Le bar
24 heures plus tôt...
Jack enfila ses derniers vêtements, jeta un rapide coup d’œil à la pendule et finit son café. Il ressemblait à tout ce qui semblait de plus banal physiquement. Taille moyenne et poids moyen.
Châtain, ses yeux verts émeraude étaient l'atout qu'il mettait en valeur auprès des filles de son âge. Il était un garçon normal. Habillé d’une façon simple. Discrète.
Chemise bleue, jean et mocassins était son accoutrement habituel. Il ne portait aucun signe distinctif, comme un piercing ou un tatoo. Seule une petite barbe garnissait son visage fin, plus ou moins longue selon l'humeur ou la saison.
Jack était monsieur tout le monde, celui qu’on ne remarquait pas. Si bien que lorsqu’il se promenait dans une rue bondée, les gens ne cherchaient même pas à l’éviter. La plèbe, pressé de finir sa journée harassante, fonçait tête baissée vers un métro, un bar ou une salle de sports. N'importe quel lieu qui lui permettait d'évacuer toute la pression accumulée dans la journée, de celle qui pesait sur ses frêles épaules.
Il lui arrivait souvent de s'imaginer être sur une course d'orientation, évitant les obstacles, les passants. Se créant une carte mentale de la ville. L'objectif était d'éviter les encombres jusqu'à l'arrivée. Ce qui l’amusait un peu.
Un torrent ininterrompu de musique électro l'aidait à se débarrasser de la jungle sonore. Klaxons, cris, bruits de moteurs, de chantier rythmaient son quotidien. Le casque audio lui permettait d'entrer dans sa bulle.
Jack travaillait dans un restaurant, s’occupait un peu de servir, un peu de nettoyer. Le restaurant n’était ni très connu, ni bien payé mais ce job lui permettait de pouvoir payer loyer et factures.
Ce jour-là, Jack bossait le soir. Il était arrivé en avance afin de fumer sa cigarette accompagnée d'un bon café. Ce mélange de caféine et d'eau l'aidait à tenir la soirée. Le ciel était gris, il ne pleuvait pas, mais le temps était morne et maussade. Les immeubles étant haut, la luminosité se faisait faible. Un décor de polar urbain pensa t-il.
Il s'installa en terrasse et sortit un smartphone de la poche de son jean. Il fit défiler son fil d'actualité Facebook sans entrain, presque par réflexe. Une information retint son attention au moment même où son téléphone vibra.
Un appel entrant de Julie le sortit de sa bulle. Cette dernière était une amie de longue date, jeune femme d'une vingtaine d'années, a la silhouette élancée et aux cheveux dorés. Sociable et distinguée, elle travaillait dans les assurances ou le commerce, il n'arrivait jamais à saisir la nature de son travail. IJack était proche d'elle, elle lui apportait de la bonne humeur et de l'enthousiasme.
Jack décrocha son téléphone, sourire aux lèvres :
- Allo ?
La petite voix féminine de Julie fit son apparition :
- Allo ? Oui ? Comment vas-tu ?
– Ça va, je vais bientôt commencer mon service, pourquoi m'appelles-tu ?
– Tu finis à quelle heure ? Rétorqua Julie, pressée.
– Vingt-trois heures officiellement mais rajoutes une demi-heure voir trois quarts d'heure pour nettoyer et boire en fin de service !
– Tu veux me rejoindre après ? On ira se boire un verre et ensuite j'ai une soirée de prévu où t'emmener.
Jack n'eut pas le temps de savoir s’il en avait envie. Elle attendait une réponse. Rapide. Et positive qui plus est. Il prit un temps de réflexion...
- Ecoutes, ok pour le verre mais je ne pense pas pour ta soirée ! Je suis fatigué et j'enchaîne demain même heure... C'est quoi comme soirée d'ailleurs ? Se demanda Jack, un peu méfiant :
– Idiot, tu es au repos demain !
Il fut surpris. Elle connaissait son emploi du temps mieux que lui-même. Vu son métier, elle devait connaître l'agenda de tous ses amis ! Cela le fit sourire. Julie poursuivit :
- Un ami m'a proposé une soirée d'envergure dans les beaux quartiers, une somptueuse villa de deux cents, trois cents mètres de carrés de surface.... Il y aura différentes salles de musique, des bars, du champagne, des jeux et beaucoup de jolies filles ! Finit-elle en voulant convaincre Jack.
Mais il avait parfaitement vu clair dans son jeu :
- N’essaies pas de me convaincre avec tes arguments sournois ! Et pourquoi tu serais invité à une soirée de ce type ? Ça n'a pas l'air fait pour les pauvres... enfin... tu vois ce que je veux dire... les gens comme nous !
– C'est un copain qui m'a proposé et il m'a dit que je pouvais inviter un ami. Il y aura des dj sets, des jeux de lumière et beaucoup de bière j'imagine.... Rien d'incroyable. Il y en a tous les mois voir toutes les semaines d'immenses soirées de ce type. Ce sera nouveau pour nous. Autant découvrir. Si on ne se sent pas à l'aise, on partira. C'est promis. Ne sois pas si méfiant ! Allez ! Viens ! Ça te fera du bien et tu ne travailles pas demain.
Jack sentit la fibre commerciale qui habitait son amie. Elle savait tout vendre. Elle n'était plus loin de le convaincre. Il pesait le pour et le contre. Il n'avait rien à perdre et il espérait pouvoir se changer les idées. Il pouvait faire des chouettes rencontres. De l'autre côté, il préférait passer une soirée posée avec son amie, au pub, à enfiler les pintes en écoutant ses histoires rocambolesques. Ils auraient fini chez elle, à commencer un film avec un bon stick et en engloutissant une bouteille de rhum. Il aimait partager avec elle ces moments-là.
Mais il pouvait le faire une autre fois. Ils se voyaient régulièrement. C'était à charge de revanche. La soirée qu'elle lui proposait possédait un caractère particulier, presque excitant.
- C'est d'accord ! Tu passes me voir à la fin du service ?
Il ne la voyait pas mais pouvait s'imaginer à travers le micro qu'elle sautait de joie, contente d'avoir pu convaincre son ami :
- Super ! Tu verras Jack, on s'amusera bien. Envoie-moi un message quand tu finis.
Julie habitait non loin du restaurant où il travaillait, une dizaine de minutes à pied à peine.
- Ça marche ! A tout à l'heure !
Jack allait raccrocher son portable quand Julie cria à l'appareil pour se faire entendre :
- J'oubliais Jack ! Il faudra venir déguiser et il y aura un mot de passe à annoncer à son arrivée. Je ne sais pas encore tout mais je serai prévenu par texto avant. Et il y aura du beau monde, de la haute sphère... Bisous, à tout à l'heure !
Sur ces derniers mots, Julie raccrocha. Jack touillait nerveusement son café. Il repensait à la conversation. Il n'eut même pas le temps d'y songer qu'une voix grave le fit sortir de sa stupeur. Son chef l'interpella.
- Jack ! Sors de ta bulle ! Les clients commençent à arriver ! Prépares-toi !
Jack marmonna dans sa barbe. Il avait plutôt de bons rapports avec son chef mais il n'aimait pas qu'on le bouscule pendant sa pause.
Il finit avec hâte sa cigarette et marcha de l'autre côté du restaurant. Etant employé, il ne devait pas se montrer en tenue citadine à l'intérieur.
Il prit l’avenue plus loin, qui formait un angle droit à la terrasse, tourna à gauche et entra par une petite arcade. Celle-ci surplombait une porte en bois peint, qui servait de lieu de passage pour les employés. Passé le seuil, les fortes odeurs de bouffe pénétraient avec choc dans le nez.
C'était le début du rush et la cuisine fourmillait. Dans un élan rapide, presque automatisé. Les serveurs et cuistos étaient comme transcendés. Ils connaissaient les mouvements des uns et des autres par cœur. La chorégraphie était apprivoisée, domptée. Les déplacements étaient coordonnés.
Jack rentra dans la cuisine, la traversa en essayant de ne pas interférer l'élan de ses coéquipiers. Il finit, non sans mal, par trouver la petite salle de repos puis se changea. Un dernier lavage de mains et il était parti pour six - sept heures de service non-stop.
Un travail fatiguant, il fallait sans cesse jongler entre subir les invectives des clients d'une part et faire preuve de diplomatie de l'autre. Ne pas heurter la clientèle mais ne pas se laisser marcher sur les pieds. Un gros boulot de psychologie. Jack rêvait souvent d'envoyer chier un client. Balancer un flot d'insultes. Ecraser une bouteille sur une tête. Il aimait s'imaginer nombre de scénarios plus machiavéliques les uns que les autres.
Le seul avantage de ce dur labeur était la bière et les repas offerts par la maison. Ou les quelques filles qui donnaient discrètement leur numéro. Qui aboutissaient souvent à des relations futiles et sans lendemain.
Le restaurant était aussi une brasserie. On pouvait y manger à son appétit et boire plus que de raison. Pour les amoureux des sorties après le travail, il y avait ce qu'on appelait, plus communément, dans un certain anglicisme reconnu, les fameux « afterwork ». Ces sorties de fin de journée s'était forgé une réputation notamment grâce à l’« happy hour » qui en provenait directement.
Le concept était simple, de dix-sept heures à vingt heures, les pintes de bières étaient à bas coût, c'était donc l'occasion rêvée pour décompresser, sans se ruiner, d'une longue journée éreintante.
Bières de toutes origines, planches de fromages, charcuteries, tapas, accompagnaient les fins de journées arrosées des jeunes travailleurs et cadres dynamiques. En passant par les étudiants et les bohémiens. C'était à moindre coût et rencontrait un certain succès auprès des habitants du quartier.
La brasserie proposait aussi toutes sortes de plats locaux à base de viande, un plat du jour, un plat du soir. Pour plaire à tout le monde et dans l'air du temps, il proposait aussi toute une gamme de produits bio, végan, sans gluten. Des bières au vin, en passant par les tartines et les salades. C'était un endroit convivial, bien vivant et à prix abordable. Une bonne adresse à connaître.
Ce soir-là, Jack avait du mal à servir les tables. Il avait subi plusieurs remontrances de la part de son chef. Il n'arrêtait pas de penser à la soirée que lui avait proposé son amie. Ce qui ralentissait son travail et le coupait dans son effort. Un immense appartement, du champagne, un mot de passe, des gens à priori biens aisés.... Une toute autre classe sociale que lui. Cela lui semblait suspicieux. La soirée possédait une aura nébuleuse, énigmatique, presque ésotérique.
Il connaissait les soirées rallyes, ces fêtes démesurées organisés par des gens fortunés dans de grandes demeures. Mais, quoi qu'il en pensait, ces dernières lui étaient accessibles. Il en avait déjà fait l'expérience.
Cette-fois ci, la description de son amie avait ce quelque chose d'hermétique, d'impénétrable pour quelqu'un comme lui. C'était et devait rester opaque. Il y avait quelques marches à gravir avant d'accéder à ce type de fête. Inapprochable pour Jack. Les soirées rallye étaient son plafond de verre. Pourtant, Julie qui ne venait pas des classes sociales supérieures, était invité par ce mystérieux ami. Elle n'aurait pu approcher de ce genre de fête par sa seule position dans la société. Qu'est-ce qu'avait pu faire son amie pour y être invité ? Et son collègue, qui était-il d'ailleurs ? Quel âge avait-il ? Travaillait-il ensemble ? Quelle fonction occupait-il ? Avait-elle menti sur lui ? L'avait-elle rencontré dans une soirée ? Dans une fête comme celle où il devait aller ce soir ? Tant de questions sans réponse. Tout cela lui restait inconnu.
Jack se passionnait un peu pour les sociétés secrètes et le surnaturel mais cela ne dépassait pas outre-mesure sa seule curiosité envers le monde caché. Peut-être se posait-il trop de questions. Peut-être à cause de sa curiosité pour le spirituel et la magie, il se montait la tête. Il était méfiant de nature. Il chercha à disperser ses pensées, n'étant plus concentré sur ses tâches.
Son chef, un grand monsieur à la musculature impressionnante, ne manqua pas de le lui faire remarquer.
- Jack ! Viens me voir !
Il comprit qu'il n'était plus attentif. Il finit de servir une table où un groupe d'amis dépassant à peine la vingtaine descendaient les pintes comme on dévalait l'Alpe d'Huez. Il arriva vers son chef.
- Il t'arrives quoi aujourd'hui ? T'as la tête dans le cul ? T'es sorti avec l'équipe du Bella Verde hier ?
Jack se souvenait d'une fête organisée la veille par le bar d'à côté à l'occasion d'un anniversaire.
- Non, j'ai juste la tête ailleurs...
C'était le moins que l'on puisse dire. Son chef fit une moue perplexe. Il savait Jack plutôt rêveur à son habitude mais là, il était étrange, comme absent.
- Bon écoutes, essaies de reprendre tes esprits jeune rêveur, prends une pause. On se revoit tout à l'heure !
Aussitôt, Jack se mit en route. Il alla chercher son paquet de cigarettes dans la salle de repos, reprit la petite porte qui donnait sur la rue et trouva en face un banc en pierre sur lequel se poser.
Il sortit son paquet, prit une cigarette et l'alluma avec le briquet qu'il trouva au fin fond de se poche gauche. Il tira une bouffée et ferma les yeux. Il hésita à rappeler son amie pour récolter quelques infos. La clope commença à faire son effet. Il se calmait, respirait doucement.
Jack adorait fumer. Il se savait addict à ce mélange de substances nocives et cancérigènes mais il prenait toujours un malin plaisir à s'en griller une. L'homme aimait bien s'empoisonner. C'était ancré dans sa nature profonde. L'autodestruction.
Jack avait succombé à son pouvoir de sociabilité. Il ne comptait plus les moments où le tabac lui avait permis de faire des rencontres. La clope servait aussi d'échappatoire. Une conversation qu'il voulait fuir. Un moment gênant. C'était peut-être aussi ça, la liberté que l'on ressentait en fumant. Pouvoir se défiler sans raison, sans explication. Bien que depuis l'avènement de l'ère du smartphone, la cigarette se faisait progressivement remplacer par ces outils intelligents. Qui permettaient tout autant de pouvoir filer à l'anglaise.
Jack, l'esprit altéré par les bouffées de cigarette, tira une nouvelle fois, sortit son jouet intelligent et le déverrouilla.
Un écran d'accueil fit son apparition, rempli de petits logos d'applications. Dont les équipes marketing devaient charbonner nuit et jour à rendre ces logos de plus en plus attractifs. Des messageries instantanées aux réseaux sociaux. En passant par le e-commerce et les sites de rencontres, avant tout sexuelles. Avant, un sms et un appel suffisaient amplement pour communiquer mais ce n'était pas suffisant pour les géants de la big tech, il fallait posséder maintenant toute une panoplie d'applications dont l'objectif restait équivalent. Il était tout autant possible d'émettre que de recevoir.
Jack finit par ouvrir un réseau social spécialisé en actualités, Twitter. Il fit défiler l'écran.
« Richesse : La fortune des cinq cents plus riches en France augmente à nouveau cette année »
« Environnement : Les prévisions alarmistes des membres du GIEC »
« Réseaux sociaux : Facebook dépasse les 3 milliards d'utilisateurs et rachètent Snapchat »
« Média : La polémique enfle ! Nadia, des anges de la téléréalité, aurait insulté Steve après avoir couché avec lui ! Vidéos à l'appui, La suite va vous étonner ! »
« Géopolitique : La bataille de l'eau ou quand les multinationales essayent de privatiser au mépris des citoyens »
« Société/ Faits divers : l'histoire terrifiante de Célia, de retour d'enfer après une soirée qui a mal tournée »
« Sciences : Découverte de nouvelles exoplanètes dans le système... »
Jack interrompit sa lecture. Une tournure de phrase avait retenu son attention. « Enfer d'une soirée ». Il revint sur l'article, cliqua dessus et réentreprit sa lecture.
« Une incroyable et stupéfiante histoire est arrivée à Célia D., une jeune fille dont nous avons changé le prénom. Elle souhaite garder son anonymat. Voici son histoire : Du haut de ses vingt-deux ans, celle-ci avait effectué un stage de formation dans une grande entreprise de communication. Tout se passait bien jusqu'au jour où elle reçut une mystérieuse invitation dans sa boîte de réception. Le mail en question conviait Célia à un événement organisé par une entreprise où seraient présents les plus grands noms des métiers de la comm'. Très ambitieuse, Célia avait répondu par la positive. C'était l'occasion rêvée pour elle de se constituer un précieux carnet d'adresses. Mais elle était loin de se douter de la suite et de s'imaginer ce qui allait lui arriver ! En effet, plus tard, elle avait reçu un second mail lui indiquant les détails d'entrée à la soirée. Qui peuvent paraître étrange au premier abord. Elle devait passer par un rituel non contraignant mais formel. Il y avait un code vestimentaire à respecter, une voiture venait la chercher à une heure précise et enfin, seul un mot de passe reçu le jour même lui ouvrirait les portes des festivités. »
Jack arrêta sa lecture. Il se passa la main dans les cheveux, perplexe, puis repensa à sa conversation avec Julie. Elle lui avait parlé de déguisement, de mot de passe, elle travaillait aussi dans la communication.... Il se ralluma une cigarette, à la fois excité d'en savoir plus et quelque peu tendu. Il poursuivit :
« Le soir venu, une voiture l'avait attendu à vingt-heures pétantes en bas de son immeuble. Habillée d'une façon chic, presque luxueuse, elle était montée dans une imposante Berline noir et le chauffeur s'était montré poli et amical sur la route. Puis elle était sortie de la ville et avait fini par arriver près d'un édifice colossal. Elle nous raconta que c'était très mal éclairé, que c'était près d'une forêt lugubre. Elle sortit de la voiture, s'approcha du portail puis le TROU NOIR. Son dernier souvenir s'apparente à la vue d'un immense portail, peut-être d'une dizaine, d'une vingtaine de mètres complètement hermétique, noir, funeste. Et un symbole... tout aussi gigantesque, au sommet. Qui ressemblait à un triangle renversé dans un cercle, traversé par un serpent. L'alentour de la sphère était entouré par des épines semblables à des couteaux, prêts à transpercer quiconque s'en approchait. Elle n’avait jamais vu quelque chose qui l'avait mis autant mal à l'aise, d'aussi malsain. Elle s'était sentie terriblement mal, impuissante, comme si ce portail était le présage de ce qui allait lui arriver. Une ombre l'anéantissant.... Puis des passants l'avaient retrouvé nue, au petit matin, en bas de chez elle, désorientée, hagarde et avaient tout de suite appelé la police. Après consultation d'un médecin spécialiste, il s'est avéré qu'elle avait été empoisonnée, droguée et agressée sexuellement. Aucun élément n'avait pu aider un tant soit peu les autorités compétentes. Le symbole ne se trouvait dans aucune base de données et il n'existait aucun portail de la sorte sur cent kilomètres à la ronde. L'enquête n'aboutissait nulle part. C'était le flou total. Pour ne rien aider, toutes les potentielles traces et les embryons de pistes disparaissaient comme par magie. Célia, battante, a alors décidé d'en parler à la presse pour que d'autres jeunes filles comme elle ne se fassent pas avoir. C'est à ce moment-là qu'elle nous contacta et que nous avons décidé de parler de cette nuit cauchemardesque. Pour essayer d'avoir plus d'informations, nous avons essayé de joindre l'entreprise concernée et la police qui se sont refusés à tout commentaire. Célia est maintenant suivie par des spécialistes et des psychologues et essaye de reprendre sa vie normalement. Mais la question demeure toujours : Sur qui et sur quoi est-elle tombée ? Que lui est-elle réellement arrivée ? Le mystère reste entier. »
Jack releva la tête. Il prit quelques secondes pour scruter l'alentour et reprit son souffle. Il fut sonné par cette épouvantable nouvelle.
L'histoire de cette fille sonnait comme un avertissement, il ne pouvait pas croire qu'il était tombé dessus par hasard. Il fit quelques recherches sur Internet pour essayer d'en savoir plus. Il tomba sur d'autres articles qui ne rajoutaient malheureusement rien à la précédente version. Aucune autre information. Nulle part. Il essaya de trouver le nom de l'auteur. Rien. Du vide. Une histoire de fantômes.
Jack était maintenant déterminé. Il devait en savoir plus. Mais il ne vit rien sur le web qui pouvait l'aider. Il décida d'appeler Julie pour lui en parler mais tomba directement sur le répondeur. Il pesta en silence et finit par lui envoyer l'article.
Jack se releva et tourna la tête pour observer la rue étroite. Elle était animée, bars et restaurants se croisaient. Le bruit des passants, les assiettes qui s'entrechoquaient, les conversations animées finirent par le rassurer. Le froid commença à l'engourdir, un frisson parcourut son corps. Il n'était sorti qu'en T-shirt.
Il revint vers la cuisine, il était temps de se remettre au boulot. Il ferma les yeux, prit une grande respiration, et se concentra. Il vit son chef et sa grosse carcasse arrivé.
– C'est bon, tu as pu vider ton esprit ? Demanda-t-il, d'un ton paternaliste.
– Oui j'y retourne, j'ai fini ma clope, désolé.
– Pas de problème. Qu'est-ce que tu fumes ?
Son chef voulut engager la conversation. Mais Jack voulut l'éviter en continuant son chemin.
- Ce sont souvent des Lucky Strike ou des Camel, selon l'envie. Pourquoi ?
- Par simple curiosité, moi j'ai arrêté il y a un moment mais je t'avoue qu'une petite de temps à autre ne me ferait pas de mal !
Jack essaya d'écourter cette discussion. Il avait autre chose à penser en cet instant. Et de savoir ce que son chef fumait ne l'intéressait pas. Son service et cette soirée avec Julie était au centre de ses préoccupations. Il finit par conclure, criant au loin :
– Peut-être que vous devriez recommencer ! Bon je vais aller resservir les clients !
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