Chapitre 8 : Le chemin de l'ascension (partie 1)

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Zayn avait passé une nuit agitée avec des rêves peuplés de félins géants le coursant à travers l’école. Il se réveilla à l’aube et resta longtemps dans son lit broyant du noir et rejouant dans sa tête les évènements passés. Il avait déjà eu à faire face à l’adversité durant sa courte existence, à maintes reprises, mais jamais il n’avait connu une telle brutalité. La scène d’hier soir avait été d’une sauvagerie et bestialité telle, que Zayn n’avait eu d’autre réflexe, humain certes mais d’une faiblesse nouvelle, que de se terrer dans sa chambre.

Il s’était hâté de s’isoler, pour cacher au monde la laideur de sa condition. Ce n’était pas tragique, ce n’était qu’un drame de plus qui s’ajoutait à liste des probables drames que devait connaître cette société de doué. Mais du point de vue de Zayn, c’était une tragédie. Un jeune orphelin qui découvre un monde se présentant comme une utopie trompeuse, rattrapé par la villosité de ses rouages insidieux : “enfant bâtard” chuchotaient-ils.

Zayn était habité par une colère haineuse et aveugle. Seul le court échange avec le directeur l’avait empêché de faire marche arrière et de retourner à l’aéronef afin d’exiger qu’on le ramène. Il la voyait déjà, cette longue et fastidieuse lutte qu’il aura à mener pour prouver sa valeur. Mais en valait-elle la peine ? Quoi qu’il fasse, son physique juvénile figé dans le temps rappelait silencieusement ses origines obscures, celle d’un enfant non désiré issu d’une lignée de puissants doués. Qu’aurait-on à lui dire, si ce n’est qu’il était tout compte fait un indésirable ? Oui, il sentait l’étreinte cruelle et sadique de cette adversité vieille comme le monde qui, naturellement, s’attaquerait à ce qu’elle rejetterait profondément, le reflet de sa propre laideur.

Il resta une longue heure dans son lit, immobile, les traits du visage fermés. Ce n’est que lorsqu’il fut dégoûté de cet être pitoyable et recroquevillé qu’il était, qu’il se décida à se lever. Il s’approcha de la fenêtre et la vue de ce parc invraisemblable l'apaisa. Barbelle le matin avait des allures de palais paradisiaque et la beauté du paysage montagneux eut raison de sa colère. C’était à en croire qu’il s’était rongé les sangs pour rien, mais Zayn était un jeune adulte avec une âme d’enfant. Les belles et bonnes choses avaient toujours réussi à lui apporter la paix et parfois même le bonheur, ce bonheur dont les poètes torturés faisaient des odes.

Il contempla le parc une longue heure, s’adonnant à ses pensées. Allait-il abandonner le don ? C’était la question qui revenait incessamment. La douleur ne provenait pas de l’humiliation car humilié, il l’avait souvent été. La douleur prenait racine dans la mort de ce bonheur éphémère qu’avait été la découverte de terre magique, une simple joie en réalité destinée à s’évanouir et devenir un des nombreux spectres du passé. La joie est un plaisir terrestre, car oui, Zayn croyait au céleste bien que ses certitudes muaient vers un aspect plus complexe. La réponse à sa question languissante était évidente, il préférait prendre les devants et ne pas la laisser s’imposer à lui, car dans la contrainte elle pourrait se transformer en passion et les passions sont des crèves-coeurs. Il sera paladin, il servira, il aidera, il portera sur son dos le poids d'un avenir possiblement radieux et fera front à ceux qui diront le contraire.

Il s’approcha de son armoire à glace et la contempla avant de commencer à déballer ses valises. C’était une pièce imposante en bois massif avec des poignées ciselées en bronze, du chêne probablement, au vu des craquelures qui couraient tout le long. Le bureau et la table de chevet étaient de la même facture. Barbelle avait les moyens de faire vivre ses élèves dans un confort plus que correct. Il rangea soigneusement ses vêtements achetés à Paris Magique avec un regret insistant, mais aussi avec une détermination nouvelle qu’il devait à ses pérégrinations intérieures. Chaque plie qu’il effectuait, chaque cintre qu’il accrochait et chaque bien possédé qu’il disposait dans la chambre se voulait être une promesse à l’avenir. C’était désormais à Barbelle qu’il vivait et ça le serait jusqu’à ce qu’il en sorte le diplôme à la main.

Sa montre indiquait sept heures et demie, il avait tout juste le temps de s’habiller et de se préparer. Sa chambre ne comportait pas de toilettes, il en déduisit qu’il devait y en avoir sur le palier communes aux élèves. Il renonça à sa douche matinale et se parfuma en excès en se pinçant les lèvres. Zayn était prêt, il ne savait pas vraiment auprès de qui il devait se rapprocher pour savoir comment cette première journée allait se dérouler. Et c’est avec la boule au ventre, les cheveux douteusement coiffés, le parfum plein les vêtements qu’il tourna la poignée de la porte.

Zayn s’était à maintes reprises imaginé sa première journée à Barbelle, il s’était fait, pendant sa méditation matinale, metteur en scène et se posant comme le personnage principal d’un drame terrible. Mais à aucun moment il n’eut cru possible, que ce matin là, en ouvrant la porte de sa chambre, il trouverait assis en tailleur devant la porte, ses trois amis discutant entre eux à voix basse, la mine inquiète. Les larmes lui montèrent aux yeux aussitôt tintant les cloches de l’espoir, du renfort et de la sécurité. Il ouvrit la bouche à maintes reprises mais aucun son ne sortit.

  • Zayn ! On s’est fait un sang d’encre pour toi ! Nous sommes avec toi, quoi qu’il arrive ! Il faut que tu le saches ! S’exclama Elisabeth avant tout le monde.
  • Oui mon vieux ! Mathias nous a parlé de quitter l’école où je ne sais quoi ? hésita Martin soucieux.

Zayn tenta de les rassurer mais il ne put que s’agenouiller devant eux les larmes coulant enfin, telle une délivrance, une acceptation de sa réalité profonde, celle de la nécessité d’être entouré, un besoin qu’il avait ignoré par survie. Elisabeth le prit dans ses bras et Léon trancha :

  • On ne laissera personne te malmener, quoi que les autres penses, nous sommes là et nous ne partirons pas.

Zayn s’essuya les larmes et se dégagea délicatement de l’étreinte maternelle d’Elisabeth, ne pouvant résister à l’envie pressante de se confondre en excuse, maudissant la notura et le directeur de l’école, et se contenta de promettre de ne plus jamais fuir les autres, quel que soit la nature du mal qui le rongeait. Puis lentement, de manière imprécise, incertaine de ce que l’avenir lui réservait, toute la bande finit par s’échanger des sourires complices, telle une confession secrète, une promesse à une camaraderie infrangible.

Il sentait l’amour l’envahir, cette fragrance enivrante qui éveille les passions et ravive les esprits. Il ne se sentait plus diminué, faible, atrophié. Il se sentait fort, tel un lion prêt à soumettre l'adversité par le retentissement assourdissant de son rugissement. Le visage de Zayn affichait la détermination résignée de l’homme en duel, prêt à en découdre dans le sang et la sueur. Personne ne rompit le silence. Il se levèrent tout d’un coup, époussetèrent leurs vêtements et se dirigèrent vers les ascenseurs. Les rares élèves qui traînaient dans les couloirs s'écartaient en dissimulant une peur inexplicable face aux mines renfrognées du cortège de Zayn, le cortège d’un prétendant décidé à arracher par la force le titre qui lui revenait de droit, la couronne de la dignité.

Zayn entra accompagné de Léon, Elisabeth et Martin dans l’ascenseur. Il ne demanda pas où est-ce qu’ils allaient et lorsque Martin lui tendit un morceau de pain et de fromage, il l’engloutit comprenant que l’heure n’était pas aux repas en bonne et due forme. Ils quittèrent le bâtiment résidentiel et traversèrent le parc en allant vers l’ouest, passant les moultes fontaines sans même les regarder et après une vingtaine de minutes, ils arrivèrent au portail ouest aux portes en fer forgés hérissés de piques.

C’est à ce moment-là, enfin, que ce silence quasi religieux fut brisé, un silence grâce auquel le groupe se préparait à faire front aux regards inquisiteurs, aux mines suffisantes, aux railleries et autres bassesses de ce type car, si seul Zayn en était l’objet central, c’était tout le groupe par association qui devait supporter les affronts. Ils devenaient les amis du bâtard, les sans honneurs, les moins que rien. Si l’on faisait affront à l’un d’entre eux, alors on faisait affront à chacun d’entre eux.

  • Nous allons marcher jusqu’au chemin de l’ascension, préparez-vous à ce qui arrive et ne lâchez rien, déclara Léon avec une autorité qui ne lui était pas commune.

Il regarda chacun d’entre eux dans les yeux, et tous hochèrent de la tête, personne ne posa de question. Il coulait de source que peu importe la nature de l’ascension, ils l'accompliraient sans rechigner. Léon tourna les talons et entreprit le sentier ouest qui allait vers une partie des montagnes tout autour de l’école.

Le sentier serpentait en pente oblique vers ce qui devait être un vallée anciennement traversée par des courants d’eaux, à en croire la dépression accentuée que formaient le relief évasé de part et d’autre. Barbelle avait dû être construite à une époque ou certains cours d’eau coulaient encore autour, sur des lits qui leurs étaient propres. On percevait plusieurs petites montagnes de là où se situait Zayn, mais l’une d'entre elle se dressait majestueusement pour imposer aux marcheurs le poids de sa présence. C’était sans aucun doute là que se déroulerait l’ascension. Zayn et le groupe étaient à présent au cœur d’une forêt dense aux arbres centenaires, voilant le soleil encore timide qui entamait à peine sa course. De rares faisceaux lumineux perçaient avec grande difficulté les ramifications ombrageuses des branches couvrant leurs têtes comme le toit d’une maison. La végétation devenait de plus en plus sauvage, l’air sentait l’humidité et les pins, saturés d’odeurs de terre mouillée, accentuaient l’atmosphère oppressante de la forêt. Il marchèrent une demi-heure en silence, le feu de leur détermination farouche intact, jusqu’à atteindre une clairière au pied de la dite montagne où une cinquantaine d’élèves étaient amassés et déjà en sueurs. Zayn jubilait intérieurement car aucun signe d’effort n'apparaissait sur lui et son groupe, pas une seule goutte de transpiration.

Zayn parcourut la foule des yeux, le regard dur, imperturbable, et personne n’osa le soutenir bien que sa présence dérangeait puisque qu’on prenait méticuleusement soin de ne pas regarder dans sa direction. Oui, personne n’osa le fixer, personne sauf elle, la princesse elfe. Ce n’était pas un coup d'œil étouffé ou une simple oeillade mais un regard qui clamait sa différence. Zayn comprit d’emblé qu’elle ne le jugeait pas et qu’elle n’avait fichtrement rien à faire des commérages. C’était un regard qu’on lançait à un égal, une marque de respect. Puis au bout d’un instant, elle tourna la tête vers la montagne. Zayn ne put se soustraire à sa présence et à cette beauté féline qu’arborait son visage. Et curieusement, il se demanda pourquoi ses gardes du corps n'étaient pas présents, il se pouvait peut-être qu’il faisait la ronde dans la forêt entourant la montagne.

Les élèves arboraient tous des tenues légères, tout comme Zayn, qui s’était préparé à des exercices nécessitant une amplitude de mouvements typique aux activités physiquement intenses. L'ascension… Zayn commençait à cerner l’exercice que leur fera faire le professeur chargé de cette matinée : gravir la montagne pour atteindre le sommet. Il estimait la hauteur du pic à trois milles mètres, difficile pour un être humain normal de la gravir aisément, mais à portée de main pour des doués.

Curieusement Zayn ne redoutait pas l’espace d’un instant l'obligation d'utiliser le don pour accomplir sa tâche. Il avait compris lors de ses méditations de ce matin que s’il n’arrivait pas à lancer de sort, son corps lui se nourrissait du don. Il avait toujours été un tantinet plus fort que les enfants de trois ans son aîné, mais il comprenait avec plus de finitude qu’il n’était pas juste “plus fort” que la normale, il était puissant et son ressentiment ne le rendait que plus redoutable, tel un fauve tapis dans sa tanière, prêt à bondir sauvagement et renvoyer implacablement cette brutalité par laquelle on l’avait martyrisé.

Un jeune roux à la musculature saillante fixait Zayn de l’autre côté de la clairière. Son regard n’était pas mauvais, mais il n’était pas non plus amical. Il était de marbre, signe d’un intérêt ouvertement affiché puisqu’il ne baissait pas les yeux. Les personnes qui l’accompagnaient, elles, pouffaient en lui lançant des regards maladroitement dissimulés. Il en remarqua un parmi la bande, aux cheveux brun et longs qui tombaient jusqu’au pectoraux, qui se délectait sadiquement des rires de ses congénères, “à défaut de les appeler par un autre nom” se dit Zayn. Une bande d’hyènes qui jubilait de la faiblesse apparente de leur proie.

Si le reste des élèves lançaient quelques fois des regards en direction de Zayn, aucun d’entre eux n’en riait ou avait une attitude agressive. Mais le brun et le roux, eux, avaient des ondes particulièrement désagréables. Le brun aux cheveux longs s’abaissa, puis ramassa ce qui semblait être à cette distance des pierres, et avec une mine innocente commença à les envoyer au centre de la clairière en parlant haut et fort. Les intonations de sa voix se voulaient être désintéressées, mais lancé après lancé, les pierres se rapprochaient de l’extrémité où Zayn et son groupe se trouvaient.

Zayn était frappé de consternation. Tous les élèves remarquaient cet acte délibéré. Personne ne tourna la tête vers Zayn, mais tout le monde suivait des yeux les pierres en se demandant sûrement s’il oserait les envoyer directement sur le “bâtard”. Chose pensée fut chose faite, se dit Zayn. Une pierre finit par frôler ses chaussures puis une autre passa derrière lui. Le brun continuait à lancer ses pierres en discutant, mais faisait mine de ne pas se rendre compte d’où est-ce qui les envoyait, une simple “erreur” dirait-t-il. Zayn, fou de rage, se baissa pour ramasser une pierre à son tour, mais Elisabeth le bouscula et lui arracha des mains le projectile. Elle lança le caillou gros comme une prune haut dans le ciel. Un silence de plomb tomba sur l’assemblée. Tout le monde semblait contempler religieusement la pierre dans le ciel et l’étonnement fut général quand la pierre s’immobilisa longuement dans les airs. Elisabeth s’avança, puis abaissa le bras violemment. La pierre à dix mètres de haut se mit en mouvement à une vitesse ahurissante vers l’arbre derrière le jeune homme aux cheveux longs et lui frôla la tête en sifflant avec force pour finir par s’écraser dans le tronc, faisant exploser le bois en envoyant des éclats dans tous les sens. L’arbre se pencha sur la gauche et s’écroula sourdement.

Le jeune homme trébucha en voulant s’éloigner de l’arbre à terre et tous leurs groupes encore stupéfaits de ce qu’avait fait Elisabeth regardait les yeux grands ouverts le tronc d’arbre sans bouger. Le roux à la mâchoire carrée souriait en fixant Elisabeth, ignorant ses camarades et la carcasse du pin.

Des chuchotements s'élevaient de part et d’autre, mais personne ne haussait la voix. Elisabeth se tourna vers Zayn et cracha furieusement :

  • La violence à la violence, le coup au coup. C’est par le mal qu’on combat le mal. Je ne les laisserai pas nous manquer de respect, j’écraserai ces petits merdeux. Qu’ils viennent s’ils osent, finit-elle en postillonnant dangereusement, prise par un accès de rage incontrôlable.

Léon posa sa main sur son épaule délicatement :

  • Ça ne fera que les enrager, dit-il un peu mal à l’aise. Ignorons-les pour l’instant, je pense que tu leur a fait une sacrée frayeur. Ils ne seront pas prêts de recommencer.

Martin qui ne manifestait pas une once de son habituelle jovialité, regardait anxieusement le tronc d’arbre écroulé.

  • Je ne sais pas si on a bien fait d’abattre un arbre tout près de leurs têtes, fit-il en se pinçant les lèvres. Les hostilités sont officiellement ouvertes maintenant…

Les élèves tournèrent tous la tête vers le sentier menant vers le pic de la montagne et Zayn chercha des yeux longtemps l’objet de leur curiosité. Au bout d’un instant, il vit un homme dans la quarantaine marchant vers eux d’un air affairé, les cheveux attachés en chignon, vêtu de ce qui semblait être une armure en cuir marron et un marteau attaché à la ceinture. Ce n’était pas un marteau de bricolage mais une arme à la tête aussi grosse qu’un tiroir et un manche en métal doré. L’objet semblait peser une tonne mais l’homme marchait sans gêne. Il finit sa descente et s’arrêta au milieu de la clairière. Sans un mot, il commença à faire le tour des élèves disposés en cercle tout en les regardant un à un dans les yeux, les jaugeant sans discrétion en émettant des petits sons dédaigneux de temps en temps. Vint de Zayn et son regard s'attarda sur lui et sa bande, puis il détourna les yeux agacés, comme si on lui avait présenté une œuvre d’art amochée par le transport d’un musée à un autre. Zayn eut du mal à interpréter cette réaction emportée, mais cela valait mieux qu’il regarde ailleurs, se dit-il.

Au bout de quelques instants, alors qu’il s’approchait du groupe du roux pour leur faire face, il finit par remarquer avec intérêt l'arbre au sol. Les élèves dévoraient des yeux celui qui semblait être leur professeur et se demandaient tous, très certainement, s’il allait comprendre la raison pour laquelle l’arbre avait été abattu. Il s’avança nonchalamment vers le brun aux cheveux longs et lui demanda abruptement son nom.

  • Je m’appelle Aubin monsieur. Aubin Bristol. Cette jeune fille derrière vous nous a attaqué moi et mes…
  • Je me fiche de savoir ce qui s’est passé ! Le coupa-t-il. Sachez que si je vous surprends à vous battre je m’assurerai personnellement que vous soyez renvoyés de Barbelle. Vous avez compris jeune homme ?

Le sort semblait se retourner vers la brute.

  • Mais monsieur vous ne comprenez pas… tenta-t-il en begayant. Ne voyez-vous pas que …

Une taloche aussi forte que bruyante parti envoyant Aubin à terre. L’assistance retenu son souffle, Zayn n’en revenait pas ses yeux. Le jeune homme ne comprenait pas ce qui venait de se produire, un instant après, celui-ci fou de rage se releva et hurla plein les poumons :

  • COMMENT OSEZ-VOUS ? VOUS NE SAVEZ PAS QUI EST MON PÈRE ? IL EST LE…

Une autre taloche partit aussitôt. Cette fois-ci il avait la lèvre fendu et les cheveux pleins de terre.

  • VOUS ALLEZ LE REGRETTEZ ESPÈCE DE VIEUX…

Une troisième taloche fendit l’air le faisant tomber à la renverse. Le jeune homme se releva les larmes aux yeux et trébucha en se relevant. Il regarda l’assemblée complètement hébétée, prenant conscience difficilement du ridicule de sa condition. Il essuya son menton en sang et la bave qui pendait de sa bouche ouverte et s'enfuit en courant vers Barbelle à moitié sonné, trébuchant de nouveau au centre de la clairière et boitant tout en sanglotant. Maintenant qu’il y repensait , la voix du professeur lui rappelait très fortement celle de l’homme les ayant accueillis le premier jour avant de se diriger vers Barbelle. Il se dirigea lentement vers le centre de la clairière et changea de sujet, comme si cet épisode n’était qu’une appartée sans réelle importance. Il le savait intérieurement, il avait marqué les esprits et les élèves le craignaient maintenant.

  • Il y’a une chose que je déteste plus que les bagarres… Les brutes !

Il cracha par terre sans ménagement puis dégaina son marteau et le posa la tête à terre pour prendre appui sur le manche. Il reprit d’une voix ferme :

  • Sachez que je n’ai pas besoin d’être présent physiquement pour savoir ce que vous faites, bandes d’asticots immatures, vous êtes aussi vénéneux les uns que les autres! Champignons incomestibles ! Il se tut un instant laissant l’effet de sa sombre tirade infuser les esprits apeurés de ses élèves, puis reprit. Votre but, aujourd’hui, est de vous constituer en groupe quatre à huit pour entreprendre l’ascension. Un matin sur deux, nous aurons rendez-vous ici à neuf heures pour que vous entamiez l’ascension. Chaque jour, elle sera plus difficile que la veille… Vous comprendrez mieux mercredi matin. Votre examen de fin de semestre consistera en partie à achever l’ascension, je courrai derrière vous avec d’autres examinateurs pour vous évaluer et observer comment vous dépasserez les différents obstacles qui seront placés sur votre route. D’autres professeurs seront là le jour de l’ascension ainsi que des examinateurs mis à disposition par l’Ordre. Bien entendu, si un de vous échoue, tout le groupe échoue. Une fois au sommet, vous combattrez en prenant un adversaire au sein même de votre groupe. Le jour de l’épreuve, votre adversaire sera un membre d’un groupe différent, naturellement. Tâchez de ne pas vous faire de fleur ou vous le regretterez le jour décisif.

Les élèves s'attendaient tous à ces explications, semblait-il, car maintenant que Zayn avait entendu le professeur, il remarquait que les élèves s’étaient déjà formés en groupes bien avant son arrivée. Zayn comprenait que cette épreuve devait forcément être une tradition. Gravir une montagne, n’importe quelle personne en forme peut le faire, mais gravir une montagne avec des obstacles conçus pour des doués, c’était une autre paire de manches.

Leon prit la parole, Martin et Elisabeth l’écoutait sans broncher :

  • Notre but n’est pas d’arriver premier mais d’arriver en un seul morceau en ménageant nos forces. Aujourd’hui il n’y a pas d’obstacles, nous allons simplement prendre connaissance du terrain.

Zayn remarquait que Léon qui était généralement si calme remplissait le rôle de chef parfaitement. Il ne prenait aucun plaisir à le faire, il le faisait par nécessité et les autres lui faisaient confiance. Zayn se sentait rassuré de le voir prendre les devants.

  • Le but est de protéger Zayn, il est, de nous quatre, celui qui ne maîtrise pas encore le don, enchaîna-t-il en fixant Zayn.

Celui-ci ne chercha même pas à le contredire, il se contenta de baisser la tête et de fixer ses chaussures.

  • Préparez-vous ! J’assure les arrières, Martin les côtés, Zayn au centre et Elisabeth tu ouvres la voie. Est-ce que vous avez des questions ?

Tout le monde acquiesça, aucune question ne leur venait en tête. Ils se tournèrent vers le début du sentier, Zayn, hagard, ressentait une boule d’angoisse au niveau du ventre, il ne savait pas à quoi s’attendre. Il avait déjà couru de longues distances mais jamais il n’avait eu à courir en pente haute. Il jette un coup d'œil aux différents groupes, qui semblaient être maintenant beaucoup plus distincts les uns des autres.

Le professeur fit le tour en inspectant d’un œil sévère les groupes, s’assurant du nombre de coureur dans chacuns d’entre eux. Les groupes de quatres étaient une minorité, la majorité des groupes comportaient entre six et huit personnes. Zayn se demanda alors avec qui courait la princesse elfe, il tourna la tête discrètement vers elle. Elle était seule, une épée au dos avec un fourreau noir de jais et le regard plongé dans les cieux, un air mélancolique ponctuait son visage angélique. La chaleur commençait à se faire ressentir, mais dans son armure de cuir, elle ne semblait pas s’en soucier. Zayn détourna les yeux et se demanda si les autres groupes oseraient la gêner pendant l’ascension. Sûrement pas, se dit-il, ils craignaient sûrement sa puissance et les possibles conséquences d’un tel acte.

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