24.2

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Ayla avait repris des forces, au moment où Yves avait ordonné la mise sous scellés de tout l’étage. Seuls deux agents étaient restés en faction afin d’empêcher toute intrusion, les autres avaient disparu.

Dehors, la nuit était tombée plongeant le secteur dans le noir. Seuls quelques halogènes du chantier de construction diffusaient une clarté pâle, le labeur des ouvriers ne s’arrêtait jamais. Yves, Ayla et Kyle, avaient rejoint la 308 du capitaine, puis s’étaient insérés dans le trafic intense des abords de la gare. Rassic aurait pu utiliser le gyrophare et la sirène de son véhicule pour se frayer un passage, il n’en avait rien fait, préférant laisser Fearghas et sa fille profiter du calme de la banquette arrière afin de se retrouver. Ayla avait appuyé sa tête contre l’épaule de son père, leurs mains s’étaient jointes. Aucun des deux n’avait parlé.

Sur le trajet, il avait reçu un appel d’Éric, l’inspecteur principal avait procédé à l’interpellation de Fred Costelli. Le malfrat n’avait pas opposé de résistance. Il avait laissé le préfet en compagnie de la presse et de la télévision régionale, il s’était fait mousser. Tant mieux pour lui ! Là, il était au commissariat à noircir la paperasse habituelle et à remplir des rapports. La nuit allait être longue. Rassic lui avait dit que les procès-verbaux pouvaient attendre demain, et lui avait demandé de les rejoindre rue Pedroni chez Tom, ils y seraient dans une demi-heure.

Blanchart patientait dans le hall de l’immeuble lorsque Ayla, avait franchi la porte. Elle lui avait souri. L’inspecteur lui avait trouvé meilleure mine, les traits de son visage ne marquaient plus l’épuisement qu’il avait constaté. Il en avait été rassuré. Puis, comme pour le rasséréner davantage, elle avait monté les marches deux par deux en appelant Tom. Là-haut l’attendait un gars fou d’elle, là-haut l’attendait son avenir.

La bouilloire émit son sifflement caractéristique, Kyle s’empressa de verser l’eau dans quatre mugs contenant des sachets de thé. Éric avait préféré un café, l’Américain l’avait préparé. Tous s’assirent autour de la table de la cuisine, Yves attrapa son téléphone, l’éteignit, puis brisa le silence qui s’était installé depuis quelques minutes.

– Monsieur Fearghas, je sais que vous éprouvez des difficultés à me comprendre, aussi, je demanderais à Tom, s’il veut bien, de traduire mes propos.

Clynac fit oui de la tête.

– Merci ! Kyle, en tant que policier, vous devez vous demander pourquoi j’ai raccompagné Ayla, au lieu de l’emmener au commissariat pour prendre sa déposition. Dans un premier temps, ayant connu votre fille dans des conditions délicates il y a vingt ans, je ne voulais pas lui infliger, sans votre présence, la douleur du souvenir des évènements passés ici, à Bordeaux. Faits reliés à l’affaire d’aujourd’hui… Je saisis, à votre étonnement, que vous ne savez pas de quoi je parle. Evra ne vous aura donc rien raconté ! Je peux le comprendre. Ensuite, nous devons accorder nos violons quant au type que nous avons retrouvé assommé dans la pièce où Ayla était retenue. Même si c’est moi qui ai donné le dernier coup, je sais que ce n’est pas vous qui l’avez cogné. Cet homme, lors de son interrogatoire racontera dans quelles circonstances il s’est retrouvé à terre. Vous me comprenez ?

Kyle regarda sa fille.

– Vous la croyez incapable de se défendre seule ?

– Oui ! Vous connaissez aussi bien que moi ce genre de type, votre fille, toute Conwell mélangée à du Fearghas qu’elle soit, ne serait pas parvenu à le battre. Monsieur Fearghas, une fois encore, d’autres personnes lui poseront des questions, je ne voudrais pas qu’elles mettent Ayla dans l’embarras. À moins d’une explication plausible, nous devrions envisager de dire que c’est vous, en état de légitime défense, qui l’avez assommé. Vous ne serez pas inquiété, je vous donne ma parole.

– Cet homme est l’assassin de mamie et de maman ! s’exclama Ayla.

La phrase provoqua de la stupeur. Kyle attrapa les mains de sa fille.

– Comment le sais-tu ?

– C’est lui qui me l’a dit, avant que…

Elle s’interrompit. Parler plus dévoilerait aux yeux des policiers français et de Tom la présence de sa mère. Ils ne comprendraient pas et la prendraient pour une folle. Elle les regarda un par un. Tom était suspendu à ses lèvres, leur amour briserait ses certitudes, il croirait à ses propos. Éric la fixait d’un regard bienveillant, son esprit ferait la part des choses. Yves sourit, comme s’il savait. Elle baissa la tête.

Ma petite fille, ton père a le droit de savoir, Tom aussi. Éric et Yves ont tout fait pour te retrouver, ils ont ma confiance, et le capitaine m’a vu quand tu étais dans les bras de papa. Il n’en a pas parlé parce que je pense qu’il attend que se soit toi qui le fasses. Ses dernières paroles le prouvent.

– Maman !… Donne-moi ta force… J’ai vu cet homme appuyer sur la détente, au travers des yeux de ma mère.

À ces mots, une auréole bleue cercla le corps de Ayla.

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