Chapitre 10 – La magie de Sweet Home Alabama
Dès lors que l’on parle d’un village de ventous, on pense évidemment à ses champs interminables de culture croisées, ses petites maisons regroupées autour d’un autel aux quatre vents et d’un ravin. Enfin, pas toujours, mais ce qu’il faut savoir à propos des ventous, c’est qu’ils vivent toujours près d’un endroit où le vent souffle la majorité de l’année, pour communiquer avec lui comme le voulaient les traditions. Les ventous sont réputés comme un peuple très attaché aux traditions et peu enclin à voyager, parce que selon eux, le vent leur apporte tout ce dont ils ont besoin : histoires, sagesses et nouveautés.
Même si les ventous trouvent leur plaisir à construire et conserver leur communauté, ils n’en restent pas moins le peuple le plus ouvert qui soit – après tout, quand on use d’une expression telle que « tous les vents sont bienvenus chez nous », on garde rarement la rancune princière du racisme en notre sein – et de ce fait accueillent tous ceux qui veulent trouver du travail autre part que dans les arts, la magie, la bureaucratie ou la science.
Qwilo était content de revenir à sa communauté. Sur le chemin de Lorkhandigue, il dit bonjour au vieux To qui fumait sa pipe, assis sur son banc. Le vieux To, un braiseur, était le seul non-ventou de la communauté de Lombardigue, dans le Nord. Il était un pyromancier – magie très répandue chez les braiseurs – et aidait l’hiver à chauffer les maisons à l’aide de ses runes et de ses cristaux de pouvoir artisanaux. Le jeune ventou s’approcha et le vieux To le regarda de la tête aux pieds :
— Nouveau look de ville !
Il faisait référence à sa nouvelle chemise achetée avec l’aide de Tac : au lieu des carreaux rouges et bleus classiques, elle laissait apparaître un motif de dégradés vaporeux très vintage. Le vieux braiseur vit Tac derrière Qwilo, en retrait, le regard rivé sur son téléphone. Il la désigna de la pipe.
— C’est bien la première fois que j’te vois traîner avec quelqu’un d’autre que tes frères et sœurs.
— C’est Tac. Une amie à moi.
— Ah, une amie !
Le clin d’œil qu’il lui fit voulait tout dire… mais Qwilo le trouva juste gênant. Il montra du pouce Tac et s’excusa avant de la rejoindre, pour qu’ils puissent se remettre à marcher.
Qwilo et Tac rejoignirent la rue Koraltaindigue après les rues Créabadigue et Lenistolerdigue. C’était dans cette rue qu’une maison à double étage, possédant une véranda et une terrasse en plein air, les accueillit. Le doux foyer de l’enfance du ventou. Tac et lui se regardèrent avant qu’il ne sorte son jeu de clés, ouvre la porte d’entrée et y pénétra. Il s’écarta pour laisser passer Tac, referma derrière elle… et furent accueillis par une explosion de confettis et des sons de trompette.
Tels étaient les pouvoirs magiques d’Aubélin Tramontane et Louisard Tramontane, les pères de Qwilo. Aubélin était un ventou à la peau bleu pâle, celle de la limite entre le nuage et le ciel. Le second avait des broussailles au nez, aux yeux, aux oreilles et aux doigts – chose rare chez les enfants du vent.
— Mon grand ! lança Aubélin le pétillant en étouffant son fils dans une embrassade, puis lui fit deux gros poutous aux joues. Tu vas bien ? On a reçu ton message, alors on s’était dit que c’était une bonne idée de t’accueillir en grandes pompes, hein doudou.
— Oui, amour.
Louisard était, comme dans beaucoup de couples, à l’opposé de son partenaire : si l’un était une rafale pour le meilleur et pour le pire, l’autre était ce genre qui soufflait toujours pour laisser les autres respirer, chaque mot pondéré avec soin. D’ailleurs, il détourna l’attention de son fils pour regarder Tac qui se cachait un peu derrière lui. Elle lui dit « bonjour » très doucement, et il répondit par un signe de tête, son sourire caché derrière sa grosse barbe. Aubélin remarqua le regard de son mari.
— Tu dois être Tacmek. Bienvenue chez nous ! On va te montrer ta chambre…
Le ventou, enthousiaste que son petit poussin ait enfin ramené poularde à la maison, poussa presque la braiseuse qui tourna un regard suppliant vers son ami, l’air de dire : « C’est quoi ce délire ? ». Qwilo fit un haussement d’épaules, du genre « La famille ». Et ce n’était qu’un avant-goût : dès qu’ils passèrent l’embrasure qui séparait le petit hall de la salle de vie, c’était la débandade, avec vingts personnes qui discutaient, se passaient les plateaux apéro et riaient à une anecdote poilante sur la taille des vincluses de cette saison. Adultes, ados et enfants.
— Qwilo ! fit un p’tit bout à la peau ciel et aux cheveux aussi blancs que la brume. Câlin !
— Oulà ! et le ventou souleva le morceau turbulent dans ses bras, qui s’amusa à jouer avec ses cheveux. Tac, voici ma plus jeune adelphe, Nara.
— Bonjour Nara.
— Bo-jur ! hulula Nara, puis sauta de Qwilo pour aller embêter quelqu’un d’autre.
— Un jour, je trouverais un moyen pour qu’elle me laisse tranquille, confia le ventou à son amie alors qu’il se démêlaient les cheveux.
Tac rit et s’apprêta à répondre, mais elle fut rapidement le centre d’attention de toute la petite assemblée. Qwilo la vit se faire submerger par les tantes Albeth, Nola, Ethian, par les oncles Tum, Ogart, Melial et Ted, par les cousins Yvain, Yvonne, Yvu, Kilian, Solas et Wakan et par les grands parents Agatha, Moragivé, Paloma et…
— Papé Darkin.
Le vieux ventou à la peau plus fripée qu’un ciel d’hiver regarda son arrière petit-fils depuis ses yeux renfoncés dans ses orbites. Qwilo le serra dans ses bras et fut encore une fois surpris par la force de l’étreinte du papé, qui à son grand bonheur ne lui fit pas la bise…
— Tu t’es enfin casé avec quelqu’un, à ce que je vois.
…et à son grand malheur, apporta ce sujet sur le tapis. Qwilo grimaça et voulut s’extirper, mais son papé le retint par le poignet.
— On n’attrape pas le vent avec les doigts mais avec la langue.
Le pauvre et jeune ventou déglutit pour couler un regard un regard vers son amie, assaillie de toutes parts. Ce fut à cet instant que les maris prirent l’initiative d’annoncer que la table était mise et le repas prêt. La famine sauva la braiseuse de la famille rapace qui changea de carcasse à embêter pour aller déguster le délicieux ragoût de hérissanglier aux poivrons. Qwilo s’approcha de Tac en souriant légèrement :
— Mes félicitations. Tu as passé la première vague.
— Attends, la première ?
Il rit et tapa son amie sur l’épaule et le contact, d’ordinaire si habituel, le poussa à croire qu’il était en train de faire quelque chose de mal. Il retira vivement sa main, geste qui n’échappa pas à Tac.
— Ça va ? demanda-t-elle en le regardant tenir sa main.
— Ouais… Viens, on va se mettre à table. Si on tarde trop, mes couz vont tout dévorer !
Pendant le repas, il ne cessa d’éviter le regard de Tac et ceux de sa famille. Aubélin, qui avait toutefois flairé le froid qui s’installait entre son fils et l’invitée, alors il commença à raconter son histoire à lui, comme il avait rencontré le petit fils du légendaire explorateur Darkin pendant son stage au vignoble. Tac écoutait avec une immense attention, pendue aux lèvres du conteur. Louisard tenait la main de son aimé avec une force qui ne trompait personne sur son intention. Aubélin, gredin de ville comme il était, permit à Tac de se concentrer sur autre chose que sur son ami.
Après tout, il l’avait invité « sur un coup de tête » d’après elle et, compte tenu de ses antécédents, elle était convaincue que rien de bizarre ne se passerait entre eux deux.
La soirée se déroula avec la langueur apaisante qui caractérise le paysage ventouesque. Les rires, les éclats de voix pour demander le plat de riz qui accompagnait la viande en sauce, les bruits des couverts qui couvraient les messes basses quand à la fabuleuse braiseuse que le petit Qwilo avait ramené, celle qui avait de grandes ambitions contrairement à notre jeune ventou. La famille Tramontane – hormis les pères – ne détestait ni ne considérait leur membre comme une erreur. Déjà parce qu’ils n’étaient pas au courant qu’il était un Brisé de un, surtout parce qu’ils espéraient qu’il arrête de « baiser à droite à gauche » pour recharger sa magie de deux (la monogamie se pratiquait toujours chez les ventous). De trois, ils adoraient déjà Tac et voir quelqu’un d’aussi exotique entrer dans la famille n’annonçait que des bonnes nouvelles, car comme dit le dicton : « Quand souffle le marin toute l’année, les fruits pourrissent ».
Le repas terminé, on aida à débarrasser la table, et on fit la vaisselle en buvant du pellenuage. Ce fut à cet instant d’effervescence qu’Aubélin prit Qwilo à part :
— Tu veux bien m’expliquer ?
— Papa…
— Que tu ramènes des amis à la maison, ça n’est pas un problème, mon chéri, mais on sait très bien toi et moi que tu n’as jamais fait ça, et ce pour une bonne raison.
Qwilo ne le démentit pas : après tout, entre Syndara, Lou et Joan, aucun d’eux n’avait vu la tête de sa maison. Il n’était pas à l’aise que d’autres personnes viennent dormir chez lui ou pire, qu’il y ait des fêtes alcoolisés qui pouvaient finir en partouzes.
— Qu’est-ce que tu veux que je te dise ?
— Tac a l’air d’être une jeune fille bien, et je comprends pourquoi vous vous entendez.
Cela eut pour effet de faire s’esclaffer le fils ; Tac l’aimait bien parce qu’elle le prenait en pitié et voulait l’aider à surmonter ses problèmes. Il l’avait bien deviné : ce n’était qu’une façon de se racheter envers son frère. Mais le hic n’était pas là…
— Tu te dis sûrement que tu ne la mérites pas, reprit son père avec une voix plus douce. Je comprends.
— Mais qu’est-ce que tu comprends, papa ? cria-t-il.
Ils se retournèrent simultanément pour voir si personne ne les entendait depuis le salon. Qwilo et lui se refirent face et le premier baissa la voix :
— Qu’est-ce que tu comprends, au fond ? T’as rencontré papa quand t’étais jeune, vous avez commencé à vous connaître un petit peu et boum ! Casés ensemble. Comme papi. Comme papé avant vous. Et la magie est venue avec ça.
Cette fois, ce fut le père qui restait silencieux, et pour cause : jamais son « chéri » ne s’était aussi énervé contre lui, et surtout sur ce sujet en particulier. Avant, c’était juste de la frustration envers lui-même, et là Aubélin pouvait gérer. Les larmes aux yeux, Qwilo agitait sa main vers son père comme s’il s’agissait d’une vaste blague.
— C’est si facile pour vous deux. Pour Syndara et Lou aussi… Pour tout le monde ! Vous êtes tous là comme si c’était la chose la plus naturelle du monde, une sorte de finalité.
— Mais… Qwilo, tu pourrais en mourir !
— Et ils sont où, les gens qui explosent, hein ? C’était il y a quarante ans ! Ils en parlent toujours dans les livres, y a des archives vidéos et on en discute de temps en temps aux infos, mais sinon rien !
Il avait cherché. Ô combien il avait farfouillé le net à propos de toute cette histoire sordide de Brisés, pour ne trouver que des sites de restauration magique, de thérapie de reconstitution psychologique ou encore du yoga pour stimuler le désir sexuel. Mais ça bien sûr, il le gardait pour lui, l’emmitouflait sous des couches et des couches de sourire, de courage faux-semblant et de phrases pré-conçues du genre : « t’as pas trouvé la bonne personne », « t’es trop gamin, ça passera », « c’est pas grave, ça va forcément venir ».
Spoiler, ça n’était jamais venu.
— Je veux pouvoir savoir faire de la magie avant tout, mais pour l’instant c’est pas possible… (il ravala ses larmes) Alors je vais y remédier.
Tout bon parent sait quand son enfant va faire une très grosse connerie, une sorte de sonars à problèmes qui allie instinct, expérience et une autre forme de surconscience que l’on ne prend jamais le temps d’écouter. Aubélin l’écouta bien sûr et son visage pâlit. Qwilo lui passa à côté et le père ne sut comment l’arrêter, deux sentiments bataillaient en lui et l’empêchaient de bouger.
De un, son petit venait d’avouer quelque chose sans l’avouer : il n’avait jamais eu de relations et il avait menti toute sa vie à propos de ça ; du coup, il était terrifié par ce que son fils comptait faire avec la personne qu’il avait amené. Oh, Qwilo… pensait-il en boucle. De deux, il était bizarrement… heureux. Heureux que son enfant allait passer la barrière infranchissable que toute personne dans l’Ultimonde avait toujours rencontré : l’autre. Car même avec toute la propagande, la prévention, l’apprentissage… L’autre restait, reste et resterait l’obstacle le plus grand qui soit.
Qwilo traversa la cuisine en trombe et dit à Tac :
— Ça te dérange si on discute dans ma chambre ?
Bien entendue par toute sa famille, sa déclaration avait eu l’effet d’un coup de gong : tout le monde s’arrêta subitement de discuter pour se tourner comme un seul être vers les deux protagonistes de la énième histoire d’amour du village. Tac, qui sentait que la tension dramatisait d’un cran, haussa des épaules pour contenir son malaise et acquiesça. Les deux montèrent l’escalier et les conversations reprirent de plus belle, en commérages et en doux souvenirs de jeunesse. Une tante parla de « péter les lattes », vieille expression patoise tout à fait à propos.
Les enfants écoutaient eux-aussi, y compris lae petit.e Nara qui demanda à Louisard, en employant une expression fort imagée pour les enfants de son âge :
— Pourquoi tout le monde adore péter les lattes ? Ça prend du temps à réparer.
Le ventou orageux ne répondit pas ; il venait de voir son mari dans le coin du salon, avachi sur le fauteuil, la tête entre les mains. Il se précipita pour venir l’aider.
* * *
— T’es bizarre, Tramontane.
Le ventou, qui avait fermé la porte derrière lui, se figea.
— Pourquoi tu dis ça ?
— Je sais pas, genre, tu m’évites depuis le repas, tu t’engueules avec ton père… (il posa sa tête contre la porte) Oui, je t’ai entendu : t’as une sacrée vocalique, d’ailleurs. Mais bref : t’agis bizarrement depuis ton rendez-vous avec la proviseure.
—…et alors ?
— Et alors ! Tu m’as dis qu’elle t’avait pas viré, ce que je trouve bizarre mais j’ai rien dit parce que t’avais l’air tellement chamboulé que je voulais attendre que tu m’en parles plus en détail. Alors j’ai attendu.
— C’est pour ça que t’as accepté de venir chez moi ?
— Ouais.
Il se retourna : elle était là, les bras croisés, avec son visage renfrogné qui signifiait que si on lui donnait pas une explication maintenant, ça allait barder. Qwilo rassembla le courage qu’il avait accumulé pendant toute cette attente et…
— La directrice n’a accepté que je reste si ce n’est qu’à une condition.
Tac déplia ses bras et parut sincèrement désolée, ce qui blessa encore plus notre ventou pour ce qu’il avait prévu de lui demander. Alors il hésita, encore. Mais des années de formalisme et de bourrage de crâne lui donnèrent le cran suffisant pour le dire :
— Je n’ai jamais couché avec qui que ce soit, Tac. Je t’ai menti, et je suis désolé.
— Quoi ?
Elle marqua une pause, qui parut être une éternité. Qwilo sentit ses jambes devenir du marshmallow.
— Tu… Attends une seconde, pourquoi tu… tu m’as pas fait confiance ?
— Je savais pas, Tac, je savais pas, et il se mit à pleurer.
Il n’en pouvait plus : toute son enfance, on lui répétait que faire l’amour, c’était l’existence même, la finalité de toute chose, l’essence de la vie. Que l’acte charnel était sacré dans le sens qu’il permettait à tous de s’unir avec la magie et ne faire qu’un avec elle. Et lui, dans tout ça, vivait dans la peur constante que ça lui arrive, tout en étant frustré de pas pouvoir.
Tac s’approcha de lui et le prit dans ses bras. La pitié, encore, mais aussi la sincère entraide entre amis par le fait qu’elle souffrait quand elle le voyait souffrir. Et là, tout devint clair tel un éclair zébrant un ciel nocturne : la révélation, l’invitation, la présentation à la famille… la chambre.
Elle s’écarta et les mots qui sortirent de sa bouche lui parurent aussi lourds que du plomb, aussi rêches que du papier de verre.
— Tu veux qu’on le fasse.
Il se redressa. Voire un ventou pleurer n’a rien de beau : ce ne sont pas des larmes de nuages qui s’écrasent sur le sol avec la grâce d’un signe. C’est un peu plus un visage de bébé renfrogné, avec des rides mauves par le sang qui monte au visage et les yeux qui bleuissent, en plus de la morve au nez. Le ventou renifla et rit, envers lui-même et la situation.
— C’est débile, hein ? Ça m’étonnerait que tu dises ou…
— Je veux bien le faire avec toi.
Il la regarda droit dans les yeux, bien plus surpris qu’heureux. Toute sa vie, il s’était dit qu’être dans son cas était autant de la faute de état de Brisé que de la sienne, parce qu’il n’avait jamais cherché à rencontrer « l’autre ». Qu’il s’était caché derrière sa maladie pour éviter un contact qui le terrifiait.
Aujourd’hui cependant, le voilà qui se retrouvait dans les bras d’une personne qui l’aimait pour ce qu’il était vraiment et qui ne le regardait pas avec la même frayeur ou l’indifférence que l’on accordait aux Brisés. Ce fut largement suffisant pour repousser ce que disait son corps sans mots, que l’on pouvait traduire par : « NON, NE LE FAIS PAS, SURTOUT PAS, TU N’EN VEUX PAS ».
Même si le corps et l’âme sont une seule et même chose, il arrive très souvent qu’ils se redivisent et entrent en conflit. Et parfois, l’un d’entre eux gagne.
Comme ce soir-là où Tramontane, avec tout le pouvoir de réflexion dont il faisait preuve, plaqua ses lèvres contre celles de Tac. Elle commença à déboutonner sa chemise et quand elle s’écarta pour reprendre son souffle, indiqua d’un signe de tête à Qwilo de faire de même. Torses nus, ils se muèrent de nouveau en un seul être détraqué qui aurait offusqué un calamar sur les principes de la ventouse. Ça balançait des « han » et des respirations saccadées alors que la partenaire plus experimentée caressait lentement Qwilo pour trouver ses zones érogènes. Elle en trouva quatre : les épaules, l’aine, les doigts et le nez, qu’elle mordilla. Notre ventou se sentit excité, chose qui lui fit croire que c’était ce qu’il voulait.
Après quelques instants où Tac demanda tout bas à Qwilo de lui caresser les cornes et de les embrasser, elle le guida à retirer son pantalon et le sien, puis leurs sous-vêtements. Complètement nus, l’un contre l’autre, ils se regardèrent : l’un qui avait le corps d’un couteau et l’autre d’une scie sauteuse. Le ventou s’écarta légèrement, et elle le regarda avec une fascination mêlée à de l’admiration.
— Retourne-toi.
— Hein ?
Le fait qu’elle ait parlé à haute voix le fit sortir d’une sorte de mélasse onirique, où il resta à béater quelques instants jusqu’à qu’elle perde patience et le prenne par les épaules pour le tourner.
— T’as un de ces dos !
— Un dos ?
— Un dos.
— Oh. C’est… bien ?
— Je sais pas, j’aime juste ton dos.
Voilà qui était Tac dans l’univers intime : elle cherchait le détail qui vous magnifiait et vous le fourrait sous le nez avec un air comblé. Forcément, ça peut monter à la tête de n’importe qui, ce genre de compliments, alors quand elle caressa son dos de plus en plus bas, Qwilo frémit mais ne s’enfuit pas.
Elle lui attrapa et lui tâta les fesses et… oh ! Eh bien, on pouvait dire qu’elle lui avait fait une mikado, si on parlait en termes élogieux. Il glapit et elle s’excusa.
— Ça va ? J’aurais dû te demander, pardon, mais en le voyant, j’ai pas pu résister…
— Y a pas de mal, je suis juste… surpris.
— Tu veux que… ?
— Non.
Elle acquiesça, puis prit sa main pour la faire passer son le bas de son corps. Qwilo sentait sa chaleur qui en émanait, plus importante que le sien et apprécia la courbe de son corps. Il était réellement attiré par cela, ce qui l’étonna. En fait, ça avait toujours été le cas mais il ne s’en rendait compte que maintenant : il trouvait des gens beaux. Tac était belle. Il se sentit chanceux et mal loti.
Il l’attira à elle, par lui-même. Ce qu’il désirait cependant n’était pas ce qu’elle pensait, mais ça il l’ignorait. Qwilo vivait dans un monde où ce genre de désirs n’existait pas vraiment. Confondus dans cette confusion, elle lui caressa le sexe et le poussa dans son lit. Elle vint au dessus de lui et commença à l’enfoncer dans le sien. Une odeur de mazout et de bitume emplit ses narines.
Sans prévenir, la magie de Qwilo, jusque là contenue en mésostasis, explosa.
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