Le voile s'est levé, laissant place à un décor plus harmonieux
San regarde la scène qui se joue devant lui, perplexe. Il semble se poser tout un tas de questions lui aussi. Tandis que je suis incapable de bouger, je sens la poigne ferme de Park. Il ne semble pas décider à me lâcher. Le tiraillement que je ressens depuis un bon moment déjà dans mon bras s'accroît. Je retiens mes larmes pour ne pas contrarié le jeune homme dont les intentions sont louables à mes yeux. Je m'apperçois enfin que Nabi s'est ravancé discrétement. Il regarde mon poignet intensément, ne prêtant aucune attention à mon agent qui semble figé. Finalement, le membre le plus âgé du groupe détâche doucement l'emprise de son ami en lui murmurant quelque chose à l'oreille. Serait-il possible qu'il est vu ma blessure ? Une fois libérée, je me frotte le poignet tout en me demandant ce que tout cela signifie. L'agent du groupe Run arrive précipitemment. Il nous regarde à tour de rôle puis s'exclame comme-ci un miracle venait de se produire que le hasard fait bien les choses. Je ne comprend rien de ce qu'il raconte. Les garçons non plus ne semblent pas saisir le sens caché de cette phrase.
- Suivez-moi, jeune gens. Votre rencontre ne peut être qu'un signe envoyé par le ciel. Je sens que tout va bien se passer à présent.
Il ne nous laisse pas le temps d'ajouter quoique ce soit et nous pousse vers la salle de réunion. Lorsque nous arrivons, les garçons s'installent avec aisance, chacun à une place qui semble prédéterminée. Je me sens tout d'à coup nerveuse. J'ai la sensation d'être la seule qui n'est pas au courant de ce qui est entrain de se passer. San s'assoit à côté de moi, sans détâcher son regard de mes voisins. J'ai l'impression qu'il serait capable de les faire disparaître en un simple souffle s'il le voulait. Je vois ses mains se crisper sur son jean, comme-ci il s'inquiétait à cause de quelque chose. Comme bien souvent, c'est Kim qui ouvre la conversation sans attendre l'aval de l'agent. Je me demande pourquoi ils ont le même agent que le groupe avec qui je suis censée travailler. Une réponse me vient à l'esprit mais elle ne me paraît pas réaliste. Ce serait bien trop de hasards qui s'enchaîneraient à une vitesse folle pour être censé.
- Donc... Tu es la jeune femme que nous devions rencontré un plus tôt et qui refuse de collaborer avec nous.
- Attends, tu veux dire que notre voisine est Eunnabi ? Ou que Eunnabi est notre voisine. Incroayble !
- Vous vous connaissez donc vraiment, intervient l'agent.
- Apparement, oui. Mais... Hanna, voici les membres du groupe Run. Je vais te faire une rapide prestation pour que tu puisses savoir qui est qui.
- Je sais.
- Pardon ?
- Hanna est intelligente. Elle a des moyens mémotechniques pour nous repérer même si au début ce n'était pas facile, intervient Kim.
- Je suis le seul à ne pas comprendre ce qui est entrain de se dire ?
- Vous voulez dire que vous êtes au courant ?
- Bien évidemment.
- Hanna ?
- Les circonstances ont fait que j'ai été obligé de leur dire pour mon problème...
- Je vois...
- Quel problème ?
- Hanna ne voit pas les visages. C'est la raison pour laquelle nous ne voulions pas participer à ce projet... Si cela se sait, cela risque d'être compliqué pour elle. De plus, elle n'aime pas forcément être en contact avec de nouvelles personnes. C'est pour cela que son identité doit rester le plus longtemps possible secret si nous travaillons avec vous. Tout cela a été décidé sans notre accord, c'est pourquoi je vous le dis à présent pour que vous puissiez prendre les mesures en tenant compte de ses éléments.
- Si je comprends bien, vous voulez que l'on renonce au projet ?, questionne Nabi.
- Ce serait effectivement mieux pour elle.
- Je suis navré mais ce ne sera pas possible, intervient Park.
- Park, tu recommences, lance Yon.
- Je suis d'accord avec lui, reprend Chin. De plus, nous la connaissons un peu. Je ne pense pas qu'elle soit mal à l'aise avec nous ?
- Ce n'est pas que par rapport à vous, comme je vous l'ai expliqué...
- C'est bon, San. Je ne suis pas en sucre. J'ai juste une question, si vous me le permettez : vous êtes extrêmement populaire, pourquoi choisir de travailler avec moi ?
- Parlons d'affinité artistique, répond Kim.
- D'affinité artistique ? Bien. Personne ne sait qui est Eunnabi et je n'aime pas trop être exposée...
- Bien, si tu es d'accord pour travailler avec nous. On t'aidera. Pas vrai les garçons ?, me coupe Jung Wan. Aucun de nous te laissera tomber. Yon n'aime pas la foule non plus, peut-être qu'il pourra t'aider.
- C'est une question ou une affirmation ?
- Comment va ton bras ? , intervient Nabi qui était étonnement silencieux jusqu'ici.
- Son bras ? , demande San tout en me jetant un oeil interrogateur.
- Oh! je suis tombée dans le bus.
- Tu n'aurais pas pu le dire au lieu de garder tout pour toi ! Allons à l'hôpital, nous continuerons cette discussion plus tard.
- Je suis un meilleur ami que toi, enchaîne Nabi. Je l'ai remarqué sans qu'elle n'ait besoin de me le dire. En plus d'être beau, je suis observateur et attentionné.
Ses camarades le regarde, interloqué. San semble perturbé par les propos de mon voisin. Son agent rit nerveusement et tente une diversion. L'ambiance s'est refroidie d'un seul coup. Nabi, d'ordinaire si patient et si gentil, semble avoir changé de visage. Ses traits enfantins se sont durcissent, montrant une expression qui m'etais encore inconnue jusqu'à présent. Elle ne m'effraie pas, étrangement. Elle a quelque chose qui m’évoque la protection. Le reste du groupe paraît lui aussi découvrir cette facette de sa personnalité. Incrédule, je le regarde se lever brusquement et disparaître de la pièce. Je ne parviens pas à dire quoique ce soit. Je me contente de regarder les garçons à l'autre bout de la table.
- Et bien, c'est une première : Nabi qui s'énerve, intervient Jung Wan. Tu devrais aller le voir, Kim.
- Oui. Nous reprendrons cette discussion plus tard. Hanna, tu devrais aller voir un médecin.
- Tu diras à Nabi que je suis désolée.
- Ce n'est pas la peine, réplique Park. On est tous tendus ce moment.
- Peut-être voudrais-voudrais-tu que je t'accompagne ? Tu seras sans doute plus rassurée.
San me regarde, interrogateur. Je suis particulièrement touchée par la proposition de Chin. Il est tellement adorable de me le demander. Il est vrai que c'est difficile pour moi de me retrouver au milieu de tout ces masques effrayants. Le fait d'avoir quelqu'un que je reconnais réellement, dont je vois le sourire chaleureux, ne peut être que rassurant. Je n'aimais déjà pas beaucoup ces lieux dans lesquels une odeur aseptisée, associée à la souffrance, mais lorsque je me suis réveillée après l'incident, le sentiment d'angoisse que je ressentais à chaque fois que je devais m'y rendre s'est accru.
Je me souviens encore de cette douleur qui transperçait mes pupilles lorsque j'ai ouvert à nouveau les yeux. La lumière blanche émanant des néons de la chambre dans laquelle je me trouvais depuis plusieurs jours m'étais difficilement supportable. Le bruit des machines prenant ma tension et d'autres informations utiles aux médecins raisonnait fortement dans mes oreilles. Les murs blancs, vide de toute décoration pouvant amener du réconfort, semblaient former des vagues tout autour de moi. J'étais totalement désorientée. Je n'aurai su dire quel jour nous étions et j'étais bien incapable de donner une heure approximative. Tout me paraissait iréel, comme si j'étais encore plongée dans un profond sommeil. À part le son discontinu des machines, rien ne m'indiquait que j'étais parfaitement consciente. J'avais beau regarder tout autour de moi, je ne reconnaissais rien. Ni la pièce dans laquelle je me trouvais, ni la vue extérieure que je parvenais à distinguer depuis mon lit. Les bâtiments qui m'entouraientm'entourent me semblaient nouveaux, comme si quelqu'un les avaient construits durant mon somme. Même le bout de ciel que je voyais me semblait surgir de nulle part. Je ne parvenais pas non plus à me souvenir des événements qui m'avaient conduit ici. Mon cerveau semblait totalement déconnecté de ce monde.
Lorsqu'enfin une infirmière entra dans la chambre avec un plateau à roulette, je me sentie soulagée. Je n'étais pas seule, abandonnée de tous dans cet espace inconnu. Elle allait pouvoir me donner des détails sur les circonstances de mon arrivée ici. Mais mon apaisement ne fut que de courte durée. Je ne vis qu'un corps portant une blouse blanche franchir la porte. La femme n'avait pas disi visage. Ses yeux, sa bouche et même ses joues étaient recouverts d'un épais masque blanc, dénoué de toute expression. Plus elle s'approchait de moi, plus son masque me semblait terrifiant. J'étais prise dans un tourbillon de panique, incapable de me contrôler. Que m'arrivait-il ? Comment m'étais-je retrouvée ici ? Pourquoi cette femme n'avait-elle pas de visage ? Qu'est-ce qu'on m'avait fait ? Je me mis à hurler, à gesticuler dans tous les sens. Je lâchais des bouts de phrases sans aucune suite vraisemblable. J'étais incapable de me raisonner. La dame tentait de me calmer, tantôt avec des mots rassurants tantôt avec des paroles plus fermes mais rien ne parvenait jusqu'à mes oreilles. Je n'entendais que le son affreux des machines autour de moi qui se faisaient de plus en plus insistants. D'autres personnes en blouses blanches, sans visages, entrérent dans la chambre provocant en moi un volcan de terreur. Je me débattais dans le vide tellement fort que j'en arracha la perfusion. Du sang commençacomme ça à gicler de mon bras, puis un des hommes en blouse blanche pointa une piqûre dans ma hanche. L'instant d'après, j'étais à nouveau dans les vapes.
En repensant à ces moments difficiles, je me sens encore plus nerveuse à l'idée de retourner l'hôpital. J'aimerais dire à San qu'un peu de pommade suffira mais aucun son ne sort de ma bouche. Il est toujours debout devant sa table, son corps tout entier tourné vers le groupe. Il semble plus tendu que jamais. Je vois son poing droit posé fermement sur la table tandis que l'autre main tremble légèrement. Je me sens désolée de lui faire vivre ces moments compliqués. Il doit être réellement fatigué de s'occuper de quelqu'un comme moi. Je me demande si parfois, il n'en arrive pas à me détester. Je suis difficile à gérer si je n' en ai pas l'air. Avec mes problèmes d'angoisses au quotidien, le fait que je veuille conserver mon identité secrète, ne pas faire de séance de dédicaces... San doit vraiment travailler dur. De plus, il doit supporter les remontrances du directeur de la maison d'édition. Je voudrais lui épargner toutes ses difficultés mais je ne suis pas certaine d'y parvenir. Malgré tout, je vais devoir me dévoiler au monde. Et si je ne plaisais pas aux gens ? S'ils me trouvaient insupportable ou pire, pitoyable. Je ne sais pas du tout comment gérer tout cela. Tout comme je ne sais pas comment je vais pouvoir affronter à nouveau cet endroit à l'odeur si singulière. Peut-être que je devrais simplement fuir ? Non. Je ne vais pas passer ma vie à fuir. Je dois regarder la réalité en face et composer avec ses bons et ses mauvais côtés. C'est comme cela que tout le monde fait.
-Trés bien. Si vous pensez que votre présence lui sera utile...
- Je viens aussi, intervient Yon. Il faudra qu'on se déguise pour ne pas être reconnu et éviter les problèmes.
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