Chapitre VIII

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Le soleil levant diffusait sa douce lumière ambrée dans la chambre lorsque Chris se réveilla. La nuit lui avait été agréable et son sommeil, réparateur. Il devait être aux alentours de 6h30. Un coq chantait au loin.

Dans la cour, Löghan s’affairait déjà à couper du bois, tandis que Löinda étendait du linge fraîchement lavé. Une délicieuse odeur de pain chaud montait de la cuisine.

Chris prit quelques secondes pour s’étirer au saut du lit, puis enfila ses vêtements.

La salle de l’auberge était silencieuse de si bon matin. Dans la lumière du jour naissant, Chris remarqua des couleurs et des dessins sur les murs et le mobilier, qu’il n’avait pas vus la veille. Une petite file de chalands s’était formée devant le comptoir, et Elöhan leur vendait du pain fraîchement sorti du four.

— Bien le bonjour, sire Chris. La nuit vous a était agréable ? demanda Löghan en lui tendant la main.

— Parfaite ! répondit Chris, en sentant à nouveau ses os craquer sous sa poigne musclée, cela faisait longtemps que je n’avais pas aussi bien dormi.

— Ravi de l’entendre ! Je vous apporte votre petit déjeuner ?

— Je ne suis pas sûr d’avoir suffisamment d’argent, malheureusement… dit Chris en fouillant dans sa bourse.

— Vous n’allez pas reprendre la route le ventre vide, enfin !

Löghan fit signe à sa femme d’apporter quelque chose.

— Je ne veux pas abuser de votre gentillesse. J’ai ça, est-ce que ça suffit ?

Chris sortit les deux pierres jaunes de sa bourse et Löghan éclata de rire en voyant l’air sérieux sur son visage.

— Pour ces deux diamants jaunes ? Je vous laisse toute mon auberge, ainsi que ma femme et mon fils ah ah ah. , il éclata d’un rire franc, ce sont là des pierres précieuses plutôt rare de nos jours, d’ailleurs ça faisait longtemps que j’en avais pas vu. J’étais persuadé que les derniers avaient été excavé il y a des années, à la fermeture de la mine. Les autres sont probablement dans les coffres du trésor de Sylandar.

Il grinça des dents.

— Je suis désolé, je savais pas…

— Si vous voulez, le gobelin aux joyaux vous en donnera un bon prix. Son échoppe est juste de l’autre côté de la rue. N’en acceptez pas moins de 20 pièces d’or chacun par contre, dit-il en indiquant la boutique par la fenêtre.

Chris le remercia de la tête et quitta l’auberge en direction du magasin.

Lorsqu’il passa la porte, une clochette tinta et presque aussitôt, un petit être semblable à ceux qu’il avait remarqué en arrivant en ville le jour précédent, habillé d’une sorte de costume queue de pie noir et blanc, vint à sa rencontre et le salua.

— Bien, bonjour voyageur. Que puis-je pour vous ? grinça la créature à travers ses dents pointues.

— Bonjour. Je souhaite vendre ces deux diamants jaunes.

Les yeux du gobelin s’illuminèrent et il se jeta sur les pierres pour les examiner.

— Jolie, jolie, dit-il en sortant une petite loupe de sa poche, bon prix, je peux donner.

— Combien ? demanda Chris, peu confiant.

— Cinq ors chacun !

Le gobelin releva la tête pour le dévisager de ses petits yeux noirs.

— Mon ami Löghan dit qu’ils en valent au minimum 20, chacun, répondit Chris, agacé de devoir marchander.

— Lui rien connaître, lui aubergiste stupide, 5 être bon prix.

— j’en veux 18 ! lança Chris en haussant le ton.

— Je donner 8 ! Pas un de plus !

La créature croisa les bras sur son torse comme un enfant capricieux.

— Moi qui pensait être au bon endroit… je trouverais un véritable connaisseur qui m’en donnera un bon prix.

En se penchant en avant pour récupérer les pierres précieuses de la main du gobelin, la clé glissa hors de sa chemise, juste sous son nez.

— Où vous avoir trouvé clé ? dit-il les yeux écarquillés, comme hypnotisé.

— Cela ne vous regarde pas !

Chris la remit précipitamment sous ses vêtements, contre sa poitrine.

— Puissant talisman aux pouvoirs phénoménaux… lui mener vous vers grandes menaces… répondit la créature, les yeux perdus dans le vide.

— Je vous laisse les deux diamants pour 30 pièces d’or !

Chris tapa du poing sur le comptoir, espérant détourner l’attention de la créature.

Le gobelin secoua la tête comme pour reprendre ses esprits.

— Conclu ! lança-t-il en arborant un sourire carnassier sur ce qui lui servait de visage.

Il attrapa la bourse et y déposa trois rouleaux de pièce d’or ficelés par de la corde de jute. Sans prendre le temps de recompter, ni même de saluer le marchand, Chris quitta sa boutique. Pendant un instant, il avait à nouveau eu cette sensation de devoir se hâter. Mais tout en traversant la rue en direction de l’auberge, la perspective d’un délicieux petit déjeuner le calma, si bien qu’il ne remarqua pas que la clé était chaude sur sa poitrine.

— Alors l’ami, combien vous a donné le gobelin ? demanda Löghan avec un large sourire.

— 30 pièces d’or !

— Eh bien, voilà de quoi vous offrir un millier de nos délicieux petit déjeuner !

Löghan attrapa une assiette posée derrière le bar et la déposa devant Chris.

Il y avait deux tartines beurrées, ainsi que des fruits frais en morceaux, et quelque chose de semblable à du chocolat en barre. Löghan apporta une énorme tasse de thé fumant qui dégageait un doux parfum, puis il déposa deux pots de ce qui ressemblait à de la confiture.

S’apprêtant à en savourer une bouchée, Chris s’interrompit lorsque la porte de l’auberge frappa contre le mur en s’ouvrant violemment.

Deux hommes aux habits sombre entrèrent l’épée à la main.

— Bien le bonjour, tavernier, lança l’un d’eux avec un rictus satisfait, mon seigneur m’envoie récupérer ta dette.

Löghan était visiblement mal à l’aise. De la main gauche, il poussa Elöhan vers la porte de la cuisine.

— Mes sires... vous arrivez à l’improviste… dit-il nerveusement, je n’ai… pas encore tout à fait... réuni la somme…

— Mon maître estime avoir était plus que patient avec toi, tavernier, grinça l’homme qui continuait de s’avancer vers Löghan.

Il pointa son épée en avant, bloquant Löghan dos au mur.

— Nous avons l’ordre de récupérer ta dette, par n’importe quel moyen, crachat le malfrat avec un sourire sadique aux lèvres.

Sans y réfléchir, Chris se leva et s’adressa à celui qui menaçait Löghan.

— À combien se monte sa dette.

L’homme se tourna vers lui et tendit son épée dans sa direction.

— Puis-je savoir pour qui messire se prend pour oser m’interrompre de la sorte ?

Il approcha son épée à quelques centimètres de son visage lorsque soudainement, cette dernière se mit à rougeoyer, chauffée à blanc. L’homme la lâcha en poussant un cri de douleur et à son tour, son acolyte pointa la sienne vers Chris, mais il subit le même sort.

— Combien ? cria Chris, la voix pleine de rage.

Le brigand, qui se tenez la main d’où son gant avait littéralement fondu, le regarda en grimaçant.

— Quinze pièces d’or… sans compter les intérêts…

Lorsque Chris sortit la bourse de sa poche, Löghan voulut l’arrêter.

— Non, sire Chris, vous n’avez pas à faire ça !

Chris lui lança un regard qui l’interrompit instantanément, les yeux brillant d’une lueur sanguinaire. Il sorti deux rouleaux de sa bourse, puis les jeta aux pieds du malfrat.

— En voilà vingt ! Et dites à votre seigneur que s’il tente à nouveau de s’en prendre à Löghan ou à un membre de sa famille, je le retrouverais ! Et je l’anéantirais !

Le regard meurtrier de Chris imprima une expression d’effroi sur le visage du malfaiteur. Il attrapa les pièces et ramassa son épée avant de s’enfuir en traînant son comparse par la cape.

À peine eurent-ils franchi la porte de l’auberge que Chris sentit ses jambes se dérober, et il tomba à la renverse. Löghan se précipita pour le rattraper avant que sa tête ne frappe le sol. Sa vision se brouilla tandis que Löghan hurlait qu’on lui apporte de l’eau.

Lorsque Chris reprit connaissance, Elöhan était assis sur une chaise à ses côtés, somnolent. La nuit était tombée et l’on pouvait apercevoir les rayons lunaires percer au travers des épais rideaux. Un horrible mal de tête lui martelait le crâne.

— Elöhan ? dit-il en essayant de reprendre ses esprits.

— Sire Chris ! lança-t-il en se réveillant en sursaut, papa ! Sire Chris est réveillé ! Hurla-t-il.

Löghan pénétra en trombe dans la petite chambre, essoufflé.

— Vous allez bien, mon ami ?

— Oui, ça va, merci. J’ai juste un horrible mal de tête.

Chris s’assit au bord du lit. La tête lui tournait encore tellement qu’il fut obligé de la tenir. Löghan attrapa une carafe et un gobelet, posés sur une table non loin, et l’invita à boire. L’eau fraîche l’apaisa instantanément.

— Que vous est-il arrivé mon ami ?

— Je ne sais pas. Ce n’est probablement rien qu’un petit malaise.

Son apparence douloureuse et sa voix chevrotante contredirent ses paroles. Il ne parviendrait pas noyer le poisson cette fois-ci.

— Un petit malaise ? lança Elöhan, dubitatif, vous avez littéralement fait brûler leurs épées dans leurs mains, puis vous êtes tombé inconscient et avez convulsé pendant de longues minutes. On aurait dit que vous étiez possédé !

— J’ai dit que je ne savais pas !

L’animosité dans la voix de Chris effraya Elöhan qui fit un pas en arrière. Löghan lui lança un regard désapprobateur.

— Laisse nous Elöhan, dit-il en indiquant la porte de la chambre à son fils.

— Pardon... s’excusa Chris du bout des lèvres tandis qu’Elöhan quittait la pièce.

Löghan referma la porte derrière lui.

— Vous devez vous calmer, mon ami.

Il servit un autre verre d’eau que Chris avala d’un seul trait. Son mal de tête commençait doucement à passer.

— Je suis désolé… je ne voulais pas être méchant avec Elöhan… c’est juste que... je ne suis pas certain de savoir expliquer clairement ce qui s’est passé tout à l’heure ! dit-il en se prenant le visage dans les mains, lorsqu’ils ont parlé de récupérer votre dette par tous les moyens, une vision affreuse m’est apparue. L’auberge était ravagée par les flammes, et vous et votre famille étiez mort, gisant sur le sol. J’ai senti une rage et une colère extrême au fond de moi… Je devais intervenir…

Des larmes lui montèrent aux yeux tandis qu’il décrivait à Löghan l’atroce sensation qu’il avait ressenti. Une vision d’horreur poussant une rage meurtrière qu’il n’aurait pas eu la force de réprimer.

— Ma femme connait une incantation pour faire souffler de l’air chaud. C’est comme ça qu’elle arrive à laver et sécher le linge aussi rapidement. Sauf qu’il faut un pouvoir autrement plus puissant pour faire chauffer au rouge le métal d’une épée.

Löghan s’approcha et s’assit en face de Chris, prenant ses mains dans les siennes.

— Je vous serais éternellement reconnaissant pour ce que vous avez fait ! De toutes les personnes présentes, vous êtes le seul à être intervenu, et pourtant j’en connais certains depuis des dizaines d’années. Ce que vous ne savez pas en revanche, c’est que le seigneur Andeläs n’est pas du genre à accepter un quelconque manque de respect.

— Il ne me fait pas peur !

— Pourtant, il est puissant et craint ! Et peu d’entre nous oseraient s’y frotter.

Le regard grave de Löghan ne parvint pas à calmer la rage dans les yeux de Chris. Au contraire, l’évocation du seigneur Andeläs l’accentua.

— Il semble que mes pouvoirs vont bien au-delà de tout ce que quiconque n’a jamais vu, pas vrai ?

La clé irradiait à nouveau atour de son cou.

— Je dois vous avouer quelque chose, Löghan, mon ami, dit-il en plongeant son regard dans le sien, ce monde… n’est pas le mien ! Lorsque cet homme à chanter les louanges de «l’ élu », j’ai su qu’il parlait de moi... je ne suis pas ici par hasard, et même si je ne suis pas certain de ce que je dois faire, je sais que si ce seigneur Andeläs vient à se mettre en travers de mon chemin, je n’hésiterais pas un seul instant !

Chris serra la clé chaude contre son torse et la sentit vibrer sans vraiment y prêter attention.

— Je dois, moi aussi, vous avouer quelque chose, Chris... lorsque vous avez franchi la porte de mon auberge, j’ai senti, au plus profond de moi-même, une intuition, un sentiment… Quelque chose m’a dit que votre destin sera grand. C’est pourquoi je ferais de mon mieux pour vous aider dans votre quête, je vous en fait le serment.

Il posa solennellement son poing fermé sur sa poitrine. De la fierté se lisait sur son visage malgré ses yeux remplis de larmes. Chris posa sa main sur son épaule.

— Merci, mon ami. Si ce Andeläs est aussi puissant que tu le dis, pense-tu qu’il pourrait retrouver une personne qui m’est chère ?

— Il est ce que l’on pourrait appeler le roi des brigands. Il sait tout sur tout, et sur tout le monde. Je pense qu’il pourrait aisément retrouver n’importe qui dans le Vaste-Monde.

Chris se releva d’un bond.

— Mène-moi à lui !

— Doucement, mon ami ! a forteresse de Banklärd est l’un des endroits les plus dangereux et les mieux gardé de la forêt de Flaïne ! répondit Löghan, nerveux, de toutes façons, il est trop tard pour prendre la route. Reposez-vous, nous partirons au lever du soleil demain matin, et je vous y mènerais.

— Il est hors de question que tu abandonnes ta famille ! Indique-moi simplement où je peux le trouver. Pour le reste, je me débrouillerais !

Löghan s’apprêta à le contredire, mais Chris le coupa d’un signe de la tête.

— Très bien, comme vous voudrez. J’ai une carte de la région, en bas. Elle vous sera bien plus utile qu’à moi. Je vous y indiquerais le chemin pour rejoindre la forteresse. Il faut vous reposer à présent, la route sera longue.

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