CHAPITRE 29 : L'agression

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STAN

Nous arrivons au Ranch et rentrons nos chevaux à l’écurie. Comme l’autre jour, nous leur apportons un seau d’eau fraîche, leur retirons leurs harnachements et les pansons. Matt fait son apparition et aussitôt je me raidis, mais je fais celui qui l’ignore. Il ne perd pas une minute pour s’attaquer à Samantha.

- Hey Sam ! Alors cette balade ? Je vois que tu ne t’es pas perdue. Ce n’était pas gagné avec Stan comme guide. J’aurais pu t’accompagner, je connais des coins isolés très sympa, il dit en se collant à elle.

Elle s’écarte et passe de l’autre côté de la jument, mais il la suit.

- Je n’ai pas besoin d’un autre guide, Stan me convient parfaitement, elle répond sèchement.

- Ohhhh ! Sam, tu vaux tellement mieux que lui, il continue.

Elle se plante face à lui, les mains sur les hanches.

- Et je suppose que tu vas me dire que tu es l’homme qu’il me faut, que tu vaux bien mieux et que tu peux me donner tellement plus.

- Tu as tout compris, il dit avec un sourire malicieux tout en s’approchant dangereusement d’elle.

Elle m’a demandé, l’autre jour, de ne pas intervenir, qu’elle était capable de se défendre toute seule, mais assister à ce spectacle est insoutenable, même si je reconnais qu’elle a du cran et du tempérament. Mais ça je le savais déjà.

- Matt, laisse-là tranquille, je ne peux m’empêcher d’intervenir.

- Je t’ai déjà dit de te mêler de tes affaires Stan, il me répond rageur. Où en étions-nous ? Il dit à l’attention de Sam. Ah ! Oui, tu allais accepter de venir boire un verre avec moi.

- Sûrement pas, elle proteste en essayant de lui échapper.

Furieux, il l’attrape par le bras, la plaque contre un box et bloque ses mains au-dessus de sa tête. Je ne réfléchis même pas et m’élance sur lui. Je l’attrape par le col et il a beau être plus costaud que moi, l’adrénaline qui coule dans mes veines me donne une force insoupçonnée et je le projette de l’autre côté de l’allée. Il tombe sur le derrière et maintenant il est fou de rage. Il se relève, fonce sur moi à la façon d’un footballeur américain et m’encastre dans les lames de bois du box qui se trouve derrière moi. J’ai l’impression que ma colonne vertébrale va tomber en miette et que mon estomac va éclater vu la douleur qui m’envahie à m’en couper le souffle. Je suis plié en deux et mes jambes flageolent. Les chevaux s’énervent, hennissent de peur et s’agitent dans tous les sens. Nous risquons de nous faire piétiner et de nous prendre un coup de sabot. Samantha fait ce qu’elle peut pour les calmer.

- Non, mais… t’es complètement… malade, j’articule péniblement en essayant de reprendre de l’air.

- Depuis le temps que j’attends ça, il dit en m’envoyant un uppercut dans la pommette gauche, le regard plein de haine.

- Matt arrête, cri Samantha.

Je suis à quatre pattes et j’essaie péniblement de me relever. Mon visage me brûle et j’ai ma vue qui se trouble de mon œil gauche. Je ne comprends pas pourquoi il nourrit une telle rage envers moi. Qu’est-ce que j’ai bien pu faire ? Dès que j’arrive à me remettre debout, il m’assène un nouveau coup au visage. Il jubile et ricane alors que je tombe contre le box, presque assommé. J’ai la tête qui bourdonne et je sens que je suis sur le point de m’évanouir, mais je lutte. Je ne dois pas lui faire ce plaisir et surtout si je perds connaissance, plus personne ne pourra porter secours à Samantha. Je secoue la tête et me frotte le visage avec mes mains pour ne pas sombrer.

- Pourquoi ? Qu’est-ce que je t’ai fait ? je demande pour gagner du temps et surtout comprendre.

- Pourquoi ? Mais tu as pourri ma vie.

- Comment ? ça fait des années que je ne suis pas venu ici.

- Il me demande comment, il ricane hystérique, en piétinant sur place. J’en ai marre, tu comprends, j’en ai marre d’entendre parler de toi du matin au soir chaque jour que Dieu fait. Depuis des années, mes parents ne voient que par toi, ne parlent que de toi et ne cessent de vanter tes mérites. « Stan est un excellent cavalier. Stan est tellement adorable et intelligent. Stan réussi tout ce qu’il fait », il dit en imitant ses parents. Stan, Stan, Stan. Il n’y en a que pour toi et moi personne ne me remarque. Plus personne ne fait attention à moi. J’ai l’impression d’être complètement invisible à leurs yeux.

Alors c’est ça. Il rumine sa jalousie depuis toutes ces années. Pourtant je n’ai jamais rien fait pour le rabaisser ou prendre sa place auprès de ses parents. J’ai toujours été moi-même, c’est tout. Il attrape un râteau et s’approche dangereusement de moi.

- Tu vas souffrir autant que je souffre, il me crache avec un sourire satisfait.

J’essaie de me relever, mais je suis pris d’un vertige qui m’oblige à me rassoir. Il lève son arme et je me raidis, prêt à encaisser le coup, mais j’entends en craquement et mon agresseur pousser un cri de douleur. Samantha vient de lui déboiter le genou d’un coup de pied, d’un geste précis avec la paume de sa main elle lui éclate le nez, puis attrape le râteau et lui bloque les bras dans le dos avec l’objet. Son visage est déformé par la colère. Elle est méconnaissable. Cette femme est une vraie lionne quand il s’agit de défendre ceux qu’elle aime. Je ne m’attendais absolument pas à ça de sa part. Je suis à la fois étonné et fier. Je dois me souvenir de ne jamais l’énerver ou alors je réserve tout de suite une chambre à l’hôpital.

- Ecoute-moi bien, elle le prévient à l’oreille, la mâchoire crispée, tu tentes un seul geste et je te brise les os un à un.

Elle relâche sa prise et vient s’agenouiller face à lui. Son visage s’est radouci et elle prend une voix douce.

- Stan n’y est pour rien si tu n’as pas confiance en toi et si tu ne sais pas t’imposer. Tes parents sont sûrement très fiers de toi et du travail que tu accomplis ici, mais tu es tellement aveuglé par ta rancœur, que tu ne le vois pas. N’accuse pas les autres pour tes faiblesses, prend toi en main et donnes toi les moyens de réaliser tes rêves. Tu es capable de tout faire si tu le veux vraiment et si tu ne baisses jamais les bras. Je suis persuadée que tu es quelqu’un de formidable et je sais que tu peux y arriver. Tu es bourré de talent, tu es fort, jeune et beau garçon. Tu dois avoir un succès fou auprès des femmes et je suis sûre que tu es un excellent guide. Relève-toi, fais le point et sers-toi de tes atouts pour y arriver. J’ai confiance en toi. Je crois en toi.

Elle lui parle encore pendant un petit moment et il finit par se mettre à pleurer. Elle le prend dans ses bras et le cajole comme un enfant en lui assurant que tout va bien se passer. Comment fait-elle ça ? Comment peut-elle être forte comme une lionne et la seconde suivante aussi douce qu’un agneau ? Cette femme est un vrai mystère pour moi et m’impressionne énormément.

Samantha remet en place le genou déboité de Matt et l’aide à se relever. Il me présente des excuses, tout penaud et quitte l’écurie en boitant. Je suis toujours assis contre le box et ne la quitte pas des yeux. Elle me rejoint et s’agenouille près de moi pour examiner mes blessures.

- Comment tu te sens ? elle me demande avec une grimace de douleur compatissante.

- J’ai eu de meilleurs jours, mais ça va aller. Tu peux juste m’aider à me relever, s’il-te-plaît ? J’ai un peu la tête qui tourne.

- Je vais te conduire à l’hôpital. Tu dois passer des examens, tu as peut-être des blessures internes ou, des côtes cassées, ou un trauma crânien, ou… elle s’inquiète.

- Non, ne t’en fais pas, ça va aller. Je sais ce qu’il faut faire et les signes à surveiller, je la rassure en avançant lentement. C’est l’avantage d’avoir passé du temps dans un service d’urgences.

Elle passe mon bras autour de ses épaules pour que je puisse m’appuyer sur elle. Petit à petit, je récupère et je pourrais désormais marcher seul, mais je n’en ai pas envie. Je veux profiter de ce contact au maximum.

Nous rentrons au lodge où Samantha m’aide à m’installer sur le canapé. Elle attrape le plaid qui se trouve sur le dossier et m’en couvre avant de se rendre dans la cuisine.

- Zut, il n’y a pas de glace dans le congélateur. Ne bouge pas, je cours chez Ellen en chercher et je reviens le plus vite possible, elle me dit.

Elle dépose un rapide baiser sur mes lèvres et disparait à la vitesse de l’éclair. Je ferme les yeux et me laisses aller contre le dossier. Je repense à ce qu’il vient de se passer dans les écuries et je n’en reviens toujours pas. Samantha qui paraît si douce et si fragile est en fait une femme incroyablement forte et courageuse.

************

SAMANTHA

Je cours vers la maison principale. Je suis toujours sous l’effet de l’adrénaline et c’est ce qui me permet de ne pas fondre en larmes. J’ai eu tellement peur lorsque j’ai vu Matt s’attaquer à Stan sans raison. J’ai cru qu’il allait le tuer. Je n’ai pas réfléchi et tout ce que j’ai appris en cours de self-défense, m’est immédiatement revenu en mémoire et sans que je ne m’en rende vraiment compte, j’avais maitrisé l’agresseur. J’ai ensuite opté pour la méthode douce et la psychologie, plutôt que la violence que je trouve inutile. Je sais qu’au fond Matt est un gentil garçon et qu’il a juste un énorme manque de confiance et lui et un grand besoin de reconnaissance. Il lui fallait un coupable et c’est sur Stan qu’il a rejeté ses fautes, par jalousie.

Je frappe à la porte d’entrée de chez Ellen et c’est John qui vient m’ouvrir. J’essaie de me contenir et de reprendre mon calme, lorsque je lui demande si je peux lui emprunter de la glace. Il voit que j’ai le souffle court, les joues rouges et les cheveux en bataille et me demande si tout va bien. Je ne vais pas leur mentir. Ils ont une part de responsabilité dans le comportement de leur fils et je pense qu’ils doivent savoir ce qu’il vient de se dérouler dans les écuries. Je lui demande si je peux entrer un instant et leur parler. Il accepte et appelle Ellen, inquiet.

On s’installe au salon et je leur raconte toute l’histoire. Ellen est très émue et extrêmement désolée. John est lui, plutôt en colère. Je les rassure et dédramatise la situation en leur expliquant que ça n’est qu’un énorme malentendu, que personne n’est gravement blessé et que tout va s’arranger. Je leur conseille d’avoir une bonne mise au point avec Matt de surtout d’être compréhensifs et plus attentif à lui. Même s’il a vingt-cinq ans, il a un grand besoin d’entendre ses parents lui dire qu’ils l’aiment et sont fier de lui. Ils acquiescent et me remercient pour cette discussion très productive. Ellen va me chercher une poche de glace et je m’empresse de rejoindre mon blessé.

- Je suis désolée Stan, j’ai été un peu longue, mais il fallait que j’ai une discussion avec Ellen et John à propos de leur fils.

- Et alors ? Comment ça s’est passé ?

- Très bien. Tout va s’arranger, ne t’en fais pas.

Je viens m’assoir, sur le canapé, à côté de lui et lui applique la poche de glace sur la pommette endoloris. Je grimace, de peur de lui faire mal.

- Je crois qu’au lieu de cours de cuisine, j’aurais dû te donner des cours de self-défense, je dis en plaisantant.

Il rit, mais grimace immédiatement à cause de ses blessures.

- Si on était en France je t’aurais demandé si tu avais une de tes huiles magiques pour atténuer mes douleurs et mes contusions.

- Oh, mais je les ai dans ma valise. Mégane a pensé à y mettre ma trousse de secours et mes fioles de mélanges spéciaux. J’ai ce qu’il te faut. Tu vas d’abord aller prendre une douche pas trop chaude car la chaleur n’est pas bonne pour les hématomes, et je te masserais ensuite.

- Ok, avec grand plaisir, il dit en se levant avec une grimace de douleur.

Je le suis dans l’escalier et prépare tout ce dont j’ai besoin pour ses soins, pendant qu’il se douche. Quelques minutes plus tard, j’entends qu’il coupe l’eau. J’attends qu’il vienne frapper à ma porte pour me prévenir qu’il est prêt, avant de le rejoindre dans sa chambre. Il est debout devant son lit, seulement vêtu d’un bas de pyjama et m’attends. J’ai un mouvement de recul lorsque je découvre les hématomes sur son torse et son dos. Matt ne l’a pas loupé.

- Assieds-toi sur le bord du lit. Je vais commencer par ton dos, je dis en venant me placer derrière lui.

Je verse quelques gouttes de mon mélange spécial coups et bleus, dans le creux de mes mains et l’applique avec précaution sur tout son dos. Mes gestes doivent être légers, mais précis. Je le préviens que ça risque d’être un peu douloureux et il m’assure qu’il va supporter. J’avais oublié comme c’était agréable de caresser sa peau et de sentir ses muscles rouler sous mes doigts. Mon corps réagit malgré moi et je sens ce feu brûlant, mais tellement bon, grandir au creux de mon ventre. Des petites décharges électriques partent de mes reins et remontent le long de ma colonne vertébrale jusqu’à ma nuque. Je me concentre sur les blessures de Stan, pour apaiser mon désir.

Je lui demande, maintenant, de s’appuyer contre la tête de lit pour que je m’occupe de son torse et son visage. Je cale des oreilles dans son dos pour qu’il soit confortablement installé et m’assois à son côté, un genou replié sous moi sur le lit. J’examine les dégâts.

- Je suis désolée, mais je ne vais pas pouvoir t’appliquer de l’huile trop près de l’œil. Tu devras te contenter de la poche de glace pour limiter l’œdème.

- Je te fais confiance, il répond en me fixant avec un drôle de regard.

Je verse une petite goutte d’huile sur mon doigt et l’applique délicatement sur sa pommette. Ses yeux ne quittent pas mon visage et je fais un gros effort pour rester concentrée. Sa bouche est si proche et j’ai tellement envie de l’embrasser. Je me mords la lèvre inférieure pour contrôler mon désir.

Je fais descendre mes mains sur son torse recouvert d’une légère toison. Je constate qu’il continue d’entretenir sa musculature pour mon plus grand plaisir. Je sens son cœur battre aussi fort que le mien et sa respiration s’accélère à mesure que mes mains vont et viennent sur son buste. Il ferme les yeux et d’un seul coup, m’attrape les mains, me stoppant net dans mes gestes. Lorsqu’il rouvre les yeux ses pupilles sont dilatées au maximum, preuve de son désir.

- Je crois que ça va aller, il me dit d’une voix rauque.

J’opine. Je précise que je vais prendre une douche et qu’il devrait se reposer. Je l’aide à s’allonger avant de quitter sa chambre. Je passe par la mienne prendre mon pyjama et me glisse sous un jet d’eau bien chaude. Je ferme les yeux et laisse l’eau ruisselet dans mes cheveux et le long de mon corps. Ça me fait un bien fou et m’aide à me détendre après les évènements de ces dernières heures. Je ne pensais pas mes muscles aussi contractés.

Vingt minutes plus tard, je sors de la salle de bain vêtue de mon pyjama, les cheveux relevés en chignon sur le dessus de mon crâne et relaxée. Je descends nous préparer des sandwichs et du thé bien chaud avec du miel. Je frappe quelques coups discrets à la porte de la chambre de Stan et l’ouvre doucement pour ne pas le réveiller s’il dort. Il est assis en train de consulter son téléphone.

- Je croyais que tu devais te reposer, je le gronde gentiment.

- Je consulte simplement la météo et le site de l’aéroport pour être sûr que notre avion de demain matin n’est pas annulé. Il y a de la neige sur New-York.

- Nous retournons à New-York ? je demande avec excitation en venant m’assoir près de lui.

- Oui. Je suis désolé, il y a des rendez-vous que je n’ai pas pu déplacer, mais je suis persuadé que ma mère se fera un plaisir de t’emmener dans ses boutiques préférées et le reste du temps je serais entièrement à ta disposition, il dit en me caressant la joue.

Je pose ma main sur la sienne, mes yeux fixés aux siens. Notre complicité, notre communion, tout ça, ça m’a énormément manqué. Je prends sa main et dépose un baiser dans sa paume.

- Tiens tu devrais manger un peu, je dis en lui tendant un sandwich.

Il croque dedans à pleine dents. Je lui demande des conseils sur les sites à visiter absolument à New-York. Il y a les incontournables coins touristiques, mais il me promet de m’emmener dans des lieux moins… convoités.

Notre frugal repas terminé, je lui ordonne de dormir et descends faire la vaisselle, ranger et nettoyer le lodge avant notre départ. Avant d’aller dormir, j’entre-ouvre la porte de la chambre de Stan pour vérifier que tout va bien. Il est agité et geint. J’ai mal au cœur de le voir ainsi. Il est allongé sur le côté droit. Je me glisse doucement derrière lui, me colle contre son dos et l’entoure de mon bras. J’espère que ma présence et l’amour que je lui donne, vont l’apaiser et lui permettre de passer une bonne nuit. Je m’endors moi-même rassurée par son odeur et sa chaleur, sans m’en rendre compte.

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