Chapitre 1: 312 p.C.

3 minutes de lecture

Une fumée charbon s'échappait de la cabane en bois, construite de bric et de broc. Une odeur puissante, âcre et nauséabonde enveloppait le marécage. Les arbres desséchés filtraient la lumière de la lune, absorbant ses rayons comme des fleurs du mal.

Une masse noire fendant le tissu étoilé poussa un croassement guttural, observant l'étrangère qui pénétrait sur son territoire.

Elise, rassemblant son courage, frappa l'anneau de métal rouillé au centre de la porte. Une silhouette anguleuse lui ouvrit. Le regard perçant de l'habitante se posa sur la jeune fille au teint crayeux.

Un silence de mort s'installa entre les deux êtres, uniquement troublé par la brise glaciale qui traversait les branches. Les lèvres d'Elise restaient figées par la peur, et elle regrettait déjà d'avoir mis les pieds ici. Son cœur battait à tout rompre. Un volatile au plumage partiellement arraché se posa sur l'épaule de sa maîtresse, émettant un cri menaçant.

- Entre, ordonna la mégère d'un ton sec.

Elise s'exécuta, terrifiée à l'idée de désobéir.

L'intérieur était minuscule, rempli d'étagères poussiéreuses où s'alignaient des bocaux étiquetés et rangés dans un ordre mystérieux. L'odeur moribonde de l'extérieur semblait atténuée, comme étouffée par un couvercle posé sur un chaudron dans un coin de la pièce. Un courant d'air dissipait les relents les plus âcres.

La vieille femme poussa un tabouret vers Elise, puis fouilla dans ses affaires pour en sortir une boîte métallique. Elle contenait des biscuits bleus, moisis et durs comme de la pierre.

- Assieds-toi, lança-t-elle nonchalamment.

- Je... je crois que je devrais partir. Pardon..., balbutia Elise en reculant d'un pas.

La mégère se retourna, lui lançant un regard glacial. Elise renonça à fuir et accepta la tasse de breuvage chaud et noir, légèrement visqueux, que la vieille femme lui tendait.

- Bois.
- Qu'est-ce que c'est ? Du poison ?

La vieille dame haussa un sourcil, à la fois surprise et vexée. Elle fit mine d'ignorer la question et donna un morceau de gaufrette à son oiseau. Curieusement, le biscuit sembla se transformer dans sa main, retrouvant une teinte dorée et appétissante, comme s'il venait d'être cuit.

Hésitante, Elise porta la tasse à ses lèvres et but une gorgée, priant pour ne pas ressentir de douleur. Contre toute attente, un arôme sucré aux notes amères enveloppa sa langue.

- C'est du chocolat chaud. Mange., grommela la vieille femme en tendant la boîte de biscuits, désormais remplie de sablés appétissants.

Elise baissa sa garde et en enfourna un. Peu à peu, elle se détendit. La mégère s'assit dans son fauteuil, sirotant son propre breuvage.

- Qu'est-ce que tu veux ?
- Eh bien... Elle marqua une pause, hésitant encore. Mon père s'est blessé au travail aujourd'hui.
- Quelle sorte de blessure ?
- Euh... une coupure.
- De quelle taille ? Où ça ?
- Pas plus grand qu'un doigt, au niveau de la paume. On a peur que ça s'infecte...

Un silence pesant s'ensuivit. Finalement, la vieille dame lança une fiole à Elise avec indifférence.

- Trois gouttes par jour sur la plaie. Ça cicatrisera rapidement.

Elle ouvrit la porte pour la raccompagner.

- Attendez ! J'ai menti. Ce n'est pas pour mon père que je suis venue... C'est pour moi...

Shara soupira et referma la porte avant de se rasseoir.

- Je t'écoute.
- Je ne me sens pas bien. J'ai les mains qui tremblent, et je sens une sorte de présence dans ma tête.
- Depuis combien de temps ?
- Quelques jours, peut-être des semaines... C'est dur à dire.

La vieille femme se gratta la tête, songeuse.

- Ce n'est pas une maladie que je peux soigner, ma grande.
- Alors, qu'est-ce que c'est ?
- De la magie., répondit-elle en lui retirant la tasse des mains.
- De la magie ? Vraiment ?
- Oui, oui, gamine. Pas la peine de t'emballer, c'est plus courant que tu ne le crois gamine.
- Vous pouvez m'apprendre ?
- Ça dépend. T'as déjà vu un sort qui tourne mal ?
- Non, jamais.
- Parfait. Alors serre ce truc bien fort et ferme les yeux.

Excitée, Elise obéit.

- Maintenant, répète après moi : Ignis.
- Ignis.

Le catalyseur entre les doigts de la jeune fille s'illumina, une flammèche tourbillonnant un instant avant de s'éteindre.

- Tadaaa, lança Shara d'un ton flegmatique.
- Incroyable ! Vous pouvez m'apprendre d'autres choses ?
- Non.
- Quoi ? Pourquoi ?
- Il se fait tard, gamine. Rentre chez toi avant que tes parents ne viennent te chercher à coups de pied au cul.

Annotations

Vous aimez lire Sort Nette ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0