dans l’eau brumeuse du ruisseau plein d’excréments et de maladies.
Chaque pièce était aussi sale que le torrent de merde dans lequel j’allais les déverser, sans la moindre hésitation je vidais le contenu de ma besace, elles coulaient une par une pour finalement disparaître.
C’était mieux ainsi, la capuche sur la tête je repris le chemin de ma quête, mes pieds s’enfonçaient dans la glaise ramollie.
Ma lueur aux mille rayons brillait faiblement entre mes doigts, j’avançais à l’aveugle...
J’erre dans ce monde à l’agonie, plus rien ne captive mes sens, plus rien n’a de sens...
Tout est friable et sans importance.
Notre astre morcelé est une vierge stérile, elle n’a pu donner qu’un seul fruit : les péchés qui la gangrènent et l’empoisonnent.
Nous ne sommes qu’une gigantesque erreur du toucher d’un être trop vieux pour écouter nos pauvres cœurs.
Nous l’avons déçu, la lumière ne traverse plus les nuages.
J’ai longtemps prié, ma foi s’ébranle un peu plus chaque jour passé dans ce sombre monde.
Faut-il encore se tourner vers toi quand tu nous enfonces dans une flaque visqueuse qui nous accroche de ses bras difformes ?
Tes créatures profanes ont choisi de détruire ce que tu as bâti et je m’efforcerai de faire de même, car du chaos ressortiront les divines horreurs de l’humain, remplies de vices qui se sont libérés de tes chaînes.
La torche pure a disparu de ma main, elle ne reviendra plus jamais.
L’Homme a trouvé son nouveau maître à travers les D, artefacts de malheur, pacte avec l’obscur.
Des cendres de ta destruction ont fait naître ces pierres aux mots interdits.
Ces objets de convoitise, je les trouverai, je creuserai la terre jusqu’au-delà de ma mort pour en prendre le contrôle.
Ils pourront sortir notre espèce de ta mare gluante, de ton observation stupide.
Tu nous as créés à ton image, n’est-ce pas ?
Alors tu es aussi mauvais que nous, créature parfaitement imparfaite.
Les Snians l’ont découvert en premier, tes rejetons fantomatiques trop longtemps châtiés, leur existence est un écart de ta part.
L’artefact est presque aussi vieux que l’origine du monde.
Une anomalie complète dans l’Histoire.
Je n’ai besoin que d’un seul : le 30ᵉ.

– Les Mages les plus célèbres ayant pu l’observer sont formels, le Tricantogone daterait d’avant la prolifération des saloperies qui menacent la putain et le sale gosse.
Il en est sûrement la cause par la même occasion, c’est notre punition, n’est-ce pas ?
Ton arme divine entre nos mains pour mieux s’autodétruire.
On en a répertorié 82, tous plus dévastateurs les uns que les autres, on les surnomme les Folies Célestes et en posséder un est signe de déclin. –

Il n’a aucune force maléfique ou suprême précisément établie, ni même une forme clairement définie.
La plupart des témoignages parlent d’une pierre polie à 30 faces égales, mais certaines sources plus floues, trouvées dans la bibliothèque oubliée dans la crypte du culte, nous parlent d’êtres innommés de l’Histoire.
Tout son potentiel est enfermé, et sans en être digne elle n’a pas d’intérêt, formée d’aucun métal noble, ni d’inscription d’une quelconque valeur historique, elle n’est qu’une insignifiante pierre.
Les seuls détenteurs dignes furent une putain, un Lyiop, un prêtre qui était aussi croyant que je le suis et un gosse, un vulgaire gosse.
Ta vision d’un être digne ne colle pas avec tes écrits idylliques, à croire que tu aimes les déchets de l’humanité, tes poupées de porcelaine les plus brisées sont tes plus belles fiertés, pas vrai ?
Nous flageller est la seule chose que tu acceptes de notre part : le pardon rédempteur du sang corrompu.
Douleur et plaisir vont de pair pour toi.
Ils ont disparu, nos démiurges, balayés par le souffle ardent du temps, ne laissant que de la poussière dans un tombeau muet.
Un nom sur une stèle effacé par les tempêtes, déposer une gerbe de fleurs pour ces héros sans nom est un devoir que je me fais.
Des années ou des millénaires plus tard, ta malédiction retombe dans les mains d’une nouvelle victime.
Je serai la prochaine, je le sens, après tout les êtres les plus laids sont les plus méritants.
Je suis ce que tu as fait de pire, ton joyau sur la couronne de désastre que tu portes fièrement.
Me faire souffrir a été un jeu pour toi, tu m’as tout pris, tout : mon visage, ma peau et mes os, mon âme sœur, ma pureté d’enfant, ma dignité.

Suis-je puni de vivre ?

Il ne reste que les rides sur un corps fatigué d’endurer tout ton supplice infini.
Un arbre sans feuille ni fleur qui attend d’être abattu par le tonnerre.
Après tout, le coup de foudre ne dure que le temps d’un éclair.
Je prendrai feu comme pour la première, et cette fois je me laisserai emporter par la rage qui me consume.
Tu verras, je finirai ce que tu as commencé, je t’en fais la prière la plus solennelle.

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