CHAPITRE XV : premiers maléfices (3)

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Le drame

Énora s’énervait après ses poules qui s’obstinaient à s’égayer tout autour d’elle. Elle s’arrêta, essoufflée et regarda le potager. Son père peinait à retourner leur modeste parcelle de terre. Sa mère se penchait difficilement à cause de son gros ventre, pour désherber. Elle était contente, elle espérait une petite sœur parce que son frère, Aubin, qui courait en ce moment après les chèvres, était plus grand qu’elle et ne voulait plus participer à ses jeux préférés. Elle se reconcentra sur ses poules.

Ce fut un cri qui la fit se retourner. Elle ne comprit pas la scène qu'elle découvrit. Son père se tenait face à un inconnu. Un inconnu bizarre, il avait un drôle d’aspect. Son père s’effondra et elle vit une forme rouler au sol. Elle voulut courir vers lui, mais sa mère lui cria, la voix tremblante d’une peur qu’Énora ne lui connaissait pas :

— Cache-toi !

Là-haut un autre « homme » courait après son petit frère. Ses jambes ne lui obéissaient plus. Elle regardait, incapable de détourner les yeux, tandis que l’inconnu bondissait sur sa mère avec une rapidité effrayante. Énora cria en voyant le couteau se lever, et sa mère tomber.

L’instinct la poussa enfin à bouger. Elle courut vers la maison, ses pieds glissant sur l’herbe humide, le souffle court. À peine entrée, elle se précipita sous sa couche, le cœur battant si fort qu’elle pensait qu’il allait exploser. Elle se recroquevilla, tirant ses jambes contre elle, le dos plaqué contre le mur, n’osant même plus respirer.

L’épouvante l’envahit totalement lorsqu’elle entendit l’homme entrer. Elle voyait ses pieds sanglés de cuir. Il s’arrêta devant la couche. Les secondes s’étiraient comme des heures. Elle se disait « Peut-être qu’il ne me voit pas. Peut-être qu’il partira. »

Mais tout à coup, une main l’attrapa par la cheville. Elle hurla, mais le cri resta coincé dans sa gorge. Elle glissa hors de sa cachette, se débattant comme un chaton pris au piège.

Elle découvrit sa tête effroyable. Il la prit par sa robe et elle se sentit soulevée telle une plume. Il l’approcha à quelques centimètres de sa figure hideuse. Ses yeux n’étaient pas ceux d’un homme, mais ceux d’un chat. Elle ne pouvait plus émettre un seul son. Il cracha comme un félin et la jeta presque sur le sol. Elle se recroquevilla, enfouissant sa tête dans ses bras. Ce fut le silence, elle l’entendit à peine s’éloigner. Elle ne pensait plus, ne réagissait plus, ne plus bouger, oui, voilà ce qu’elle devait faire.

Ne bouge pas. Ne bouge pas et il ne te verra pas.

Elle perdit la notion du temps. Lorsqu’elle releva enfin la tête, la maison était vide. Mais quelque chose en elle, elle le savait, ne serait jamais plus pareil.

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