Chapitre 5 - La rencontre

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Chloé part peu de temps avant sa sœur, mais pour une fois, Maéline ne ressent pas le froid qui l'habite de coutume à chacun de ses départs. Au contraire, une voluptueuse tiédeur la parcourt. Elle pourra prendre du plaisir ce soir, parler de tout et de rien avec légèreté, et surtout approcher Mattéo.

D'un coup, un nœud se forme dans le creux de son ventre, empli de questions et d'hésitations, de doutes et de peurs les plus diverses. Au fait, qu'est-ce que j'apporte ? De la bière ? Et Mattéo, est-ce qu'il sera vraiment présent ? Me trouvera-t-il jolie ? Est-ce que j'oserais l'aborder ? Pire, s'il s'est remis avec Zoé ? 

Maéline préfère étouffer ces questions dans l'oeuf et revenir à la préoccupation immédiate. Elle ouvre les tiroirs de la cuisine en quête d'inspiration. Elle met la main sur des chips. Sans hésitation, elle les sort et les pose devant la porte d'entrée pour ne pas les oublier : tout le monde aime les chips, elle ne risque pas de faire un impair.

Les bras encombrés de trois paquets, l'adolescente quitte enfin l'appartement, à pieds. Elle avait été surprise de voir que Jennifer habite à moins de dix minutes de marche ; autant profiter de l'air frais de la soirée après une chaude journée printanière.

Durant le trajet, Maéline cogite. Il lui faut trouver des phrases d'accroche pour paraître cool aux yeux de celui qui anime son cœur. Elle se sent bête de ne pas avoir demander à sa soeur, ça lui aurait évité de se mettre à stresser quelques minutes avant le moment fatidique.

— T'as besoin d'aide, ma jolie ?

Maéline tourne la tête pour tomber nez à nez avec un grand gaillard dont elle n'a pas sentie la présence, perdue dans ses réflexions, et qui la colle d'un peu trop près. D'un coup, sa robe lui paraît bien trop courte et trop sexy.

— Non merci, répond-elle avec une fausse assurance.

— Pourtant, on dirait que ça va tomber par terre. Je peux t'aider, y'a pas de soucis.

L'adolescente se raidit, tout en maintenant une expression assurée autant que cela lui est possible. Malgré tout, son corps réagit pour elle et fait un pas en arrière.

— C'est gentil, mais je n'en ai pas besoin. Bonne soirée, répond-elle d'une voix neutre.

Son coeur bat la chamade. Une soudaine envie pressante de tirer sur sa robe l'obsède. Pourtant cela ne la rallongerait pas, et de toute façon elle a les bras encombrés par les chips. Elle sent ces derniers glisser légèrement du fait de la moiteur grandissante de ses mains. Elle prie pour qu'ils ne tombent pas. Certes, elle pourrait courir plus facilement, mais cet homme doit certainement courir plus vite. L'impression de piège la paralyse. Ses idées se figent, comme si son cerveau avait stopper d'un coup toute activité autre que celle dédiée aux fonctions vitales.

Il s'approche d'un pas. La bouche de Maéline devient sèche. Elle sent ses bras parcourus de légers tremblements.

— Hey, tu..., reprend l'insistant.

L'un des paquets commencent à lui échapper des mains, quand soudain une voix s'écrie dans son dos :

— Je crois qu'elle a été claire, non ? Porter ces paquets de chips ne lui pose pas de problème. Tu viens, on va être en retard.

La jeune fille se retourne surprise. Un adolescent de grande taille, avec un nez fin sur lequel reposent des lunettes de travers soutient de son regard sombre l'expression de défi du grand gaillard.

Maéline se sent à la fois rassurée et très peu à son aise alors que les deux inconnus se toisent en silence. Au moins, son coeur s'apaise et sa prise se raffermit sur les sachets. Il manquerait plus qu'elle donne tord à son sauveur en les laissant tomber sur le sol ! Dans ce court lapse de temps, les questions s'affolent à nouveau. Doit-elle faire quelque chose ? Ne serait-il pas temps de déguerpir en vitesse ?

Un je-ne-sais-quoi dans l'expression du garçon à lunettes l'interpelle sans réussir à le définir exactement.

— Fallait le dire de suite, mademoiselle, que t'étais accompagnée.

Sur ce, le grand gaillard tourne les talons. L'adolescent au nez fin se retourne, un sourire chaleureux sur le visage.

— On peut même pas sortir tranquille. Je vais à une fête un peu plus loin, tu veux que je t'accompagne avant ?

— Euh... Tu vas où ?

Maéline s'entend prononcer la question sans avoir eu le temps de réfléchir à ce qu'il convenait de faire ou de dire. Son cerveau a comme disjoncté.

— Rue de Dinan. Et toi ?

La mâchoire de la jeune fille manque se décrocher.

— Moi... Moi aussi, parvient-elle à articuler.

Il doit me prendre pour une idiote à faire une tête pareille ! Faut que je me ressaisisse. Allez ma belle, demande-lui chez qui il se rend. Il m'a impressionné, le mec le dépassait d'une demi-tête, mais il a quand même pris ma défense. C'est vraiment adorable ! Ch'uis sûre que c'est un vrai gentleman ! Il a de ces yeux verts ! J'ai envie d'y plonger et de m'y prélasser des heures !

— Me dis pas que tu vas à la soirée de Jenny ? s'enquiert-il.

— Jennifer ? Si.

Le jeune homme part d'un rire grave tout en se grattant la nuque.

— Alors autant faire le trajet ensemble.

Pleinement rassurée, Maéline s'approche tout en le remerciant :

— Tu m'as enlevé une sacrée épine du pied.

— Chevalier servant à mes heures perdues, pour vous servir, répond-il en faisant une révérence exagérée.

Le ventre de Maéline pétille. Elle rit de bon cœur et, pour éviter de dévoiler ses grandes incisives, place une main devant sa bouche. Se faisant, un paquet chute sur le sol, puis un deuxième. Elle les avait complètement oubliés, et retient fermement le dernier. Quelle idiote ! Que va-t-il penser ?

Elle se baisse et, se faisant, le troisième lui échappe des mains. Ses joues chauffent de honte alors qu'elle attrape l'un des sachets.

— Un peu trop lourd finalement, lance-t-il en lui faisant un clin d'œil alors qu'il se baisse pour ramasser les deux autres paquets. Tu t'appelles ?

Ouf, il ne me prend pas pour une cruche, ç’aurait été trop la honte ! J’aurai fait demi-tour en vitesse !

Tout en se redressant, il frôle le bras de Maéline qui sent un frisson la parcourir jusqu'à sa nuque. Cette fois, elle a carrément chaud. Un large sourire se dessine sur son visage lorsqu'elle lui donne son prénom.

Il pose sa main sur l'épaule de la jeune fille.

— Allez, on va être en retard. Moi, c'est Romain. C'est original et doux à l'oreille, Maéline.

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