CHAPITRE VIII : La fête chez les charbonniers

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La préparation des festivités

La cabane des Waldener était l'une des constructions les plus solides du camp. Érigée en torchis soigneusement appliqué sur de robustes poutres de sapin, elle témoignait d'un savoir-faire minutieux. Son toit, probablement le plus étanche du camp, était recouvert d'un épais chaume transporté depuis la vallée. Le sol, en terre battue, avait été préparé avec soin, aplani et recouvert d'une couche de graminées fraîches qui, changées régulièrement, offriraient une agréable texture sous le pied tout en diffusant un parfum herbacé pendant plusieurs jours.

À l'intérieur, l'aménagement était pensé pour le confort de la famille. Les deux sœurs disposaient d'un espace réservé à l'arrière de la cabane, sombre, mais calme, où elles dormaient à l'abri des regards. Thibaut et son petit frère partageaient un autre recoin, séparé du reste par une toile épaisse tendue. Quant aux époux Waldener, ils s'étaient aménagé une chambre avec des cloisons en véritable dur, leur garantissant une intimité précieuse.

La pièce principale occupait le centre de la cabane, un espace à vivre dominé par un grand foyer entouré d'une zone dédiée à la cuisine. Ce lieu accueillant, bien conçu et fonctionnel, faisait de leur cabane la plus confortable du camp, reflet de l'ingéniosité et des efforts de ses occupants.

— Güat ! fiston, interpella le père Waldener. Nous allons devoir réfléchir à construire un abri, le premier, un vrai nid d’amoureux, finit-il en donnant une bourrade à Thibaut.

Thibaut rit jaune en pensant aux paroles de Flore. Il culpabilisait un peu de ne pas parler franchement à ses parents.

— On a encore le temps d’y penser, tu sais. Les Bergmann nous ont déjà prévu une loge à part, chez eux. Ça finira la saison.

Yber Waldener se passa la main sur le visage. Bella, la mère, ne dit rien. Un vague malaise plana dans la pièce.

— Oui, je sais… Le lien du sang, lâcha finalement Yber avec un soupir. Mais il va bien falloir vous émanciper. Vous ne pouvez pas vivre éternellement sous leur toit, même si c'est la tradition que les jeunes mariés restent auprès de la famille de l'épouse.

Le prélude de la fête du soir se résumait à la préparation d'un bon repas. L'odeur épicée du ragoût de porc s'échappant du grand faitout suspendu au-dessus d'un feu crépitant flottait dans tout le camp. Les flammes dansaient, projetant des lueurs vacillantes sur les visages le bruit sec du bois qui se consommait venait rythmer les conversations. Brotdieb surveillait le feu, le regard rivé sur les braises, lorsque Fischer, l'aîné de la famille, arriva d'un pas nonchalant.

— Alors comment il va le frangin ?

Fischer haussa les épaules avec une moue.

— Sais pas ! parle pas. Il reste à ruminer chez nous.

— Qu’est-ce qu’y arrive? se demanda Brodtieb, comme pour lui-même.

— Er hät dorch nit kopf verola (l’est pas devenu maboule pourtant).

Fischer, fidèle à sa réputation de taiseux, demeurait silencieux. Il était toujours difficile de suivre le cours des pensées qui couraient sous son crâne.

— D’Alta ! (la vieille) avec ces potions, mixtures et toutes ces histoires, y a tourneboulé la tête, c’est sûr. Bon faut dire qu’il a toujours eu peur des Gaischt, (fantômes). J’sais pas pourquoi, c’est toi aussi qui faisait peur avec toutes ces histoires qu’tu lui disais.

Pour toute réponse, Fischer haussa les épaules et s’occupa du ragoût en marmonnant. Le Dodel (simplet) s’approcha d’eux. Il vivait seul avec sa vieille mère, la vieille Berwulf. Simple d’esprit, mais dur à la tâche et ne rechignant à aucune besogne, aussi rebutante soit-elle, il avait largement gagné sa place dans la communauté.

— Wass assam ? (On mange quoi ?)

— Salut, Berwulf, ce sera du cochon. On va se régaler, hein ?

Il semblait vouloir rester planté là à les regarder avec un grand sourire jusqu’à ce qu’il entende sa mère l’appeler. Il détala rapidement.

— Un bon gars se contenta de commenter Fischer.

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