Sélection
POV: Ryu
Nous sommes toujours là.
Debout, figés dans cette salle glaciale, comme si le temps s’était suspendu.
Personne ne bouge. Personne ne parle.
Il n’y a que ce silence… lourd, oppressant, presque étouffant.
Il est là, au centre.
Cet homme, en uniforme sombre. Droit. Impassible.
Il domine la pièce rien que par sa présence.
Ce type… il a un charisme qui t’écrase, sans jamais hausser le ton.
Ses cheveux noirs, légèrement en bataille, lui donnent un air presque détendu… Peut-être un masque ?
Mais dans son regard — des yeux gris clairs, tranchants comme l’acier — y’a rien de doux.
Juste une précision froide.
Comme un rapace qui analyse, qui juge, qui tranche sans hésiter.
Son costume noir est impeccable. Rien ne dépasse.
On dirait qu’il sort d’un magazine, mais il en impose trop pour qu’on ose seulement penser à ça.
Il bouge à peine.
Quand il parle, sa voix est calme, posée… mais chaque mot te transperce.
Dans cette salle métallique, chaque syllabe devient une claque.
Et cette voix… elle résonne.
C’est lui. Il prend la parole.
— J’ai beaucoup parlé sans m’être présenté.
Il balaye la salle du regard.
— Je suis Yuuto Takeda.
Il nous fixe, un à un, comme s’il scannait nos âmes.
— Je suis le représentant officiel de cette promotion. Celui chargé de vous évaluer. De vous guider… ou de vous écarter.
Silence.
Pesant. Presque sacré.
Il laisse le temps suspendu planer encore un peu avant de reprendre.
— Comme je l’ai dit, vous avez été choisis pour une raison bien précise. Parce que vous représentez ce que ce pays espère… ou ce qu’il craint.
Il nous regarda longuement puis poursuivit:
— Bienvenue à l’Awakened Japan’s Academy. L’unique établissement dédié à la formation des “Gifted”. Ceux capables de défendre cette nation… au prix de tout !
La tension monte d’un cran.
Certains élèves échangent des regards. D’autres détournent les yeux.
Moi, je sens mes poings se serrer sans m’en rendre compte.
— Mais soyons clairs.
Sa voix devient plus froide.
— Vous ne serez pas tous sélectionnés. Cette académie ne garde que ceux capables de survivre. De s’adapter. De penser vite et de frapper juste. Les autres… seront éliminés dès aujourd’hui.
Éliminés ?
Il a dit ça sans trembler.
Pas exclus. Pas renvoyés.
Éliminés. Dans quel sens ?
Je me retourne vers les autres, espérant avoir mal compris…
Mais non. Tués il a voulu dire!
La panique contenue sur leurs visages me confirme que j’ai bien entendu.
Et là, sa voix résonne de nouveau :
— Un test va être effectué. Maintenant. Là-bas.
Il désigne un couloir derrière lui. Sombre. Menaçant.
— Je ne dirai rien de plus. Ceux qui reculent n’ont rien à faire ici.
Silence.
Puis les lumières au sol s’allument lentement, traçant un chemin jusqu’au fond du couloir.
Les premiers élèves s’avancent.
À contre-cœur.
Leurs pas sont lents, hésitants. Comme s’ils étaient tirés malgré eux.
Moi, je reste figé.
Mon cœur cogne. Ma respiration s’emballe.
J’ai chaud. J’ai froid. Mes jambes sont en coton.
C’est quoi ce délire ?
Pourquoi maintenant ? Pourquoi sans explication ?
J’ai rien demandé, et je dois encore prouver quelque chose ?
C’est quoi cette “sélection” ? Une mise à mort déguisée ?
Et ce mec… Takeda… il agit comme si tout ça était banal.
Autour de moi, les élèves avancent. Certains sans réfléchir. D’autres parce qu’ils refusent de rester en arrière.
Et moi ?
Je reste là. Paralysé.
Je déteste ça.
Ce vide. Ce flou. Ce moment où t’as aucune prise sur ce qui va arriver.
Mais ouais… j’ai peur.
Et je crois qu’on avait tous peur, ce jour-là.
Les pas résonnent sur le sol métallique.
Je finis par bouger. Mes jambes avancent toutes seules, sans que je le décide vraiment.
On arrive dans une nouvelle salle.
Un dôme. Froid. Immense. Silencieux.
Le plafond disparaît dans les hauteurs. L’écho de nos pas est le seul son qui nous accompagne.
Et devant nous…
Cent portes.
Numérotées de 1 à 100.
Parfaitement alignées. Identiques.
Pas un symbole. Pas une indication. Rien.
Pourquoi cent ?
Pourquoi toutes pareilles ?
C’est un piège ? Un jeu ? Un test ?
Le silence est de retour. Plus lourd que jamais.
Puis Takeda revient.
Il tient une tablette. Derrière lui, deux agents l’accompagnent. Un homme et une femme, en uniforme sombre.
Leurs lunettes à verres teintés leur donnent un air inhumain.
Takeda se poste devant nous. Sa voix fend l’air, glaciale :
— Vous allez maintenant passer la sélection. Devant vous : cent portes. Je suppose que vous les avez remarquées.
— Chacune vous mènera à un test… aléatoire. Les portes se referment sur deux candidats à la fois. Les binômes sont creer par vous et seulement vius.
Un murmure de panique se propage.
— Vous aurez un temps limité pour faire votre choix cincernant la porte. Ceux qui resteront en arrière seront disqualifiés. Définitivement.
Il se tait.
Et là, une vérité brutale me traverse.
Nous sommes plus de trois cents ici.
Et il n’y a que cent portes. Deux par porte.
Deux cents candidats maximum.
Cent seront laissés derrière.
Volontairement. Froidement.
Comme un tri.
Les deux agents s’avancent. Ils commencent à distribuer des badges.
Quand vient mon tour, je baisse les yeux.
144.
Aucune explication. Juste ce chiffre froid, imprimé sur du métal.
Une fois tous les badges distribués, les agents rejoignent Takeda.
Puis une voix mécanique s’élève dans le dôme.
Automatique. Inhumaine.
— Vous avez deux minutes pour choisir une porte. Une fois passé le seuil, il est impossible de revenir.
Deux minutes ?
Sans connaître le test ? Sans savoir avec qui ?
Sérieux ?
Un compte à rebours rouge s’affiche au plafond.
01:59
01:58
01:57…
Certains foncent. Comme s’ils fuyaient.
Un élève se jette vers la porte 32. Disparaît sans un mot.
D’autres suivent.
Moi, je reste.
Je regarde. J’analyse. Je panique.
Mon regard s’arrête sur la porte 67.
Pourquoi elle ? J’en sais rien.
C’est comme un appel.
Je m’en approche. Les mains tremblantes.
00:43
Les autres courent. Sautent sur les poignées.
00:15
00:14
Je pose la main sur la poignée de la 67.
Je ferme les yeux.
Parce que si je réfléchis… je vais reculer.
00:03
00:02
Avant d’entrer, je me retourne.
Derrière moi, c’est le chaos.
Des cris. Des suppliques. Des élèves qui courent, qui tombent, qui frappent contre les murs.
Des visages terrifiés.
Je les regarde. Juste un instant.
Puis j’ouvre la porte.
Et j’entre.
CLANG.
Toutes les portes se referment.
Un bruit de fin du monde.
Le sol tremble.
Puis… le noir complet.
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