CHAPITRE 3 : Premier contact

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STAN

J’ai bien dormi, je suis en pleine forme. Il est presque huit heure. Je viens de finir d’avaler mon café. J’enfile un short, un t-shirt, des baskets et j’emprunte la petite route sur la droite en sortant de chez moi, pour aller faire un peu de jogging. Je viens de dépasser mon terrain et je sursaute, surpris par l’aboiement du chien du voisin. C’est donc lui Charly ? Un beau mâle Rotteweiler. Il est magnifique ce chien. Il me poursuit derrière la clôture grillagée. Je m’arrête, m’accroupi devant lui et lui présente ma main, comme je l’ai fait hier à travers la palissade.

- Hey salut Charly. Comment tu vas ? Là, doucement, tu vois tu n’as rien à craindre c’est moi. On se connait.

Le chien inspecte ma main avec sa truffe, intrigué, puis quand il reconnait mon odeur, il se met à remuer vivement sa courte queue et ses babines s’élargissent comme s’il me faisait un sourire. Il est vraiment adorable. Je le sentais qu’on allait devenir potes tous les deux. Il lève la patte et gratte le grillage pour essayer de m’atteindre. Je me risque à passer deux doigts par un trou et à lui gratouiller le cou. Il aime ça et se frotte encore plus. Je souris et passe mon autre main pour le caresser de l’autre côté aussi. Il ferme les yeux et lève le museau, me présentant sa gorge m’indiquant ainsi qu’il aimerait que je lui fasse des gratouilles ici aussi, ce que je fais avec plaisir.

- Charly, rentre à la maison, dit une voix féminine. Allez, dépêche-toi.

Absorber dans ce moment de tendresse avec l’animal, je n’ai ni entendu, ni vu sa maitresse sortir de la maison. Je me relève et regarde Charly la rejoindre à la porte d’entrée restée ouverte pour lui permettre de regagner l’intérieur. La femme doit être un peu plus jeune que moi. Elle est de taille et de corpulence moyenne, aux longs cheveux châtains. Elle porte un jean, une chemise blanche, des escarpins noirs qui ont pour effet d’allonger sa silhouette. Elle tient son sac à main et ses clés. Je me surprends à observer le moindre de ses gestes tandis qu’elle referme la porte derrière Charly et qu’elle se dirige vers sa voiture.

- Bonjour, elle me dit avec un grand sourire.

Bon sang, elle a un sourire magnifique. Je remarque également qu’elle a de beaux yeux noisette.

- Bonjour, j’arrive à articuler.

- Désolée pour Charly. Il est très sociable et très câlin. On passerait sa journée à le papouiller.

- Oh ça ne me dérange pas. J’adore les animaux et je crois qu’on est déjà ses supers copains tous les deux. Pardon, je ne me suis pas présenté : Stan, je suis votre nouveau voisin.

Elle n’a pas l’air de m’avoir reconnu, alors c’est volontairement que je ne lui ai pas décliné mon identité complète.

- Ah c’est vous qui avez emménagé ces jours-ci. Bienvenue alors, je suis Samantha, me dit-elle en me tendant une main amicale que je m’empresse de serrer.

- Merci.

- Je suis désolée, je dois partir travailler, je n’ai pas le temps de discuter. Une autre fois peut-être, elle dit en se dirigeant vers sa voiture. Bonne journée.

- Bonne journée, je réponds alors qu’elle démarre déjà.

Elle me fait un petit signe de la main en passant près de moi et je la suis des yeux jusqu’à ce qu’elle disparaisse au coin de la rue. Je secoue la tête pour rassembler mes esprits et je reprends mon jogging. Je ne fais même pas attention au paysage, ni aux rues que j’empreintes, encore troublé par la rencontre avec ma voisine. Je suis impressionné par son accueil spontané et amical, son sourire chaleureux et naturel. Je suis habitué à ce que les gens m’adressent des sourires polis, inexpressifs, mais le sien est spécial. J’ai vraiment senti qu’elle était sincère et qu’elle était heureuse de faire ma connaissance. Si tout le monde ici est comme elle, je vais vraiment me plaire dans cette ville.

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SAMANTHA

Plutôt canon le nouveau voisin et il a un fort accent américain, très charmant. Jusqu’à aujourd’hui, je l’avais seulement aperçu depuis la fenêtre de ma chambre qui donne sur nos jardins, mais je ne me suis pas attardée pour ne pas passer pour une voyeuse ou une commère. Ça va être plutôt agréable de le voir régulièrement. Ça change des retraités qui habitent le quartier. C’est bizarre, j’ai l’impression de l’avoir déjà vu quelque part, mais je n’arrive pas à me rappeler où. Pourtant un mec pareil, ça ne s’oublie pas.

Le trajet jusqu’à mon bureau m’a paru plus court que d’habitude, comme j’étais préoccupée par Stan. Impossible de me souvenir où je peux l’avoir déjà rencontré. Peut-être que je l’ai croisé à mon travail ou alors ça n’est qu’une impression. Je hausse les épaules en attrapant mes affaires posées sur le siège passager et, après avoir fermé ma voiture à clé, je gagne mon poste de travail.

J’ai quarante et un ans et je suis assistante de direction dans l’une des plus grosses agences de voyage de France, depuis plus de quinze ans. J’ai commencé comme réceptionniste et au fil des années j’ai gravi les échelons pour devenir l’assistante du responsable des ventes du département. J’adore mon travail et je m’entends bien avec tous mes collègues. J’ai un salaire correct, bref, niveau professionnel c’est le top. Par contre niveau personnel, ces dernières années ont été difficiles. J’ai divorcé du père de mes enfants, il y a un peu plus de cinq ans. Oh ça s’est bien passé dans l’ensemble, mais bon la pilule a tout de même eu du mal à passer. J’ai vécu ce moment comme un échec et ça a été très dur pour moi de réapprendre à vivre autrement.

Juste après ma séparation, mes enfants et moi avons dû venir nous installer chez mes parents. Pas que je n’ai pas les moyens de me prendre un appartement, non, mais parce que mes parents ont une santé précaire et qu’ils ont besoin de mon aide.

Ma mère, Isabelle, 65 ans, fait la même taille que moi, un mètre soixante, mais est plus rondelette avec ses soixante-dix kilos, ses yeux sont marrons derrière ses lunettes et ses cheveux sont totalement blancs. Elle souffre d’une forme grave d’arthrose déformante, qui l’invalide beaucoup au quotidien. Elle a du mal à boutonner ses chemises, à tenir un crayon ou un couteau, et parfois la douleur est tellement forte qu’elle l’empêche de dormir la nuit.

Mon père, Etienne, 70 ans, un mètre soixante-quinze pour quatre-vingt kilos, il porte lui aussi des lunettes qui cachent un peu ses beaux yeux verts et ses cheveux son grisonnants. Il est atteint de la maladie de Parkinson. Cette maladie dégénérative du système nerveux, lui crée des tremblements irrépressibles, surtout des mains. Il doit faire des efforts de concentration énormes pour les contrôler lors d’une action précise et minutieuse, ce qui le fatigue énormément. Sa motricité est aussi affectée, il doit marcher plus lentement et s’essouffle vite.

Heureusement j’ai des enfants géniaux. Axel, dix-huit ans, est en première année de BTS. Il aimerait devenir informaticien. Ce beau jeune homme châtain aux yeux marrons, d’un mètre soixante-quinze, affichant seulement cinquante-cinq kilos sur la balance, parait tout maigrichon, mais il ne faut pas s’y fier, il a beaucoup de force. En effet, il fait tous les soirs de la musculation. Son grand-père a aménagé le garage en salle de sport. Il y a un banc de musculation, un tapis de course, un vélo d’appartement et divers poids.

Ma fille, Mégane, quinze ans, est en seconde au lycée. Cette petite brunette d’un mètre cinquante-cinq pour quarante kilos, a déjà un caractère très affirmé et ne mâche pas ses mots. Lorsqu’elle a quelque chose à vous dire, elle vous le dit droit dans les yeux. Elle aimerait devenir kinésithérapeute. C’est l’état de santé de ses grands-parents qui lui a fait choisir cette voie. D’ailleurs elle les aide beaucoup au quotidien, ainsi que pour faire leurs exercices prescrit par le kiné.

Je n’ai pas le temps de pousser plus loin ma réflexion, le téléphone de mon bureau se met à sonner. C’est parti pour une journée encore très chargée.

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STAN

Après une heure de jogging, je regagne ma maison, à bout de souffle. Je me précipite sous la douche où je reste un long moment sous le jet chaud, qui détend mes muscles endoloris. J’ai peut-être un peu trop forcé aujourd’hui, ça fait longtemps que je n’ai pas couru autant, mais je me sens bien. Tellement bien. Je me savonne et me décide enfin à sortir de la douche. Je me rends dans la cuisine, juste vêtu de mon jean et ma serviette autour du cou, les cheveux encore humides. Alors que je suis en train de me verser une tasse de café, mon téléphone se met à sonner. D’un rapide coup d’œil, je vois que c’est ma mère. Elle a déjà essayé de m’appeler hier, je ne peux pas une fois encore, ne pas lui répondre, sinon elle va s’inquiéter.

Ma mère est soulagée d’entendre ma voix. Elle me sermonne pour ne pas lui avoir donné de nouvelles depuis une semaine. Je m’excuse et lui promet de ne plus rester aussi longtemps sans lui parler ou lui envoyer un message. Elle me demande si je suis bien installé, si je mange correctement, si je dors bien et ne fais pas trop la fête. Les questions d’une maman qui s’inquiète pour son enfant, quoi. J’ai beau avoir quarante-quatre ans, je crois qu’elle ne cessera jamais de s’en faire pour moi. Je la rassure puis lui demande de me raconter ce qu’elle a vu ces derniers jours. Elle part dans un monologue me décrivant les paysages, les rencontres qu’elle fait et les petites anecdotes marrantes qui peuvent se passer sur un bateau de croisière. Trente minutes plus tard, elle raccroche précipitamment en me disant qu’elle m’embrasse, car c’est l’heure de la partie de bingo. Je ris de son excitation et de son enthousiasme. Je suis content que ce voyage lui plaise et lui fasse autant de bien. Elle a l’air vraiment épanouie et heureuse.

Je m’installe dans mon bureau, avec une tasse de café pour consulter et trier ma messagerie. Il faut que je le fasse régulièrement sinon ma boite mail va vite être saturée et je vais encore avoir un mal fou à la débloquer. Comme je le pensais, j’ai reçu beaucoup de messages de la part de mon agent. Je les regarde rapidement au cas où elle me ferait part d’une information vraiment importante et j’ai bien fait. Elle m’informe que du dix au vingt-quatre Septembre, je dois partir en tournée promotionnelle journalistique pour la sortie de « Success » sur les écrans de cinéma le vingt-cinq Septembre deux mille dix-neuf.

Ça ne me plait pas du tout, je n’avais pas prévu de rentrer aux Etats-Unis avant Thanksgiving. Je le lui ai pourtant répété à plusieurs reprises, mais comme toujours elle ne tient pas du tout compte de mes envies et de mes autres obligations et organise tout à ma place. J’envisage fortement de me séparer d’elle.

Je referme mon ordinateur portable. C’est bon, j’en ai assez vu pour aujourd’hui. Je sors sur la terrasse et m’allume une cigarette. Il va vraiment falloir que j’arrête. Je fume un peu trop ces derniers temps et je me suis rendue compte, ce matin, que j’ai perdu du souffle. Je suis dans le cadre idéal pour me défaire de cette addiction, alors pourquoi attendre plus longtemps ? J’écrase ma cigarette avec détermination et je vais jeter le reste du paquet à la poubelle. Ça ne peut qu’être bon pour ma santé et aussi pour Maia. Je dois lui montrer le bon exemple. Ça ne va pas être facile, mais je vais y arriver. Je suis motivé.

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