Prologue

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Au cœur d’un univers s’étendait une masse d’énergie brute, unie et sans forme distincte, bruissante d’ondes et de pulsations titanesques. Mais ce n’était pas une simple étendue : c’était un assemblage infini de fragments énergétiques, les cellules d’un organisme sidéral. Lentement, cette masse avançait, croissante, repoussant inlassablement ses frontières par la force de ses vagues colossales qui déchiraient les réalités du vide pour les faire siennes, ainsi grandissait l'Océan Primordial.

Sa conquête cosmique n’avait aucune limite, dévorant les voiles dimensionnels de son univers, inconscient qu’il réveillait lentement son némésis, dont la seule ambition était de précipiter sa décadence. Une force cosmique primitive des premiers âges, endormie par le silence absolu des univers. Khaor’thuun, le souffle noir, sortit de son sommeil. Puissant et conquérant, il incarnait la négation du vivant, l’absence du sens, l’oubli du cycle. Il était le maître du néant, le reste d’un monde d’avant le monde, banni aux confins d’une dimension lointaine lors du tressaillement originel.

L’Océan Primordial continuait de façonner l’univers à son image. Un architecte cosmique dont le souffle bouleversait les lois d’un univers stérile. L’anarchie devenait ordre et le néant se muait en matière. L’obscurité absolue devint relative, à mesure que les étoiles incandescentes naissaient de sa seule volonté. Il enveloppait tout ce qu’il créait d’un voile cosmique — une signature établissant un lien immuable entre ses créations et lui, assurant leur prospérité, leur pérennité. En perpétuel expansion, il créait en son sein, des galaxies et des étoiles ; des lieux qui portaient en eux les conditions mêmes pour que la vie puisse un jour s’y épanouir. Ce qu’elle fit, au coeur d'un astre.

Dans l’une de ces galaxies, sous les chaleureux rayons d’une étoile lointaine, Ael’tharynl’éclat de lumière, s’étendait un monde d’océans et de terres riches et fertiles : Yshara. C’est ainsi que les premiers êtres baptisèrent ce monde. Dans leur langue ancienne, "Yshara" évoquait le mysticisme d’une terre façonnée par le temps et la volonté de l’Océan Primordial. Ces êtres étaient les Ysharii, les Humains d’Yshara. Ce peuple vivait depuis des millénaires sur une île continent appelée Val’ishar ; le Berceau.

Peuple de bâtisseurs, les Ysharii vénéraient l’Océan Primordial qu’ils personnifièrent en une déesse : Thyra’harel, pour laquelle ils édifièrent des monuments toujours plus raffinés. Ils pensaient ainsi qu’en retour, leur divinité régénérait leur monde en y distillant l’essence même de son énergie. Les terres de Val’ishar étaient fertiles, offrant d’abondantes récoltes. En profondeur, d’intarissables gisements de minerais offraient toutes les ressources nécessaires à l’épanouissement grandiose de leur foi.

Les Ysharii érigèrent un pilier de dolérite, une pierre noire à laquelle ils incrustèrent des éclats de cristaux lumineux. Ce pilier symbolisait l’univers, son immensité et son obscurité. Les cristaux représentant les étoiles, comme Ael’Tharyn, qu’avait fait naître Thyra’harel en porteuse de lumière. Ils célébraient leur divinité à chaque solstice, intégrant un nouveau cristal — une nouvelle étoile — dans l’immensité de l’univers, pour honorer la création de l’Océan Primordial et sa conquête sur le néant.

Durant des millénaires, le peuple d'Yshara vécut dans l’abondance absolue d’un monde aux ressources inépuisables, exempt de maladie et de guerre, jusqu’à cet instant où le lien cosmique vacilla. La magie s’arrêta progressivement, imperceptible. Plusieurs générations d’Ysharii se succédèrent avant que les premiers signes n’apparurent. Les premiers hivers difficiles, les premières disettes.

Durant deux années, les troubles s’accentuèrent. Les récoltes s’amenuisaient, les poissons et coquillages se raréfiaient sur les littoraux, le gibier ne se reproduisait plus suffisamment, obligeant à contrôler les prélèvements. Au printemps de la troisième année, une épidémie d’ampleur frappa l’île de Val’ishar. Ce fléau sonna le glas d’une ère immuable. Une fracture dans l’histoire de leur civilisation. Le lien cosmique était rompu, la signature s’était effacée. Un frisson traversa l’échine du monde ; Yshara entrait dans la nuit.

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