Chapitre 26 (1/3)

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A cette heure-ci de la nuit, la cour du palais royal se trouvait être le théâtre d’une activité peu habituelle. Les Paladins et Inquisiteurs de l’Ordre, debout en ordre rangé, attendaient la fin du discours du Seigneur-Inquisiteur. Bientôt, ils s’en iraient déloger la Légion de Portelune.

— Rappelez-vous, nous devons agir vite et fort. Ces chiens doivent comprendre qui sont les maîtres ici. Une bonne fois pour toute.

— Oui, Seigneur-Inquisiteur.

— Pour le Père de la Lumière !

— Pour Aelleon !!

Ce discours conclut, le groupe commença à se disperser. Cinab se tenait encore aux côtés d’Iveln, le visage fermé mais l’esprit agacé de voir ses Paladins se mêler aux Inquisiteurs dans cette tâche qu’elle estimait ne pas être la leur. Comme elle s’y était attendu, l’obsession de son « supérieur » pour les Mortis le forçait à prendre des décisions qu’elle jugeait idiotes. Ses gens devraient être en train de patrouiller les rues, protéger les innocents et aider les miséreux et non pas gaspiller du temps et de l’énergie sur un groupe de personnes qui de toute manière quittera ces terres d’ici la fin de la semaine.

Elle s’éloigna d’Iveln, le laissant aux dernières finitions de son plan, et se tourna en direction de la herse du château. Le ciel s’était quelque peu dégagé entre temps, découvrant la lune. Sa lumière lui permis de suffisamment distinguer les formes générales de l’avenue des Montoineaux et d’une partie de la ville-haute et de la ville-basse ainsi qu’une figure mouvante, de la taille d’un homme.

— Seigneurs ! Seigneurs !

Un homme paniqué émergea de l’ombre et se dirigea droit vers la herse dont il agrippa les barreaux avec toute sa force.

— Seigneurs, vous devez…

— Du calme, mon brave.

Cinab s’approcha, scrutant malgré tout comme elle le pouvait les environs. L’homme face à elle tremblait.

— Les morts… Par tous les saints… Les morts, ils…

Une explosion retentit au loin, dans les docks, l’empêchant de conclure. L’homme hurla, lâcha les barreaux et se recroquevilla contre l’un des murs. Il trembla de plus belle. Quelques secondes plus tard, le beffroi, à l’ouest, sonna, réveillant les habitants alentours.

— Par Aelleon… Ouvrez la herse !

— Que quelqu’un aille prévenir le roi !

— Dame Sofra, Seigneur-Inquisiteur ! Regardez, au nord !

Au loin, deux lueurs orangées apparurent l’une après l’autre. Très vite, les flammes qui les constituaient commencèrent à percer la limite des toits. Cet incendie n’avait rien de naturel.

Cinab s’approcha alors de l’homme recroquevillé. Elle le saisit par les épaules, le poussant à la regarder.

— Vous avez parlé de morts. Ceux des souterrains ?

— Oui… Ils…Ils sont… Ils ont… Oh, par les dieux.

Voyant qu’elle n’obtiendrait rien de plus, elle le lâcha et se tourna vers les siens.

— Aux armes !

*****

Dans le silence, une cacophonie de claquements osseux sur la pierre ancienne ; dans les ténèbres, une myriade de symboles luisant du même violet sombre ; dans la paix, le conflit et les morts à venir.

Telle était la vision qu’offrait les antiques souterrains depuis peu. Une marée composée d’os et d’esprits faisait lentement mais sûrement son chemin vers les points où elle pourrait jaillir telle une vague déferlant sur les côtes.

Les squelettes et les spectres, habituellement dispersés, en patrouille ou en dormance dans le troisième et quatrième sous-sol, s’étaient réunis ici en une masse étrange, inhabituelle. Sur leur front, un étrange glyphe y avait été tracé, symbole d’une magie particulièrement puissante qui les manipulait comme de vulgaires marionnettes, les poussant vers la surface, les forçant loin de chez eux.

Certains se dirigeaient d’abord vers les zones habitées par les contrebandiers, mais nul doute qu’ils feraient tout pour rejoindre leurs congénères une fois là-bas. Naturellement, après s’être occupés des nuisibles présents, car telle était leur volonté, ou plutôt, celle de leur marionnettiste.

Vers la fin de la horde, un homme à la peau pâle et aux longs cheveux roux, exhibait droit devant lui un bien curieux objet, une lanterne des plus singulières. Le métal gris qui la composait ne portait aucune trace d’usure, comme s’il avait été fraichement forgé. Mais cela était trompeur car la flamme qui brûlait en son sein, alimentait une magie plusieurs fois plus ancienne que ce pays. La flamme sombre qui y demeurait, de la même couleur que les marques sur le front des morts des catacombes, n'était nulle autre qu’un fragment de la Nocteflamme, le feu maudit de l’Umbra.

Confinée derrière huit vitres et de nombreux enchantements, elle brûlait d’une malveillance dont ce pays n’avait encore jamais été témoin. Ne pouvant être manipulée par nulle autre que ceux ayant été initiés aux sombres et mystérieux arts de la nécromancie, elle avait soif de sang. Vildis, à qui l’on avait fait l’honneur de la manier, et Ciaran étaient de ceux-là. Pour eux, tous les outils, magies les plus sombres y comprises, étaient bons pour les aider à servir leur seul et unique maître.

Les autres zélotes étaient déjà très certainement dans la ville, provoquant d’autres formes de chaos. Bientôt, une fois ces couloirs vidés, il les rejoindrait. Mais pour le moment, il se contenta d’observer la lente marche des morts vers la surface.

*****

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