Chapitre 11 - Partie 4
J’arrive à l’appartement complètement vidé. Mentalement et physiquement. J’entends l’eau de la douche. Je vais chercher quelques affaires de rechange dans ma chambre le temps que Maud finisse et j’attends mon tour sur le canapé. L’eau s’arrête rapidement. En tendant l’oreille, je l’entends fredonner. Elle rayonne toujours. Elle ne s’en rend pas compte mais elle est vraiment lumineuse. Totalement le contraire de moi. Il vaut mieux pour elle comme pour moi qu’on ne soit qu’amis. Ou moins. Elle mérite mieux. Je ferai ce qu’il faut pour ne plus la voir et l’oublier. Continuer de travailler loin. A l’étranger. Y rester s’il le faut.
J’entends la porte de la salle de bain s’ouvrir.
- Tu as fini ? je demande en me levant.
Maud lâche un petit cri.
- Tu m’as foutu la trouille de ma vie ! couine-t-elle enroulée dans une serviette.
- Qui ça pourrait bien être à part moi ?
- N'importe qui vu que la porte n'était pas verrouillée ! Et puis, je m’attendais pas à ce que tu sois là si tôt. Et je t’ai pas entendu rentrer. Enfin bref… Oui, j’ai fini. La salle de bain est toute à toi.
- Okay, merci.
Je rentre en trombe dans la salle de bain et ferme la porte à clé. La voir dans cette tenue… ça m’a affecté plus que je ne veux l’admettre. Ça me rappelle notre douche. Quand je l’ai attendue à la sortie. La salle de bain est encore moite et chaude. Je me déshabille et me glisse dans la douche. Sous le jet d’eau, je m’engueule tout seul. Il faut que j’arrête de la voir comme ça, putain. Pourquoi est-ce que je n'arrive pas à passer à autre chose ?
J’ai envie d’elle. Bordel je l’ai voulue dès que je l’ai vue. Physiquement d’abord vu que je n’arrivais pas à la cerner. Tout comme moi, elle a besoin de connaître les gens pour se livrer. Elle s’est frayé un chemin à travers mon blindage. C’est comme ça que j’ai découvert qu’elle était bien plus profonde qu’il n’y paraît. Elle est curieuse. Elle est douce. Elle est intelligente. Elle est forte. Elle est optimiste. Elle est courageuse. Elle est aventureuse.
Vas-y mec, fais la liste de ses qualités… “Je ferai ce qu’il faut pour ne plus la voir et l’oublier”... C’est sur que ça, c’est un super plan pour l’oublier, abruti !
Je fais pivoter le robinet et pose le front sur le carrelage. L’eau tombe encore plus chaude sur mon dos, dénouant mes muscles. Au bout de quelques minutes, j’attrape le gel douche et le shampoing pour me laver. Ça ne me prend pas longtemps. Je sors de la douche, enfile mes vêtements et sors de la salle de bain.
Maud est assise sur le canapé. Elle ne porte qu’un t-shirt. Encore un t-shirt quinze fois trop grand pour elle. Et qui lui donne des airs de poupée. Ses grands yeux bruns me regardent et je lui souris. Depuis le temps, je la connais par coeur. Elle a encore des choses à me dire. Ok, faisons ça. Plus vite on en aura fini, plus vite elle sera repartie et plus vite je retournerai à ma douleur. Je m'appuie sur le chambranle de la salle de bain et lui demande :
- Tu n’as pas fini de me parler, pas vrai ?
Elle acquiesce. Je me passe une main sur le visage en soupirant. Je croise les bras et fixe le sol. Je ne suis pas maso. La regarder droit dans les yeux pendant qu’elle piétine mon cœur, c’est pas au programme.
- Alors, vas-y, je souffle. Je t’écoute.
Elle prend une grande inspiration.
- Et bien, je t’ai dit pas mal de trucs qui n’ont pas dûs être faciles à digérer. Et je me suis rendue compte que je ne t’ai pas vraiment laissé le temps de faire pareil.
C’est pas faux.
- Je pense que ça peut être bénéfique pour tous les deux si toi aussi tu vides ton sac, continue-t-elle. Qu’il n’y ait plus de tabou, plus de non-dits… Qu’est-ce que tu en penses ?
Je garde les yeux fixés sur le bord de la table basse, face au canapé. Je ne dis rien. Parce que je n’ai pas envie de répondre. Je pensais qu’elle allait juste me dire « Voilà, c’est dit. Maintenant je repars. » Mais en fait non. Elle veut que je parle de ce que je ressens. Putain, j’ai pas envie de lui dire ce que je ressens pour qu’elle me rejette juste après. Ça va faire encore plus mal. C’est super cruel…
Non. Ça n’est pas cruel pour elle. Je sais qu’elle ne le voit pas comme ça. Elle a besoin d’une réponse. Je le sais parce que ça fait plusieurs minutes que je n’ai rien dit et elle n’a pas cherché à combler le silence. Sauf que je n’ai pas envie de m’étaler. Je ne veux pas que les choses changent. Je ne veux pas que ce qu’on a s’arrête.
- Non, je lâche. Je ne veux pas en parler.
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