CHAPITRE XX : La menace se précise
Le cri
Seule dans l’intimité de la crypte, Nix terminait son incantation. Les volutes noires se concentrèrent et le Baron se tint de nouveau devant elle. Ses yeux rouge flamboyant reflétant une colère contenue, presque insoutenable. Son armure noircie semblait irradier une sombre puissance, et l’air autour de lui vibrait comme s’il était chargé d’électricité.
— Ces moments de néant me sont insupportables.
Nix écarta les bras.
— Je sais, Baron, mais, comme je te l’ai dit, je ne peux pas tenir le sortilège très longtemps. Je dois me reposer et toi, qui ne fais pas partie de ce monde, ne peux y exister sans que je déploie un sortilège puissant.
Elle soupira, avant de reprendre.
— Ton réveil ne va pas être agréable lorsque je t’aurais tenu au courant des derniers événements.
Elle lui parla de l’attaque manquée de la bibliothèque de Dànn. Le Baron Noir resta immobile un instant, puis laissa éclater sa colère. Son hurlement traversa toute la citadelle avant d’exploser à l’extérieur.
— Tu m’avais promis un succès sans faille, gronda-t-il, sa voix semblable à un tonnerre lointain. Et pourtant, cette tentative a échoué. La bibliothèque est intacte, et notre ennemi a appris notre présence. Explique-toi.
Nix, impassible, soutenait son regard, son expression parfaitement maîtrisée.
— Mon cher Baron, répondit-elle d’une voix douce, mais acérée, ce pacte qui nous lie ne peut être brisé sans entraîner notre destruction mutuelle. Alors oui, j’ai besoin de toi, comme toi de moi. Ensemble, la magie et la force brute peuvent conquérir ce monde et établir notre royaume.
Le Baron se redressa, les poings serrés.
— Et pourtant, il y a déjà eu un problème.
Il s’écarta brusquement et hurla vers l’entrée de la pièce.
— Qu’on fasse venir Hakon !
Les lourdes portes s’ouvrirent, et Hakon entra. Le guerrier nordique, imposant, mais visiblement tendu, se figea devant le Baron, sa posture raidie par l’appréhension.
— Explique-moi ce qu’il s’est passé à Dànn, tonna le Baron Noir, sa voix résonnant comme un coup de marteau. Mes ordres étaient clairs.
Hakon inspira profondément, tentant de masquer son trouble.
— Maître… commença-t-il, la voix tremblante, j’ai cru bien faire en envoyant Sigvard, l’un de nos meilleurs, seul. Je pensais qu’il passerait inaperçu. Mais il a été confronté à deux adversaires qui ne devaient pas… ne pouvaient pas être là.
Le regard du Baron s’assombrit encore, mais avant qu’il ne réponde, Nix intervint.
— Ne le blâme pas, Ulrich, dit-elle calmement.
Le spectre tourna son visage laiteux vers elle.
— Et pourquoi devrais-je lui pardonner cette incompétence ?
— Parce que cela dépasse sa faute, poursuivit Nix. Il y avait un homme, un combattant aguerri, mais surtout une femme… Une guerrière noire d’une puissance exceptionnelle. Je soupçonne qu’elle détient des pouvoirs rares, peut-être des racines de magie ancienne. Leur présence était un hasard malheureux, mais elle ne reflète pas une défaillance de nos plans.
Le Baron Noir serra les mâchoires, puis relâcha un soupir grondant. Sa colère, bien que toujours présente, semblait s’apaiser.
— Très bien. Il se retourna vers Hakon. Pour ta prochaine mission, tu travailleras avec Gunnar. Et fais en sorte qu’il ne prenne pas ta place.
— Il n’y aura aucun problème, Maître, répondit Hakon en inclinant la tête avant de se retirer précipitamment.
Une fois seul avec Nix, le Baron Noir s’adoucit à peine, fixant son regard perçant sur elle.
— Nos troupes sont compétentes, je te l’accorde. Mais il est temps de leur montrer à quoi elles servent réellement. Notre colère doit éclater. Il faut semer la terreur.
Nix hocha la tête, mais son expression se fit plus grave.
— Il y a encore une menace, murmura-t-elle.
Le Baron haussa un sourcil.
La guerriière noire?
— Non ! Phaenna, répondit Nix. Ses pouvoirs restent limités tant qu’elle ne rencontre pas… la pureté.
Un rire sec échappa au Baron.
— La pureté ? Ne sois pas ridicule, Nix. Ce concept n’a plus sa place dans ce monde.
Mais le silence de Nix éveilla un doute. Il plissa les yeux.
— Tu insinues que… si ?
Elle se détourna, marchant lentement, comme perdue dans ses pensées. Enfin, elle s’arrêta, ses doigts se crispant sur l’amulette qui pendait à son cou.
— Il existe un homme, dit-elle. Pour l’instant, il n’est rien. Presque insignifiant. Mais il porte en lui une puissance latente, une force qui pourrait se réveiller… s’il la rencontre.
Le Baron Noir s’approcha, son regard brûlant d’un intérêt nouveau.
— Qui est-il ?
Nix détourna le regard, hésitante, songeuse. Elle fit quelques pas, son long manteau de ténèbres traînant derrière elle, avant de répondre d’une voix mesurée.
— Pour l’instant, il ne représente rien. Insignifiant, peut-être. Mais il porte en lui une force endormie, une puissance capable de changer le cours de notre ascension si elle arrive à l’attirer à elle.
Le Baron Noir plissa les yeux, une lueur dangereuse dans son regard.
— Et tu proposes de l’éliminer avant qu’il ne devienne une menace ?
Nix secoua lentement la tête, son expression empreinte de réflexion.
— Pas immédiatement. Pas si vite. Une telle puissance pourrait être… utile. Elle marqua une pause, pesant chaque mot. S’il est possible de l’attirer dans notre camp, il pourrait devenir un allié précieux. Mais s’il refuse… alors oui, il devra être éliminé.
Il esquissa un sourire carnassier, ses dents blanches contrastant avec son visage d’ombre.
— Alors, dis-moi tout. Qui est cet homme ?

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