CHAPITRE 7

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Nous nous éloignons pour retourner vers des rues plus animées et moins sordides. Mais à peine avions-nous fait quelques pas que deux surveillantes apparaissent à l’angle de la ruelle, à une trentaine de mètres.

— Trop tard ! grogne Alice.

Elle regarde dans tous les sens à la recherche d’une échappatoire. Elles s’approchaient de nous en courant.

— On fait quoi ? demandai-je à voix basse.

Alice soupire.

— Rien, n’y a rien à faire. Je n’aurais pas dû appeler au secours. Je suis désolée, Simon.

— Attends, tout n’est peut-être pas perdu. Aide-moi à remettre mieux ma perruque.

Elle s’exécute, larmoyant presque, pendant que les deux gardiennes de l’ordre nous rejoignent. Leurs costumes en cuir rouges masquent leurs formes. Plus grandes et plus baraquées que moi, je me doute de ne pas réuissir à prendre le dessus en cas d’affrontement. Les deux arrivantes ont bien des silhouettes féminines. Elles portent à la taille une matraque d’un côté et une sorte d’arbalète de l’autre.

— Bonjour, citoyennes. C’est vous qui avez crié ?

Je maintiens les yeux baissés quelques secondes. Si Alice ne répond pas promptement, ça va se régler plus vite que prévu.

— Oui, c’est moi, lâche-t-elle enfin entre deux sanglots.

La deuxième surveillante nous abandonne pour aller examiner les deux assommées

— Que s’est-il passé ? demande-t-elle d’un ton hautement autoritaire

C’est pénible, on ne voit pas ses yeux à travers la visière teintée de son casque.

— Nous avons été agressées.

— Par celles-là ? questionne la policière en désignant les corps gisant sur la chaussée à quelques mètres.

Alice acquiesce en essuyant ses larmes.

— Que s’est-il passé ?

— Elles… J’ai… j’ai failli être violée. Elles étaient trois. La dernière s’est enfuie.

— Hmmm… C’est vous qui les avez mises dans cet état ? demande la surveillante en se tournant vers moi.

Je confirme d’un hochement de tête.

— Oui, c’est grâce à elle que je n’ai pas été violée ! clame la rouquine en se serrant contre moi. Elle a réussi à nous protéger.

— Vous n’y êtes pas allée de main morte, déclare la deuxième sentinelle en revenant vers nous après avoir examiné les corps.

— Dans quel état sont-elles ? s’enquit sa collègue.

— Il faut appeler le service de soins.

— Vous n’allez pas soigner ces… ces… ces crapules, quand même ? s’agace Alice.

— C’est la procédure, madame. Vous pourrez aussi bénéficier du service de soins.

— Mais je vais bien, je vous assure !

— Nous allons devoir également enregistrer votre témoignage par écrit. Il va vous falloir nous suivre jusqu’au poste de surveillance.

Bon, évidemment, ça prend une vilaine tournure. L’une des surveillantes arme son arbalète d’un étrange projectile fuselé et tire en l’air. Le projectile éclate haut dans le ciel et une détonation retentit, accompagnée d’une nuée d’étincelles rouges qui retombent vers nous. Puis elle recommence la même manœuvre et cette fois, ce sont des étincelles orangées qui illuminent longuement l’espace au-dessus de nous.

— Je vais commencer par relever vos identités, citoyennes, déclare l’autre surveillante en sortant un grand calepin d’une poche latérale de son uniforme.

Alice me lance un regard désespéré.

— Madame ?

— Je… je m’appelle… Alice. Je suis… la servante d’Héloïse de Picardie.

La surveillante fouille un instant dans son calepin.

— C’est une indigène ! lâche-t-elle finalement à sa collègue.

Et les deux changent alors d’attitude à l’égard de la jeune femme qui s’est remise à sangloter, se montrant aussitôt moins prévenantes et plus froides, se désintéressant complètement d’elle.

— Et vous, madame ?

Il faut que je trouve un truc à dire… Sans vraiment lever les yeux, je réponds d’une voix la plus fluette possible, en essayant d’adopter l’accent que j’entend partout autour de moi depuis quelques heures.

— Je suis Héloïse de Picardie.

— Bien. Puis-je voir votre médaillon, madame ?

Mais un coup de sifflet retentit soudain, me sauvant momentanément la mise. La gardienne de l’ordre qui m’interroge, répond en émettant elle aussi un long sifflement strident qu’elle a dû produire depuis l’intérieur de son casque mais qui résonne tout autour de nous. Et deux nouvelles femmes vêtues de rouge débarquent, suivies de deux autres portant un uniforme jaune.

— Unité de secours, prenez en charge les victimes, là-bas ! ordonne l’interrogatrice montrant les skinheads au sol.

— Renforts de surveillance, de quoi s’agit-il ? Demande une des surveillantes nouvellement arrivées.

Elle est plus petite que les deux premières quasiment une tête de moins, rendant sa silhouette anguleuse plus imposante que ces consœurs.

— D’une agression. Nous n’avons pour l’instant qu’un seul témoignage, mais il n’y a aucune validité, c’est celui d’une indigène.

Je fulmine de colère mordant mes lèvres pour garder mon sang froid.

— Puis-je voir votre médaillon, madame ? reprend finalement notre interlocutrice, pendant que tous les autres s’affairent autour de nous et des deux assommées.

Je simule de me fouiller le temps de trouver une idée de nous sortir de cette situation.

— Non, je ne l’ai pas ici, tentai-je.

— Hein ? Montrez-moi votre médaillon, je vous prie !

— la troisième sauvageonne a dû me le voler.

J’étais un génie.

Mais as pour longtemps.

— Qui est-ce ? demande une autre surveillante qui arrivait tout juste.

Une femme qui me fait penser au bonhomme Michelin tant elle parait engoncer dans son uniforme. Elle est petite et ne doit pas dépasser le mètre soixante.

— Il s’agirait d’Héloïse de Picardie et de sa servante.

Derrière nous, l’une des pétasses que j’avais assommées, vient apparemment de se réveiller et hurle :

— C’est un indigène ! Arrêtez-le ! Il nous a agressées ! Ce n’est pas une femme, c’est un homme.

Merde !

Ça se complique vraiment. L’idée de me mettre soudain à courir me traverse l’esprit, mais ma robe et mon déguisement ne vont pas favoriser mon départ rapide.

Et puis, pour m’enfuir où ?

De plus, les surveillantes réagissent bien plus vite que moi. Deux d’entre elles reculent de quelques pas et arment instantanément leurs arbalètes en m’ajustant précisément. La troisième vient m’arracher tout mon accoutrement, de ma perruque à ma robe. Elle découvrit le couteau que j’avais chapardé à nos agresseuses et s’en servit pour déchirer mon tee-shirt et couper la lanière retenant le soutien-gorge

— Eh bien, deux indigènes, dont un mâle ! L’affaire est classée. Surveillante Loveless, passez-lui des menottes.

Alice, désespérée, se met à hurler :

— Non, arrêtez ! C’est grâce à lui que je suis indemne ! Les autres ont essayé de me violer !

— Écarte-toi !

— Faites venir Maitresse Héloïse ! Vous verrez !

— Maintenant, tu t’écartes et tu nous laisses effectuer notre travail !

Alors que l’une des surveillantes repousse vivement Alice en faisait mine de la frapper, je m’interpose.

— Arrêtez, calmez-vous ! Il ne faut…

Mais un coup de matraque m’envoya au tapis.

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