Chapitre 4 - Carl prend ma défense

5 minutes de lecture

 

–        Crois-tu que je mémorise ce que prennent les clients ? lançais-je à Carl tout en nettoyant un verre.

–        Tu as raison, je devrais changer. Je vais prendre le cocktail Capitaine. Argua-t-il en fronçant les sourcils sans lâcher son fameux sourire.

Carl me tint le crachoir toute la soirée. Même si je devais admettre que cela me plaisait, il ne fallait pas que j'oublie de travailler. Mon patron me toisait à plusieurs reprises. Carl prenait plaisir à me raconter ses voyages, ses projets. Il se passa plusieurs fois la main dans sa chevelure blonde toujours tirée en arrière. Je faillais lui lancer « C'est bon, tu es canon, ce n'est pas la peine de remettre le millimètre de mèche qui dépasse ».

Il resta accoudé au bar son verre à la main toute la soirée. C'était d'ailleurs l'un des derniers clients au moment de la fermeture. Lui et un homme qui devait avoir la quarantaine étaient restés au bar. Ce dernier avait beaucoup trop picolé, il avait la voix railleuse et rauque, il dégageait une puanteur typique des personnes qui ne se lavent que très rarement. Comment n'avais-je pas pu sentir cela plus tôt. Il voulut commander une autre bière mais se heurta à mon refus.

–        Allez fais pas ta pute, ma jolie, sers-en un autre. Lança l'homme.

–        On ferme je suis désolée.

A ce moment précis j'en voulais à mon patron de m'avais chargée exceptionnellement de la fermeture ce soir. Ce quarantenaire me fichait la trouille, comment allais-je pouvoir m'en débarrasser sans risquer une agression ? Je réitérai ma demande de quitter les lieux. En vain.

–        Quand le minet sera sorti, je le suivrai. Railla-t-il en désignant d'un coup de tête Carl.

–        Regardez je sors, lança Carl qui s'avançait vers lui.

–        Bas vas-y, vas dehors ! brailla-t-il en faisant un grand signe de son bras droit tout en m'adressant un regard malsain qui ne dura qu'une fraction de seconde mais assez pour me faire déglutir.

 J'étais mal. Je jetais un regard à Carl en signe de détresse. Mais il n'eut pas besoin de cela pour comprendre comment réagir. Il attrapa par le col l'homme ivre pour l'emmener dehors. Il tenait difficilement sur ses jambes mais gardait une certaine force. Il réussit à éjecter Carl contre une table et tenta de retourner vers le bar. Carl le saisit de nouveau et le retourna vers la porte.

Mais l'ivrogne n'avait pas dit son dernier mot et parvint à se défendre assez habilement vu le taux d'alcoolémie qu'il devait avoir dans le sang. Il fit un coup de tête par derrière à Carl qui se couvrit le nez de ses mains, la frappe fut forte. Mais Carl ne resta pas longtemps ainsi et lui asséna un coup de poing et tenta de le pousser dehors, ils n'étaient plus qu'à quelques centimètres de la porte. L'homme allait répliquer quand Carl sortit un couteau de sa poche et le plaça sous la gorge de son adversaire.

–        Ne remets plus les pieds ici ou je te fais la peau. Menaça Carl.

Il appuya la lame sur la gorge de l'ivrogne de telle sorte qu'il comprenne qu'il ne plaisantait pas. Ce dernier abandonna toute résistance et partit finalement du bar en insultant Carl qui referma la porte et revint vers moi en me dévoilant toutes ses dents.

–        Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas foutu une raclée.

–        Merci de m'en avoir débarrassé. Tu saignes. Dis-je en attrapant une serviette propre.

–        Pas de problème. 

–        Cela t'arrive souvent d'avoir affaire à ce genre de personne ici ?

–        Ici, non mais je n'ai jamais été contre mettre une raclée pour me défouler.

–        Tu fais partie d'un gang ou quoi ? m'esclaffais-je.

–        Comment s'est passée ta semaine ? questionna-t-il en essuyant son visage.

–        Bien, par contre je dois fermer le bar, hors de question que je reste ici plus longtemps.

–        Pas d'inquiétude pour ça je suis là. Répliqua-t-il en s'approchant un peu trop près de l'autre côté du bar.

–        J'ai cours demain. Fis-je en reculant d'un pas feignant de chercher les clés que j'avais déjà dans ma poche.

–        Moi aussi, insista-t-il en reprenant le ton bas de la dernière fois.

–        J'ai eu mon quota de clients insistants pour la soirée, ne t'y mets pas toi aussi.

–        Très bien chef.

Je refermais la porte de l'établissement derrière moi. Carl ne semblait pas vouloir rentrer toute de suite chez lui. Il se plantait à côté de moi observant chacun de mes gestes. Je lui lançai qu'il était étrangement collant et qu'il allait commencer à me faire flipper quand il prit mon visage entre ses mains et m'embrassa.

Sur le moment je ne réagis pas, enfin disons que je le laissais faire mais une fois qu'il me relâcha, je restais bouche bée comme une idiote.

–        Désolé, cela faisait un moment que j'en avais envie.

Je ne répondis rien. Je cherchais à formuler une réponse dans ma tête mais rien ne me venait.

–        Je te raccompagne ? Le gars de tout à l'heure doit encore zoner dans les rues.

–        Hum, oui, je veux bien. Balbutiais-je en me passant la main dans les cheveux le regard ailleurs.

            Tout le long du chemin, il me parla de ses cours, il ne laissait plus transparaitre le même enthousiaste que l'autre fois pour le droit. Son rêve était maintenant de tout plaquer et de partir à l'autre bout du monde mais il attendait de rencontrer le bon compagnon de route. Plutôt instable ce gars. Des amis à lui faisaient régulièrement des voyages mais ils eurent certains incidents qu'il préférait éviter de subir. Il me demanda si j'avais déjà voyagé. Je lui répondis que ma venue ici était en quelque sorte un voyage même si j'étais astreinte à certaines obligations. Il me tendit la perche pour me faire savoir que si j'éprouvais le besoin de bouger mais de façon totalement libre, il serait ravi de le faire avec moi. Je rétorquais que ma situation était particulière, cette année d'étude était une promesse, et sitôt terminée, je devais repartir chez moi.

            Juste avant que nous arrivions vers mon logement, nos mains s'effleurèrent un bref instant et je ressentis comme un brin d'électricité me parcourir le corps. Le baiser m'avait fait la même chose mais c'était encore plus intense. Il m'était difficile de ne pas y repenser même lorsqu'il me parlait. Je faisais des efforts pour me concentrer sur les mots qui sortaient de sa bouche mais seule cette dernière m'obsédait. Ce qui me faisait bizarre, ce n'était pas mon genre de rester focalisée sur un garçon. J'avais eu des petits flirts dans mon pays natal mais je parvenais facilement à m'en détacher. Heureusement, c'était l'heure pour chacun de nous de rentrer se coucher.

Annotations

Vous aimez lire BlackShrew ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0