V

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 « De tout temps, lorsque la pluie se fait longue sur les champs, dans les rues des villes ou bien dans les allées des villages, des petits êtres sortent de terre par des tunnels. Ils veillent à ce que l’eau du Ciel coule dans la terre, pour l’évacuer. Ils poussent l’eau avec leurs petits outils pour qu’elle file dans les galeries dans lesquels ces petits êtres sont arrivés. Ces tunnels sont tous reliés ensemble par un réseau et ils débouchent en bas dans un vaste espace. C’est la ville de ces lutins, l’eau de la pluie coule du ciel en de longues cascades pour alimenter des roues qui créent de l’énergie appelée « électrique » que même les Nains du Mont d’Eter ne connaissent pas. L’électricité permet d’allumer des sortes de bougie qui illumine la grotte des lutins. Et l’eau déversé s’en va ensuite dans les profondeurs de la terre pour être chauffé à des températures inimaginables où elle disparaitra en vapeur. La vapeur remonte ensuite par d’autres galeries et elle alimente également, par sa force de pression, des hélices qui créent elles aussi de l’énergie électrique. Puis les vapeurs remontent encore et encore pour déboucher à l’air libre par de minuscules crevasse ici ou là à la surface de la Terre d’E.

La ville des lutins est cachée, on ne peut y accéder si l’on n’a pas été invité par un lutin et les creuseurs chez les Nains ne la trouveront pas non plus à moins d’avoir une chance inouïe de tomber dessus en perçant un rocher. Les sous-sols de notre Terre sont si vastes que tomber par hasard sur la ville des lutins n’est pas possible.

Et je ne vais pas conter l’histoire d’une petite fille ou d’un petit garçon qui y serait allé par un concours de bonne fortune, non. Je n’ai cherché qu’à trouver une explication à l’évacuation de l’eau de pluie entre les pavés de nos rues et dans la terre de nos champs. De même que ces mystérieuses vapeurs qui sortent de terre du côté des Montagnes de l’Est, près du Mont Calme ou encore dans la Vallée Profane malgré les siècles passés depuis la Porte de l’Enfer. Je me posais simplement la question. »

 Je suis allé me promener hors de la route aujourd’hui. J’avais largement le temps de le faire, on est arrivé à l’espace du campement bien avant les heures de midi, tout l’après-midi était alors libre pour s’occuper à regarder le temps passer.

Au lieu de cela, j’ai quitté la route, je n’ai pas été le seul à faire ça, et à marcher entre les arbres tout en gardant mon orientation et savoir d’où je venais, ce n’était pas si facile en réalité. Les arbres se ressemblent un peu tous ici. Puis, à quelques centaines de mètres de la route, je suis tombé sur une partie de la forêt différentes. Il y avait des arbres et des buissons à fruits, des pommiers, des poiriers et beaucoup, beaucoup de groseillers. Je me suis posé la question suivante, qui a bien occupé mes pensées : comment la forêt s’organise-t-elle toute seule ainsi ? Qu’il y ait ici des arbres à fruits, ici des sapins, ici des chênes, là des frênes, je veux dire. Je ne suis pas un homme savant, je n’ai pas été plus loin que l’école principale, l’Université comme celle d’Eter, n’en parlons même pas. Je suis persuadé qu’il y a là-bas un professeur qui aurait la réponse à ma question et à toutes celles que je me suis posé aujourd’hui dont je me souviens plus le soir venu. J’ai envié la place de ces penseurs, qui n’ont d’autres tracas dans la vie que de réfléchir au sens de la vie et aux sens des choses autour de nous. Quoique dire cela est un peu rapide, parce qu’il faut bien se sacrifier pour assumer prendre la tournure d’esprit de chercher et toujours chercher, de réfléchir et toujours réfléchir sur ce qui nous entoure. Quand est-ce que l’on fait une pause, quand est-ce que l’on apprécie simplement à sa valeur observable un arbre dès lors que l’on connait son nom, son origine, le pourquoi de sa présence ici et que l’on peut prédire son futur en relation à l’environnement et aux changements à venir ?

Je ne sais pas, en fait, si j’aimerais cette position et cette tournure d’esprit. Je crois que j’apprécie ne pas savoir, d’être capable de rêver l’invraisemblable, l’illogique, l’irrationnel, l’irraisonnable. Je me demande si ces professeurs en sont capables ? Arrivent-ils a s’extirper de leur condition, de temps en temps, pour profiter juste de la vie ? Je me suis posé ces questions à propos des pommiers, d’où viennent-ils, tout en mangeant une pomme tombée à terre et une fois terminée, j’ai lancé en arrière le trognon en même temps que mes réflexions. Elles étaient toutes passagères, comme mon existence sur la Terre d’E. Percer des mystères, non, ce n’est pas pour moi.

Je suis revenu vers le campement à peu près par les mêmes contournements d’arbres qu’à l’aller et j’ai attendu la fin du jour en lisant un livre que j’ai ramené. Je sais lire et écrire, ce sont des acquis que j’ai contrairement à beaucoup d’autre, j’en suis conscient, et j’en profite un peu : cette compilation de divers textes écrit pas des inconnus qui ont vécu sur la Terre d’E, ici ou là, au Nord ou au Sud, me parle vraiment. Je m’y retrouve, je crois, beaucoup dans cette idée d’évasion ponctuelle de notre condition. Le temps d’une petite histoire ou le temps d’un petit témoignage, d’une manière de dire « je suis là, j’ai vécu, je vis ». Je vis ma vie.

 Et il y a toutes ces histoires que j’entends les soirs.

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