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contenu sensible

À être enfermés ensemble, sans avoir de relations avec l’extérieur, j’ai commencé à dériver sans m’en rendre compte. Chaque matin, donc, j’aidais Charles. Nous avions notre rituel dans la laverie. Un jour, il m’invite à visiter les pièces d’en bas. Je suis surpris par l’attirail présent. Je n’y connais rien en BDSM, mais je peux deviner à quoi servent tous ces objets. Certains me demeurent cependant mystérieux, stimulant ma curiosité. Il n’y a pas que ma curiosité à être stimulée ! Décidément, il me faudra explorer cet univers. Avec sa permission, j’emporte quelques accessoires, ayant une idée en tête. Je sais que je vais être à la limite du dérapage. J’aime beaucoup cette sensation du va-tout !

Cependant, jamais mon éducation ne m’aurait permis d’oser faire ce que je vais faire. Le soir, je prends Roxane à part. Cette fille m’interroge, m’attire, me rechigne. Ces contradictions me sont insupportables, car j’ai envie d’autre chose. Je lui propose un petit jeu, pour nous distraire. Elle se laisse embobiner par mon charme. Elle tique un peu quand je déballe mon premier accessoire. Mon sourire chaleureux la retient de commenter. Je prends le bandeau que je serre doucement autour de sa tête, tendrement. Elle est maintenant aveuglée. Elle se laisse faire ! J’ai gagné la première étape. Quand je lui enfile aux mollets et aux poignets les bracelets, elle ne comprend pas ce que je fais, mais ne réagit toujours pas. Je l’incite doucement à se coucher sur le dos. J’attache les bracelets au lit, pourvu, comme par hasard, des anneaux nécessaires, avec beaucoup de mous pour qu’elle ne sente pas les liens la tenir. Puis, point crucial, je sors la boule. Avant qu’elle n’ait pu la sentir, je la lui mets dans la bouche et l’attache. Elle prend peur, se débat. Elle sent alors les liens la retenir. Panique. Je m’approche de son oreille, lui murmure des mots apaisants et rassurants en lui caressant le front. Elle se calme, un peu. Quand je me relève, je vois Manon, prête à m’arracher les yeux. Qu’elle est belle dans sa fureur angoissée ! Les autres me regardent, interrogatifs. Doron, même, semble inquiet.

Je prends les mains de Manon, lui pose un baiser sur la bouche en lui disant :

— Jamais je ne lui ferai du mal ! Je te le promets ! C’est juste un jeu ! Enfin, presque. J’ai eu une intuition, sans bien la comprendre. Tu veux bien ?

Elle me regarde. Décidément, ses yeux me chavirent. J’y lis tant de choses ! Je doute un instant. Puis, je pose ses mains sur le corps de Roxane.

— Va ! Fais-lui plaisir ! lui lancé-je.

Nous avons parlé doucement. Roxane n’a pas dû saisir toutes les paroles. Ce que je veux, c’est qu’elle le ressente physiquement, sans contrôle par son esprit, pour voir !

Je regarde Manon parcourir ce corps adoré, allant aux endroits qu’elle connait comme sensibles. Roxane a reconnu les mains de sa compagne, car elle s’abandonne. Je resserre les liens sans qu’elles y prêtent attention. Je ne sais pas trop ce que je fais. Mon instinct me guide, avec plein d’alarmes allumées dans mon cerveau. Je m’associe à Manon, caressant, malaxant le corps de Roxane. À la sensation de ces mains d’homme, elle se tend. Les lanières, cette fois, la contraignent totalement. La panique revient. Manon, surprise, a cessé ses gestes. Je la remercie d’un mouvement de tête en lui faisant signe de s’écarter. Mes alarmes sont inutiles, car Manon est prête à me déchirer au moindre écart. Roxane lutte. Mes mains continuent à la pétrir violemment, loin des caresses initiales. Elle arrête de lutter. Elle sanglote derrière la boule, se relâche, soumise. J’approche alors mon sexe, dur et gonflé, du sien. À nouveau, la peur déferle en elle. Elle rue, s’agite immobilisée par les cordes. Je frappe mon sexe sur son pubis, simule un début de pénétration. L’ambiance est prenante dans cette pièce, la tension extrême.

Je me jette sur Roxane, la libère, la prends dans mes bras pour la consoler en lui murmurant :

— C’est fini. Tu as été extraordinaire. Tu es belle, tu es merveilleuse, c’est fini.

Manon me remplace pendant que j’achève de la détacher. Je m’éloigne, les laissant toutes les deux. J’ai besoin d’un câlin, d’un gros câlin de mon amour. Doron comprend mon besoin et m’accueille comme j’aime l’être.

— Tu m’expliques ?

— Une intuition ! Mais je crois que j’ai déconné !

— Ouais ! On peut le dire !

Nous sommes interrompus par Manon qui m’appelle en me faisant signe de venir. Je m’allonge auprès d’elles. Roxane abandonne les bras de son amoureuse pour se blottir contre moi. Je suis ému par cet élan.

— Usem, s’il te plait, fais-moi l’amour, doucement, tendrement, avec force.

L’expérience n’a rien à voir avec la précédente. C’est une amante passionnée qui partage avec moi cette communion. Nos complices continuent de regarder, sans comprendre l’histoire qui vient de se dérouler. Moi-même, je ne la connais pas.

Roxane se racontera, après, entre Manon et moi. À neuf ans, elle a été violée par un oncle. Elle l’avait oublié, refoulé. Il n’y avait que ce dégout des hommes, cette répulsion à les approcher. J’avais tout fait éclater avec mon jeu. En quelques mots, elle raconte cette abomination. Puis elle se tourne vers Manon :

— Cela ne change rien à l’amour que j’ai pour la plus belle fille de la Terre.

Je les laisse se retrouver. J’ai juste besoin des bras de Doron. Je suis pris de tremblements, effrayé de ce qui vient de se passer, de ce que j’ai osé faire. J’ai joué avec les démons. J’ai risqué de la faire dévorer. Je suis totalement, de façon irrécupérable, un irresponsable !

Le lendemain matin, après une nuit de cauchemars, Manon viendra me trouver, me dire simplement merci. Ses yeux contenaient tout ce que sa pudeur retenait. Merveilleuse Manon. Un peu plus tard, Roxane viendra se lover entre Doron et moi, surtout contre moi. Elle aussi, sans paroles, exprimera mille choses et un avenir enrichi d’une amitié immense.

Cela ne compensait pas ma culpabilité.

Là, je m’en veux !

Mon intuition avait bon dos ! Je ne comprends pas cette prise de risques sur une autre personne !

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